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Titre: La contraception en perimenopause
Année: 1996
Auteurs: - Jamin Ch.
Spécialité: Gynécologie
Theme: Contraception

La contraception en périménopause

C. JAMIN

La contraception chez la femme au-delà de 40 ans est souvent délicate . En effet, même si la fertilité diminue avec l'âge, le risque de grossesse persiste et celle-ci est souvent mal acceptée et risquée au plan médical.

L'utilisation de la contraception mécanique (DIU) représente souvent un moyen sûr et efficace. Cependant, sa tolérance est souvent médiocre du fait des pathologies utérines qui se développent à cet âge, mais surtout elle ne résout pas les troubles engendrés par les anomalies hormonales dont la fréquence augmente avec l'âge.

La contraception orale (C.O.) classique a l'avantage d'installer la femme dans un climat hormonal stable et équilibré jusqu'à la ménopause. Cependant, les risques cardio-vasculaires mis en lumière par les études épidémiologiques publiées à la fin des années 70 ont donné un brutal coup de frein à leur utilisation chez les femmes de plus de 40 ans. Ultérieurement, des études rassurantes sont venues ne montrant plus qu'un risque accru chez les fumeuses. Cette nette amélioration a été attribuée à la modification de la composition des pilules avec en particulier diminution des doses d'éthinyl estradiol entrant dans leur composition, sélection de progestatifs moins androgéniques mais aussi à l'éviction des femmes à risque (diabétiques, hypertendues, hyperlipémiques fumeuses...).

Les prescriptions ont aussi fortement diminué chez les femmes au-delà de 40 ans [14] et il est certain que le nombre d'accidents chez ces femmes n'a pu que suivre cette forte diminution des prescriptions.

L'étude des facteurs de risque a confirmé qu'en partie l'intérêt de la modification de la composition des estroprogestatifs. C'est au niveau lipidique que les modifications ont été les plus sensibles. Malheureusement, cela n'est probablement pas à ce niveau que le risque existait. Il est apparu une amélioration de la tolérance glucidique, mais aussi et surtout quelques améliorations des facteurs de coagulation, ayant entraîné une diminution du risque thromboembolique veineux sans pour autant le faire disparaître [9]. Le risque de thrombose artériel est en partie lié à l'activité androgénique du progestatif, mais le recul et les marqueurs nous manquent pour apprécier l'éventuel progrès apporté par la modification de structure des progestatifs utilisés.

La contraception progestative pure

 

Nous ne ferons que citer ici la contraception par progestatifs injectables et microprogestatifs. En effet le contrôle du cycle et de la fonction ovarienne y est insuffisant en particulier chez des femmes en périménopause.

 

L'utilisation de progestatifs macrodosés ne fait l'objet en France d'aucune autorisation de mise sur le marché mais est pourtant largement utilisée. En général, utilisée 21 jours sur 28, elle fait appel à deux types de molécules : les dérivés de la testostérone et ceux de la progestérone.(17 0H progestérone Luteran et 19 nor progestérone Lutenyl, Surgestone 0,5).

Quelles sont les justifications théoriques de l'utilisation de la contraception macroprogestative ?

On peut schématiquement séparer trois situations :

- Recherche d'un effet anti-estrogène ;

- Utilisation d'une contraception n'entraînant aucune anomalie métabolique ;

- Prévention des bouffées de chaleur.

Recherche d'un effet anti-estrogène

 

Cet effet peut bien entendu être recherché après 40 ans où les situations d'hyperestrogénie relative ou absolue sont les plus fréquentes.

L'effet anti-estrogène est recherché (Tableau I) :- dans le syndrome prémenstruel avec cette sensation de gonflement, la mastodynie, la nervosité, la prise de poids ;è dans les troubles des règles. Les ménorragies liées à l'hyperplasie de l'endomètre sont particulièrement sensibles à ce type de traitement; dans les mastopathies bénignes qu'il s'agisse de fibroadénomes ou de maladies fibrokystiques du sein. L'efficacité de cette activité anti-estrogène est cliniquement nette pourvu que le traitement soit débuté tôt dans le cycle avant l'ovulation, ce qui est le cas en contraception ;

- dans la prévention des pathologies cellulaires si fréquentes après 40 ans : hyperplasie de l'endomètre, fibroadénomes du sein, cancer de l'endomètre. Certains pensent même que l'on pourrait obtenir une prévention dans l'apparition des fibromes utérins, des polypes endométriaux et du cancer du sein. Ces derniers avantages sont très controversés.

Origine de l'activité anti-estrogène (Tableau II)

La progestérone augmente la transformation de l'estradiol en estrone en stimulant 17 B 0H stéroïde deshydrogénase ; elle augmente la sulfatation des estrogènes, elle diminue les récepteurs cellulaires de l'estradiol. Ces propriétés ont été démontrées tant au niveau de l'endomètre que du sein [7, 8]. Certains progestatifs ont une forte activité antigonadotrope, c'est par ce biais que l'on observe au niveau mammaire l'effet recherché. Il semble que pour que cette propriété se manifeste, le traitement doit être débuté tôt dans le cycle en tout cas avant l'ovulation.

Enfin, les dérivés de la 19 nor testostérone voient probablement leur effet anti-estrogène augmenté par leurs effets androgéniques. Cependant, pour certains d'entre eux, on a suspecté une aromatisation in situ faisant perdre une partie de leurs propriétés anti-estrogènes.

Aspects métaboliques de la contraception progestative pure

Il persiste avec les pilules estroprogestatives classiques des anomalies des paramètres métaboliques, tensionnels et de la coagulation. Ces produits restent donc contre-indiqués chez les fumeurs à risque et probablement à partir d'un certain âge, celui-ci variant en fonction du terrain personnel et familial.

Les dérivés de la testostérone (19 nor testostérone) furent les premiers utilisés et gardent aujourd'hui des partisans du fait du bon contrôle du cycle, de l'activité antigonadotrope mais aussi de la puissance, de l'effet anti-estrogène [11]. Cependant, les inconvénients métaboliques et les signes d'hyperandrogénie non exceptionnels font qu'elle ne peut donc être largement utilisée sauf indication spécifique chez les femmes au-delà de 40 ans.

Les dérivés de la progestérone (17 0H progestérone et 19 nor progestérone) ont été étudiés soit chez des sujets sains, soit chez des sujets à risque.

Trois produits ont été étudiés avec des schémas de type contraceptif : l'acétate de chlormadinone (Luteran) [12, 13] à la dose de 10 mg par jour en 2 prises, la promegestone (Surgestone 0,5) [2] et l'acétate de nomegestrol (Lutenyl) [3] à la posologie de un comprimé par jour pour ces derniers produits.

La tolérance clinique (poids, TA) et biologique (métabolismes glucidique, lipidique et coagulation) est bonne (Tableau III-IV).

Mécanismes de l'effet contraceptif (Tableau V)

Ces trois produits ont prouvé une activité antigonadotrope avec inhibition du pic de LH absence d'ovulation mesurée par la disparition de l'élévation de la progestérone et hypoestrogénie [3-5-12-13-15].

En plus de cet effet sur l'ovulation, les progestatifs ralentissent le péristaltisme des trompes, et modifient l'endomètre avec transformation sécrétoire ou atrophie. Le Lutenyl a de plus mis en évidence un effet sur la glaire [6] et modifie la folliculogenèse [4].

Les inconvénients de la méthode

Le premier inconvénient est que ces produits ne disposent pas de l'autorisation de mise sur le marché dans cette indication et que nous ne disposons pas d'indices de Pearl.

Sur le plan clinique, l'incidence des troubles des règles est mal connue surtout à long terme, il est signalé principalement des métrorragies et des aménorrhées. On peut situer ces troubles à plus de 30 % des femmes [1, 5, 11, 12].Ces troubles du cycle sont liés à l'avantage le plus souvent recherché, c'est-à-dire l'hypoestrogénie engendrée par l'effet antigonadotrope et l'effet atrophiant des progestatifs. Il ne semble pas exister de différence entre les taux d'estradiolémie moyens mesurés avec chaque produit [1, 5, 12, 13, 15]. En revanche, pour un même produit lorsque les valeurs individuelles sont publiées [5], il existe une dispersion des valeurs dont on ne peut préciser s'il s'agit de différences de susceptibilité individuelle ou de biodisponibilité des progestatifs (Tableau VI).

Une nouvelle contraception

Dans un travail préliminaire, nous avons étudié l'efficacité contraceptive chez 18 femmes ayant présenté des troubles du cycle sous contraception macroprogestative de 19 à 40 ans de l'association 5 mg/j d'acétate de nomegestrol Lutenyl et de l'estradiol donné par voie cutanée (Estraderm TTS 50 changé 2 fois par semaine), les deux produits étant utilisés 21 j/28. La première prise se faisant le premier jour du cycle.

La majorité de ces femmes ayant une contre-indication à l'utilisation des contraceptifs classiques pour hypercholestérolémie sous pilule 14 cas/18, mastopathie bénigne 4 cas/18, diabète 1/18.

La durée d'utilisation est actuellement de trois mois pour les plus récentes à trois ans pour les plus anciennes. L'efficacité a été complète. Aucune grossesse n'étant survenue. Les menstruations sont régulières sans exception et la tolérance clinique est parfaite. La tension artérielle et le poids sont stables et au niveau lipidique, aucune femme n'a vu réapparaître l'hypercholestérolémie qui avait imposé l'arrêt de sa pilule classique. Les taux des différentes fractions lipidique et des apoprotéines n'ont pas été modifiés par rapport au niveau de départ.

 

Ces travaux bien que très préliminaires sont encourageants, améliorant la tolérance clinique et biologique de la contraception progestative pure qui pourrait représenter une alternative de choix pour les femmes chez qui la contraception classique est contre-indiquée, pour des raisons mammaires ou métaboliques ou plus simplement chez la femme au-delà de 40 ans.

Depuis la publication [10] du travail princeps notre expérience s'est considérablement enrichie, avec en particulier un suivi de cinq ans et un nombre de sujets supérieur à 50. L'efficacité contraceptive ainsi que la tolérance tant clinique que biologique se sont confirmées. Les indications de prescription se sont élargies aux femmes en périménopause. Le choix de l'estrogène associé s'est légèrement modifié.

Si nous préférons toujours la voie cutanée dès qu'existent des facteurs de risque cardio-vasculaires tant personnels que familiaux la voie orale est utilisée dans les autres cas à la dose de 2 mg d'estradiol micronisée.

La durée d'administration de l'estradiol est modulée en fonction de la situation clinique. Lorsqu'existent des signes d'hyperestrogénie (mastodynie, mastopathie, ménorragie) l'estrogène n'est débuté que le 8e mois 10e jour du traitement progestatif. Ainsi, après 40 ans la contraception progestative macrodosée est une méthode de choix dès qu'existent des signes d'hyperestrogénie absolue ou relative, ou des facteurs de risque métabolique. En cas de troubles du cycle, l'adjonction d'estradiol naturel par voie cutanée améliore la tolérance de la méthode et met à l'abri des conséquences à long terme qui pourraient engendrer une diminution trop nette de l'estradiolémie.

 

Bibliographie

[1] BASDEVANT A., PELISSIER C., CONARD J., DEGRELLE M., GUYENE TT., THOMAS J.L. : Effects of nomegestrol acetate (5 mg/d) on hormonal metabolic and hemostatic parameters in premenopausal women. Contraception, 1991, 44, 599-605.

[2] BASDEVANT A., CONARD J., DENIS C., GUYENERM TT, EGLOFF M., DENYS I. : Effets métaboliques et hormonaux de l'administration de 1 mg/24 h de promegestone. Gynécologie, 1989, 40, sup. 2, 17-21.

[3] BAZIN B., THEVENOT R., BURSAUX C., PARIS J. : Effect of nomegestrol acetate a new 19 nor progesterone derivative on pituitary ovarian function in women. Brit. J. Obstet. Gynecol. 1987, 94, 1199-203.

[4] BAZIN B., THOMAS J.L., du BOUCHER PINAT E., THEBAULT J.J. : Etude de la physiologie et de la morphologie folliculaire après administration d'acétate de nomegestrol : relation effet-dose. 9e congrès français endocrinol., Strasbourg 12-14 oct. 1989.

[5] BLACKER C., SENET J.M., DUBOURG D., DENIS-RIGAUD C., FOURTILLAN J.B. : Action de la promegestone à la dose de 0,500 mg/j vingt jours par mois sur le pic ovulatoire de LH. Hormones, Reproduc., Metab., 1986, 3, 277-82.

[6] CHRETIEN F.C., DUBOIS R. : Effect of nomegestrol acetate on spinability ferning and mesh dimension of midcycle cervical mucus. Contraception, 1991, 43, 55-65.

 

[7] DUC I., BOTELLA J., GILLET J.Y., DELAUSORNE R., PARIS J. : Liaison de l'acétate de nomegestrol aux récepteurs de l'endomètre et du tissu mammaire humain. Contracept., Fertil., Steril., 1991, 19, 995-7.

[8] GOMPEL A., MALET C., SPRITZER P., LALARDRIE J.P., KUTTEN F., MAUVAIS JARVIS P. : Progestin effet on cell proliferation and 17 B hydroxysteroid deshydrogenase activity in normal human breast cells in culture. J. Clin. Endocrinol., Metabol., 1986, 63, 1174-80.

[9] GUSTAM B.B., PIPER J.M., TOMIKA D.K., FERGERSON W.J., STADEL B.V., LUNDIN F.E. : Oral contraceptive estrogen dose and the risk of deep venous thromboembolic disease. Am. J. Epidemiol., 1991, 133, 32-13.

[10] JAMIN C. : La contraception féminine par progestatif normodosé après 40 ans. Rev. fr. Gynécol. Obstet., 1992, 87, 70-6.

[11] KUTTEN F., MONFAREGE A., MAUVAIS JARVIS P. : Bases hormonales de la contraception progestative discontinue. Nouv. Pres. Med., 1978, 7, 3109-13.

[12] PELISSIER C., BASDEVANT A., CONARD J., EGLOFF M., HUSSON T., GUYENNE T.T. : Contraception pour l'acétate de chlormadinone chez des femmes à risque vasculaire. Contracep. Fertil. Steril. 1987, 125, 45-54.

[13] PELISSIER C., CABY J. : Contraception des femmes à hauts risques vasculaires et métaboliques. Gynécologie, 1983, 34, 131-8.

[14] THOROGOOD M., WESSEY M. : The epidemiology of cardiovascular disease in women taking oral contraceptives. Symp. XIII World Congress on Fertility and Sterility, Marrakech oct. 1989.

[15] VAN DER LINDEN C., BOUCHARD P., LE STRAT V., SCHAISON G. : Effet antigonadotrope d'un progestatif dérivé de la progestérone. Cinquième congrès français endocrinol. abst. 104. Bordeaux oct. 1985.