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2004 > Néonatologie > Pyelonephrites aigues du premier mois  Telecharger le PDF

Pyélonéphrites aiguësdu premier mois

V Mucignat , J. Baudon , S Ducrocq , F Lebas et F. Gold

La pyélonéphrite aiguë ou infection urinaire haute est un motif fréquent d'hospitalisation dans le premier mois de vie. Elle prédomine chez le garçon avec un sex-ratio variant entre 2 et 9. Ceci contraste avec les données épidémiologiques des infections urinaires du nourrisson et de l'enfant et suggère un mode de contamination par voie ascendante à partir d'une stagnation bactérienne préputiale. Ce risque est retrouvé chez le garçon plus âgé, chez lequel un taux plus faible d'infection urinaire est noté après circoncision. Ce constat a conduit à une polémique sur l'éventuelle justification d'une circoncision systématique, actuellement réfutée.

Signes cliniques

Son expression clinique est variable :

– La fièvre est fréquente mais n'est pas constante, elle est retrouvée dans 21 à 40 % des cas ; son absence n'exclut donc pas le diagnostic.

– Une mauvaise prise ou une perte de poids est fréquente, révélant le diagnostic dans 25 à 38 % des cas. Les anomalies pondérales, si elles ne sont rapportées qu'à l'infection urinaire, témoigneraient d'un processus évoluant sur plusieurs jours voire plusieurs semaines ; cette interprétation impose d'éliminer toute cause associée de type carence d'apport ou intolérance alimentaire.

– La révélation par un ictère prolongé varie de 37 % des cas dans les publications anciennes à 6 % des cas dans la plus récente, modification qui peut correspondre à une meilleure sensibilisation diagnostique ou à des souches d'Escherichia (E) coli différentes. Le mécanisme de cet ictère est encore discuté : invasion hépatique directe par les bactéries disséminées par voie sanguine ou lymphatique, agression hépatique par les toxines bactériennes, ou atteinte non spécifique liée à la fièvre, la dénutrition ou l'anoxie cellulaire.

– Elle peut être également révélée par un choc septique, une altération de l'état général (mauvaise coloration, sensibilité ou douleur diffuses) ou encore par un syndrome de perte de sel (déshydratation extra-cellulaire et acidose).

Signes bactériologiques et biologiques

Le bilan bactériologique associe la réalisation d'un examen cytobactériologique urinaire (ECBU), d'une hémoculture et éventuellement d'une ponction lombaire selon l'état clinique du nouveau-né.

L'infection urinaire est définie par une bactériurie > 105 bactéries/ml dans un prélèvement urinaire réalisé de façon aseptique.

Une leucocyturie (> 105/ml) accompagne fréquemment les bactériuries significatives mais sa signification n'est pas univoque car elle peut être la conséquence d'une contamination au cours du prélèvement ou être induite par la fièvre.

La comparaison des résultats obtenus par pose d'une poche stérile (faux positif : 19 %) et par ponction sus-pubienne a fait préconiser cette dernière technique en première intention chez le nouveau-né. Cette attitude permet de réduire les erreurs diagnostiques liées à une contamination bactérienne et/ou à une desquamation cellulaire d'origine péri-urétérale. La ponction sus-pubienne est réalisée de façon optimale sur vessie pleine (couche sèche 30 à 60 minutes après un biberon). Les contre-indications sont les troubles de l'hémostase et une dilatation des anses digestives (risque exceptionnel de perforation d'un organe digestif). Les risques sont minimes (1 % d'hématurie macroscopique transitoire). Un guidage échographique de la ponction sus-pubienne permet d'améliorer sa sensibilité de 60 à 96,4 %, réduit le nombre de gestes invasifs nécessaires, et augmente le volume des urines obtenues. La présence d'un germe dont la concentration est > 102 bactéries/ml en culture dans l'urine recueillie est pathologique.

Sur le plan bactériologique, E. coli est le germe le plus fréquent. E. coli de sérotype K1, le germe fréquent de l'infection materno-fœtale précoce, possède un caractère invasif particulièrement marqué, en particulier méningé. Le risque de diffusion septicémique est inversement proportionnel à l'âge : 31 % des cas en période néonatale, 21 % entre 1 et 2 mois, 14 % entre 2 et 3 mois, 5,5 % après l'âge de 3 mois.

L'existence de cocci à gram positif à l'examen direct fait évoquer un entérocoque et implique l'adjonction d'amoxicilline jusqu'au résultat des cultures.

Si l'infection urinaire survient dans les jours qui suivent une circoncision, une infection urinaire à staphylocoque ne peut être écartée et la Vancomycine doit alors être associée à une céphalosporine de 3e génération et à un aminoside.

Les infections urinaires nosocomiales du nouveau-né sont rares et majoritairement liées à une manœuvre de sondage urinaire. Les germes responsables sont ceux des infections nosocomiales : pseudomonas aeruginosa (13 %), enterocoque et candida albicans (12 %), staphylocoque à coagulase négative (10 %), klebsiella pneumoniae (3%), seracia marcesens (12 %).

Le bilan biologique initial comporte une numération formule sanguine avec plaquettes, un dosage de la protéine C-réactive (CRP). Un syndrome inflammatoire (hyperleucocytose > 25 000/mm3, thrombopénie < 100 000/mm3, CRP > 20 mg/l) est présent dans 86 % des cas. La procalcitonine sérique semble être un bon marqueur pronostique au cours des pyélonéphrites car son taux initial élevé est corrélé aux cicatrices rénales révélées par la scintigraphie avec un taux de faux négatifs < 10 %.

Examens radiologiques

Une échographie rénale doit être réalisée dans les 4 premiers jours du traitement.

Une dilatation bilatérale des cavités pyélocalicielles chez un garçon est évocatrice de valves de l'urètre postérieur, même si elle est asymétrique. Elle nécessite une prise en charge en urgence par une équipe chirurgicale pour la confirmation anatomique du diagnostic et un traitement adapté.

Une dilatation urétéro-pyélocalicielle (avec des uretères visibles en arrière de la vessie) est en faveur d'un méga-uretère ; une dilatation pyélocalicielle oriente vers un reflux vésico-urétéral quand elle est isolée ou vers une maladie de la jonction pyélo-urétérale lorsque le bassinet est globuleux et les calices en boule.

Une dilatation des cavités restreinte au pôle supérieur ou une urétérocèle vésicale signent une duplication de la voie excrétrice.

Une dilatation pyélique supérieure à 20 mm doit être explorée à la fin du premier mois par une urographie intra-veineuse (UIV) ou quantifiée par une scintigraphie au MAG 3 avec une épreuve au furosémide. Ces deux examens permettent de faire le diagnostic différentiel entre maladie de la jonction pyélo-urétérale, méga-uretère et duplication de la voie excrétrice. Une dilatation du bassinet inférieure à 10 mm chez un nouveau-né à terme n'est pas considérée comme le témoin d''une obstruction significative et ne nécessite pas d'investigation immédiate.

Une cystographie rétrograde est systématiquement réalisée, le plus souvent vers l'âge de 3 mois. Les reflux vésico-urétéraux sont les uropathies les plus fréquentes, trouvées dans 35 % des pyélonéphrites de l'enfant. Leur traitement chirurgical n'est pas urgent en l'absence d'obstruction significative : cette situation correspond à des reflux vésico-urétéraux de grade I-III, qui disparaissent spontanément dans 80 % des cas avant l'âge de 4 ans en raison d'une « maturation » du bas-appareil urinaire.

La scintigraphie au DMSA est proposée pour le dépistage des cicatrices rénales acquises sur reflux vésico-urétéral.

L'UIV est réservée au bilan préopératoire et aux syndromes de la jonction pyélo-urétérale.

Traitement

Le traitement de l'infection urinaire néonatale est réalisé par voie parentérale et associe une céphalosporine de 3ème génération (de type céfotaxime : 100 mg/kg/j) et un aminoside (de type gentamycine : 3 mg/kg/j). Ce type d'association permet une bactéricidie rapide grâce à un effet synergique et une concentration rénale élevée de l'aminoside. La durée conseillée du traitement parentéral est de 10 jours pour la céphalosporine et de 2 à 10 jours pour l'aminoside en fonction des facteurs de risque associés (uropathie, bactériémie initiale, germe hospitalier).

Un relais du céfotaxime par la ceftriaxone peut être proposé, en l'absence d'ictère. Ce traitement est relayé par une antiseptie urinaire (Alfatil®, Céfaclor : 25 mg/kg/j en une prise per os ; ou Bactrim®, Sulfaméthoxazole-triméthoprime : 10 mg/kg/j en une prise per os après l'âge de 2 mois) jusqu'à la réalisation d'une cystographie rétrograde. Son efficacité n'a pas été étudiée prospectivement.

La reconnaissance d'une atteinte méningée associée implique de doubler la posologie de la b lactamine et de prolonger le traitement pendant 21 jours.

La prise en charge thérapeutique des pyélonéphrites aiguës du premier mois comporte une antibiothérapie par voie parentérale pendant 10 jours. En revanche, chez le nourrisson, il existe des modalités radicalement différentes de prise en charge entre les partisans d'une antibiothérapie orale ambulatoire et les partisans d'une hospitalisation, au moins initiale, et d'une antibiothérapie intraveineuse. Des études récentes confirment la possibilité de traiter une pyélonéphrite aiguë chez le nourrisson par une antibiothérapie orale, avec une efficacité comparable et un taux identique de séquelles rénales.

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