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Titre: Jusqu’à quel age poursuivre les frottis cervicaux de dépistage ?
Année: 2001
Auteurs: - Leroy J.-L.
Spécialité: Gynécologie
Theme: Frotis cervicaux de dépistage

Jusqu’à quel age poursuivre les frottis cervicaux de dépistage ?

J.L.LEROY

Collège de gynécologie. Hôpital Jeanne de Flandre. CHRU de Lille

RESUME

Il ne s ‘agit pas d’abandonner les patientes les plus agées à leur triste sort mais on peut réflechir à l’efficacité du depistage chez ces patientes . S’il y a eu une surveillance cytologique parfaite au cours de la periode d’activité genitale , la poursuite de cette surveillance est d’une part inutile car le risque de cancer invasif est quasi nul . D’autre part elle est potentiellement dangereuse en induisant trop d’exereses inutiles car la majorité des positivités cytologiques correspondent à des faux positifs . Toutes les publications traitant de ce problème font état d’un âge limite pour le dépistage cytologique systématique du cancer du col . Les études Françaises dont les conclusions sont parues dans la conférence de consensus de Lille et la recommandation de l’ANAES, ne font pas exception.

SUMMARY
This title mean that postmenopausal women are gave up. Neverless all publications about cervical cancer screening in postmenopausal women agree not to screan for cervical cancer beyond a limited age.
The results of french clinical screening published in Consensus Conference of Lille and in ANDEM recommendations are as well accord
.

INTRODUCTION

Le cancer du col utérin est dans le monde , le deuxième cancer féminin en terme de frequence .En France , malgré la réalisation annuelle de 5 millions de frottis de depistage , ce cancer reste un problème de Santé Publique . L’incidence de ce cancer est bien passée de 15,6/100 000 à 8,6/100 000 entre 1978 et 1992 mais trop de femmes meurent encore de ce cancer chaque année.(1)
Il est maintenant admis que les CIN de bas mais surtout de haut grade sont à l’origine du cancer invasif . L’évolution est très progressive et passe souvent par le stade de carcinome microinvasif. Cette période préinvasive dure en moyenne de 10 à 15 ans., mais peut être beaucoup plus courte dans les formes très evolutives .
L’age moyen de decouverte des cancers invasifs se situe autour de 50 ans . Le diagnostic des lesions pre invasives se situe bien avant cet age .
De ce fait , partant du principe que tout se joue precocement , de nombreux programmes conseillent l’arrêt du dépistage après 65 ans (2,3,4) .Des auteurs comme Cruickshank (5) ou Duncan(6) suggèrent même l’arrêt à 50 ans chez des femmes antérieurement bien suivies.

POPULATION ET METHODES 

Nous avons actualisé notre étude rétrospective ( 15 ) qui concerne maintenant 2130 lésions intraépithéliales et cancers invasifs précoces, découverts ces 20 dernières années à la consultation de colposcopie de la Maternité Salengro puis de l’hôpital Jeanne de Flandre au CHU de LILLE .
Les patientes ont été adressées à cette consultation pour frottis anormaux . On ne connaît pas la fréquence des frottis en fonction de l’âge ni l’importance de la couverture de la population de notre Region par le dépistage cytologique .
Le diagnostic définitif a été celui de la biopsie en cas de traitement destructeur ; celui de la pièce d’exérèse en cas de traitement chirurgical . Les patientes ont été divisées en trois groupes :

  • Les lésions intraépithéliales de bas grade (BG)
  • Les lesions de haut grade (HG)
  • Les cancers microinvasifs ou invasifs à un stade précoce(I).

Nous avons comparé ce recrutement à 148 cas de cancers invasifs patents adressés après diagnostic ces dermières années dans les 3 plus grandes structures hospitalières accueillant ces pathologies dans la Region : Hopital Jeanne de Flandre , Centre Oscar Lambret , Centre Hospitalier de Roubaix ( 16 ) .
Nous avons étudié dans les 2 groupes la répartition selon l’âge des différentes lésions ; les elements de la demarche diagnostique . Nous avons recherché le suivi antérieur des femmes porteuses de cancers invasifs précoces ou patent.

RESULTATS

Analyse des lésions intraépithéliales et des invasions précoces : Diagnostic de consultation

Sur 2130 lesions , le diagnostic final était le suivant :

948 CIN de bas grade,
CIN de haut grade,
89 cancers micro invasifs
cancers invasifs précoces ( stade Ib occulte ).

Répartition selon l’âge (Tableau n° 1 et Graphique n°1)

Age

15.20

21.25

26.30

31.35

36.40

41.45

46.50

51.55

56.60

61.65

>65

Total

Bas grade

96

204

216

137

100

84

56

28

12

10

5

948

Haut grade

17

129

240

257

184

106

63

30

7

9

7

1049

Invasif
Et micro invasif

0

3

17

33

24

25

8

5

4

5

9

133

 

Tableau n° 1 : Répartition en fonction de l’âge de 2190 lésions intraépithéliales
ou invasives précoces


Graphique n°1 : Répartition selon l’âge des lésions intaépithéliales

L’age moyen des CIN de bas grade se situe entre 25 et 30 ans, puis le taux diminue progressivement
L’âge moyen des CIN de haut grade est un peu plus élevé , entre 30 et 35 ans et on observe la même diminution de fréquence avec le temps


Graphique n°2 : Répartition chez les plus de 50 ans.
.

Les patientes de plus de 50 ans ne representent que 5.98% des lésions cervicales depistées pre invasives ou invasives ( 131/2190 ) . Les lesions intra epitheliales diminuent considérablement avec l’age mais ne disparaissent pas totalement ( graphique n°2 ) . Il est important de remarquer l’augmentation significative des lesions les plus graves avec l’age. Si on considère le pourcentage de quinquagenaires et plus dans la population des patientes porteuses de lesions cervicales decouvertes en consultation de colposcopie :

CIN de bas grade

5.8%

(55/948)

CIN de haut grade

5.1%

(53/1049)

Cancer micro invasif

12.3%

(11/89)

Cancer invasif

27.1%

(12/44)


L’age moyen de découverte des invasions precoces à la consultation de colposcopie , à un stade infraclinique , est de 39 ans mais 17.3 % le sont après 50 ans (23/133).

Suivi cytologique :
Aucune des 23 patientes dont le cancer invasif ou micro invasif a été diagnostiqué après 50 ans n’avait eu de surveillance cytologique régulière , en particulier aucun frottis dans les 5 années précédent le diagnostic.
Si on considère les resultats de la biopsie amenant au diagnostic des lesions les plus graves après 50 ans ( haut grade , microinvasion et invasion ), on voit que la correlation n’est pas parfaite mais que la majorité des invasions ont été repérées par la biopsie ( Tableau 2 ) .Il faut à l’inverse signaler de nombreuses conisations pour frottis anormal avec resultat negatif de l’ histologie . Après 2 frottis anormaux , si la colposcopie est non valable , la conisation diagnostique s’impose compte tenu d’un risque de lesion endocervicale . Nous n’avons pas été en mesure de chiffrer ces eventualités pourtant frequentes .

Tableau n° 2 : DIAGNOSTIC de 76 LESIONS CERVICALES SEVERES Après 50 ANS

Analyse de 148 cancers invasifs patents

Ces 148 patientes ont été adressées pour traitement d’une lesion invasive dans un centre d’oncologie gynécologique . Le diagnostic avait été fait préalablement sur des arguments sur lesquels on va revenir .
L’age moyen est de 49.2 ans avec des extrèmes de 26 à 86 ans
La répartition selon l’âge figure dans le tableau n°3
L’age moyen de ces femmes se situe aux alentours de 45 ans . elles sont plus agées que les femmes dépistées en consultation de colposcopie : 41% des patientes ont plus de 50 ans ( 61/148 ) .
On peut deja souligner que 69% des patientes sont symptomatiques et presentent des metrorragies provoquées amenant à consulter .

Age

26.35

36.45

46.55

56.65

>66

Nombre de patientes

19

48

35

25

21


Tableau n°3 : Répartition selon l’âge des 148 cancers invasifs patents.

On a pu retrouver le suivi anterieur des ces patientes que l’on peut distinguer en 5 groupes

  • Aucun suivi : 54 patientes
    34 sont agées de plus de 50 ans
  • Suivi insuffisant : un frottis de plus de 3 ans : 51 patientes
    18 sont agées de plus de 50 ans
  • Patientes perdues de vue après un frottis positif :
    12 patientes n’ont pas consulté malgrè un frottis anormal
  • Prise en charge inadequate :
    5 patientes agées de moins de 50 ans ont été traitées par LASER pour CIN2 dans l’année précédant le diagnostic de cancer .
  • Suivi cytologique correct : 26 cas

Un frottis a été considéré comme normal dans les 3 ans precedant le diagnostic de cancer .
4 patientes sont agées de plus de 50 ans .
Dans 11 cas , il s ‘agit d’un adenocarcinome

La relecture des lames a été faite dans 18 cas . Retrospectivement 13 anomalies cytologiques ont été notées qui auraient du induire une colposcopie avec bipsie eventuelle .

Globalement , on peut dire que dans notre Région , la majorité des patientes qui développent un carcinome invasif sont non ou mal suivies dans plus de 80% des cas . Il y a manifestement une insuffisance du depistage cytologique qui doit être intensifié à tous les ages . Il est desolant de constater que le cancer du col est encore diagnostiqué à un stade symptomatique dans 69% des cas .

DISCUSSION

Nous retrouvons les résultats de notre précédente étude . Dans l’ étude collaborative PETRI (7) de 1996, portant sur 8574 biopsies lues dans 62 laboratoires d’Ile de France , les chiffres sont similaires : les CIN de bas grade se voient dans la decennie des 20 ans et les CIN de haut grade dans celle des 30 ans et les cancers invasifs après 50 ans .
D’autre part , si les CIN sont beaucoup plus rares chez la femme agée, leur évolution serait beaucoup plus péjorative . Dans son étude de 1991 ,Van oortmarssen (9) a bien montré qu’avant 35 ans les lésions préinvasives régressaient dans 84 % des cas alors que cela ne survenait que dans 40% des cas après 35 ans . L’évolution vers un cancer invasif serait donc plus frequente .
Le pic de fréquence du cancer invasif se situe aux alentours de 50 ans mais il est encore très présent après cette période  : 46 % des patientes avaient plus de 50 ans dans l’étude de PETRI et 41 % dans la notre . Pour souligner l’interet du depistage cytologique , on peut remarquer qu’en consultation de colposcopie , seules 27 % des patientes porteuses d’un cancer invasif ont plus de 50 ans . C’est dire que 73% des cancers sont diagnostiqués avant 50 ans à partir d’une positivité cytologique .
Le depistage cytologique joue un role fondamental pour reperer les lesions pre-invasives dont la destruction ou l’ablation permettra de stopper l’evolution vers le cancer invasif . Il est bien prouvé que le risque de cancer diminue avec le nombre de frottis réalisés.Mitchell (10) estime que ce risque devient inférieur à 2.5 % après 3 frottis normaux , même au delà de 50 ans. Lyndge (11) , parle d’un risque quasi nul après 5 frottis normaux .
Ce depistage doit être effectué avant l’evolution invasive , c’est à dire avant 50 ans .On voit bien dans notre etude que les cancers tardifs sont le fait de patientes non ou mal surveillées .
Ces données sont confirmées dans la littérature. Wijngaarden et Duncan (6), en Ecosse , retrouvent des résultats similaires puisque sur les 17 cancers invasifs découverts après 60 ans 14 n’avaient jamais eu de frottis et 2 en avaient qui dataient de plus de 5 ans. M Cruisckshank (5), dans son étude en Angleterre arrive aux mêmes conclusions. De sorte que chez des femmes antérieurement bien suivies, il y a une certaine logique à interrompre le dépistage après un certain âge .
A l’inverse si le depistage a été insuffisant ou inexistant , il doit être mis en œuvre avec soin sans meconnaitre certaines difficultés .
Le premier problème est de motiver les femmes les plus agées dont on voit bien qu’elles sont moins presentes dans la surveillance . Cette particularité n’est pas spécifique à notre region . Une étude américaine (13) retrouve qu’après 55 ans l’intervalle entre 2 frottis est bien supérieur à 3 ans.
D’autre part , les frottis de femme ménopausée ont des particularités qui rendent leur interprétation parfois difficile :
La carence hormonale ménopausique entraîne une atrophie épithéliale.Les frottis ne retrouvent dans ces cas que des cellules basales qui peuvent en imposer pour une dysplasie. Il est donc conseillé de renouveler ces frottis après un traitement oestrogénique qui corrigera l’atrophie épithéliale et les normalisera dans éliminera(13,14 ).
Une autre particularité du col de la femme ménopausée est l’intériorisation de la zone de jonction retrouvée dans 40 à 48% des cas (13.14).Ceci rend difficile l’exploration de cette zone et explique l’existence dans certains cas de faux négatifs. Dans les cas où cette zone ne peut vraiment pas être étudiée, une conisation diagnostique devient indispensable même si dans notre experience , elle est souvent negative . Le depistage en post menopause induit beaucoup de faux positif avec necessité de conisations parfois inutiles . A l’avenir le depistage par recherche d’HPV pourrait être d’un grand secours en selectionnant les petientes chez qui la conisation est necessaire .


CONCLUSION

Le cancer invasif survient après un CIN dont le pic de fréquence se situe aux environs de 35 ans. C’est entre 20 et 50 ans que la surveillance cytologique doit s ’exercer avec le plus de soin . Si la patiente a bien été surveillée , on peut sans risque majeur espacer le dépistage cytologique après 50 ans puis l’interrompre après 60 ans.
Après cet age , on constate trop de faux positifs par atrophie épithéliale. A l’avenir on pourra integrer dans ce depistage la recherche d’HPV oncogènes pour eviter les conisations inutiles .
Si la patiente n’a pas été surveillée, il faut au contraire rester vigilant car on ne connait pas l’histoire cytologique de la patiente . un CIN jonctionnel a pu ascencionner dans l’endocol avec possibilité de révélation tardive par une invasion .

BIBLIOGRAPHIE

1) PP Sschaffer et coll.Reseau FRANCIM des registres du cancer.

2) Conférence de consensus sur le dépistage du cancer du col utérin.J .Gynecol.Obstet.Biol.Reprod,1990,19 ,5 bis

3) Canadian Coordinating Office for Health Technology Assessment.Assessment of techniques for cervical cancer screening.May 1997.

4) ANDEM . Pratique des frottis cervicaux pour le dépistage du cancer du col. Novembre 1994.

5) M E Cruickshank,V Angus, M Kelly,S Mc Phee, HC KitchenerThe case for stopping cervical screening at age 50.British J of Obstet and Gynecol.1997,104,586.589.

6) W J Van Wijngaarden.I D Duncan.Rational for stopping cervical screening in women over 50.BMJ,1993,306,10,967.971.

7) X Sastre Garau, B Asselain,C Bergeron,I Cartier , M Souques.-Pathologie précancéreuse du col de l’utérus. Bull Cancer,1996,83,400.406.

8) Mandelblatt J.S, Phillips RN :Cervical cancer : How often and why to screen older women.Geriatrics,1996,51,45.48.

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10) Mitchell H , Medley G, Giles G.Cervical cancers diagnosed after negative results on cervical cytology :perspective in the 1980s. Br Med Journal.1990,300,1622.1626.

11) E Lynge, P Poll.Incidence of cervical cancer following negative smear.Am J of Epidemiology .1986.124.n°3.345.352

12) S Hirsh , Ph D Ruchlin. Prevalence and correlates of breast and cervical cancer screening among older women. Obstet & Gynecology.1997,90,n°1,16.21.

13) JC Boulanger, J Gondry.- De la bonne pratique du dépistage du cancer du col utérin. Références en Gynécologie Obstétrique,1996, 4, n°1, 75.84.

14) Tranbaloc P.Epidémiologie des lésions cervicales pré-néoplasiques et néoplasiques après la ménopause.1997,10,n°7 ,467.470.

15) Faut-il interrompre le depistage cytologique du cancer du col utérin après la menopause
P.Merviel, Jl Mergui, R Gaudet, S Sananes, A Cortez , S Uzan
G Orazi , E Bogaert , D Vinatier , D Querleu , Jl Leroy
Contracept Fert Steril 99 ;27 , 826 – 35

16) Histoire du suivi cytologique des femmes atteintes d’un cancer invasif
N MUBIAYI , Thèse LILLE oct 2000