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Titre: Éclosion assistée : pour qui et pour quoi ?
Année: 2005
Auteurs: - Dumont M.
Spécialité: Infertilité
Theme: AMP

Éclosion assistée :
pour qui et pour quoi ?

Martine DUMONT-HASSAN*, Paul COHEN-BACRIE*

Introduction et définition de l'éclosion assistée

Dans les conditions physiologiques l'embryon se développe jusqu'au stade jeune blastocyste puis le blastocèle s'agrandit ; on obtient alors un blastocyste expansé qui possède une zone pellucide (ZP) de plus en plus fine. Sous l'action de lysines embryonnaires (et utérines) et de cycles de contraction-expansion du blastocyste, la ZP s'amincit, s'ouvre, et l'embryon sort pour s'implanter dans l'utérus. La zone pellucide est une membrane acellulaire composée de trois glycoprotéines majeures (ZP1, ZP2, ZP3). Les changements biochimiques qu'elle subit au moment de la fécondation la rendent plus résistante à différents agents chimiques (protéases, tyrode acide) ; cette modification est appelée durcissement de la zone pellucide ("ZP Hardening"). En plus de ce durcissement induit par la fécondation, la ZP peut subir un durcissement spontané après culture in vitro ou après vieillissement in vivo ; cela a été bien montré chez la souris. Chez la femme, un durcissement spontané de la ZP des ovocytes intervient après 24 heures de culture in vitro ; cependant il n'y a pas de corrélation entre l'épaisseur de la ZP et sa résistance à une dissolution chimique. D'autres facteurs exogènes peuvent également augmenter la résistance de la ZP : la congélation embryonnaire ou le traitement des ovocytes à la hyaluronidase (voir revue de A. De Vos et coll, 2000).

L'hypothèse qu'un retard ou une absence d'éclosion embryonnaire (dû à un durcissement de la ZP ou à une diminution de la production de lysines par l'embryon ?) pouvait être responsable d'échecs d'implantation a été émise par l'équipe américaine de Cohen et al. dès 1989, suite à deux observations :

-   L'analyse rétrospective de l'aspect morphologique des embryons sur bandes vidéo-cinématographiques et du résultat de leurs transferts a montré que les embryons à ZP épaisse et uniforme (> 15 μm) s'implantaient beaucoup moins que les embryons à ZP fine et irrégulière (10 % contre 25 %).

-   Les embryons issus d'ovocytes micromanipulés, c'est-à-dire ayant eu un trou dans leur ZP avant d'être mis en fécondation, avaient un taux d'implantation plus élevé que ceux à ZP intacte. D'où l'idée que l'échec d'éclosion pouvait être un facteur supplémentaire contribuant à l'échec d'implantation et que la capacité à éclore des embryons pouvait être augmentée par un amincissement ou la perforation artificielle de la ZP ; ce que l'on appelle éclosion assistée ou "Assisted Hatching (AH)".

Quelles techniques ?

Éclosion assistée par technique mécanique

PZD conventionnelle

La dissection partielle de la zone pellucide connue sous le sigle PZD (Partial Zona Dissection) est un procédé mécanique mis au point par Malter et Cohen en 1989. Il consiste à embrocher la zone pellucide de l'embryon avec une aiguille de verre et à écraser le segment sous-tendu contre la pipette de contention. La difficulté avec cette technique est de toujours réaliser une brèche qui soit de taille suffisante pour obtenir une éclosion embryonnaire normale. Si le trou est trop petit (< 10 μm), l'embryon au cours de son éclosion peut subir un traumatisme.

PZD en 3D

Afin d'éviter les traumatismes embryonnaires ou cours d'une éclosion par PZD conventionnel, Cieslak et coll,1999, ont proposé de réaliser 2 brèches en croix appelées PZD Tri Dimensionnelle. Celle-ci permettra à la ZP de se déchirer dans plusieurs directions sous la pression du blastocyste.

Amincissement et perforation de la ZP par Piezo-micromanipulation

Dans cette technique, c'est la vibration, produite par un pulse piezoélectrique, d'une micropipette d'injection, qui permet l'érosion d'une partie de la ZP ainsi que la perforation.

Éclosion assistée par technique chimique (ZD)

Le "Zona Drilling" (ZD) est un procédé chimique mis au point sur les ovocytes de souris par Gordon et al. en 1986. Il consiste à créer un orifice dans la ZP de l'embryon en appliquant une solution de tyrode acide (pH 2,3) à l'aide d'une micropipette en verre. Cette méthode permet de réaliser des trous de taille plus importante (diamètre des trous 20 ± 6 μm). Les embryons sont ensuite abondamment rincés avant d'être remis en culture puis transférés.

Éclosion assistée par laser

L'importance que le laser a connu en médecine a encouragé certaines équipes de FIV à considérer son application pour percer la ZP (Obruca et coll, 1997 ; Antinori et coll, 1996 ; Germond et coll,1995). Plusieurs lasers à infrarouge (1480nm de longueur d'onde) sont actuellement disponibles dans le commerce ; ils s'adaptent facilement sur les microscopes et permettent de perforer ou d'amincir la ZP avec précision et rapidité ; cependant cette technologie est onéreuse.

Éclosion assistée par dissolution complète de la ZP

Certaines équipes ont choisi de s'affranchir de l'étape d'éclosion en retirant complètement la ZP des blastocystes par dissolution ; soit par des protéases (Fong et coll, 2001; Urman et coll, 2002), soit par le tyrode acide (Jelinkova et coll, 2003).

In Vitro

La perforation de la ZP, qu'elle soit faite mécaniquement, au tyrode acide ou par laser augmente significativement le taux d'éclosion des blastocystes (Malter et Cohen, 1989 ; Dokras et coll, 1994 ; Mandelbaum et coll, 1994 ; Wong et coll, 2003).

Quelles patientes ? et/ou quels embryons ?

Pour quels résultats ?

Aucun effet bénéfique de l'éclosion assistée n'a été montré chez des patientes non sélectionnées. Les patientes sélectionnées pour leurs faibles chances d'implantation, susceptibles de bénéficier de l'éclosion assistée sont les patientes d'âge avancé (> 38ans) et/ou à FSH élevée et/ou en échecs répétés d'implantation embryonnaire ainsi que les patientes ayant des transferts d'embryons congelés.

Les données sur l'impact de l'éclosion assistée sur les résultats de l'AMP (Assistance Médicale à la Procréation) sont extraites de l'étude européenne multicentrique, prospective et randomisée de Priami et coll [1] présentée à la journée de la SMR en 2003 ; et de la revue de Edi-Osagie et coll ; 2003 [2] sur l'impact du hatching sur les taux de naissance.

Femmes d'âge avancé

Les résultats sont contradictoires avec des effets positifs pour certains ou pas d'effets sur le taux de grossesses, trouvés par d'autres. D'après l'étude d'Edie-Osagie et coll, 2003, l'éclosion assistée augmente probablement le taux de grossesses cliniques chez les femmes « âgées ». Priami et coll, ne montrent pas d'effet bénéfique du hatching chez ce groupe de femmes pour lesquelles, on le sait bien, le taux d'anomalies génétiques embryonnaires souvent élevé est en grande partie, responsable du mauvais taux de grossesses et d'un fort taux de fausses couches spontanées.

Femmes à FSH de base élevée, à J3

D'après Cohen et coll, 1992, l'éclosion assistée des embryons de 30 femmes ayant une FSH de base élevée au troisième jour du cycle a permis d'obtenir un taux d'implantation embryonnaire de 26 % contre 10 % pour le groupe contrôle. Il n'y a pas d'autres données dans la littérature, permettant d'affirmer l'effet bénéfique du hatching dans ce groupe de patientes.

Femmes ayant eu des échecs d'implantation
après plusieurs transferts d'embryons

Embryons frais

L'application de l'éclosion assistée chez les femmes ayant eu des échecs de transferts d'embryons améliore significativement le taux de grossesses cliniques par transfert pour Priami et coll, 2003 (3 échecs de transfert : 14-16 % contre 9,3 % pour les témoins) ; à condition que les embryons soient de bonne qualité. De même, L'analyse des études randomisées publiées [2] confirme une augmentation significative du taux de grossesses cliniques chez ce groupe de patientes.

Embryons congelés

Après 2 transferts d'embryons congelés-décongelés, l'application du hatching permet d'augmenter significativement le taux de grossesses cliniques par
rapport aux témoins (9,4% versus 0 %) [1]. La dureté ou l'élasticité des ZP moyennes ou épaisses (> 16 μm) des embryons semble être modifiée par la congélation, ce qui dans ces conditions, diminue l'implantation embryonnaire.

Aide à l'implantation d'embryons sélectionnés

Au cours d'une première étude réalisée sur 137 femmes jeunes à FSH normale à J3, l'équipe américaine de J. Cohen a montré que les embryons à ZP épaisse micromanipulés s'implantaient plus fréquemment que leurs témoins aux mêmes caractéristiques ; d'où l'idée de baser les indications de hatching sur l'aspect morphologique des embryons au troisième jour post-ponction et de réaliser une éclosion assistée sélective des embryons. Seuls les embryons plutôt de mauvais pronostic, possédant au moins une des caractéristiques morphologiques suivantes devaient être traités par éclosion assistée : épaisseur de la zone pellucide > 15 μm et/ou moins de six blastomères et/ou plus de 20 % de fragments dans l'espace périvitellin. Cette politique d'éclosion assistée sélective leur a permis d'obtenir un taux d'implantation embryonnaire de 25 % contre 18 % dans le groupe contrôle lors d'une étude prospective sur 163 patientes. D'autres études semblent également indiquer une augmentation de l'implantation des embryons dont le développement est un peu lent après culture prolongée en milieux séquentiels (Urman et coll, 2002; Jelinkova et coll, 2003) ou après vitrification au stade blastocyste (Vanderzwalmen et coll, 2003).

Conclusion

Les études publiées sont difficiles à comparer car les méthodologies sont différentes : technique de hatching, population étudiée, âge des embryons ; de plus un traitement associé à la cortisone et des antibiotiques n'est pas toujours donné aux patientes alors qu'il semble avoir un intérêt important pour certaines. On manque également de données sur le taux de naissances.

L'éclosion assistée est une technique à réserver à une population sélectionnée. Elle peut être proposée aux femmes en échecs répétés de transferts d'embryons frais ou congelés. Cependant, en plus des critères cliniques, il semble important de tenir compte d'un certain nombre de critères embryonnaires qui sont encore à préciser (morphologie des PN, cinétique de division des embryons, etc.) auxquels il faudrait peut-être ajouter la mesure de la variation d'épaisseur des ZP afin de pouvoir évaluer la capacité à éclore des embryons (Gabrielsen et coll, 2001) ; ceci afin de réaliser une éclosion assistée sélective des embryons comme l'a suggérée Cohen et coll, 1992.

C'est une technique qui peut être réalisée en complément d'une autre technique (culture prolongée des embryons, congélation lente ou vitrification des embryons) si l'on estime que cette dernière peut avoir altéré la capacité à éclore des embryons.

Bibliographie

[1]   A De Vos et coll : Cells Tissues Organs 2000, 166: 220-227.

[2]   J Cohen et coll : Fertil Steril 1989, 51, 5: 820-827.

[3]   H Malter et J Cohen : Gamete Research 1989, 24: 67-80.

[4]   J Cieslak et coll : Fertil Steril 1999, 71, 2: 308-313.

[5]   T Nakayama et coll : Fertil Steril 1998, 69, 4: 784-788.

[6]   JW Gordon et coll : J Exp Zool 1986, 239: 347-354.

[7]   A Obruca et coll : Hum Reprod 1994, 9: 1723-1726.

[8]   S Antinori et coll : Hum Reprod 1996, 11: 590-594.

[9]   M Germond et coll : Fertil Steril 1995, 64: 604-611.

[10]   CY Fong et coll : Hum Reprod 2001, 16, 3: 540-546.

[11]   B Urman et coll : Fertil Steril 2002, 78, 2: 392-396.

[12]   L Jelinkova et coll : Fertil Steril 2003, 79, 6: 1299-1303.

[13]   A Dokras et coll : Fertil Steril 1994, 61, 3: 514-520.

[14]   J Mandelbaum et coll : Contracept Fertil Sex 1994, 22, 5, 352.

[15]   BJ Wong et coll : Fertil Steril 2003, 80, 5: 1249-1254.

[16]   MP Priami et coll : Congrès SMR 2003 ; voir le site internet de la SMR.

[17]   E Edi-Osagie et coll : Hum Reprod 2003, 18, 9 :1828-1835.

[18]   J Cohen et coll : Hum Reprod 1992, 7, 5: 685-691.

[19]   P Vanderzwalmen et coll : Hum Reprod 2003, 18, 7: 1504-1511.

[20]   A Gabrielsen et coll : Hum Reprod et coll, 2001, 16, 10: 2166-2170.

*AMP EYLAU - 55, rue Saint-Didier - Paris.

102   M. DUMONT-HASSAN, P. COHEN-BACRIE

omalies d'éclosion

d'après J. Cohen et coll. 1990

   ÉCLOSION ASSISTÉE : POUR QUI ET POUR QUOI ?   103

D'après Nakayama et coll, 1998

104   M. DUMONT-HASSAN, P. COHEN-BACRIE

   ÉCLOSION ASSISTÉE : POUR QUI ET POUR QUOI ?   105

106   M. DUMONT-HASSAN, P. COHEN-BACRIE

   ÉCLOSION ASSISTÉE : POUR QUI ET POUR QUOI ?   107