Chapitre XXVII
HYSTEROSCOPIE ET PROLIFERATION ENDOMETRIALE
J.HAMOU
Introduction
L'endomètre est sans aucun doute la muqueuse qui subit les
modifications les plus radicales sur le plan morphologique et histologique, tant sur le
plan physiologique (cycles menstruels, ménopause...) que pathologique (hyperplasies,
adénocarcinomes...).
Parmi les multiples moyens d'explorations, l'hystéroscopie trouve une
place privilégiée. En effet, l'observation visuelle directe et grossie au cours d'un
examen en ambulatoire complète utilement l'approche diagnostique.
I. CONDITIONS TECHNIQUES
- L'examen est réalisé en ambulatoire, au cabinet du médecin, sans
anesthésie et par distension au CO2 sous contrôle strict des débits et pressions.
- Le développement d'une nouvelle génération d'hystéroscopes et en
particulier du Microhystéroscope offre en plus d'une vision panoramique de la cavité,
une observation macroscopique très détaillée de l'endomètre et une traversée
atraumatique de l'endocol sous contrôle visuel.
II. ÉVALUATION DE L'ENDOMETRE EN HYSTÉROSCOPIE
* L'Hystéroscopie en vision panoramique précise :
- L'aspect uniforme et la coloration.
- L'aspect oedématié (directement lié à l'imprégnation
oestrogénique).
- L'épaisseur (par dépression créée par l'endoscope).
* La vision macroscopique x20 précise :
- La densité et la répartition glandulaire.
- La structure des glandes au point de dépression.
- La vascularisation.
* La vision microscopique x6O au contact précise :
- La vascularisation capillaire.
- Líarchitecture glandulaire.
III. MODIFICATIONS PHYSIOLOGIQUES
* Au cours du cycle, parmi les modifications décrites de manière
exhaustive par B.J Van Herendael, on retiendra :
- Les modifications vasculaires très spécifiques à chaque phase du
cycle avec en particulier en phase proliférative tardive, l'observation des vaisseaux
spiralés et une épaisseur d'endomètre atteignant 6 à 7 mm. L'endomètre voit son
épaisseur et son oedème se réduire en phase sécrétoire précoce.
IV. MODIFICATIONS IATROGENES EN HYSTÉROSCOPIE
- Les oestrogènes sur une brève durée induisent une augmentation en
nombre et en densité des tubes glandulaires et du stroma avec toutefois une augmentation
relative plus importante des glandes par rapport au chorion cytogène. La bordure
épithéliale, demeure régulière avec des cellules à noyau en position basale.
L'hystéroscopie observera un épaississement de l'endomètre, un aspect oedématié et
des glandes rectilignes évoquant une phase proliférative tardive ou une hyperplasie
simple.
- Le Tamoxifène présente un effet oestrogénique paradoxal sur les
muqueuses endométriales et vaginales. Cette action peut être liée aux métabolites, tel
le Monophénol-Tamoxifène (agent oestrogénique puissant). L'aspect hystéroscopique
évoque celui d'une hyperoestrogénie prolongée non compensée évoquant un remaniement
glandulo-kystique avec structures kystiques translucides.
- Les progestatifs inhibent la multiplication cellulaire
oestrogénodépendante et provoquant ainsi une différenciation cellulaire avec aspect
sécrétoire de l'endomètre. De manière prolongée, ils peuvent entraîner une atrophie
endométriale avec un stroma fibreux. Tous ces critères étant facilement appréciés par
l'observation microhystéroscopique.
V. MODIFICATIONS DYSTROPHIQUES ET PATHOLOGIQUES EN HYSTÉROSCOPIE
De toutes les études sur les états précancéreux de l'endomètre se
dégage un consensus sur l'étiologie.
L'hyperoestrogénie qu'elle soit endogène ou induite par stimulation
excessive aboutit à l'hyperplasie endométriale.
L'appréciation par hystéroscopie de ces hyperplasies doit tenir compte
de la multiplicité des aspects. On distingue cependant par ordre croissant de sévérité
:
- Les hyperplasies simples avec architecture conservée et épaisseur
augmentée de l'endomètre.
- Les hyperplasies polypoïdes avec replis muqueux prenant parfois
l'aspect de véritables polypes mais totalement dépressibles.
- Les remaniements glandulo-kystiques avec un aspect pathognomonique
montrant des structures kystiques et un endomètre laminé atrophique.
- Enfin les aspects adénomateux avec début de modifications de
l'architecture glandulaire et par conséquence de la vascularisation superficielle.
- Les adénocarcinomes qu'ils soient débutants ou étendus montrent en
dehors de l'aspect bourgeonnant macroscopique, des plages de nécrose. La vascularisation
anarchique, avec aspect en tire-bouchon est également pathognomonique.
IV. PLACE DE L'HYSTÉROSCOPIE PARMI LES AUTRES MOYENS
D'INVESTIGATIONS
L'Hystéroscopie s'avère complémentaire à tous les autres moyens
d'exploration. Cependant, tant sur le plan du dépistage que du diagnostic des états
précurseurs de l'adénocarcinome, c'est encore l'association Hystéroscopie-Biopsie qui
s'avère la plus fiable.
- L'histologie qui prétend à un taux de positivité moyen de 85
% en cas de biopsie simple et de 90 à 95 % en cas de curetage, améliorera ces taux et
approchera les 100 % lorsque cette biopsie est dirigée sous hystéroscopie surtout dans
les adénocarcinomes débutants. De plus, elle est réalisée en ambulatoire et est moins
invasive qu'un curetage.
- La cytologie endométriale notoirement peu fiable (70 à 80 %
de faux négatifs pour les hyperplasies) va permettre de poser l'indication d'une
hystéroscopie lorsqu'elle révèle des atypies cellulaires.
- L'échographie n'aura qu'une valeur d'orientation. Alors que
l'hystéroscopie, devant un endomètre épaissi, distinguera entre une hyperplasie ou un
polype et la nature de cette hyperplasie, l'échographie couplée au Doppler pourra
montrer une baisse de l'indice de résistance vasculaire mais n'aura de valeur quíen
post-ménopause en dehors de tout traitement hormonal.
- L'hystérographie voit ses indications notoirement réduites
pour appréhender la pathologie intra-cavitaire depuis la diffusion de plus en plus large
de l'hystéroscopie en ambulatoire. Toutefois, les aspects polymorphes peuvent être tout
à fait évocateurs mais insuffisants.
VII. LIMITES DE L'HYSTEROSCOPIE
Cette observation en direct même en microhysteroscopie (Gx20) ne peut
offrir qu'une observation de surface et de la partie fonctionnelle de l'endomètre après
dépression mais elle ne peut en aucun cas préjuger d'une extension sous jacente
myométriale ou prétendre à une certitude anatomo-pathologique.
Seule l'histologie établira le diagnostic final.
- Devant des hydro-leucorrhées ou des sérohématométries de la post
ménopause, l'échographie sera indispensable pour préciser une localisation tubaire.
VIII. ROLE DE L'HYSTEROSCOPIE DANS LA CONDUITE A TENIR
L'intérêt de cet examen en ambulatoire et reproductible est non
seulement de participer de manière déterminante aux étapes de dépistage et de
diagnostique des états précurseurs de l'adénocarcinome mais également de permettre de
suivre l'évolution, l'amélioration ou la régression des hyperplasies sous traitements
progestatifs et de s'assurer qu'ils ont une activité anti-oestrogénique suffisante.
Enfin, de manière plus directe, l'hystéroscopie participera à ces
traitements en réalisant une résection endométriale lorsque :
- L'hyperplasie s'avère rebelle aux traitements progestatifs et après
s'être assuré de l'absence d'atypies histologiques.
- L'hystéroscopie posera l'indication d'une hystérectomie en cas
d'association à une pathologie organique intra-utérine inaccessible à
l'hystérochirurgie ou en cas d'hyperplasie atypique.
BIBLIOGRAPHIE
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