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Titre: L'administration de vitamine D et de calcium chez le nouveau-né et le nourrisson en 1998
Année: 1998
Auteurs: - Mallet E.
Spécialité: Néonatologie
Theme: Vitamine D et Calcium

L'administration de vitamine D et de calcium chez le nouveau-né et le nourrisson en 1998

E. MALLET

Service de Pédiatrie & Laboratoire de Biologie du Développement

Hôpital Charles Nicolle, Rouen, France

 

Si les besoins en calcium sont couverts par une alimentation normale, par contre la supplémentation vitaminique D, nécessité nutritionnelle, constitue une prescription usuelle de l'exercice médical concernant la petite enfance.

Cette prescription est à adapter à l'âge, au terme, et au type d'alimentation.

I - STATUT VITAMINIQUE D

a) Des mères et leurs nouveau-nés lorsque le dernier trimestre de la grossesse se déroule en hiver

Une étude randomisée a été réalisée à ROUEN chez les femmes enceintes et leurs enfants nés en février-mars. La supplémentation vitaminique D a été administrée selon deux modalités : des femmes prenant une dose journalière de 1000 UI pendant le dernier trimestre ou une dose de charge de 200 000 U per os le 7è mois et un groupe de femmes sans supplémentation constituant le groupe témoin.

Il apparaît que le taux au cordon de 25-hydroxyvitamine D, reflet du stock vitaminique D, est toujours plus bas d'un tiers par rapport à celui de la mère. Les taux sont cependant étroitement et positivement corrélés. Les taux de 25-OH-D du groupe supplémenté atteignent des taux estivaux. Cependant, les calcémies maternelles et au cordon ne sont pas différentes dans les trois groupes, les calciuries maternelles des enfants ne sont pas élevées et le poids de naissance des enfants n'est pas différent. Cette étude a permis de confirmer la dépendance du foetus vis-à-vis du stock vitaminique D maternel et de considérer l'administration d'une dose unique de 200 000 unités de vitamine D administrées per os au 7è mois de grossesse comme une prophylaxie adaptée à notre région (1).

L'effet de cette supplémentation systématique a été apprécié sur deux périodes de deux ans portant chacune sur plus de 3000 nouveau-nés, période témoin antérieure, et période avec supplémentation. Tous les facteurs de risque se référant à la survenue de l'hypocalcémie néonatale n'étant pas différents d'une période à l'autre, il est apparu une réduction très significative de l'incidence de l'hypocalcémie néonatale en hiver (2,4 ‰ contre 7,7 ‰) (2, 3).

b) Les nourrissons à l'heure des laits enrichis en vitamine D

Une étude prospective a été réalisée à ROUEN sur une année et près de 400 nourrissons. L'ensoleillement, cette année-là, a atteint ses extrêmes saisonnières.

Les principales constatations ont été les suivantes :

- Les habitudes de prescription de la vitamine D par le médecin n'a pas changé depuis l'introduction des laits en vitamine D. La dose moyenne prescrite était de 1 200 unités par jour en apport quotidien, ce qui correspondait aux recommandations antérieures.

- L'apport de vitamine D par le lait apporte en moyenne 300 unités par jour dans la tranche d'âge étudiée de 1 à 9 mois, ce qui fait un apport global en moyenne de 1 500 unités par jour chez les enfants à peau claire.

- Le taux plasmatique de 25-OH-D a été en moyenne de 50 à 60 nmol/l, été comme hiver, restant dans la limite des normes établies (hiver : 10-55 ; été : 15-85) avec cependant quelques valeurs fortes.

- L'administration d'une dose unique de charge de 100 000 unités de vitamine D ne s'accompagne pas d'un pic plasmatique excessif de 25 hydroxyvitamine D, le taux restant satisfaisant à 3 mois.

- Aux égards de la tolérance, si aucun cas d'hypercalcémie n'a été observé en particulier on peut cependant noter un certain nombre de rapports calcium/créatinine supérieurs à la norme de 1,2 à cet âge. Une posologie proche de 800 UI apparaîtrait comme satisfaisante à l'heure des laits enrichis (4).

Surtout, selon une étude multicentrique menée par le groupe calcium, il faut noter que l'administration obligatoire de vitamine D, certes modeste avec l'alimentation lactée, a entraîné une franche diminution de l'incidence du rachitisme carentiel au moins justifiant d'une hospitalisation en France (5).

c) Chez le prématuré

Une étude prospective a été réalisée à LYON chez 16 prématurés de poids de naissance de moins de 1500 g recevant une formule enrichie de 80 UI /100 ml a été réalisée dans le service de néonatologie du Professeur Bernard SALLE en 1996, les prématurés recevaient un supplément de 800 UI de vitamine D/jour. Le dosage de 25(OH)D plasmatique a été réalisé à 21 jours de vie, à la sortie du service entre 6 et 8 semaines, enfin au terme théorique, c'est-à-dire à 3 mois d'âge chronologique. Les taux de 25(OH)D plasmatiques ont évolué dans les limites physiologiques, certaines valeurs étant à la limite supérieure (6).

 

I I - SUPPLEMENTATION VITAMINIQUE D EN PRATIQUE

Les recommandations actuelles se fondent dans des études de statuts considérant le taux plasmatique 25-hydroxyvitamine D comme le reflet du stock vitaminique D de l'organisme, les signes de subcarence se traduisant par une augmentation du taux de parathormone 1-84 plasmatique, des signes débutants de surcharge par une augmentation de la calciurie.

Les principales situations de prescription sont les suivantes :

a) Le nouveau-né en maternité.

Ce nouveau-né a un handicap : il est à risque de carence en vitamine D.

Le nouveau-né est en effet dépendant du stock vitaminique D de sa mère. Or, la mère est en situation de carence en vitamine D lorsque l'accouchement a lieu en fin d'hiver et au printemps (1), mais aussi chez celles qui ne s'exposent pas au soleil (7), de ce fait, "à mère carencée, nouveau-né carencé" avec le risque d'hypocalcémie néonatale (2, 3).

L'administration de vitamine D de 100 000 unités quotidiennes à partir du 7è mois ou 200 000 unités en dose de charge au 7è mois constitue une mesure sans risque pour la mère et son enfant et permet d'obtenir des taux plasmatiques de 25-hydroxyvitamine D de niveau estival (1).

Enfin, l'effet d'une supplémentation systématique d'une grossesse hivernale par 200 000 unités de vitamine D s'accompagne d'une chute significative de l'incidence de l'hypocalcémie néonatale (2,4 ‰ contre 7,7 ‰) (2, 3),

On se doit donc de conseiller la supplémentation de la mère par une dose de charge de 100 000 à 200 000 unités au 7è mois de grossesse, particulièrement durant le 3è trimestre et les mois "en R" ; comme on se doit de prescrire la vitamine D dès la naissance, beaucoup de mères ne bénéficiant pas encore de cette supplémentation.

Les modalités de la prescription ultérieure chez le nourrisson vont dépendre du type d'alimentation au sein ou avec un lait diététique.

b) Chez le nourrisson au sein,

Le bénéfice de l'allaitement maternel n'exclut cependant pas la nécessité d'une supplémentation en vitamine D.

De fait, l'activité vitaminique D du lait de femme est faible (25 à 70 UI/l). Ce point a naturellement été longtemps controversé. Des rachitismes carentiels sévères sont de fait observés chez des enfants ayant une alimentation exclusive et prolongée au sein et appartenant à des familles immigrantes. Au risque lié à la peau pigmentée, s'ajoutent des habitudes de vie casanière (8).

Une supplémentation vitaminique D est donc indispensable et spécialement chez le nourrisson chez lequel la vélocité de croissance est grande. La posologie est d'environ de 1 200 UI/jour chez l'enfant à peau claire recommandée depuis plus de 25 ans, conformément aux Circulaires Ministérielles de 1963 et 1971 qui reste tout-à-fait applicable dans cette situation (9).

Chez le nourrisson alimenté avec un lait diététique, la composition en vitamine des laits diététiques couvre tous les besoins vitaminiques à l'exception de la vitamine D. En effet, si les laits infantiles sont, depuis l'Arrêté de Février 1992 devenu effectif en septembre 1992, enrichis en vitamine D, et cela conformément aux normes européennes, ils ne contiennent selon les marques que de 400 à 500 UI/l.

La recommandation actuelle est donc le maintien d'un complément vitaminique de 400 à 800 UI/jour pour les enfants qui consomment une quantité suffisante de lait diététique du 1er au 2è âge.

Lors de la diversification alimentaire, la réduction de la quantité de lait diététique enrichie en vitamine D absorbée au dessous du demi-litre par jour doit faire renforcer la prescription de vitamine D au niveau des 1 000 unités par jour des enfants à peau claire, et ceci jusqu'à l'âge de 18 mois.

L'administration de vitamine D peut également être prescrite en dose de charge de 80 à 100 000 unités per os, et ce, tous les trois mois, dans les situations où l'on a un doute sur la compliance... .

Sur le plan pratique, le mode d'administration le plus favorable est l'addition de la vitamine D à une petite quantité de diluant tel le lait, et si possible administrée à la cuillère (10).

c) Quant aux recommandations actuelles chez le jeune enfant après l'âge d'un an,

Il est indispensable de poursuivre la supplémentation en vitamine D (9)

En effet, les laits de suite ou les laits de croissance n'en contiennent pas.

Les aliments en France n'en contiennent également pas, y compris les produits laitiers, le beurre et la margarine qui ne sont pas supplémentés comme en Amérique du Nord ou au nord de l'Europe. Or, le jeune enfant, et jusqu'à l'âge de 5 ans, a une vélocité de croissance staturale et donc squelettique importante.

Il est donc nécessaire de supplémenter l'enfant jusqu'à 5 ans, l'administration de vitamine D pouvant se faire par dose de charge deux fois par an en hiver et au printemps avec 80 à 100 000 unités.

d) Cas particuliers du prématuré

Le prématuré, dont la vélocité de croissance est plus rapide, a un besoin de vitamine D augmenté. Recevant un lait diététique, il doit bénéficier d'une supplémentation de 800 à 1000 UI/jour, et ce, jusqu'au terme théorique. Il recevra ensuite de 400 à 800 UI/jour.

NB : l'estimation des apports chez les enfants à peau pigmentée, antérieurement fixée à 2 000 UI/jour est en cours de réévaluation.

III - LES APPORTS EN CALCIUM

Le calcium absorbé par l'intestin doit fournir à l'organisme le calcium nécessaire à la minéralisation du squelette en croissance. L'accroissement quotidien estimé de la masse calcique osseuse pendant la croissance est, lors de la vie foetale, de l'ordre de 150 mg/jour s'élevant jusqu'à 230 mg en fin de grossesse, pour être de l'ordre de nouveau de 150 mg/jour au cours de la première année chez le nourrisson.

Il faut cependant noter que la capacité de l'intestin à absorber le calcium est maximale lorsque les apports en calcium ou phosphore sont faibles, ces défauts d'apports induisant une stimulation de la synthèse du métabolite terminal et actif de 1,25 dihydroxyvitamine D et donc une stimulation de l'absorption intestinale active du calcium. Il faut souligner le rôle primordial d'un statut vitaminique D correct. La fraction du calcium absorbé par l'intestin correspond au coefficient d'utilisation digestive du calcium. Ce coefficient apprécié par étude de bilan se modifie avec l'âge s'élevant au dessus de 50 % chez le nourrisson jusqu'à 3 mois pour diminuer à 25 % à la fin de la première année.

D'autres facteurs alimentaires sont capables de moduler cette absorption : le lactose l'augmente, les lipides non absorbés peuvent l'inhiber. La concentration en phosphore semblerait influencer indirectement l'absorption finale du calcium en diminuant la synthèse du 1,25-dihydroxyvitamine D. La richesse en phosphates des anciennes formules lactées était tenue pour en partie responsable de la chute de la calcémie en période néonatale. Il s'en est suivi par analogie au lait de mère une réduction du taux de phosphate dans les laits "maternisés", puis "adaptés" (11).

Le modèle de biodisponibilité du calcium est représenté par le lait de femme riche en lactose et où le rapport calcium/phosphore est proche de 2. L'évaluation des besoins quotidiens en calcium a été proposé pour le nourrisson et l'enfant en France (12). Ce besoin est fonction de l'âge et de la vélocité de croissance staturale et donc squelettique. Elle est estimée en France au cours des trois premières années de 400 à 600 mg/jour, un apport inférieur à 300 mg apparaissant insuffisant (13).

En pratique, les besoins sont parfaitement couverts chez les nourrissons recevant un lait diététique dont les concentrations en calcium sont de l'ordre de 70 à 80 mg /100 ml de lait reconstitué.

Cependant, lors de la diversification alimentaire, il faut veiller chez le nourrisson au maintien d'une quantité de lait suffisante faisant en sorte que le régime contienne un certain nombre de produits laitiers (sachant en particulier que les yaourts amènent environ 150 mg de calcum / 100 g, le fromage à pâte cuite 1 000 mg/100 g .

Références

1 - MALLET E., GUGI B., BRUNELLE Ph., HENOCQ A., BASUYAU J.P., LEMEUR H. "Vitamin D supplementation in pregnancy : a controlled trial of two methods". Obstet Gynecol, 1986 : 68, 300-304.

2 - MALLET E., HENOCQ A., H. de MENIBUS C. "Effects of vitamin D supplementation in pregnant women on the frequency of neonatal hypocalcemia. Vitamin D. A pluripotent steroid hormone. Walter de Gruyter, 1994, 869-870.

3 - MALLET E., HENOCQ A., H. de MENIBUS C. "Effets de la supplémentation de la mère en vitamine D sur l'incidence de l'hypocalcémie néonatale". In : Journées Parisiennes de Pédiatrie, Flammarion 1991 : 67-69.

4 - MALLET E., HADJI S., MOUTERDE O. "Statut vitaminique D des nourrissons à l'heure des laits enrichis : expérience rouennaise". Arch Pediatr, 1995 : 2, 194

5 -MALLET E. au nom du Groupe d'Etude du Métabolisme du Calcium en Pédiatrie. "Le rachitisme carentiel en France à l'heure des laits enrichis en vitamine D". Arch Pediatr, 1996 : 3, 393s.

6 -SALLE B.L., MALLET E., PICAUD J.C., LAPILLONNE A. "Statut vitaminique D des prématurés et nourrissons à l'heure des laits enrichis. Journée Lyonnaise de Pédiatrie 1997

7 - ZEGHOUD F., THOULON J.M., GILLET J.Y. "Effet de l'ensoleillement sur le statut vitaminique D de la femme enceinte en France. J Gynecol Obstet Biol Reprod,1991, 20 : 685-690.

8 - MALLET E., BASUYAU J.P., BRUNELLE Ph., H. de MENIBUS C. "Nutritional rickets in breast-fed infants : two cases report". Vitamin D, Chemical, Biochemical and Clinical Endocrinology of Calcium Metabolism 1982, Walter de Gruyter 739-740.

9 -Lait pour nourrissons enrichi en vitamine D : nouvelles modalités de prescription médicamenteuse pour la prévention du rachitisme. Recommandations du Groupe d'Etude du Métabolisme du Calcium en Pédiatrie et Comité de Nutrition, Société Française de Pédiatrie. Arch Fr Pediatr, 1993, 50 : 543-4.

10 -GARABEDIAN M., ZEGHOUD F., ROSSIGNOL C. "Statut vitaminique D du nourrisson vivant en France : résultats d'une enquête multicentrique chez 411 enfants bien portants de 8 à 10 mois". In : Journées Parisiennes de Pédiatrie. Médecine-Sciences, flammarion, Paris, 1991, 51-57.

11 -MALLET E., HENOCQ A., H. de MENIBUS C. "Does elevated phosphorus level of socalled "infant formula" milk have a detectable effect on parathyroid function ?" Ped Res 1979, 13 : 75.

12 - DUPIN H., ABRAHAM J., GIACHETTI I. "Apports nutritionnels conseillés pour la population française". CNRS-CNERNA. Technique et documentation, Paris, 1992, 146 pages.

13 - PETTIFOR J.M. "Dietary calcium deficiency". In : FH Glorieux. Rickets. Nestlé Nutrition Workshop Series, vol. 21. New York, Raven Press, 1991 : 123-143.

 

 

TABLEAU RECAPITULATIF :

SUPPLEMENTATION VITAMINIQUE CHEZ L'ENFANT SAIN

 

 

MODALITES

VITAMINE D

. Nouveau-né

NB : Mère

100 000 à 200 000 UI au 7è mois de grossesse ?

. Nourrisson allaité

- au sein

- au lait diététique

1 000 à 1 200 UI per os/jour

400 à 800 UI per os/jour

ou si doute sur compliance

80 à 100 000 UI/3 mois

. Nourrisson au régime varié

(et < 500 ml de lait diététique)

1 000 à 1 200 UI per os/jour

ou si doute sur compliance

80 à 100 000 UI/3 mois

. Enfant ---> 5 ans

80 à 100 000 UI/3 mois pendant l'hiver (novembre et février)

Formes médicamenteuses

utilisables

Prophylaxie journalière

- Adrigyl (D3) 1 gtte = 300 U

- Uvestérol D (D3) dose L = 800 U ;

n°1 = 1 000 ; n°2 = 1 500

- Stérogyl (D2) 1 gtte = 400 UI

- Zyma (D2) 1 gtte = 300 UI

Dose de charge

- Uvedose 100 000 U/ampoule

- Zyma D2 80 000 U/ampoule.

- Administration per os à la cuillère avec un peu d'eau ou de lait

- Prescription à inscrire en rouge dans le carnet de santé