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Titre: La chirurgie anténatale des cardiopathies congénitales : nouvelle donne ou utopie ?
Année: 1999
Auteurs: - Vouhe
Spécialité: Médecine foetale
Theme: cardiopathies congenitales

La chirurgie anténatale des cardiopathies congénitales : nouvelle donne ou utopie ?

Pascal R. Vouhé

Il est maintenant clairement admis que, en théorie au moins, toute malformation structurelle grave du cœur doit être réparée le plus anatomiquement possible et le plus précocement possible après la naissance. Un exemple qui illustre de façon frappante ce concept thérapeutique est représenté par la réparation néonatale de la transposition simple des gros vaisseaux. Le " switch " artériel en période néonatale assure la correction anatomique et physiologique de la malformation dès que cette dernière a des conséquences cliniques, c’est à dire dès la naissance.

Malheureusement, ce concept ne peut pas s’appliquer à toutes les malformations cardiaques congénitales. Dans certaines anomalies, les conséquences morbides n’apparaissent pas, comme dans la transposition des gros vaisseaux, à la naissance, mais se manifestent dès la constitution de l’anomalie structurelle (c’est à dire autour de la 8ème semaine de gestation). Durant les 7 mois qui séparent la constitution de l’anomalie de base et la naissance, des dégâts cardiaques secondaires à l’anomalie primaire se constituent, rendant illusoire tout espoir de réparation néonatale réellement anatomique. C’est pour ce groupe de malformation que se justifient les tentatives de réparation anténatale.

Cependant, avant que la chirurgie anténatale ne devienne une réalité, 3 problèmes doivent être résolus.

  1. Faire le diagnostic anténatal des cardiopathies congénitales.
  2. Les progrès extraordinaires de l’échocardiograpie fœtale permettent le diagnostic précis de la plupart des anomalies cardiaques congénitales dès la 10-12ème semaine de gestation (1). Même si, aujourd’hui, beaucoup de malformations congénitales échappent encore à ce diagnostic anténatal, il est raisonnable de penser que dans un avenir proche, l’amélioration de la qualité des examens de dépistage systématique et le recours plus fréquent à des examens spécialisés permettront de déceler avant la naissance la plupart des cardiopathies congénitales, et en particulier celles qui pourraient relever d’un geste chirurgical anténatal.

  3. Identifier les malformations cardiaques susceptibles de bénéficier d’une chirurgie anténatale.
  4. Dans certaines malformations congénitales, les conséquences cliniques présentes à la naissance sont dues, certes à l’anomalie structurelle primaire mais aussi et surtout aux lésions secondaires à l’anomalie primaire et qui se sont développées durant la grossesse (2). La lésion initiale peut être une anomalie anatomiquement simple mais qui modifie fondamentalement les conditions du flux sanguin intracardiaque. Ces modifications hémodynamiques peuvent conduire, in utéro, à l’altération ou à l’hypoplasie d’une cavité ventriculaire, lésion secondaire dont les conséquences cliniques sont prédominantes après la naissance. Dans ce groupe de malformations entrent, essentiellement, les atrésies/sténoses pulmonaires à septum interventriculaire intact, les sténoses valvulaires aortiques critiques et certaines formes d’hypoplasie du cœur gauche. Si la liste en est courte, le nombre de fœtus atteints de ces cardiopathies est relativement élevé.

    La correction anténatale de ces malformations serait à l’évidence bénéfique. La réparation, même imparfaite, de l’anomalie primaire restaurerait des conditions hémodynamiques normales et éviterait la constitution des lésions secondaires ou, au moins, empêcherait l’aggravation progressive de ces lésions durant le reste de la vie intra-utérine.

  5. Surmonter les problèmes techniques de la chirurgie intracardiaque chez le fœtus.

Ces problèmes sont en fait multiples.

Le premier d’entre-eux consiste à déterminer le moyen optimal de corriger l’anomalie cardiaque initiale. Certaines gestes, à cœur fermé, sont éventuellement envisageables (en particulier, levée d’un obstacle valvulaire pulmonaire). Les autres geste chirurgicaux (levée d’un obstacle valvulaire aortique, ouverture d’un foramen ovale restrictif, correction d’une anomalie plus complexe) sont des interventions à cœur ouvert et nécessite la mise en œuvre d’une circulation extra-corporelle. Les problèmes posés par cette CEC (incorporation ou non du placenta dans la circulation, prévention d’une dysfonction placentaire par élévation des résistances vasculaires placentaires) ont, en grande partie, été résolus, tout au moins chez le fœtus de brebis (3,4).

Le deuxième problème consiste à éviter la réaction fœtale au stress opératoire, source de mort fœtale secondaire. La mise en œuvre de techniques spéciales d’anesthésie visant à éviter la libération de catécholamines fœtales et la dépression myocardique devrait apporter des solutions satisfaisantes (5).

Enfin, après correction intracardiaque, la grossesse doit pouvoir se poursuivre jusqu’à son terme normalement. Cela nécessite la mise au point de substances tocolytiques puissantes, problème à ce jour non résolu chez l’être humain.

La quasi totalité des travaux expérimentaux ont pour l’instant été réalisés chez le fœtus de brebis. Avant d’envisager un geste chez le fœtus humain, il est évident que d’autres travaux expérimentaux, en particulier chez le primate, sont indispensables.

En conclusion.

  1. Il est maintenant techniquement possible de déceler la plupart des anomalies cardiaques congénitales, tôt dans la grossesse, peu de temps après leur constitution.
  2. Certaines de ces malformations qui entraînent des lésions secondaires souvent plus graves que l’anomalie initiale pourraient bénéficier d’un geste chirurgical in utéro.
  3. Les problèmes techniques posés par cette chirurgie intracardiaque fœtale ne sont qu’en partie résolus, mais il est raisonnable de penser qu’ils seront dans un avenir plus ou moins éloigné, résolus en totalité.

Il convient cependant de souligner que les anomalies initiales qui justifieraient le plus un geste anténatal (sténose/atrésie valvulaire pulmonaire, sténose valvulaire aortique, fermeture prématurée du foramen ovale) sont également accessibles à des gestes de cathétérisme interventionnel. Il est vraisemblable que le cathétérisme interventionnel anténatal a beaucoup plus d’avenir que la chirurgie anténatale proprement dite.

En dernier ressort, il importe aussi de ne pas sous-estimer les implications éthiques et socio-économiques soulevées par ces espoirs, médicalement justifiés de chirurgie anténatale.

R E F E R E N C E S

  1. LE BIDOIS J, FERMONT L, SIDI D, KACHANER J. " Diagnostic anténatal des malformations cardiaques : un exemple de collaboration obstétrico-pédiatrique ". Ann. Ped. 1998 : 45, 178-181.
  2. ALLAN L.D. " Development of congenital lesions in mid and late gestation ". Int. J. Cardiol, 1998 : 19, 361-369.
  3. SABIK J.F, HEINEMANN M.K, ASSAD R.S, HANLEY F.L. " High-dose steroids prevent placental dysfunction after fetal cardiac bypass ". J. Thorac. Cardiovasc. Surg, 1994 : 107, 116-125.
  4. REDDY V.M, LIDDICOAT J.R, KLEIN J.R, WAMPLER R.K, HANLEY F.L. " Long-term fetal outcome after fetal cardiac bypass : fetal survival to full term and organ abnormalities ". J. Thorac. Cardiovasc. Surg, 1996 : 111, 536-544.
  5. FENTON K.N, HEINEMANN M.K, HICKEY P.R, KLAUTZ R.J.M, LIDDICOAT J.R, HANLEY F.L. " Inhibition of the fetal stress response improves cardiac output and gas exchange after fetal cardiac bypass ". J. Thorac. Cardiovasc. Surg, 1994 : 107, 1416-1422.