MICROCALCIFICATIONS ET MICROBIOPSIES : RESULTATS A DEUX ANS DE
L'ENQUETE PROSPECTIVE
S. UZAN1/2, J.Y. SEROR1/3, J. CHOPIER1/4,
M. ANTOINE1/5, S. SANANES1 ET PH. MERVIEL1
INTRODUCTION
La découverte de microcalcifications est une situation rencontrée de plus en plus
fréquemment du fait des mammographies de dépistage. Outre les différentes
améliorations portant sur l'imagerie et l'analyse séméiologique de ce symptôme
radiologique, un certain nombre d'auteurs ont proposé l'utilisation de microbiopsies sous
contrôle stéréotaxique. Très longtemps ces microbiopsies ont connu des résultats peu
encourageants du fait de la technique utilisée et du nombre de prélèvements réalisés.
Nous avions déjà présenté des premiers résultats concernant l'utilisation de
microbiopsies à l'aide d'aiguilles de 14 Gauge réalisées avec un minimum de 4 à 5
prélèvements sous anesthésie locale. Nous avons mis en place depuis deux ans une
enquête prospective qui avait pour objectif d'étudier la corrélation de ces
microbiopsies aux résultats d'interventions chirurgicales réalisées pour
microcalcifications.
Schématiquement nous avons réalisé trois types de microbiopsies :
- des microbiopsies de rattrapage (MBR) lorsque l'aspect des microcalcifications
paraissait bénin mais qu'une indication éventuelle de microbiopsie existait. Ces
indications étaient essentiellement liées aux antécédents de la patiente (cancer
contro-latéral ou cancer dans le même sein) et à la nécessité d'une intervention
chirurgicale contro-latérale. Ces microbiopsies de rattrapage sont encore en cours
d'évaluation quant à leur pertinence.
- Des microbiopsies d'avance diagnostique (MAD). Elles sont réservées aux patientes
présentant des microcalcifications douteuses, débouchant généralement sur une
surveillance par de nouvelles mammographies à 6 mois. Ces microcalcifications sont
essentiellement de type II de Le Gall. Il nous a paru utile d'introduire des microbiopsies
dans ce cas là car l'obtention d'un résultat positif permet alors d'écourter le délai
de surveillance et de réaliser plus tôt une intervention exploratoire. En cas de
négativité des microbiopsies la surveillance est effectuée comme prévu 6 mois plus
tard.
- Des microbiopsies stratégiques (MBS). Leur objectif est, en présence de
microcalcifications suspectes nécessitant de toute façon une intervention chirurgicale,
de réaliser des microbiopsies permettant éventuellement de disposer du diagnostic
histologique avant l'intervention. On peut alors soit pratiquer un geste étendu d'emblée
tel qu'une mastectomie si les microbiopsies multiples espacées sont positives ou un
curage axillaire si les microbiopsies permettent de mettre en évidence un cancer
micro-invasif ou invasif.
RESULTATS ET COMMENTAIRES
Les principaux résultats observés par notre groupe concernent avec un recul
considéré de plus d'un an maintenant, 170 microbiopsies réalisées chez 86 patientes
opérées et 84 ayant fait l'objet d'une surveillance continue. Les résultats peuvent
être schématisés comme tels :
- sensibilité : 90,9 % ;
- spécificité : 97,6 % ;
- valeur prédictive positive : 97,6 % ;
- valeur prédictive négative : 91,1 %.
On peut exprimer ces résultats en termes de sous-évaluation (21 %), de corrélation
parfaite (75 %), de surévaluation (4%). Il faut noter que si la surévaluation concerne
essentiellement deux foyers d'hyperplasie canalaire atypique et un carcinome lobulaire in
situ pour lesquels le diagnostic de bénignité a été retenu in fine, elle concernait
dans 1 cas un carcinome canalaire invasif qui en fin de compte était un carcinome in
situ. On peut se poser la question dans ce dernier cas d'un micro-foyer d'invasion retiré
lors de la microbiopsie. En ce qui concerne les sous-évaluations elles traduisent le
caractère fragmentaire de ces microbiopsies, ce qui, malgré les précautions prises lors
de la réalisation de cet examen reste inévitable.
Parmi les facteurs influençant la productivité de la microbiopsie, deux facteurs
semblent importants, le nombre de prélèvements (un nombre supérieur ou égal à 5 est
nécessaire dans la majorité des cas) et le calibre des aiguilles utilisées (14 Gauge).
Il faut également noter que l'expérience de l'opérateur joue un rôle important puisque
dans notre groupe, le facteur temps a amélioré de 83 à 90 % le nombre de prélèvements
comportant des microcalcifications significatives.
Les incidents ont été minimes, essentiellement à type de malaises et dans deux cas
d'hématome, dont l'un très réduit. Certaines précautions (en particulier l'arrêt de
la prise d'Aspirine ou d'un traitement anticoagulant) permettent d'éviter ou de réduire
très largement ces inconvénients.
Un autre résultat observé lors de ces microbiopsies est le gain de temps opératoire.
En effet dans certains cas, le diagnostic pré-opératoire de ces microcalcifications
permet d'emblée de réaliser un traitement complet. Ce fut le cas pour 4 mastectomies sur
9 et pour 9 quadrantectomies sur 16 qui ont pu être réalisées dès le premier temps.
Cette économie de temps opératoire témoigne de l'intérêt de la valeur prédictive
positive de ces microbiopsies.
En conclusion on peut dire que les microbiopsies appliquées à 170 patientes n'ont pas
entraîné de morbidité significative, qu'elles supposent des règles rigoureuses en ce
qui concerne les modalités et le nombre de prélèvements. Un contrôle de qualité par
clichés des prélèvements et lecture des prélèvements s'avère indispensable.
Les microbiopsies des microcalcifications peuvent être déjà considérées comme d'un
grand apport sur le plan diagnostique et stratégique à condition d'être totalement
intégrées à une démarche carcinologique.
La valeur prédictive positive (l'absence de faux positif significatif) permet de
prendre des décisions en termes de stratégie pré-opératoire (mastectomie ou curage
axillaire).
La valeur prédictive négative (faux négatif et sous évaluation) reste imparfaite.
Un résultat négatif ne doit en aucun cas remettre en question une indication
opératoire portée sur l'aspect des microcalcifications. Cet aspect reste le critère
décisif de choix.
S. UZAN1/2, J.Y. SEROR1/3, J. CHOPIER1/4, M.
ANTOINE1/5, S. SANANES1 ET PH. MERVIEL1
1 Département des tumeurs du sein de l'Hôpital TENON, 4, rue de la Chine, 75020
Paris.
2 INSERM U 149, 123, Bd de Port-Royal, 75014 Paris.
3 Centre de Radiologie Duroc, 9 Ter, Bd du Montparnasse, 75006 Paris.
4 Service de Radiologie, Hôpital TENON, 4, rue de la Chine, 75020 Paris.
4 Service d'Anatomie Pathologique, Hôpital TENON, 4, rue de la Chine, 75020 Paris.
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