Endométriose et contraception
D. SERFATY*
INTRODUCTION
Cette introduction est largement inspirée des publications de G. Brun [1]
et A. Audebert [2].
Affection rare (prévalence = 1 à 9 % selon les publications)
l'endométriose se définit par la localisation anormale d'un endomètre normal. Il est
habituel de distinguer d'une part l'endométiose interne ou adénomyose (invasion bénigne
et croissance de la muqueuse utérine dans le myomètre) et d'autre part l'endométriose
externe (toute localisation ectopique d'endomètre (glandes épithéliales plus chorion
cytogène) à l'exception du myomètre) [2].
L'endométriose est plus souvent corrélée à l'infertilité qu'à la
contraception. Une femme endométriosique sur deux seulement aura besoin d'une
contraception selon G. Brun qui estime que seulement 0,5 à 2 % de la population féminine
seront concernés par le problème contraception et endométriose.
Les implants endométriosiques pelviens peuvent entraîner la destruction
des ovaires par des kystes et des adhérences peri-tubo-ovariennes pouvant sténoser les
trompes ou les rendre captives. Il y a plusieurs classifications des endométrioses selon
l'importance des lésions. La plus utilisée est celle de l'American Fertility Society
(AFS).
Citons Brun [2] " Dans le stade 4, les patientes dont le score est
supérieur à 50, on note que les traitements n'ont permis d'obtenir ni grossesse
extra-utérine, ni grossesse intra-utérine ; a priori aucune grossesse n'est susceptible
de survenir spontanément ". Si l'endométriose est une affection
hormono-dépendante, les kystes et les adhérences endométriosiques ne réagissent à
aucun traitement hormonal. L'endomètre ectopique est sensible aux estrogènes et à la
progestérone. Il peut donc proliférer, saigner ou s'atrophier selon le climat hormonal
auquel il est soumis. Au cours de la grossesse il se produit une décidualisation et une
nécrose secondaire des lésions. L'endométriose peut s'accompagner de stérilité ou se
manifester par des douleurs (dysménorrhée, douleurs pelviennes, dyspareunie) ou des
métrorragies ou rester parfaitement silencieuse.
LES DIVERSES METHODES DE CONTRACEPTION MODIFIENT-ELLES LE RISQUE
D'ENDOMETRIOSE PELVIENNE ?
De longs épisodes de règles longues, abondantes et trop fréquentes sont
généralement considérés comme pouvant augmenter le risque d'endométriose (Vercellini
[3] citant Cramer).
Les estroprogestatifs, entraînent généralement une diminution de la
durée et de l'abondance du flux menstruel tandis que les dispositifs intra-utérins, au
contraire, ont tendance à augmenter l'abondance et la durée des règles ; théoriquement
ces 2 méthodes devraient influencer le risque de survenue d'une endométriose chez les
utilisatrices. Vercellini et al. (1993) [3] ont analysé plusieurs études
épidémiologiques récentes consacrées aux relations entre les estroprogestatifs, les
dispositifs intra-utérins et le risque d'endométriose.
Concernant l'association pilule et endométriose, il ne semble pas exister
de consensus quant à l'effet des EP sur le risque d'endométriose, la majorité des
études étant cependant en faveur d'une diminution de ce risque ce qui viendrait en appui
de la théorie d'implantation selon laquelle des règles prolongées peuvent favoriser le
passage tubaire des cellules endométriales et augmenter le risque de survenue d'une
endométriose. Concernant l'association DIU et endométriose, la majorité des études
colligées par Vercellini [3] sont en faveur d'une augmentation du risque d'endométriose
ou d'une absence d'influence sur le développement d'une endométriose. Vessey et al.
(1993) [4] ont également analysé l'épidémiologie de l'endométriose chez 17 032 femmes
consultant pour planification familiale en Angleterre et en Ecosse (Oxford Family Planning
Association Study). Voici les résultats de cette étude de cohorte non randomisée :
l'endométriose est significativement corrélée à l'âge (fréquence maximale à 40 - 44
ans) et ne l'est ni à la parité, ni à la durée de prise de contraceptifs oraux (CO).
Cependant, en comparaison avec des femmes n'ayant jamais pris la pilule, le risque
d'endométriose est diminué chez les utilisatrices de CO (risque relatif = 0,4 (95 %
intervalle de confiance 0,2 à 0,7) et augmenté chez les femmes l'ayant auparavant
utilisée, et arrêtée depuis 25 à 48 mois, risque relatif =1,8 ; (1,0 - 3,1).
Une tendance analogue fut mise en évidence dans cette étude de l'Oxford
Family Planning Association chez les utilisatrices de stérilets : risque relatif = 0,4
(0,2 - 0,7) chez les utilisatrices actuelles et 1,4 (0,4 - 3,2) chez les femmes ayant
utilisé le DIU et ayant arrêté cette méthode depuis 49 à 72 mois. Vessey conclut que
la pilule semble masquer temporairement l'endométriose et ses manifestations et que le
diagnostic d'endométriose peut-être tardif chez les femmes utilisant le DIU, les
douleurs pelviennes et les saignements pouvant survenir dans les deux circonstances
(utilisation de DIU ou endométriose).
Aucune relation ne fut mise en évidence par ailleurs, entre l'utilisation
du diaphragme et la fréquence de l'endométriose ni dans cette étude rapportée par
Vessey et al., ni dans l'étude de Parazzini et al. (1994) [5].
CONTRACEPTION DES FEMMES ATTEINTES D'ENDOMETRIOSE
Cette contraception va dépendre essentiellement du type d'endométriose
(endométriose interne (adénomyose) ou endométriose externe) du stade (I à IV) de
l'endométriose et de la symptomatologie clinique. Ceci explique que chez les femmes
atteintes d'endométriose, il s'agira plus de traitement médico-contraceptif que de
contraception. Les méthodes contraceptives à déconseiller figurent au tableau I (en
partie d'après le texte de C. Pelissier [6]).Les méthodes de contraception à conseiller
sont détaillées au tableau II. Les indications des diverses méthodes de contraception
figurent au tableau III.
CONCLUSION
Entre contraception et endométriose, trois notions semblent fondamentales
:
1 - la contraception devrait avoir, dans la mesure du possible, un effet
thérapeutique (et préventif) sur l'endométriose ;
2 - La contraception ne devrait pas aggraver l'endométriose ;
3 - La contraception ne devrait pas " réveiller " une
endométriose silencieuse.
BIBLIOGRAPHIE
[1] BRUN G. : Contraception et Endométriose, Contracept. Fertil. Sex.
1993 - Vol. 21, n_ 7-8, 563-565.
[2] AUDEBERT A. : Endométriose. In Gynécologie : E. Papiernik, H.
Rozenbaum, J. Belaisch-Allart, Editeurs, Editions Flammarion Medecine-Sciences, Paris,
1990, Chapitre 29, 435-458.
[3] VERCELLINI P., RAGNI G., TRESPIDI L. et al. : Does contraception
modify the risk of endometriosis ? Human Reproduction, 1993, 8, 4, 547-551.
[4] VESSEY MP., VILLARD-MACKINTOSCH L., PAINTER R. : Epidemiology of
endometriosis in women attending family planning clinics. B.M.J., 1993 (16 Janvier), vol.
306, 182-184.
[5] PARAZZINI F., FERRARONI M., BOCCIOLONE L. et al. : Contraceptive
methods and risk of pelvic endometriosis. Contraception, 1994 ; 49, January, 47-55.
[6] PELISSIER-LANGBORT C. : Contraception et pathologie bénigne de
l'utérus. In La Contraception, Nouvelle édition, D. SERFATY et col. Editions DOIN,
Paris, 1992, Chapitre 60, 559-567.
D. SERFATY Centre de Régulation des Naissances, Hôpital Saint-Louis,
Paris.
: JOURNÉES DE TECHNIQUES
AVANCÉES EN GYNÉCOLOGIE OBSTÉTRIQUE ET PÉRINATALOGIE PMA, Fort de France 11 - 18
janvier 1996
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