Les XXIIe JTA
> Présentation
> Programme
> Comité scientifique
> Intervenants
> Contacter les JTA

En pratique
> S'inscrire
> Renseignements
> Hébergement
> Programme social
> Post-congrès

Les archives
> Andrologie
> Biologie
> Gynécologie
> Infertilité
> Médecine foetale
> Néonatologie
> Nutrition
> Obstétrique
> Pédiatrie
> Périnatalité
> Périnéologie
> Phlébologie
> Psychosomatique

Rechercher

Titre: La coelioscopie dans les cancers du col et du corps utérin
Année: 1996
Auteurs: - Villet R.
Spécialité: Gynécologie
Theme: Cancer du col

la cœlioscopie dans les cancers du col et du corps utérin

R. VILLET

Dans les cancers du col et du corps utérin, comme ailleurs, la coeliochirurgie peut être strictement mimétique, reproduisant les techniques effectuées par laparotomie avec, si possible, une morbidité moindre, ou innovante, c'est-à-dire permettant de proposer des stratégies thérapeutiques différentes visant à améliorer la survie dans les formes de mauvais pronostic.

CANCER DU COL UTÈRIN

Les recherches sur l'intérêt de l'endoscopie dans le cancer du col utérin visent surtout à proposer de nouvelles stratégies pour les formes de mauvais pronostic.

Facteurs pronostiques des cancers du col

Le pronostic des cancers du col dépend du volume tumoral et de l'envahissement ganglionnaire. Le volume tumoral est apprécié par l'examen clinique et l'IRM qui donne le plus grand diamètre de la tumeur et montre les limites de l'envahissement tumoral. Il est habituel de choisir 4 cm de diamètre comme seuil entre petites et grosses tumeurs. Il faut toutefois se méfier des cancers donnant un aspect en "barillet" avec hypertrophie supravaginale du col réalisant un important volume centro-pelvien. De plus il faut tenir compte de la taille de la tumeur par rapport à celle du col car ce rapport conditionne les risques d'envahissement paramétrial, à la base de la classification FIGO. L'envahissement ganglionnaire se fait vers les ganglions pelviens et lombo-aortiques. Il est corrélé au volume tumoral et donc au stade FIGO comme ceci ressort au tableau I [5].Dans cette série de l'institut Gustave ROUSSY où toutes les patientes ont eu un curage lombo-aortique, le taux d'envahissement de ces derniers a été de 9 % (6 % dans les stades Ib et 15 % dans les stades IIb), avec là encore une corrélation entre la taille de la tumeur cervicale (5 % pour les tumeurs (4 cm et 13 % pour les tumeurs > 4 cm). Il faut enfin noter que 1,4 % des patientes avaient un envahissement lombo-aortique isolé. La connaissance de ces facteurs pronostiques conditionne le choix thérapeutique mais en dernier recours, car ils ne sont actuellement véritablement connus que par l'étude histologique.

Les interventions coelioscopiques pour cancer du col

La coeliochirurgie ne peut pas apprécier le volume tumoral mais peut intervenir dans le traitement des cancers du col sur trois plans.

La transposition ovarienne

La transposition ovarienne per-cœlioscopique a pour but d'éviter la castration radiothérapique dans les protocoles où le traitement débute par une curiethérapie ou une radiothérapie externe. Elle peut concerner un seul ou les deux ovaires. Si on choisit de ne transposer qu'un seul ovaire, il vaut mieux transposer l'ovaire droit car la technique est souvent plus simple et le risque de dystrophie moindre en raison de la présence, à gauche, du colon sigmoïde. Les ovaires doivent etre transposés dans une zone recevant moins de 2 grays et donc suffisamment haut dans la gouttière pariéto-colique. La technique coelioscopique consiste à sectionner le ligament utéro-ovarien et à pédiculiser l'ovaire sur le ligament lombo-ovarien. L'ovaire est ensuite fixé dans la région sous-costale à laide d'un fil résorbable.

Les lymphadénectomies

La lymphadénectomie iliaque externe et la lymphadénectomie lombo-aortique peuvent être réalisées sous cœlioscopie.

La lymphadénectomie iliaque externe

Elle peut être également réalisée par rétropéritonéoscopie mais nous ne nous intéresserons qu'à la voie cœlioscopique. Sa réalisation n'est pas difficile pour les équipes entraînées à la cœliochirurgie. Elle demande environ une heure à une heure trente pour un curage bilatéral. Dans la série de Querleu [8] sur 53 cas de curage cœlioscopique suivi de laparotomie, il n'y a pas eu d'envahissement ganglionnaire méconnu par le cœlioscopiste. Toutefois cette sensibilité n'est pas retrouvée par tous les auteurs, le nombre de ganglions prélevés par lymphadénectomie per-cœlioscopique étant en général 10 à 20 % inférieur que par laparotomie [2]. Cette différence est essentiellement liée à l'obésité des patientes. Quoi qu'il en soit cette méthode, en dehors de la laparotomie, est la plus fiable pour préciser l'état ganglionnaire pelvien et domine très largement les techniques d'imagerie.

La lymphadénectomie lombo-aortique

La technique du curage lombo-aortique a été mise au point chez la truie par Herd et coll [4] et reprise en France essentiellement par Denis Querleu [9]. Elle consiste à ouvrir le péritoine pariétal postérieur et à effectuer une dissection sous-péritonéale en avant des gros vaisseaux. Toutes les chaînes latéro, pré et inter aortico-caves peuvent être retirées jusqu'aux veines rénales et à l'origine de la mésentérique inférieure. Les prélèvements sont toutefois plus difficiles à gauche.

Il semble que la morbidité soit moindre qu'après curage lombo-aortique par laparotomie mais aucune étude prospective comparative n'a pu être réalisée.

La colpohystérectomie

Les hystérectomies élargies ont pu être réalisées par cœlioscopie [6] mais il s'agit en fait d'hystérectomie de type II selon Piver. Or dans les cancers du col utérin à partir du stade Ib, en dehors des tumeurs de petit volume, la colpohystérectomie de type III est la règle [10]. Il s'agit dans ce cas d'effectuer l'ablation du paramètre sus-urétral. Pour cela Denis Querleu [7] propose d'effectuer par voie cœlioscopique la dissection de l'uretère préligamentaire et la section des paramètres au niveau de leur insertion sur la paroi latérale du pelvis suivies d'une dissection de l'uretère distal et d'une section du paramètre sous-urétéral par voie vaginale selon la technique de Shauta. Cette approche éviterait une incision périnéale de Schuchardt indispensable dans la technique par voie vaginale pure.

Les indications théoriques

Aucun travail ne permet actuellement de donner exactement la place de la cœliochirurgie dans le cancer du col. L'argument de l'absence de cicatrice abdominale ne peut théoriquement être retenu que si on exclut les protocoles ne comportant pas une laparotomie seconde systématique. Les partisans de la cœliochirurgie l'intègrent essentiellement dans les protocoles visant à séparer les patientes N- et N+ pelvien avec deux buts essentiels par rapport aux protocoles classiques

:a) Eviter le délai d'irradiation de huit semaines par rapport au diagnostic initial chez les patientes N+

.b) diminuer les séquelles de l'irradiation postopératoire après laparotomie et curage.

Les indications varient suivant le stade FIGO.

Dans les stades précoces

Actuellement l'utilisation la plus logique de la cœliochirurgie chez les patientes aux stades I et II proximaux, en l'absence de masse ganglionnaire à la tomodensitométrie, semble être la suivante : réalisation d'un examen sous anesthésie générale (avec éventuellement une cystoscopie), et d'une cœlioscopie avec curage iliaque externe bilatéral et un examen extemporané des ganglions.

Si ceux-ci sont négatifs, suivant les écoles deux attitudes sont possibles :

a) on considère que le cancer du col peut être traité par chirurgie exclusive notamment lorsque la tumeur est inférieure à 4 cm, une intervention de Werteim-Shauta est alors réalisée soit immédiatement, ce qui semble le plus logique, soit dans une seconde séance opératoire si l'on préfère attendre le résultat définitif de l'examen des ganglions. Si l'intervention a lieu dans la mÍme séance opératoire, on peut profiter de la cœlioscopie pour préparer la chirurgie utérine, en sectionnant les paramètres, intervention appelée CŒLIO-SHAUTA par D. Dargent, ou en faisant le décroisement de l'uretère et de l'artère utérine comme nous l'avons décrit précédemment.

b) on reste fidèle à l'association radio-chirurgicale. Dans ce cas on peut effectuer une transposition ovarienne et faire l'application du moule de curiethérapie qui ne sera chargé qu'après le résultat définitif des ganglions pelviens, à moins que l'on ne choisisse de faire une irradiation externe en cas de gros col. Six semaines plus tard une colpohystérectomie peut être effectuée par simple laparotomie ou à nouveau par cœliochirurgie ou encore coelio-assistée. Si les ganglions sont positifs, on réalise un prélèvement lombo-aortique pour compléter le prélèvement pelvien et définir au mieux les champs d'irradiation, ces patientes étant alors traitées par radiothérapie exclusive.

Dans les formes avancées

Dans les formes de cancers du col dites " avancées ", deux éventualités sont possibles :- Le stade est dit avancé parce qu'il existe une masse ganglionnaire sur la tomodensitométrie ou l'IRM. Si celle-ci a pu être ponctionnée et qu'elle est positive, la cœliochirurgie n'a pas de place. Ailleurs, la cœliochirurgie peut permettre le prélèvement ou la biopsie de cette masse ainsi qu'un inventaire péritonéal et éventuellement ganglionnaire. Si la positivité de la masse se confirme alors, la patiente doit être placée dans un essai de radio-chimiothérapie. - Ailleurs il peut s'agir de stade II distaux ou de stade III. Le problème est ici d'éliminer une diffusion extra-pelvienne pour pouvoir proposer une exentération. La cœliochirurgie permet d'éliminer une carcinose péritonéale et d'effectuer des prélèvements lombo-aortiques dont la positivité contre-indique en principe l'exérèse pelvienne.

Critiques des indications

La transposition ovarienne

La transposition ovarienne ne se justifie qu'avant 40 ans. En effet la vascularisation de l'ovaire transposé ne dépend que du pédicule lombo-ovarien, or sa valeur fonctionnelle diminue avec l'âge et après 45 ans la vascularisation ovarienne est tributaire de l'artère utérine qui est supprimée lors de la transposition. Il existe un risque de métastase ovarienne qui dépend du type histologique et du degré d'extension tumorale. Les métastases ovariennes sont plus fréquentes dans les adénocarcinomes du col, rendant la conservation discutable dans ces cas. Par contre la conservation ovarienne ne se justifie pas nécessairement en cas de carcinome épidermoïde puisque cette forme n'est pas hormono-dépendante et qu'un traitement hormonal substitutif peut étre prescrit au décours du traitement. Enfin il ne faut pas oublier que la transposition ovarienne multiplie par trois le risque de dystrophie [1].

En cas de N

-Si l'on opte pour la colpohystérectomie abdominale après curiethérapie ou radiothérapie, on ne tire pour ces patientes aucun bénéfice de la cœlioscopie préalable. Or la réalisation purement coeliochirurgicale de la colpohystérectomie est très difficile et dangereuse.

Seule la chirurgie vaginale directe voire cœlio assistée est logique, mais l'intervention de " SHAUTA " :

a) nécessite un apprentissage dont la diffusion est parcimonieuse ;

b) a une morbidité identique à la morbidité actuelle de la colpohystéro-lymphadénectomie par voie abdominale ;

c) impose le plus souvent une grande épisiotomie médio-latérale avec section du muscle pubo-coccygien dont le retentissement à long terme sur la statique pelvienne n'est pas connue.

En cas de N +

Traiter toutes les patientes par radiothérapie exclusive, c'est admettre que l'on ne tient pas compte dans le choix thérapeutique :

a) du nombre de ganglions envahis. Or la survie à cinq ans est étroitement corrélée au nombre de ganglions iliaques envahis puisqu'après traitement classique 63 % des patientes avec un ganglion envahi sont vivantes à cinq ans, contre 35 % lorsque plus de deux ganglions sont envahis [3] ;

b) du volume tumoral. Les chances de stérilisation radiothérapique sont inversement proportionnelles au volume tumoral. Or les patientes N + ont volontiers un volume tumoral important. Il semble donc logique d'enlever chirurgicalement le plus gros volume tumoral et de laisser les radiothérapies stériliser les microfoyers résiduels.

LA CŒLIOCHIRURGIE DANS LES CANCERS DE L'ENDOMèTRE

La place de l'endoscopie dans les cancers de l'endomètre est plus facile à appréhender que dans les cancers du col car le traitement standard est mieux codifié et surtout la chirurgie est indiquée quel que soit l'état des ganglions. La transposition ovarienne ne se pose guère étant donné l'âge de survenue et le risque de métastases ovariennes des cancers de l'endomètre. Seuls les cancers stade I peuvent justifier une approche cœlioscopique puisque ceux-ci sont strictement limités au corps utérin et donc l'exérèse paramétriale n'est pas justifiée. Le bilan préopératoire devra donc comprendre, outre l'examen clinique, une hystéroscopie, une échographie abdomino-pelvienne et endovaginale et une IRM pour affirmer que la tumeur est bien limitée au corps utérin, que l'envahissement du myomètre est peu important et qu'il n'y a pas d'envahissement ganglionnaire massif.

L'intervention débute par une cœlioscopie exploratrice avec cytologie péritonéale et une lymphadénectomie iliaque externe bilatérale. Celle-ci est suivie d'une hystérectomie qui peut être cœlioscopique, vaginale ou mixte. L'inconvénient majeur est le risque d'effraction utérine et de brèche tumorale susceptibles d'entraîner des greffes métastatiques ou des passages vasculaires. Il est clairement démontré que l'effraction utérine modifie le pronostic des cancers de l'endomètre. Ainsi nous voyons seulement deux grandes indications à la cœliochirurgie dans les cancers de l'endomètre :

a) l'adénocarcinome de l'endomètre de découverte fortuite sur une pièce d'hystérectomie. Le bilan cœlioscopique de la cavité péritonéale avec lymphadénectomie et ovariectomie nous semble préférable à la radiothérapie iliaque systématique sans évaluation ganglionnaire ;

b) l'association adénocarcinome de l'endomètre et prolapsus utérin. Dans ce cas en effet l'hystérectomie vaginale est facile, avec une mobilisation utérine minime et donc un risque faible de contamination par rupture utérine. Il peut être logique de débuter par l'hystérectomie vaginale, la cœlioscopie permettant secondairement une cytologie péritonéale.

Conclusion

La cœliochirurgie n'a pas encore trouvé sa place réelle dans les cancers du col et du corps utérin. Elle doit encore être évaluée et comparée au traitement par laparotomie. Sa place passe également par des études fondamentales sur les greffes tumorales évaluant en particulier les effets métaboliques propres de la cœlioscopie en cancérologie et notamment l'augmentation des pressions intra-adbominales, la baisse du Ph intra-péritonéal et la diffusion de gaz.

Quoi qu'il en soit, plusieurs perspectives peuvent se dessiner :

- pour les cancers du col, dans les stades précoces, la cœliochirurgie devrait permettre de redonner un gain d'intérêt aux techniques par voie vaginale, notamment dans les formes où tout le monde semble admettre que la chirurgie seule est suffisante (cancer Ia2). Sa place se situerait également lorsque, dans les formes avancées, on décide d'une exérèse élargie pour éliminer, avant toute ouverture abdominale, une extension extra-pelvienne ;

- dans les cancers de l'endomètre sa place se justifie en particulier lorsqu'un cancer de l'endomètre a été découvert sur une pièce d'hystérectomie afin d'évaluer l'état ganglionnaire et de choisir au mieux la radiothérapie complémentaire. Elle peut également trouver une place lorsqu'il existe un prolapsus associé au cancer de l'endomètre permettant de faire une chirurgie vaginale exclusive en évitant tout risque d'effraction de l'utérus.

Bibliographie

[1] CHAMBERS S.K, CHAMBERS J.T, KIER Ph.D, PESCHET R.E. :Sequelae of lateral ovarian transposition in irradiated cervical cancer patients. Int. J. Radiation. Oncology. Biol. Phys, 1991 : 320, 1305-1308.

[2] CHILDERS J.M, HATCH K, SURWET E.A. : ì The role of laparoscopic lymphadenectomy in the management of cervical carcinoma ". Gynecol. Oncol, 1992 : 47, 38-43.

[3] CLOUGH K.B, RENOLLEAU C, DURAND J.C. : " La lymphadénectomie cœlioscopique doit-elle faire modifier les protocoles thérapeutiques du cancer du col utérin ? î. J. Gynecol. Obstet. Biol. Reprod, 1994 : 23, 671-675.

[4] HERD J, FOWLER J.M, SHENSON D. : " Laparoscopy paraaortic lymphnode sampling development of a technique ". Gynecol. Oncol, 1992 : 44, 271-276.

[5] MICHEL G, CASTAIGNE D, GERBAULET A, LHOMME C, DUVILLARD P. : ì Existe-t-il des indications de la cúliochirurgie dans les ÈpithÈliomas invasifs du col utÈrin ? î XIXe journÈes de chirurgie carcinologique de líI.G.R, 12.12.1994.

[6] NEZHAT C.R, BURRELL M.O, NEZHAT F.R, BENIGNA B.B, WELANDER C.E. :" Laparoscopic radical hysterectomy with paraaortic and pelvic node dissection. Am. J. Obstet. Gynecol, 1992 : 166, 864-865.

[7] QUERLEU D. : ì HystÈrectomies de Shauta-Amreich et Shauta-Stúckel assistÈes par cúlioscopie î. J. Gynecol O B R., 1991 : 20, 747-748.

[8] QUERLEU D. : " Laparoscopic paraaortic node sampling in gynecologic oncology : a preliminary experience "; Gynecol. Oncol., 1993 : 49, 24-29.

[9] QUERLEU D, LEBLANC E, CASTELAIN B. : " Laparoscopic pelvic lymphadenectomy in the staging of early carcinoma of the cervix ". Am. J. Obstet. Gynecol, 1991 : 164, 579-581.

[10] VILLET R, MOSER C. : " Cancers invasifs du col utérin : Quelle doit être l'extension de la chirurgie de la tumeur aux stades I et II ? ". In Cancers gynécologiques - Escalade ou désescalade thérapeutique ? QUERLEU D. (ed) Arnette-Blackwell, 1995.


R. VILLET Hôpital des Diaconesses - Paris.
 : JOURNÉES DE TECHNIQUES AVANCÉES EN GYNÉCOLOGIE OBSTÉTRIQUE ET PÉRINATALOGIE PMA, Fort de France 11 - 18 janvier 1996

de France 11 - 18 janvier 1996