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Titre: Genetique moleculaire des diabetes insipides
Année: 2000
Auteurs: - Czernichow P.
Spécialité: Pédiatrie
Theme: Diabéte insipide

Génétique moléculaire des diabètes insipides

 

Professeur Paul CZERNICHOW

 

Service d’Endocrinologie et de Diabétologie Pédiatriques

Hôpital Robert Debré - 48, bd Sérurier 75019 PARIS , France

 

 

I - Physiologie du système antidiurétique.

Le système antidiurétique est maintenant connu dans ses détails au niveau anatomique, physiologique et moléculaire.

1 - Le gène de la vasopressine et la synthèse de l’hormone vasopressine.

La Vasopressine (AVP pour Arginine Vaso-Pressine) et sa protéine porteuse au niveau cellulaire la Neurophysine est synthétisée sous forme d’une préprohormone chez l’homme. Le gène est situé sur le chromosome 20 et sa structure est indiquée sur la figure 1. On voit qu’il comporte trois exons et qu’il code une protéine de 164 acides aminés, la prépo-vasopressine. Cette molécule va subir des modifications successives dans les granules de sécrétion situées dans les cellules des noyaux supra-optiques. Les granules de sécrétion vont migrer le long de l’axone et terminer au niveau de la post-hypophyse où l’hormone mature est sécrétée dans le sang. En effet, au cours de cette migration, la préprohormone va être transformée pour aboutir à trois fragments dont l’AVP, peptide de 9 acides aminés.

La sécrétion d’AVP est probablement continue et régulée par divers stimuli. L’augmentation de l’osmolarité plasmatique est le stimulus essentiel dans les conditions normales : une augmentation de l’osmolarité au-dessus de 282 mosmols déclenche la sécrétion de vasopressine. De même l’hypotension et l’hypovolémie sont des stimuli puissants de la sécrétion d’AVP.

L’AVP circule sous forme libre dans le sang et se fixe sur différents types de récepteurs. Seuls les récepteurs dits V2 seront envisagés ici.

2 - Action de l’AVP au niveau rénal (figure 2).

2.1 : Le récepteur rénal de l’AVP.

La première étape concerne la liaison de l’AVP à son récepteur. Ce récepteur V2 est situé sur la membrane basolatérale du tube collecteur du rein. Ce récepteur active une adénylate cyclase et est lié à une protéine G. Il est codé par un gène situé en Xq28. La protéine a 371 acides aminés. Il s’agit d’une protéine à 7 domaines transmembrannaires, 4 domaines intracellulaires et 4 domaines extra-cellulaires.

2.2 : Le système des aquaporines.

Les aquaporines (AQP) sont des canaux qui permettent le passage d’eau libre à la surface de la membrane. Il en existe quatre formes : AQP1, exprimé de manière constitutive dans différents tissus, AQP2 régulé par l’AVP, AQP3 exprimé sur les membranes basolatérales des tubes collecteurs de la médullaire rénale et l’AQP4 exprimé dans le cerveau. AQP2 est codé par un gène situé chez l’homme en 12 q13. La structure du gène est connue : il a 4 exons et 3 introns et code une protéine de 271 acides aminés. La molécule est exprimée dans le cytoplasme des cellules du tube collecteur et est présente de manière uniforme dans le cytoplasme de ces cellules. Sous l’effet de la vasopressine, AQP2 va migrer au pôle apical de la membrane et permettre le transfert d’eau libre du pôle apical vers le pôle basolatéral de la cellule et les vaisseaux qui la bordent. Lorsque l’AVP revient à des valeurs basales, AQP2 quitte le pôle apical pour retourner dans le cytoplasme et la membrane devient imperméable à l’eau.

II - Le diabète insipide

Le diabète insipide (DI) se définit comme une situation où les urines sont abondantes et hypotoniques (polyurie insipide). Cette polyurie osmotique peut être due à une consommation excessive d’eau. Dans cette situation, la polyurie est secondaire à la prise d’eau, c’est la polydipsie primaire.

Plus fréquemment la polydipsie est secondaire et la polyurie primaire. Dans cette situation, le diabète insipide peut être dû à deux mécanismes : soit une anomalie de synthèse ou de sécrétion d’AVP, c’est le diabète insipide d’origine centrale ou neurogénique, soit une anomalie de l’action de l’AVP sur le rein, c’est le diabète insipide néphrogénique.

1 - Diagnostic

La polyurie insipide (urines hypotoniques) définit la situation pathologique. L’épreuve de restriction hydrique permettra de démontrer que le malade est incapable de concentrer ses urines en situation d’hyperosmolarité plasmatique : il s’agit bien d’une polyurie primaire. Le test au d D.AVP, un analogue très actif de l’AVP, permettra de distinguer le diabète insipide central (le rein est sensible au d D.AVP et l’osmolarité urinaire augmente) des formes néphrogéniques où le rein est insensible à l’action de l’AVP.

2 - Le diabète insipide central

Comme on peut le voir sur le tableau I, le diabète insipide peut être dû à différentes causes. Dans cette classification, environ 25% des cas sont idiopathiques. On sait maintenant avec les progrès de l’imagerie cérébrale que la majorité de ces cas sont dus à des minuscules lésions de la tige pituitaire. Un infime pourcentage de ces cas est dû à des anomalies génétiques.

Les anomalies génétiques

Les anomalies génétiques sont autosomiques dominantes. Près de 30 familles ont été identifiés. Le fait que ces formes soient dominantes est inexpliqué. Il faut remarquer que dans le modèle animal de DI central génétique du rat Brattleboro, l’anomalie est récessive et la maladie ne s’exprime que si les deux allèles sont mutés. Une possible explication serait que chez l’homme, l’allèle muté produit une protéine anormale dont la transformation est impossible. Elle s’accumulerait dans la cellule et produirait rapidement une cytolyse. En faveur de cette hypothèse, le fait que chez certains malades la maladie se constitue progressivement : la fonction antidiurétique est normale à la naissance et s’altère dans les premières années de vie.

Il serait fastidieux d’énumérer les anomalies génétiques à l’origine de ces diabètes. Aucune de ces anomalies ne touche la partie du gène codant pour l’AVP.

La majorité des mutations sont portées par l’exon II. Récemment, une mutation située au début de l’exon I et touchant le peptide signal a été décrite.

Une forme particulière de diabète insipide congénital commence à être bien connue. Il s’associe un diabète insipide, un diabète sucré, une atrophie optique et une surdité. Le gène de cette maladie est sur le chromosome 4 et serait dû à une anomalie mitochondriale.

 

3 : Le diabète insipide néphrogénique

Il existe des formes acquises de diabètes insipides néphrogéniques. Elles se développent dans un contexte de lésions infectieuses chroniques de l’arbre urinaire ou sont secondaires à des malformations congénitales urétérales ou rénales.

Les formes congénitales de diabètes insipides sont liées à des anomalies du récepteur de l’AVP V2 ou a des anomalies de AQP2. Sur 75 formes de diabète insipide néphrogénique décrites par Bichet à Montréal, 71 avaient une mutation du gène du récepteur V2 et les autres une anomalie de AQP2 qui semblent donc très minoritaires.

Le récepteur V2 est codé par l’X et par conséquent ce type de diabète insipide néphrogénique est lié à l’X. La maladie touche les garçons et le diabète insipide s’exprime dès la naissance. Les rares anomalies de AQP2 sont récessives et touchent les garçons et les filles.

On possède maintenant les outils pour faire un diagnostic moléculaire de ces deux formes.

4 : Le traitement

4.1 : Le diabète insipide d’origine centrale :

Le traitement est basé sur l’administration d’un analogue très actif de l’AVP, le D.AVP ou Minirin. Ce peptide est déaminé en position 1 ce qui allonge sa durée de vie et il est porteur d’une arginine dextrogyre en position 8 ce qui lui retire toute activité pressive. Il peut être administré par voie nasale en spray (20 µg 2 à 3 fois par jour). Il peut également être administré par voie orale sous forme de comprimés de 200 µg, les doses actives allant de 200 à 800 µg.

4.2 : Le diabète insipide néphrogénique :

Le traitement est difficile et repose sur l’utilisation des inhibiteurs des prostaglandines et l’administration d’eau.

Tableau I : Causes des diabètes insipides centraux

 

 

Enfants (%)

Adultes (%)

Tumeurs cérébrales :

- Avant chirurgie

- Après chirurgie

49,5

(33,5)

(16,0)

30

(13)

(17)

Histiocytose

16

8

Cancer métastasé à l’hypophyse

-

 

Traumatismes

2,2

17

Post-infectieux

2,2

 

Idiopathiques

29

25

 

LEGENDES DES FIGURES

 

 

Figure 1 : Organisation du gène qui code pour l’AVP.

Une préprohormone est produite qui va être progressivement transformée dans les granules de sécrétion.

Figure 2 : Schéma du mode d’action intracellulaire de la vasopressine.

Le récepteur à l’AVP à 7 domaines transmembrannaires est lié à une protéine G. Activé par la liaison de son LIGAND l’AVP, il provoque l’activation de la cyclase, une génération d’AMP cyclique et l’augmentation d’une protéine kinase (PKA), AMPc dépendante.

Les événements intracellulaires provoquent la migration vers la paroi cellulaire côté tube collecteur de vésicules contenant AQP2. La présence de AQP2 sur la membrane augmente la perméabilité à l’eau et permet le transfert d’eau du tube collecteur hypotonique vers la cellule. Lorsque le récepteur AVP n’est plus stimulé, AQP2 quitte la membrane par endocytose et le tube devient imperméable à l’eau.