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2000 > Pédiatrie > Nutrition  Telecharger le PDF

Acquis et futur dans l'alimentation du prématuré

B. Salle , S Laborie , G. Putet , J. Picaud et A. Lapillonne

L'alimentation du prématuré a fait l'objet depuis un quinzaine d'années d'un grand nombre de recherches expérimentales et surtout cliniques ; les prématurés qui se définissent comme des nouveau-nés de moins de 37 semaines de gestation révolues représentent une cohorte importante d'enfants ( 5 à 6 % des naissances) ; le taux des prématurés de moins de 32 semaines de gestation reste stable dans les pays occidentaux de l'ordre de 1,2 à 1,4 % des naissances.

Au contraire dans les pays en voie de développement la fréquence de la prématurité est élevée et atteint parfois 20% des naissances. Du fait de l'amélioration de la prise en charge à la naissance, des techniques de réanimation le taux de survie a considérablement augmenté et est de l'ordre de 85% dans les pays développés. Afin d'assurer une croissance optimale tant somatique que neuro-psychique et pour éviter des séquelles dues à une malnutrition protéique et calorique, il est donc nécessaire de connaître les besoins nutritionnels de ces enfants et d'assurer pendant les premiers mois de vie un apport adéquat en énergie, protéines, minéraux, vitamines, oligo éléments et enfin acides gras essentiels.

Cet apport nutritionnel doit tenir compte de l'immaturité des fonctions digestives.

Le prématuré se distingue du nouveau né à terme par la faiblesse de ses réserves à la naissance (graisses, acides gras à longue chaîne, minéraux et vitamines) car elles se constituent durant le dernier trimestre de la grossesse. Sa vitesse de croissance est très élevée et les processus de multiplication cellulaire sont très importants. Aussi ces enfants sont vulnérables à toute carence ou excès d'apport nutritionnel.

Selon l'Académie Américaine de Pédiatrie (1985) l'objectif de la prise en charge nutritionnelle des enfants prématurés est d'obtenir une croissance similaire à celle du foetus de même âge gestationnel ; pour cela les éléments de référence restent les courbes de croissance foetale et les résultats d'analyse chimique de composition corporelle effectuée chez des enfants mort-nés à des âges gestationnel différents (Widdoson, Ziegler). Chez le prématuré foetus ex utero l'obtention d'une courbe de croissance identique ne peut ainsi être obtenue qu'avec des apports nutritionnels plus élevés que ceux fournis par la mère in utero ceci du fait des pertes insensibles, fécales et énergétiques très élevées chez le prématuré

La croissance du prématuré :

L'évolution de la composition corporelle chez le foetus au cours du dernier trimestre de la grossesse se caractérise par une augmentation du pourcentage de graisse de 1% de la masse corporelle à 22 semaines pour atteindre 15 à 16% à 40 semaines, la masse maigre diminuant parallèlement de 99 à 86% du poids du corps ; pendant la même période le pourcentage d'eau total diminue. On a ainsi pu calculer qu'un foetus stocke environ 20 à 30 Kcal/kg/j, pour une prise pondérale de 15 g/kg/j.

Aussi la répartition du gain pondéral est en moyenne 70% d'eau 13 à 14% de protéines et 13 à 14% de lipides et le reste en minéraux et oligo éléments. Pendant cette même période il accumule 30 grammes de calcium et 15 grammes de phosphore pour son squelette. Chez le prématuré après les 7 à 10 premiers jours de vie qui représentent une période de stabilisation et d'adaptation à la vie extra utérine la croissance réelle commence.

Quantitativement la croissance idéale est celle qui va replacer sa courbe de poids et de taille sur les courbes de croissance in utero. Qualitativement la composition du gain pondéral optimal est celle qui permettra la meilleure rétention protéique lipidique et minérale.

Comment assurer les apports nutritionnels et connaître leur devenir

Ce sont les études anatomiques et histologiques du foetus surtout durant le dernier trimestre de la grossesse, les techniques biochimiques dans le dosage de nombreux métabolites au niveau du plasma les techniques modernes d'exploration physiologique et l'étude de la composition corporelle in vivo qui ont permis de mieux connaître les apports nutritionnels adéquats. La liste de ces techniques est assez longue mais elle a permis de connaître les pertes insensibles, la physiologie rénale et intestinale du prématuré. La rétention protéique des lipides et minéraux selon des apports connus en fonction de l’âge gestationnel et de l’âge chronologique.

Les dernières technique font appel à la connaissance de la composition corporelle et ceci en fonction des apports ; c'est le TOBEC ou surtout l'absorptiométrie biphotonique par rayons X d'utilisation plus facile non invasive peu irradiante et qui peut être répétée.

Les objectifs pour une croissance adéquat (composition du gain de poids proche de celle de la croissance du foetus) sont atteints lorsqu'on utilise le lait de la mère du prématuré enrichi en protéines, énergie et minéraux ou à défaut lorsqu'on utilise une formule adaptée pour l'enfant prématuré et enrichie en acides gras polyinsaturés et en sels minéraux solubles.

Quel est le futur dans l'alimentation du prématuré

L'alimentation du prématuré de moins de 30 et surtout de moins de 28 semaines de gestation :

Etant donné les difficultés inhérentes à l'alimentation dans les premiers jours de vie compte tenu des difficultés respiratoires et digestives il est difficile par la suite d'avoir une courbe de rattrapage et la croissance de ces prématurés ne suit pas les courbes du foetus in utero, la courbe ayant tendance à se superposer sur celle à moins 2 ou 3 déviations standards. Aussi au terme théorique ces enfants ont un retard de croissance qui peut persister loin après la naissance dans les premiers mois de vie avec toujours l'inquiétude d'un non rattrapage à l’âge de 3 à 5 ans.

Aussi il est important, pour le néonatologiste, d'apporter, très rapidement, un apport protéique et calorique adéquat et proche de celui in utero chez de tels enfants ; ceci ne pourra se faire que par une alimentation parentérale associée à un apport oral minimal pour stimuler les sécrétions enzymatiques intestinales ainsi que le péristaltisme. Cette alimentation parentérale doit pouvoir très rapidement après 4 à 5 jours de vie assurer un apport protéique et énergétique dans un rapport adéquat pour une vitesse de croissance proche de celle du foetus. De même l'alimentation orale doit être augmentée en volume et en qualité le plus rapidement possible ; ceci est d'ailleurs la politique de nombreuses unités de néonatologie

L'alimentation à la sortie du service de néonatologie :

Les prématurés sortent du service avec un poids de 1900 à 2000 grammes c'est à dire à 33 - 34 semaines de gestation. Ils ont encore des besoins spécifiques que ne sont pas couverts par les formules pour nourrissons. Aussi il est nécessaire de les nourrir avec un lait pour prématurés mais ceux ci actuellement sont trop riches en protéines et en calories d'o la nécessité d'avoir un lait de suite couvrant les besoins en protéines calories et minéraux pendant 6 à 8 semaines. Peu d'études ont été réalisées dans la littérature en dehors de celles de R. COOKE et P. SAUER. Les études nutritionnelles doivent maintenant s'attacher à connaître les besoins nutritionnels du prématuré après la sortie du service ; les études par DXA pourraient rendre de grands services, car il est difficile de proposer des études par balance métabolique ou par calorimétrie indirecte.

On sait qu'un prématuré au sein absorbe 200 à 220 ml par kilo/jour lorsqu'il est rendu à sa mère ce qui est un volume plus important que celui d'un enfant à terme; plus de 200 ml par Kg/jour couvre largement les besoins pour la croissance d'un prématuré ce volume étant difficilement atteint lorsque celui ci est dans l'unité de néonatologie.

Enfin il est nécessaire par des études de suivi à long terme de connaître les effets de la nutrition de ces prématurés en période néonatale. Bien qu'il existe de nombreuses controverses, l'influence de la nutrition dans les premières semaines de vie sur le devenir ultérieur de l'enfant semble de plus en plus évidente en particulier en ce qui concerne la croissance staturo pondérale le développement psycho moteur, la minéralisation osseuse et enfin l'apparition de certaines pathologies.

Nous ne discuterons pas ici de l'influence des acides gras polyinsaturés à longue chaîne sur le développement cérébral et sensoriel car ceci fait l'objet d'une communication spécifique de la table ronde.

La malnutrition protéique en particulier dans les premiers jours de vie chez des prématurés de faible poids et d'âge gestationnel bas peut avoir une conséquence sur le développement psycho moteur de ces enfants. Ceci est encore plus vrai dans le retard de croissance intra utérin. L'apport calcique au cours des premières semaines intervient dans le contenu minéral osseux de l'enfant à l’âge de la puberté.

Plusieurs études et une métaanalyse récente montrent que la méthode d'alimentation durant la petite enfance influence significativement le développement psychomoteur des prématurés pendant les premières semaines de vie ; en particulier le QI est augmenté si l'enfant est allaité ceci par rapport à des prématurés ayant reçu une formule de lait artificiel. Après ajustement avec le sexe et les facteurs environnementaux la différence persiste de façon significative.

Enfin l'obésité du nourrisson est un facteur prédictif de l'obésité de l'adulte. Or les études en absorptiométrie biphotonique montrent que ces prématurés après le terme théorique ont un contenu en graisses significativement plus important que celui d'un enfant né à terme ; ceci sera encore plus vrai avec des formules très riches en calories (80 Kcal/dl) qui sont actuellement sur le marché ; G PUTET a bien objectivé par calorimétrie indirecte couplée à une balance métabolique qu'un prématuré recevant un apport énergétique métabolisable (donc absorbé) de 130 Kcal/kg/jour dépose chaque jour 6 grammes de graisse par Kilo et par jour, alors que normalement le foetus dépose 2 à 2,5 grammes à même âge gestationnel. Ceci est du essentiellement a une non observation d'un rapport adéquat calorique protéique.

Conclusion

Le lait maternel reste l'aliment idéal pour un prématuré en particulier celui de sa mère. Il faut donc par tous les moyens encourager les mères à allaiter leur enfant.

Néanmoins du fait des besoins spécifiques du prématuré il est nécessaire de le supplémenter en protéines, énergie et minéraux ; des suppléments prêts à l'emploi sont disponibles dans le commerce. Il est nécessaire enfin d'assurer un supplément vitaminique A, D et E car le lait de mère n'apporte pas les besoins quotidiens en ces vitamines pour le prématuré.

A la sortie du service de néonatologie il semble nécessaire de donner un lait pour prématuré si celui ci n'est pas allaité. L'enfant au sein adapte son apport à ses besoins

Enfin des études de suivi doivent maintenant répondre aux nombreuses questions posées par les effets à long terme de la nutrition durant les premières semaines de vie.

Service de Néonatologie Hôpital E Herriot et Hopital Debrousse LYON