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Titre: Hépatopathies gravidiques
Année: 1995
Auteurs: - Bernuau J.
Spécialité: Obstétrique
Theme: Hepatopathies gravidiques

Chapitre 5

hépatopathies gravidiques

J. BERNUAU

 

Introduction

Les maladies hépatiques de la femme enceinte sont classées en 2 catégories selon leur dépendance vis-à-vis de l'état gravidique : (a) les hépatopathies gravidiques, survenant exclusivement au cours de la grossesse, et (b) les hépatopathies non gravidiques, aiguës ou chroniques, associées fortuitement à une grossesse.

Les hépatopathies gravidiques sont au nombre de 4 : les vomissements gravidiques incoercibles (hyperemesis gravidarum), la cholestase gravidique, l'hypertension gravidique et la stéatose hépatique aiguë gravidique, seule responsable d'insuffisance hépatocellulaire aiguë.

 

Avant d'envisager chacune de ces 4 entités, nous rappellerons les principales règles du diagnostic hépatologique pendant la grossesse.

 

I La démarche diagnostique au cours des hépatopathies chez la femme enceinte (1)

 

 

Le diagnostic des hépatopaties, aiguës ou chroniques, survenant au cours de la grossesse suit les règles habituelles du diagnostic hépatologique, mais doit tenir compte des modifications, liées à l'état gravidique, de certaines variables biologiques (1). Le problème le plus souvent posé actuellement est celui d'une pathologie hépatique non ictérique.

Les principaux éléments d'orientation du diagnostic étiologique des hépatopathies associées à la grossesse sont : (a) le type de syndrome hépatique réalisé (voir ci-dessous) ; (b) le terme de la grossesse au moment du début des symptômes ; (c) les antécédents hépato-biliaires, gravidiques ou non ; (d) la consommation médicamenteuse dans le mois précédent ; (e) l'absence, ou l'existence, d'une hypertension artérielle et d'une protéinurie ; (f) la créatininémie (<80 =mol/l au 3e trimestre de la grossesse normale) et l'uricémie à jeun (2) ; (g) éventuellement, l'échotomographie du foie et des voies biliaires. La ponction-biopsie hépatique n'est presque jamais indispensable au diagnostic avant l'accouchement : elle pourra être réalisée, avec le même rendement diagnostique, dans le post-partum précoce, souvent par voie transjugulaire.

De nombreuses maladies hépatiques se manifestent par un, ou plusieurs, des syndromes suivants qui permettent d'orienter le diagnostic étiologique. Toutefois, certaines des hépatopathies associées à la grossesse ne s'intègrent à aucun de ces syndromes.

 

L'insuffisance hépatocellulaire se manifeste initialement par une diminution du taux de prothrombine (temps de Quick) et du facteur V (proaccélérine). En cas d'aggravation, apparaît un ictère à bilirubine conjuguée et, à un degré de plus, une encéphalopathie clinique associée à l'effondrement des facteurs de coagulation.

 

La cholestase isolée, anictérique ou ictérique, est toujours associée à une augmentation de la concentration plasmatique des acides biliaires totaux. Le prurit est un symptôme inconstant et non spécifique de cholestase. En dehors de la grossesse, la cholestase est associée à une activité augmentée de la 5'-nucléotidase et de la gamma-GT. Pendant la grossesse, l'augmentation de la gamma-GT lors d'une cholestase est très inconstante.

 

Toute cholestase peut être associée à une augmentation de l'activité sérique des aminotransférases, parfois supérieure à 20 fois la normale, suggérant faussement une nécrose hépatocytaire. En cas de cholestase anictérique, la bilirubinémie à prédominance conjuguée est normale ou inférieure à 30-40 =B5mol/l et le taux de prothrombine est normal. En cas de cholestase ictérique, la bilirubinémie dépasse le plus souvent 50=B5mol/l et, si l'ictère est présent depuis plusieurs semaines, le taux de prothrombine est diminué par hypovitaminose K (le facteur V restant normal ou élevé). Cette diminution des facteurs vitamine K-dépendants sera corrigée par l'administration parentérale brève (1 à 2 jours) de vitamine K.

L'hypertension portale est définie hémodynamiquement, comme une augmentation de la pression portale au-dessus de 15 cm d'eau. Elle peut être due à une hépatopathie aiguë ou chronique : elle est alors souvent associée à une insuffisance hépatocellulaire. Elle peut être asymptomatique. Ses principales manifestations cliniques sont une circulation veineuse sous-cutanée, épigastrique et basithoracique, et une ascite. Au cours des hépatopathies chroniques, l'hypertension portale peut se compliquer d'hémorragies digestives par rupture de varices oesophagiennes ou gastriques.

En pratique, dès que des anomalies hépatiques apparaissent chez une femme enceinte, la démarche diagnostique et thérapeutique doit être menée, en étroite collaboration, par l'obstétricien et un hépatologue.

II Vomissements gravidiques incoercibles (hyperemesis gravidarum)

 

Ils sont définis comme la majoration des vomissements gravidiques usuels rendant nécessaire l'hospitalisation avant le terme de 13 semaines d'aménorrhée. Le plus souvent, aucune cause organique n'est identifiée et les malades sont, pour la plupart, des émigrées. Une cause organique est rare : grossesse gémellaire, grossesse molaire, hypercalcémie ou sténose digestive haute.

Des anomalies non hépatiques sont fréquentes et le plus souvent dépistées en premier : déshydratation, amaigrissement, cétonurie, hypercréatininémie, alcalose métabolique, hypophosphorémie et natriurèse basse traduisent l'importance des vomissements. Une hyperthyroïdie biologique, cliniquement asymptomatique, est fréquente. Les anomalies hépatiques, en partie la conséquence du jeûne secondaire aux vomissements et en général au second plan, comportent une augmentation des aminotransférases dans 20 % des cas et un ictère à bilirubine conjuguée dans moins de 10 % des cas. Il n'y a pas d'insuffisance hépatocellulaire. Des troubles de la conscience, voire un coma, doivent évoquer une encéphalopathie de Gayet-Wernicke par hypovitaminose B1, seule cause de mort maternelle. Le risque d'hypotrophie foetale est majoré par une diminution du poids maternel de plus de 5 % par rapport au poids maternel avant la grossesse. La récidive lors de grossesses ultérieures est possible.

 

Le traitement comporte l'isolement, la rééquilibration hydro-électrolytique, l'arrêt de l'alimentation orale avec apport intraveineux de glucose pendant 3 à 5 jours, toujours associé à du phosphore et des vitamines du groupe B. Le métoclopramide peut être utilisé comme anti-émétique, mais les médicaments cholestasiants (en particulier les phénothiazines) sont contre-indiqués.

 

III Cholestase gravidique

 

 

La cholestase gravidique est considérée comme l'expression d'une sensibilité, génétiquement déterminée, à l'action cholestatique des oestrogènes. Sa transmission se fait sur un mode mendélien dominant. Des antécédents familiaux de prurit gravidique sont possibles. Des antécédents personnels de prurit contemporain de la prise d'un contraceptif oral sont maintenant exceptionnels avec les contraceptifs faiblement dosés en oestrogènes. Chez les femmes normotendues, elle est la plus fréquente des hépatopathies gravidiques du 2e et du 3e trimestres. Elle survient chez les primipares et chez les multipares. Sa prévalence, de l'ordre de 10 % au Chili, de 2 % en Suède, et de 2 pour 1000 grossesses en France, est accrue par la gémellarité (10). Les lésions hépatiques sont celles d'une cholestase pure.

Les formes asymptomatiques, probablement fréquentes, pourraient être reconnues sur l'augmentation des acides biliaires totaux du sérum. Le symptôme habituel est le prurit, présent dans 95 % des cas, isolé, sans douleurs, ni fièvre, ni hépatomégalie. Il peut être intense, entraînant des lésions de grattage, un amaigrissement par restriction alimentaire, voire un syndrome dépressif. L'augmentation des acides biliaires prédomine sur l'acide cholique (11). L'augmentation des aminotransférases, jusqu'à 25 fois la valeur normale, est presque toujours présente. La phosphatase alcaline et la 5'-nucléotidase sont inconstamment augmentées ; la gamma-GT est presque toujours normale. Les facteurs de coagulation, la créatininémie et l'uricémie à jeun, sont normaux. La régression du prurit dès le début du post-partum, puis sa disparition complète en 3 à 5 jours, sont très caractéristiques. Rarement, le prurit voire l'ictère peuvent persister plusieurs mois (12). A l'inverse, sa disparition avant l'accouchement est très rare et doit faire remettre en cause le diagnostic de cholestase gravidique génétique.

 

Dans 25 % des cas, un ictère à bilirubine conjuguée est présent. Il excède rarement 80 =moles/l, sauf si une infection urinaire est associée. Une stéatorrhée et une hypovitaminose K sont possibles en cas d'ictère prolongé. La régression de l'ictère est plus lente que celle du prurit.

 

La mortalité maternelle est nulle. La prématurité est le principal risque foetal : elle survient dans 30 à 50 % des cas (13). Des cas de souffrance foetale aiguë et des cas de mort in utero ont été rapportés. Les risques foetaux semblent plus importants en cas d'ictère, mais aucun critère maternel ne permet actuellement leur prédiction efficace. La récidive de la maladie lors d'une grossesse ultérieure est fréquente, mais inconstante. Chez les femmes ayant eu une cholestase gravidique, le volume vésiculaire mesuré à jeun est augmenté et la prévalence de la lithiase biliaire cholestérolique est augmentée par un facteur 2 à 3.

 

Le traitement médical est peu efficace. L'efficacité de la cholestyramine sur le prurit est inconstante et imprévisible. Dans quelques cas de survenue précoce, une plasmaphérèse a pu entraîner la disparition d'un prurit sévère et permettre la poursuite de la grossesse (14). Après la 34e semaine, la grossesse est souvent interrompue par césarienne. En cas d'ictère, une hypoprothombinémie doit préalablement être corrigée par la vitamine K (en intraveineux). Récemment, dans une étude non contrôlée, l'administration d'acide ursodésoxycholique (actuellement officiellement contre-indiqué pendant la grossesse) a entraîné la disparition du prurit et la normalisation des tests biologiques avant l'accouchement (15).

 

IV Hypertension gravidique  

Elle complique, selon la population étudiée, de 5 à 20 % des grossesses, atteint surtout les primipares et se manifeste au 3e trimestre, voire seulement dans le post-partum. Un faible risque de récidive lors d'une grossesse ultérieure existe.

L'hypertension gravidique est une maladie primitivement vasculaire, au niveau du foie comme dans les autres organes. Les lésions hépatiques ne sont observées qu'en cas de toxémie gravidique (hypertension artérielle et protéinurie). La lésion hépatique élémentaire est constituée de dépôts intravasculaires de fibrine dont la répartition dans le foie est hétérogène (16). Ils siègent le plus souvent dans les sinusoïdes périportaux, parfois dans des branches intrahépatiques de la veine porte ou de l'artère hépatique. Ces lésions, perturbant la circulation intrahépatique normale, sont la cause probable de foyers de nécrose hépatocytaire et parfois d'infarctus hépatiques et d'hémorragies intrahépatiques. La confluence de ces hémorragies conduit à la formation d'hématomes, le plus souvent, sous-capsulaires et siégeant dans le lobe droit. Parfois, l'hématome est étendu à presque toute la surface du foie. La capsule, en regard, peut être intacte et tendue, ou fissurée

La symptomatologie de ces lésions hépatiques est variable. Le principal symptôme est une douleur, durant de quelques minutes à quelques heures, souvent épigastrique en barre, ou de l'hypochondre droit, parfois thoracique basse, scapulaire droite ou dorsale basse. L'activité des aminotransférases est toujours augmentée, dépassant parfois 50 fois la valeur normale. La bilirubinémie est le plus souvent normale. Un ictère, à bilirubine conjuguée et non conjuguée, est rare et souvent associé à une hyperhémolyse intravasculaire (augmentation de la LDH et la diminution de l'haptoglobine). Les facteurs de coagulation sont normaux ou modérément abaissés. Un syndrome de coagulation intravasculaire disséminée peut être constaté. Le syndrome HELLP est défini par l'association d'une hémolyse intravasculaire, de l'augmentation des aminotransférases et d'une thrombopénie (17) ; il peut être incomplet, voire réduit à une thrombopénie isolée. L'échotomographie et la tomodensitométrie hépatiques peuvent être normales, ou visualiser un hématome sous-capsulaire ou un infarctus étendu. Un épanchement péritonéal de faible abondance, peut être présent. Une protéinurie, une hyperuricémie et une hypercréatininémie sont fréquentes.

Le diagnostic étiologique de ces anomalies hépatiques est facile quand le syndrome de toxémie gravidique est évident ou quand les anomalies hépatiques sont constatées après une crise d'éclampsie (18).

Il est difficile quand, simultanément, la douleur est inaugurale et ectopique, l'hypertension artérielle modérée ou absente et la protéinurie non retrouvée (19). Dans de tels cas, la constatation d'un syndrome HELLP, même incomplet, a une valeur quasi pathognomonique.

Le traitement médical de la toxémie gravidique comprend le repos au lit et la prévention des convulsions. Un remplissage vasculaire prudent par l'albumine humaine à 20 % peut être utile. Les diurétiques sont contre-indiqués. L'efficacité d'un traitement hypotenseur est discutée. L'interruption de la grossesse est pratiquement toujours nécessaire ; son moment est discuté en fonction de l'état maternel, du terme de la grossesse et de l'état du foetus qui est parfois hypotrophe. Quand la grossesse a été interrompue avant la rupture hépatique, les infarctus et les hématomes intrahépatiques régressent spontanément et sans séquelles (20).

 

La rupture spontanée du foie atteint surtout les multipares dont la grossesse a été mal surveillée. La lésion hépatique est une dilacération capsulaire à la surface d'un hématome sous-capsulaire. La rupture peut survenir dans le post-partum. Elle est la cause d'un hémopéritoine massif entraînant un état de choc avec anémie aiguë. Le traitement associe, en urgence, le remplissage vasculaire massif, l'évacuation utérine, et l'hémostase de l'hémorragie hépatique par embolisation ou ligature artérielle, ou par une méthode chirurgicale. Le transfert dans un centre d'hépatologie médico-chirurgicale est une urgence (21). La fréquence d'une souffrance foetale aiguë mortelle est voisine de 80 % (22). La mortalité maternelle est de l'ordre de 60 % (23). Ultérieurement, une grossesse normale est possible.

V Stéatose hépatique aiguë gravidique (24, 25)  

Sa prévalence est de l'ordre de 1 pour 10 000 grossesses. Elle survient plus souvent chez une primipare que chez une multipare et est associée à une prévalence accrue de grossesses gémellaires et de foetus mâles. La lésion est une stéatose microvacuolaire, intéressant les hépatocytes de la région centro-lobulaire et ne modifiant pas la position centrale de leur noyau. La cause de la maladie est encore inconnue, mais on s'oriente de plus en plus vers une pathologie mitochondriale du foie foetal entraînant, par accumulation de substances toxiques, un dysfonctionnement mitochondrial du foie maternel responsable de la stéatose microvésiculaire. Plusieurs cas ont été rapportés après administration parentérale de fortes doses de tétracycline.

Le début clinique, le plus souvent après la 28e semaine (parfois dès le 5e mois), peut être précédé pendant plusieurs jours d'une hyperuricémie, isolée ou associée à une augmentation asymptomatique des aminotransférases. Les principaux symptômes inauguraux sont des nausées et des vomissements, des douleurs abdominales hautes, parfois un prurit. Une polyuro-polydipsie est probablement un symptôme inaugural fréquent mais souvent négligé (26). Dans la moitié des cas, des manifestations d'hypertension gravidique sont associées. L'activité des aminotransférases est augmentée, souvent à moins de 20 fois la valeur normale. La bilirubinémie est normale ou à peine augmentée. Les facteurs de coagulation sont normaux ou peu abaissés. La créatininémie et la leucocytose sont normales ou peu augmentées. Une hyperuricémie est fréquente. L'échographie hépatique est souvent normale. A ce stade initial, la condition foetale est normale, et l'interruption rapide de la grossesse est associée à la survie de la mère (la guérison des lésions hépatiques et de l'insuffisance rénale sont obtenues en une semaine ou moins) et de l'enfant. Le diagnostic précoce repose sur un très haut degré de suspicion clinique : au 3e trimestre de la grossesse, des nausées et des vomissements sont toujours pathologiques et requièrent le dosage, en urgence, des aminotransférases.

 

L'évolution spontanée se fait inéluctablement vers l'aggravation. En quelques jours à 2 semaines, les symptômes cliniques et biologiques précédents s'accentuent, un ictère à bilirubine conjuguée apparaît dans tous les cas. Le taux de prothrombine est souvent inférieur à 50 % et la diminution parallèle des facteurs V, VII et X, témoigne de l'insuffisance hépatocellulaire. La thrombopénie, non associée à une hémolyse, est souvent inférieure à 100000/mm3. Une hyperéchogénicité hépatique est très inconstante. La condition foetale peut encore être normale, mais aussi se détériorer très brusquement. Si la grossesse est interrompue d'extrême urgence, le pronostic maternel est encore bon, mais les risques de complications dans le post-partum sont plus élevés qu'au stade tout initial. Si la grossesse n'est pas interrompue d'extrême urgence, l'aggravation se poursuit, le pronostic maternel (risques de coma et d'anurie) et le pronostic foetal sont alors très menacés. La mort in utero, en elle-même témoin de la gravité de la maladie maternelle, est fréquente. Dans les cas extrêmes, une transplantation hépatique en urgence peut être tentée (27).

 

Le risque de complications post-partum est élevé quand la grossesse n'est interrompue qu'après l'apparition de l'ictère et surtout en cas de souffrance foetale ou de mort in utero. Les principales complications sont les hémorragies de la délivrance (dont il est essentiel de déterminer la source, utérine ou vaginale), parfois des hématomes pelviens d'hémostase très difficile, une insuffisance rénale aiguë et une rétention hydrosodée, conséquences directes de la maladie hépatique et dues à la conjonction d'une hypovolémie et d'une hypoalbuminémie souvent inférieure à 25 g/l. La survenue fréquente d'une ascite témoigne, à la fois, de la rétention hydro-sodée et d'une hypertension portale. Le risque de surinfection bactérienne est spécialement élevé quand l'insuffisance hépatique est sévère, associée à une ascite et après césarienne.

Le traitement est dominé par la nécessité impérative d'interruption de la grossesse. Elle est d'autant plus urgente que la maladie maternelle est plus grave et que la condition foetale est plus menaçante. Elle ne doit être retardée ni par l'administration de plasma frais congelé, ni par le transfert en centre spécialisé qui est recommandé.

Si le taux de prothrombine est >50 %, l'accouchement est souvent obtenu par voie basse. Quand le taux de prothrombine est <50 %, même en l'absence d'ictère, la césarienne est préférable. En cas de mort in utero, nous considérons que la césarienne immédiate est une urgence absolue. Dès l'intervention et dans le post-partum, la réanimation inclut un remplissage vasculaire par l'albumine à 20 % et la prévention et le traitement des surinfections bactériennes. La transfusion de sang n'est indiquée que s'il existe une hémorragie L'administration de plasma frais congelé n'est justifiée que si une hémorragie est associée à des facteurs de coagulation inférieurs à 30-40 %. Les mesures habituelles visant à obtenir une rétraction utérine efficace seront soigneusement observées. Certains médicaments sont contre-indiqués : héparine, PPSB, diurétiques thiazidiques et aminosides (leur toxicité rénale est accrue par l'insuffisance hépatique).

L'amélioration de la précocité du diagnostic associée à la conduite thérapeutique précédente a permis de transformer le pronostic : la survie maternelle est passée de 20 % environ avant 1970, à 90 % au début de la décennie 90 (28, 29). La survie foetale est maintenant de l'ordre de 70 %. Dans de très rares cas, la récidive de la maladie lors d'une grossesse ultérieure a été observée.

 

 

BIBLIOGRAPHIE

 

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Jacques BERNUAU Service d'Hépatologie, Hôpital Beaujon, 92118 Clichy 40 87 50 00

 : JOURNÉES DE TECHNIQUES AVANCÉES EN GYNÉCOLOGIE OBSTÉTRIQUE ET PÉRINATALOGIE PMA, Fort de France 12 - 19 Janvier 1995