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Titre: Osteoporose de la grossesse
Année: 2001
Auteurs: - Simon F.
Spécialité: Gynécologie
Theme: Ostéoporose

OSTEOPOROSE DE LA GROSSESSE

F. SIMON

H.N.S.M. Chef de service, Rééducation et Rhumatologie 14 rue du Val d'Osne 94410 Saint-Maurice

INTRODUCTION

Au cours de la grossesse et de l'allaitement, il est classique en pratique médicale courante de supplémenter en calcium et vitamine D pour éviter une "décalcification" . La minéralisation du squelette foetal utilise 25 à 30 gr de calcium et 250 mg par jour de ce même calcium pour le nourrisson. Sous nos climats, avec nos habitudes hygiénodiététiques, cette demande est le plus souvent satisfaite. Des fractures vertébrales ont pourtant été décrites. Les techniques non invasives de mesure de la densité osseuse ont permis de mieux évaluer les risques d'ostéoporose.

OSTEOPOROSE DE LA GROSSESSE (OG) [3-6-7]

LES MODIFICATIONS HABITUELLES

Pour explorer les OG nous pouvons nous aider du dosage biologique des constantes du métabolisme phosphocalcique, des hormones stéroïdiennes sexuelles, les marqueurs biologiques du remodelage osseux et la mesure de la densité osseuse (DMO) par absorptiométrie. Ces explorations ne sont pas courantes pour plusieurs raisons : la rareté des fractures, la crainte d'irradier les femmes enceintes (bien que l'absorptiométrie biphotonique par rayons X soit peu irradiante : 1/10 de l'irradiation d'une radiographie thoracique standard). Par ailleurs, les études publiées sont très hétérogènes et rarement prospectives avec beaucoup d'imprécisions ou d'inconnues : date des bilans au cours de la grossesse, sites et techniques différents pour évaluer la DMO exacte, nombre réduit de femmes pas toujours représentatives , apports calciques et vitaminiques non précisés [9-10].
Néanmoins, les études les moins critiquables montrent une baisse de la DMO surtout nette à la première grossesse et au cours du dernier trimestre : c'est l'os trabéculaire (vertèbres) qui est plus spécifiquement atteint. La baisse de la DMO est alors entre -2 et -4,2% selon les études lorsque la mesure est faite sur un os trabéculaire KOLTHOFF [5] ; sur un os cortical, les modifications ne sont pas significatives SOWERS [8], CROSS [2].
Le bilan phosphocalcique est normal (cf tableau I) en dehors d'une augmentation de 2 à 3 fois la normale 25(OH)2D3 et de sa protéine porteuse qui augmente ainsi l'absorption intestinale du calcium [10]. Pour les stéroïdes sexuels, l'hyperoestrogénie et l'augmentation de la prolactine jouent un rôle probable (Tableau II). Les marqueurs du remodelage osseux sont augmentés les derniers mois de la grossesse (phosphatases alcalines osseuses, ostéocalcine, télépeptides urinaires) pour se normaliser en 2 à 3 mois.
Dans la physiopathologie de l'OG on fait jouer un rôle au surpoids, à l'hyperprolactinémie, à la PTH-rP avec une action compensatrice de l'hyperoestrogénie et de l'augmentation de l'absorption intestinale du calcium grâce à l'élévation de la 1-25(OH)2D3.
Ces anomalies peuvent être considérées comme physiologiques, dans la grande majorité des cas. Lorsque les femmes n'allaitent pas, la densité osseuse revient à la normale en 3 à 6 mois.

LES FRACTURES AU COURS DE LA GROSSESSE [6-7]

Ce sont le plus souvent des fractures vertébrales (photo IRM I Mme D...), elle surviennent généralement durant la première grossesse au troisième trimestre. Elles révèlent, en fait, une maladie osseuse préexistante vraisemblablement génétique. On retrouve dans les antécédents familiaux des fractures. Lorsqu'on mesure la DMO dans la famille, en particulier chez les femmes, on retrouve des chiffres bas par rapport à une série témoin.
Les fractures ne récidivent pas au cours des grossesses ultérieures : une surveillance du poids, le traitement d'une éventuelle carence vitaminocalcique , la contre-indication d'allaitement sont conseillés. [9-10]
Avant de poser ce diagnostic d'ostéoporose idiopathique de la grossesse un bilan étiologique complet doit être effectué : calcémie, phosphorémie, calciurie des 24 heures, dosage de la PTH, de la 25(OH)VIT D au minimum.

OSTEOMALACIE [10]

Les apports vitaminocalciques sont parfois un peu bas en France mais rarement au point de réaliser une vraie carence. Néanmoins les sujets socialement défavorisés, les immigrés, les sujets à peau noire, les grossesses répétées et rapprochées, les régimes pauvres en calcium sont des facteurs favorisants d'une ostéomalacie.
Elle se traduit cliniquement par une asthénie, des douleurs musculaires, des difficultés à la marche . Devant l'importance des douleurs osseuses, une radiographie peut être demandée et montrait une fracture ou stries de Looser Milkman. L'hypocalcémie, l'hypocalciurie, le taux effondré de 25 OH D3 confirment le diagnostic. Le traitement par calcium et dose curative de vitamine D améliore de manière spectaculaire les malades en 3 à 4 semaines.

OSTEOPOROSE DE L'ALLAITEMENT [2-5-8]

Les études sont plus nombreuses et mieux menées, elles concernent des périodes d'allaitement allant de 3 à 6 mois. Le bilan calcique est négatif avec une nette augmentation des marqueurs biologiques du remodelage osseux. La diminution de la DMO est de -3,6% à -7,5% au niveau du rachis lombaire. Les fractures vertébrales sont possibles, là aussi plutôt à la première grossesse et au cours du dernier trimestre. La normalisation se fait dans les 6 à 12 mois suivants. Lors d'une grossesse ultérieure l'allaitement est contre-indiqué.
L'hyperoestrogénie, l'hyperprolactinémie, la PTH-rP jouent un rôle dans la survenue de cette ostéoporose sur un terrain prédisposé génétiquement.

PTH-rP (PROTEINE APPARENTEE A L'HORMONE PARATHYROIDIENNE : PTH) [1-4]

Elle est bien connue des oncologues et rhumatologues, en effet, en pathologie elle est responsable d'hypercalcémie au cours d'affections malignes, en l'absence de métastases osseuses (par exemple cancer du poumon). Cette hormone "PTH Like" est sécrétée par le tissu tumoral.
Cette hormone a un rôle physiologique : elle est sécrétée par le placenta, les parathyroïdes foetales et la glande mammaire.
Au cours de la grossesse elle a une action myorelaxante avec un rôle dans le déclenchement du travail. Son action est majeure pour le développement foetal, le gradient calcique mère-foetus et la PTH-rP règlent le transport du calcium transplacentaire.
Au cours de l'allaitement la PTH-rP enrichit en calcium le lait maternel. Sa sécrétion augmente lors de la succion. Enfin la PTH-rP est un facteur important de la prolifération et de la maturation du cartilage de croissance. Son rôle est vraisemblable dans la pathogénie de l'ostéoporose de la grossesse et de l'allaitement.

L'ALGONEURODYSTROPHIE DE HANCHE [9]

C'est une curieuse coxopathie survenant au 3ème semestre de la grossesse et dans le post-partum . Elle se manifeste par une douleur inguinale irradiant vers la face antérieure de la cuisse et le genou, d'abord mécanique à la marche puis permanente. Une limitation des mouvements de la hanche est retrouvée. Elle se caractérise par une déminéralisation diffuse de la tête du fémur sans anomalie de l'interligne articulaire. Classiquement on la considérait comme une maladie locale de hanche. Actuellement on considère que cela peut être une manifestation d'ostéoporose de la grossesse ou de l'allaitement. En effet, elle survient elle aussi, plutôt à la première grossesse, au 3ème trimestre ou dans le post-partum. Elle récupère sans séquelle en 3 à 6 mois, elle peut se compliquer d'une fracture du col fémoral ; elle est associée à une densité minérale osseuse basse. Enfin on retrouve des antécédents familiaux d'ostéoporose ou de fractures vertébrales. Il peut donc s'agir de microfractures favorisées par un terrain prédisposé : le rôle du surpoids de la grossesse est possible.

CONCLUSION

Les mécanismes de régulation phosphocalcique au cours de la grossesse et de l'allaitement permettent dans la majorité des cas de ne pas retentir sur la minéralisation osseuse sauf dans de rares cas où il existe probablement une prédisposition génétique ou une modification de la sécrétion de la PTH-rP.

TABLEAU I

TABLEAU II

BIBLIOGRAPHIE

1- COHEN-SOLAL M, DE VERNEJOUL M.C, BOUIZAR Z, "La protéïne apparentée à l'hormone parathyroïdienne". Rev. Rhum, (ed Fr) 2000 : 67, 55-57.

2- CROSS N.A, HILMAN L.S, ALLEN S.H, KRAUSE G.H, VIERA N.E, "Calcium homeostasis and bone metabolism during pregnancy, lactation and postweaning : a longitudinal study". Am. J. Clin. Nut, 1995 : 61, 514-523.

3- DUNNE F, WALTERS B, MARSHALL T, HEATH D.A, "Pregnancy associated osteoporosis". Clinical Endocrinology : 39, 487-490.

4- HOUILLER P, BLANCHARD A, FROISSART M, PAILLARD M, "Effets spécifiques de la PTH-rP". In Maladies métaboliques osseuses de l'adulte, KUNTZ D (ed), Expansion scientifique, Paris, 1996 : pp. 152-153.

5- KOLTHOFF N, NIELSEN S.P, KRISTENSEN B, EIKEN P, "Bone mass change during pregnancy and lactation". A longitudinal study (abstract), Bone, 1997 : 20 suppl,. 415.

6- SARAUX A, BOURGEOIS F, EHRART A, BARON D, LEGOFF P, "Ostéoporose de la grossesse 4 observations". Rev. Rhum. (ed Fr), 1993 : 60 (9), 596-600.

7- SMITH R, ATHANASOU N.A, OSTLERE S.J, VIPOND S.E, "Pregnancy associated osteoporosis". Q. J. Med., 1995 : 88, 865-878.

8- SOWERS M, RANDOLPH J, SHAPIRO B, JANNAUSCH M, "A prospective study of bone density and pregnancy after a period of lactation with bone less". Obst. and Gyn, 1995 : 85, 285-289.

9- TIMSIT M.A, KOEGER A.C, Osteoporose de la grossesse et du post-partum, In L'Actualité rhumatologique, KAHN M.F, KUNTZ D, MEYER O, BARDIN Th, ORCEL Ph, GUERIN Cl, Paris pp. 215-218.

10- TIMSIT M.A, Métabolisme osseux pathologique pendant et après la grossesse, Rhumatologie Pratique, 1999 : 183 1-5.