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1994 > Néonatologie > Pématurité  Telecharger le PDF

Attitude des obstétriciens face à la grande prématurité

G. Bréart , M. Dehan et M. Tournaire

Les progrès récents de la médecine néonatale ont abouti à une augmentation de la survie des grands prématurés sans augmentation marquée des séquelles neurologiques graves (1,2).

Ces progrès permettent de prendre de plus en plus souvent des décisions de césariennes prématurées, notamment en cas d'hypotrophie et de souffrance foetales (3,4,5). Toutefois ces décisions sont difficiles à prendre, notamment du fait des incertitudes sur les conséquences.

En l'absence d'étude évaluative permettant d'avoir des réponses définitives, la confrontation d'opinions peut être un moyen d'améliorer les décisions si elle aboutit à une augmentation de leur cohérence.

C'est dans cet objectif que nous avons mené une enquête auprès d'obstétriciens et de néonatologistes exerçant en France, pour connaître leur attitude vis-à-vis de la grande prématurité selon un modèle proche de l'étude réalisée par Amon et al. (6).

Matériel et Méthodes

L'enquête auprès des obstétriciens a été réalisée auprès d'un échantillon au quart des membres du Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français. Un questionnaire, reproduit à la figure 1 a été envoyé aux 159 gynécologues et obstétriciens de l'échantillon. Cinquante-neuf réponses (37%) ont été obtenues.

Dans cet article seront présentés les résultats concernant le début de l'enregistrement du rythme cardiaque foetal, les décisions de césarienne et la réanimation néonatale.

Resultats

En ce qui concerne le début de l'enregistrement du RCF le tableau I montre deux types de résultats. Le premier est une préférence nette pour les semaines paires avec des pics à 26, 28 et 30 semaines. Le deuxième est l'étalement des réponses puisqu'un tiers des répondants disent commencer à 25 ou 26 semaines, un tiers à 27-28 et un tiers au-delà.

En ce qui concerne les décisions de césarienne, on constate (tableau II) un très grand étalement des réponses qui vont de 26 à 36 semaines pour les césariennes en cas de RCIU et de 25 à 34 semaines pour les césariennes en cas de travail spontané. Il faut noter une préférence très nette pour une limite proche de celle de la déclaration des naissances puisque 42% ont dit accepter une césarienne à 27 ou 28 semaines en cas de RCIU et 49% en cas de travail spontané. Peu d'obstétriciens ont dit faire des césariennes avant 27 semaines, tandis que 19% ont dit décider des césariennes à partir de 32 semaines en cas de RCIU et 14% en cas de travail spontané.

Les données concernant le poids vont dans le même sens. Il existe un étalement important des réponses : 600 à 2000 g pour la césarienne en cas de RCIU et 600 à 1800 g pour la césarienne en cas de travail spontané. La limite de 1000 g constitue une référence puisque c'est la réponse la plus fréquente et que 47% des répondants fixe la limite entre 900 et 1000 g. Toutefois 27% la fixe à 800 g au moins.

Si l'on compare les réponses aux deux questions, on note qu'il n'existe pas de différences en ce qui concerne le poids, et une faible différence en ce qui concerne l'âge gestationnel avec une tendance à accepter plus tôt une césarienne en cas de travail spontané.

Un autre fait doit être signalé, il concerne les non réponses. Dix pour cent des répondants n'ont pas donné de limite pour le poids ; ce chiffre nous parait faible compte-tenu des imprécisions concernant son estimation, et montre bien que le poids est un élément pris en compte dans les décisions.

En ce qui concerne les décisions de réanimation néonatale (tableau III) les réponses sont en accord avec celles observées pour les décisions de césarienne à savoir étalement des réponses de 25 à

32 semaines, référence marquée à la limite de 28 semaines. Un autre groupe d'obstétriciens fixe la limite plutôt aux alentours de 30 semaines.

En ce qui concerne le poids, si les réponses s'étalent de 600 à 2000 g, il existe une concentration des réponses (les deux tiers) entre 800 et 1000.

Les réponses à la question concernant les transferts (tableau III) sont très étalées et l'ont peut se demander s'il n'y a pas eu un problème de formulation de la question. Certains obstétriciens semblent avoir donné les limites supérieures et non ce que l'on attendait c'est-à-dire la limite inférieure. Quoi qu'il en soit, il semble bien exister une tendance à transférer les enfants avec un très faible âge gestationnel puisque 4 obstétriciens ont répondu qu'ils transféraient toujours et 15 ont fixé la limite à 26 semaines ou avant.

Commentaires

Le premier élément concerne la représentativité des réponses. Nous n'avons reçu que 37% des questionnaires envoyés, ce qui peut paraître faible mais nous n'avons pas fait de relance et parmi les membres du Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français (C.N.G.O.F.) il existe des spécialistes qui exercent uniquement la gynécologie, et qui ne sont pas concernés par le problème de la grande prématurité. Si l'on se réfère aux obstétriciens, le taux de réponse est plus élevé, probablement supérieur à 50% si l'on se réfère aux enquêtes antérieures. Le taux de réponse ne permet pas de garantir une bonne représentativité par rapport aux membres du collège et doit donc rendre prudent dans l'interprétation des résultats même si les données recueillies fournissent des éléments intéressants de réflexion.

De la même façon les membres du collège ne peuvent être considérés comme représentatifs de l'ensemble des obstétriciens. Toutefois on peut considérer que les membres du C.N.G.O.F. sont plus souvent confrontés à des décisions concernant les grands prématurés.

Avec les réserves qui viennent d'être énoncées on peut dire que cette enquête auprès d'obstétriciens met en évidence trois types de résultats :

-Un grand étalement des réponses

-Une référence nette à 28 semaines et 1000 grammes

-Une réserve plus marquée de la part des obstétriciens par rapport aux néonatologistes pour accepter des césariennes très précoces.

La dispersion des réponses montre qu'il existe vraisemblablement un besoin d'étude évaluative permettant de mieux estimer les avantages et inconvénients de chaque décision. Elle montre la nécessité de réaliser des suivis à long terme d'enfants nés prématurément et d'étudier le lien qui existe entre le devenir et les conditions de leur prise en charge périnatale.

Cette dispersion peut traduire aussi la diversité des situations en particulier en ce qui concerne l'environnement néonatal. Une analyse plus approfondie des questionnaires nous permettra de mieux apprécier l'influence de cet environnement sur les réponses. Même s'il existe une grande dispersion des opinions parmi les néonatologistes (Dehan), on peut se demander si le transfert en période anténatale de la mère dans des centres proches d'un service de néonatologie ne limiterait pas les variations des décisions liées à l'environnement.

La référence marquée à 28 semaines ou 1000 grammes comme limite pour certaines décisions ne signifie pas que ces deux bornes sont considérées comme les limites de viabilité comme en témoigne le pourcentage élevé de réponses fixant la limite plus bas. Il est vraisemblable que la tendance à l'abaissement des seuils de décision va continuer. Il est donc extrêmement important que l'on puisse disposer de données fiables pour les enfants nés avant 28 semaines ou de poids inférieur à 1000 g. Ceci ne peut être fait qu'en modifiant les règles de l'enregistrement à l'état civil (7,8). Un groupe de travail réuni à l'initiative de la Direction Générale de la Santé travaille dans

ce sens, en vue d'arriver à un système d'enregistrement compatible avec les définitions proposées par l'O.M.S. et la F.I.G.O. (Fédération Internationale de Gynécologie Obstétrique).

La comparaison avec les réponses faites par les néonatologistes fait apparaître une tendance à prendre des décisions "actives" plus précoces pour les néonatologistes que les obstétriciens. Ceci peut avoir plusieurs explications.

La première peut être liée aux populations d'étude. Les néonatologistes concernés par l'enquête sont membres de la Fédération Nationale des Groupes d'Etudes en néonatalogie. La plupart appartiennent à des services de soins intensifs ou de réanimation et sont donc très souvent dans des CHR ou CHU. Alors que les obstétriciens même s'ils sont membres du C.N.G.O.F. sont plus dispersés. Il aurait donc été intéressant de recueillir aussi l'avis des pédiatres de maternités, ceci sera fait dans une prochaine étape. On peut en effet penser que l'éloignement d'un centre néonatal est un facteur amenant à ne pas intervenir très précocement ou à transférer la mère si le problème se pose.

La deuxième peut être liée aux éléments pris en compte dans la décision. Le néonatologiste prenant en compte l'aspect néonatal tandis que l'obstétricien intègre également l'aspect maternel et les risques liés à une césarienne précoce.

Conclusion

Les données présentées ici ne sont que préliminaires mais n'en constituent pas moins une base de discussion intéressante même si les données présentées ici ne représentent que des déclarations d'intention et pas les pratiques réelles.

Références

1Mc Cormick MC. Has the prevalence of handicapped infants increased with improved survival of the very low birth weight infant ? Clin Perinatol 1993, 20 : 263-277.

2Veen S, Ens-Dokkum MH, Schreuder AM, Verloove-Vanhorick SP, Brand R, Ruys JH. Impairments, disabilities and handicaps of very preterm and very-low-birthweight infants at five years of age. Lancet 1991, 338 : 33-36.

3Bréart G, du Mazaubrun C. La périnatalité en France, 20 ans d'évolution. Médecine Sciences 1993, 9 : 323-326.

4Le Coutour X, Marie G, Muller G, Levy G. Changing trends in preterm childbirth. Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol 1991, 38 : 113-117.

5 Lequien P, Delecour M, Puech F. Evolution of prematurity before the 32nd week from 1980 to 1985 in a tertiary perinatal center in Lille, France. Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol 1990 ; 34 : 59-65.

6Amon E, Shyken JM, Sibai BM. How small is too small and how early is too early ? A survey of american obstetricians specializing in high risks pregnancies. Am J Perinatol 1992, 9 : 17-21

7Dumoulin M, Blondel B, Lequien P. Naître et ne pas être : aspects épidémiologiques, juridiques et psychologiques. J Gynecol Obstet Biol Reprod 1993, 22 : 385-392.

8Bréart G, Blondel B, Kaminski M, et al. Mortalité et morbidité périnatales en France. In : Tournaire M, ed. Mises à jour en gynécologie et obstétrique, Paris : CNOGF-Vigot 1991, 175-214.

Attitude vis-a-vis de la grande prematurite

(voir Quest. JTA)

Tableau I - Enregistrement du RCF

En cas de RCIU à quel âge gestationnel commencez-vous les enregistrements ?

Age gestationnel

n

25 semaines

26 semaines

3

17

}

34%

27 semaines

28 semaines

29 semaines

5

15

1

}

34%

30 semaines

10

31 semaines

0

32 semaines

5

33 semaines

0

34 semaines

2

35 semaines

1

Tableau II - Décision de césarienne

a)En cas de RCIU avec signe de souffrance foetal au RCF quelle est la limite inférieure d'âge ou de poids estimé à partir de laquelle vous décidez de faire une césarienne avant tout début de travail?

b)En cas de début de travail spontané quelle est la limite inférieure d'âge ou de poids estimé à partir de laquelle vous décidez de faire une césarienne en présence d'une anomalie du RCF ?

Age gestationnel

a)

b)

25 semaines

0

1

26 semaines

1

2

27 semaines

28 semaines

5

20

}

42%

3

26

}

49%

29 semaines

4

3

30 semaines

11

10

31 semaines

3

2

32 semaines

33 semaines

34 semaines

35 semaines

36 semaines

8

1

1

0

1

}

19%

6

1

1

0

0

}

14%

non réponses

3

3

Poids

600 grammes

650 grammes

700 grammes

750 grammes

800 grammes

2

0

6

1

7

}

27%

2

0

5

2

7

}

27%

850 grammes

0

0

900 grammes

950 grammes

1000 grammes

5

1

22

}

47%

6

1

21

}

47%

1100 grammes

2

1200 grammes

2

1

1300 grammes

1

1400 grammes

1

0

1500 grammes

1

3

1600 grammes

0

1

1800 grammes

1

2

2000 grammes

1

0

non réponse

5

7

Tableau III - Réanimation néonatale

a)A quelle limite d'âge ou de poids pensez-vous qu'il faut réanimer un prématuré né en état de mort apparente ?

b) A quelle limite d'âge ou de poids pensez-vous qu'il faut transférer un prématuré qui a respiré tout seul ?

Age gestationnel

a)

b)

25 semaines

26 semaines

1

7

}

14%

3

12

}

25%

27 semaines

3

3

28 semaines

27

6

29 semaines

1

0

30 semaines

14

2

31 semaines

2

2

32 semaines

1

2

33 semaines

34 semaines

5

35 semaines

9

36 semaines

2

toujours

4

non réponses

3

9

Poids

500 grammes

0

1

600 grammes

5

7

700 grammes

4

4

750 grammes

2

2

800 grammes

14

6

900 grammes

6

4

1000 grammes

18

3

1200 grammes

1

1400 grammes

1

1500 grammes

0

1

1600 grammes

1

1700 grammes

1

1800 grammes

0

1

1900 grammes

0

1

2000 grammes

1

9

2100 grammes

1

2200 grammes

2

2300 grammes

1

2400 grammes

1

2500 grammes

2

toujours

1

4

non réponse

4

9