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Titre: Traitement coelioscopique de l'incontinence urinaire d'effort
Année: 1996
Auteurs: - Benifla J.-L.
Spécialité: Périnéologie
Theme: incontinence urinaire d'effort

Prolapsus, incontinence urinaire

traitement cœlioscopique de l'incontinence urinaire d'effort

J.-L. BENIFLA, P. MADELENAT*, T. GROSMANN et E. DARAI

Plus de cent interventions différentes ont été à ce jour décrites pour le traitement chirurgical classique de l'incontinence urinaire d'effort. A l'heure actuelle, les techniques les plus pratiquées sont les colposuspensions de type Burch ou Marschal, Marketti-Kranz et les frondes sous urétro-vésicales de type Goebbel Stockel.

La chirurgie de moindre contrainte est apparue dès la fin des années 70. Ces interventions pratiquées par voie per cutanée n'ont pas eu les résultats espérés. Avec le recul du temps des taux d'échec de 50 % ne sont pas rares ; ainsi les techniques de Cobb Pereyra, Guittes et même Stamey ne semblent pas avoir un réel avenir.

 

Depuis 1991, la mise au point de techniques reposant totalement ou partiellement sur l'endoscopie concerne cette indication.

 

Le recul du temps, encore insuffisant, permettra de juger de leur efficacité à long terme. Toutefois dès aujourd'hui il est possible d'apprécier :

- la faisabilité comparée de ces nouveaux gestes ;

- leur morbidité immédiate et à moyen terme ;

- leurs résultats à deux ou trois ans au plus.

 

Pour de nombreuses raisons et aussi pour des problèmes éthiques très compréhensibles, les patientes incluses dans les différentes séries publiées à ce jour ont le même profil :

- patiente de première main n'ayant pas bénéficié d'un geste chirurgical antérieur pour la même raison ;

- incontinence urinaire d'effort pure à l'interrogatoire et à l'examen clinique ;

- absence de tout dysfonctionnement sphinctérien à l'exploration urodynamique ;

- absence de lésions de prolapsus associées à l'exception d'une cystocèle isolée et modérée.

 

Plusieurs techniques chirurgicales sont d'ores et déjà proposées pour le traitement endoscopique de l'incontinence urinaire d'effort. Elles appartiennent à trois grandes catégories :

- les abords extra-peritonéaux exclusifs ;

- les abords intra- péritonéaux ;

- les abords mixtes laparoscopico-vaginaux.

 

A - La Retziuscopie par abord extra-péritonéal exclusif

 

L'abord est celui de la pelvis copie rétro péritonéale. Une open laparoscopie est réalisée à 3 travers de doigt au-dessus du pubis. Après décollement digital du Retzius, l'endoscope est introduit et l'insufflation réalisée secondairement à la pression de 8 à 10 millimètres de mercure. Deux trocards de 5 mm sont placés de part et d'autre de l'optique ; un troisième trocard est souvent introduit entre l'ombilic et l'endoscope sur la ligne médiane, les ligaments de Cooper sont découverts. La vessie est refoulée en dedans. Ainsi on découvre l'aileron latéral du vagin.

 

Dès lors, dans cette technique extra péritonéale exclusive, la solidarisation des ailerons vaginaux aux ligaments de Cooper s'effectue de différentes manières :

- par des points intracorporels, effectués au porte-aiguille. Leur réalisation est souvent complexe ;

- par des points extracorporels ;

- par un fil monté sur une aiguille introduite par voie percutanée sus-pubienne. Elle transfixie le Cooper sous contrôle de la vue puis le vagin ; cette manoeuvre est répétée et les deux chefs du fil ainsi récupérés sont noués dans le vagin et enfouis sous la muqueuse.

 

Enfin par mise en place d'une prothèse de Mersilène. Dans cette variante technique, les trocards opératoires doivent avoir un diamètre de 12 mm afin de permettre l'introduction de la pince à agrafes qui sera nécessaire au double amarrage de la prothèse sur les ligaments de Cooper et sur les ailerons vaginaux.

 

B - La Retziuscopie par abord coelioscopique

 

Dans cette méthode la coelioscopie est réalisée de manière conventionnelle. Deux trocards sus-pubiens de 5 mm sont placés assez haut en regard des E.I.A.S. Le péritoine prévésical est incisé aux ciseaux ou au crochet électrique par un large abord transversal. La vessie est alors refoulée vers le bas et la ligne médiane livrant accès comme précédemment aux ligaments de Cooper et aux ailerons vaginaux. Ils sont solidarisés comme précédemment. En fin d'intervention, le péritoine vésical est refermé par clip ou un surjet transversal.

 

C - Les abords mixtes laparoscopico-vaginaux

 

Les techniques précédemment décrites exposent à certaines critiques qui en limitent l'intérêt. La réalisation des gestes endoscopiques purs est souvent complexe. La durée de ces interventions est souvent longue.

 

L'amarrage vaginal est souvent aléatoire dans son efficacité à long terme. Habituellement un seul point est réalisé de part et d'autre de la jonction urétro-vésicale. Une cystocèle souvent associée est mal traitée par ces méthodes. Toutes ces raisons expliquent le développement récent de techniques mixtes laparoscopico-vaginales.

 

Le point commun de ces méthodes est l'abord chirurgical par voie vaginale de la jonction urétro-vésicale. Une colpotomie a minima est pratiquée par voie basse sous la jonction repérée par le ballonnet de la sonde.

 

L'incision peut être menée :

- par voie transversale directe ;

- par voie arciforme en U renversé ;

- par double voie para-médiane verticale.

 

A partir de cette incision, une dissection aux ciseaux est réalisée. Elle dégage la face inférieure de la jonction puis latéralement, en restant au contact de la branche ischio-pubienne, les faces latérales de celle-ci. Ils perforent l'aponévrose pelvienne. Le temps vaginal est alors terminé.

 

Il faut alors dégager les ligaments de Cooper par voie laparoscopique :

- soit par abord extra-péritonéal comme précédemment ;

- soit par abord coelioscopique mais il est alors inutile d'ouvrir le Retzius largement. Une petite incision est réalisée à gauche comme à droite en dehors de l'artère ombilicale, en dedans des épigastriques. Le ligament de Cooper est découvert derrière cette incision. Dans ces variantes techniques, il est inutile de dégager largement le Retzius ; le refoulement vésical est mené de manière plus limitée.

 

Le soutènement de la jonction urétrovésicale est réalisé de différentes façons : un fil non résorbable est passé dans le ligament de Cooper. Les deux chefs du premier fil abandonnés dans le Retzius, sont récupérés par une pince de Bengolea introduite à partir de la colpotomie. Les fils amenés au niveau vaginal sont fixés solidement à la face profonde du paravagin. Leur serrage est réalisé pour permettre l'ascension raisonnable de la face antérieure du vagin. La colpotomie est refermée. Une variante technique intéressante est autorisée par cet abord mixte. Il est en effet possible de mettre en place une fronde selon la technique de Goebbel Stockel. La prothèse synthétique introduite par un trocard de 12 millimètres est agrafée sur le ligament de Cooper droit. Son extrémité libre est récupérée par la pince vaginale qui la réintroduit dans le canal para médian gauche.

 

Récupérée dans le Retzius, elle est amarrée par agrafage sous tension mesurée au ligament de Cooper gauche. La fixation de la fronde sous la jonction, la fermeture de la colpotomie et la péritonisation a minima par voie coelioscopique terminent l'intervention. Les bandelettes prothétiques jusqu'alors utilisées dans cette technique de fronde sont en Goretex ou PDS.

 

RESULTATS

 

Affirmer la fiabilité de la colposuspension endoscopique est complexe car les expériences n'ont pas le recul du temps. En outre, les opérateurs n'utilisent pas tous les mêmes techniques. Les comparaisons sont donc difficiles. Nous donnons comme exemple le résultat d'une série de 47 patientes opérées dans le service gynécologie au CHU Bichat, série analysée en décembre 1994, sur des patientes ayant toutes un recul au moins égal à un an. Toutes les interventions de cette série étant des colposuspensions réalisées par voie endoscopique rétro péritonéale pure. 47 patientes ont bénéficié de ce geste. Parmi ces 47 patientes, 6 ont été laparoconverties, 41 colposuspensions endoscopiques ont été menées à terme. Cinq patientes ont été perdues de vue. Donc, l'analyse rétrospective a été effectuée sur 36 colposuspensions endoscopiques menées à terme et suivies. Le temps moyen d'intervention étant de 77 min. Nous avons exclu des temps d'hystérectomies ou de myomectomies. Les pertes sanguines n'ont pas été évaluées, mais aucune patiente n'a été transfusée. Sur les 36 patientes opérées et suivies, 31 femmes ne présentaient plus d'incontinence urinaire à l'effort, soit un taux de succès de 86 %, 5 patientes ont été améliorées, mais avec persistance de troubles urinaires, soit un taux de succès relatif de 14 %. Chez les patientes guéries, une augmentation significative de la longueur fonctionnelle urétrale et des taux de transmission sans modification de la pression de clôture étaient retrouvés. On retrouvait une baisse significative de la pression de clôture chez les 5 patientes ayant un échec du traitement chirurgical. Si l'on compare les valeur urodynamiques des profilométries avant l'intervention, il existe une différence significative pour les valeurs de pression de clôture et de transmission entre les succès et les échecs. L'analyse des échecs fait apparaître que les facteurs cliniques d'échec sont le degré d'incontinence urinaire (plus le degré d'incontinence est fort, plus le risque d'échec est important) et le statut hormonal post-ménopausique.

 

Parmi les 47 colposuspensions réalisées, il a fallu effectuer une laparoconversion dans 6 cas.

 

Les raisons de ces laparoconversions sont :

- une hypercapnie : 2 fois ;

- une plaie vésicale : 2 fois ;

- un hématome du Retzius : 1 fois ;

- une faute de dissection : 1 fois.

 

DISCUSSION

 

A travers notre expérience et la revue de la littérature médicale, il est possible aujourd'hui de répondre à un certain nombre de questions que posent ces nouvelles techniques chirurgicales. L'abord endoscopique de l'incontinence urinaire d'effort est aujourd'hui techniquement possible. L'expérience des opérateurs ayant publié à ce propos en témoigne. Toutefois, ces séries ne sont pas parfaitement comparables. Il est très évident que la durée d'intervention est nettement supérieure à celle de la chirurgie conventionnelle, la durée d'hospitalisation étant par contre inférieure. Les taux de complications per opératoires et la morbidité post opératoire de la chirurgie endoscopique sont voisins de ceux publiés en chirurgie conventionnelle. Il ne faut pas oublier qu'un taux de complication d'environ 15 % est retrouvé pour celle-ci. Dans toutes les séries, les complications, immédiates notamment, surviennent en début d'expérience et ont tendance à diminuer nettement avec le temps. Les complications hémorragiques semblent être moins fréquentes avec les techniques endoscopiques. L'hypercapnie est diminuée par le recours à quelques artifices techniques, et la collaboration et l'expérience des partenaires anesthésistes.

 

Les avantages et inconvénients des différentes techniques doivent être mieux analysés. Le choix de la voie d'abord des trocards, leur nombre et leur diamètre doivent être soigneusement réfléchis pour éviter une rançon cicatricielle pariétale, qui dans cette chirurgie, pourrait parfois être peu acceptable.

 

A ce titre une variante proposant l'insufflation première du Retzius par voie sus-pubienne et la mise en place du trocard d'observation par abord sous ombilical immédiat et cheminement rétro péritonéal est sûrement intéressante.

 

L'abord mixte laparoscopico-vaginal est sûrement à retenir :

- car il simplifie les gestes d'aiguillage endoscopique ;

- car il permet de traiter une cystocèle associée, qui doit toutefois rester modeste.

 

L'analyse des échecs montre que la bonne indication de la chirurgie endoscopique des incontinences urinaires d'effort est représentée par les patientes ne présentant pas de trouble majeur. L'aide à la décision de scores tel celui de Kusenju est certainement importante.

 

Ainsi donc cette expérience mérite d'être poursuivie dans le respect strict d'indications raisonnables. Si toutefois l'épreuve du temps confirme la stabilité des résultats. Ceux-ci dans le court et moyen termes à sont à l'heure actuelle comparables à ceux de la chirurgie traditionnelle.

.-L. BENIFLA, P. MADELENAT, T. GROSMANN et E. DARAI
Service de Gynécologie Obsétrique - Hôpital Bichat Claude Bernard, 170, boulevard Ney, 75018 Paris.