Hydratation
par voie entérale du prématuré :
le soluté de réhydratation orale (SRO) hypoosmolaire, une alternative
à la voie veineuse ?
H.
Razafimahefa. Service de Pédiatrie et Réanimation Néonatales.
Hôpital
Antoine Béclère, 92 141 Clamart.
1.
Introduction
La
prise en charge d'un nouveau-né (NN) prématuré impose des
apports hydriques initiaux permettant une évolution pondérale
" physiologique ", avec perte de poids de naissance (PN) " physiologique
" d'environ 10%, et reprise du PN avant 15 jours de vie (1). Ces apports
doivent compenser les pertes hydriques insensibles (surtout transcutanées
et respiratoires), et rénales. Du fait de la maturation digestive progressive
(tant pour les capacités d'absorption en nutriments que pour la motricité
digestive), l'alimentation entérale lactée doit être donnée
prudemment, surtout chez les prématurés de moins de 34 semaines,
et / ou de moins de 1750 g (2,3,4). Elle ne suffit pas à assurer les
apports hydriques nécessaires initialement, obligeant à un apport
complémentaire hydrique en prévention de la déshydratation
(2). La voie de référence pour cet apport est intraveineuse, avec
ses inconvénients iatrogéniques (infections nosocomiales, thromboses,
nécroses cutanées), mais aussi son maintien parfois difficile
induisant de multiples reperfusions, avec inconfort de l'enfant, et majoration
de la charge de travail de l'équipe soignante.
Or, les capacités d'absorption intestinale en eau et électrolytes
sont précocement matures chez le prématuré (3). Certains
ont réhydraté avec succès des NN diarrhéiques, nés
à terme ou de faible PN, avec un soluté de réhydratation
orale (SRO), donné par voie entérale (5-9).
Nous
présentons l'expérience, première à notre connaissance,
utilisant, chez des prématurés, une perfusion entérale
d'un SRO hypoosmolaire commercialisé (PSRO), pour prévenir la
déshydratation des premiers jours de vie du prématuré,
en alternative à la voie veineuse ou en complément de celle-ci.
2.
Hydratation du prématuré par voie entérale : de la physiologie
au concept de réhydratation par SRO hypoosmolaire
2.1.
Organogenèse et maturation précoce des fonctions d'absorption
digestives (3)
Chez
le ftus humain, contrairement à ce qui se passe chez beaucoup de
mammifères, l'intestin grêle a la particularité d'être
différencié et fonctionnel très tôt :
- organogenèse complète à 13 semaines ;
- dès 10 semaines, formation des villosités intestinales, différenciation
en monocouche cellulaire de l'épithélium intestinal, et polarisation
de l'entérocyte, avec un pôle apical (porteur d'enzymes et de transporteurs
transmembranaires), un pôle basal (porteur de récepteurs), et deux
pôles latéraux (tight-junctions et transporteurs) ;
- dès 10 semaines, mise en place de la bordure en brosse.
Ainsi, dès 22 semaines, les cellules épithéliales ressemblent
à celles de l'adulte.
Parallèlement se fait une maturation précoce des fonctions d'absorption
digestives : la plupart des enzymes de la membrane entérocytaire sont
détectables peu de temps après la morphogénèse intestinale,
et leur taux augmente avec l'âge gestationnel. La première détectable
est la sucrase isomaltase, d'abord sous forme d'une proenzyme, puis sous forme
adulte dès 30 semaines.
2.2.
Rapidité de maturation de l'absorption en eau, glucides et électrolytes
(3,4)
Les
systèmes de transports transmembranaires sont détectables et fonctionnels
dès 17 à 20 semaines, tant en ce qui concerne l'absorption couplée
de sodium et de glucose, que l'absorption de fructose ou d'acides aminés
: une captation du glucose entraînant une différence de potentiel
transmural est mise en évidence dès 10 semaines impliquant à
la fois la présence, à ce terme, d'un transport couplé
Na-Glu, et d'un système de transport (ou " pompe ") Na-K ATPase.
deux sortes de protéines permettant le cotransport Na-Glu ont été
mises en évidence, sans relation encore évidente avec SGLT-1 (sodium
glucose linked transporter 1), transporteur principal de Na-glu présent
sur la membrane apicale ;
- GLUT-2, transporteur mineur de glucose, localisé sur la membrane basale
est détecté bien avant la formation des villosités ;
- GLUT-5, transporteur de haute affinité du fructose, présent
sur la membrane apicale, est trouvé dès 16-25 semaines.
La capacité de transport de glucose est à la naissance égale
au quart de celle de l'adulte.
2.3.
Limites des fonctions d'absorption en nutriments (4)
Bien
que la maturation des fonctions d'absorption et de digestion soit très
précoce, certaines restent incomplètement développées
à la naissance à terme et a fortiori prématurée.
Il en résulte une insuffisance de digestion gastrique des protéines
les premières semaines, par insuffisance de sécrétion de
pepsine ; une maturation biochimique des enzymes pancréatiques plus tardive
que celle des enzymes intestinales, avec, en postnatal, une sécrétion
fonction de la croissance pancréatique ; une activité lipasique
faible (¼ de celle des enfants de plus de un an), encore plus faible
chez le prématuré, même si elle augmente rapidement pour
être considérée comme normale après le 10ème
jour de vie postnatale ; une capacité de transport transmembranaire de
glucose, continuant à augmenter après la naissance, par augmentation
du nombre et de la densité de transporteurs.
2.4.
Besoins hydrosodés et évolution pondérale initiale du prématuré
La
prévention d'une déshydratation initiale (définie
comme une perte du PN de plus de 15%) reste une des préoccupations majeures
dans la prise en charge des prématurés lors des premiers jours
de vie (1,2). Cette déshydratation peut résulter d'une mauvaise
compensation des pertes hydriques et sodées initiales (1,10).
Les pertes hydriques sont dues à l'association de pertes insensibles
(d'origine transcutanée, par évaporation, et respiratoire), et
de pertes rénales (correspondant à l'adaptation postnatale progressive
du débit de filtration glomérulaire) (10,11).
Les apports hydriques recommandés chez le prématuré
sont initiés à 80 ml/kg/j, puis augmentés de 20 à
30 ml/kg/j pour obtenir à J2-J3 une balance hydrique négative,
puis des apports de l'ordre de 150 à 200 ml/kg/j après la première
semaine de vie (1,2). Ces apports doivent permettre à la fois une perte
de PN " physiologique " de 5 à 15 %, et une reprise du PN vers
J10-J15 pour les prématurés de 30 à 34 semaines. Les apports
hydriques fournis par le lait étant faibles initialement, la technique
de référence actuelle d'hydratation complémentaire fait
appel à la voie veineuse.
Les
pertes sodées, chez le prématuré, sont très
élevées à la naissance, 3 à 4 fois plus que chez
le NN à terme, avec une fuite urinaire sodée les deux premières
semaines de vie, qui disparaît à partir de la 3ème semaine
postnatale (11). Or, un bilan sodé positif est nécessaire à
une croissance postnatale régulière. Les apports recommandés
sont de 3 à 5 mmol/kg/j les deux premières semaines de vie, pour
garder une natrémie dans les limites de la normale entre 135 et 145 mmol/l,
et permettre une récupération plus rapide de la perte de PN.
2.5.
Bases de l'efficacité du SRO
L'utilisation
d'une solution contenant en proportions diverses, de l'eau, du sodium, du glucose,
du potassium, et des bases, comme soluté de réhydratation ingéré
par voie orale existe depuis 3000 ans. Oubliée, puis réutilisée
à partir des années 1940, ses " lettres de noblesse "
ne lui ont été données que dans les années 1960,
avec la découverte du transport couplé sodium-glucose (12). Ce
co-transport Na-glu, actif, situé sur la bordure en brosse de l'entérocyte,
provoque un gradient osmotique entre la lumière intestinale et le milieu
extra-entérocytaire : en présence de Na+ (2 molécules pour
une molécule de glucose), le glucose se lie à son transporteur
et s'accumule dans la cellule, ce qui permet un flux passif d'eau dans l'entérocyte,
puis dans le milieu extra-entérocytaire, donc une absorption hydrique
(13). Le gradient de Na+ est maintenu au pôle basal de l'entérocyte
par la " pompe " Na-K ATPase. Les SRO ont pour buts, d'une part de
lutter contre une déshydratation et contre les troubles hydroélectrolytiques
qui s'ensuivent, et d'autre part, de permettre une réhydratation.
2.6.
SRO hypoosmolaire : SRO " idéal " dans le traitement de la
déshydratation aiguë post diarrhéique du nouveau-né.
Une
première réhydratation orale par SRO couronnée de succès
est décrite en 1975 chez un NN de 2 jours traité pour gastroentérite
aiguë (9). Plusieurs équipes confirment par la suite cette efficacité
du SRO, avec reprise pondérale rapide, même en cas de déshydratation
sévère avec perte de poids de plus de 15 %. Les effets secondaires
décrits se composent d'hypernatrémie (parfois compliquée
de convulsions), d'oedèmes, ou d'irritabilité (5-9).
Poussant plus loin la réflexion, Abdalla et coll ont décrit en
1984 une étude portant sur la réhydratation par voie
entérale d'enfants de petit PN, hospitalisés dans une unité
de soins intensifs, et y développant une diarrhée aiguë (6).
Le SRO, administré par biberon ou par gavage gastrique, permet une réhydratation
aussi rapide que par voie veineuse. Il est bien toléré, y compris
chez des prématurés de moins de 1500 g à la naissance,
même avec un SRO débuté entre J0 et J30.
Au vu des études menées dans plus de 10 pays, un SRO "
idéal " pour enfants de moins de 3 mois, incluant ceux de faible
PN est proposé par Sachdev et coll (7) :
- Concentration de sodium de 60 mmol/l et faible osmolarité, sinon,
risque non négligeable d'hypernatrémie, d'dèmes et
d'irritabilité dans cette population ;
- Polymères de glucose : mieux et plus rapidement absorbés
que le glucose seul ; meilleur apport calorique sans augmentation trop importante
de l'osmolarité ; risque moindre de gradient osmotique en cas de non-absorption
d'une partie des apports glucidiques d'élimination fécale sous
forme de dimères ;
- Concentration de potassium à 30 mmol/l
- Utilisation de citrate comme base : seule base recommandée par
l'ESPGAN pour la composition des SRO (14).
Le
SRO est actuellement considéré par la plupart des pédiatres
des pays en voie de développement comme une alternative thérapeutique
à la voie veineuse dans le traitement des déshydratations
dues aux diarrhées aiguës chez le NN, même de faible PN :
il est efficace, peu coûteux et avec peu d'effets secondaires si on l'utilise
à bon escient. Il est étonnant de découvrir que très
rares sont les études publiées sur l'utilisation du SRO chez le
nouveau-né en dehors des pays en voie de développement.
2.7.
Prévention de la déshydratation par SRO hypoosmolaire : premiers
pas
Dans
notre service, comme dans beaucoup d'autres unités de réanimation,
les NN, prématurés ou à terme, ont une voie d'abord veineuse
dès l'entrée, donc, dès la naissance : d'une part pour
l'administration des différents traitements, d'autre part pour une prise
en charge hydrique et nutritionnelle, puisqu'ils ne sont pas alimentés
les 24 premières heures de vie, en raison de leur pathologie respiratoire.
Jusque vers la fin 1998, au décours de cette alimentation parentérale
exclusive initiale, la prise en charge hydrique et calorique des enfants faisait
appel, en plus de la mise en route progressive de l'alimentation entérale
par gavage gastrique, à une perfusion intraveineuse (IV) de complément,
jusqu'à l'obtention d'apports hydriques lactés suffisants. Cette
perfusion IV, selon les protocoles de prise en charge du service, différait
selon la population :
- voie
veineuse périphérique (VVP) de complément pour les enfants
de plus de 34 SA avec un PN de plus de 1800 g ;
- cathéter veineux ombilical (CVO), puis cathéter central épicutanéo-cave
(CC), posé par voie transcutanée pour les grands prématurés
de moins de 32 SA et de moins de 1500 g. Trois échecs de cette voie
imposaient une pose chirurgicale dans un autre hôpital en l'absence
de service de chirurgie pédiatrique sur place ;
- les enfants " intermédiaires ", de 32 à 34 SA, entre
1500 et 1800 g bénéficiaient d'une VVP initiale, pendant environ
5 jours, le temps que les apports hydriques lactés soient suffisants,
avec parfois un maintien difficile (nécessité de " reperfusions
" multiples). Du fait de la nécessaire progression prudente dans
l'alimentation lactée entérale, on posait parfois l'indication
d'un CC transcutané, de durée habituellement inférieure
à 10 jours, en mettant en balance les risques iatrogéniques
connus et la nécessité d'un apport hydrique de complément
avec risque d'épuisement progressif du capital veineux, et risque de
devoir finalement avoir recours à une pose chirurgicale de CC.
Ce dilemme
a été aigu en cette fin d'année 1998 : un enfant né
au terme de 33 SA, 1800g, âgé de 4 jours, était devenu "
imperfusable " après échecs multiples de pose de VVP. Le
seul recours aurait dû être la pose chirurgicale d'un CC. Cet enfant
avait alors une très bonne tolérance alimentaire. Par extrapolation
à la prise en charge des diarrhées aiguës, où les
capacités d'un épithélium intestinal abrasé restent
suffisamment efficaces pour permettre une réhydratation entérale,
un SRO hypoosmolaire est proposé en perfusion gastrique continue, en
remplacement de la VVP. L'efficacité sur l'hydratation a été
équivalente à celle d'une VVP (reprise du PN en moins de 15 jours
de vie), et la tolérance parfaite.
Cette première expérience a été suivie de quelques-unes,
sporadiques, avec toujours le même succès tant sur le plan hydratation
que tolérance. Le SRO était toujours utilisé en dernier
recours avant la pose éventuelle d'un CC. Naturellement, cette technique
de prise en charge, peu invasive, confortable pour l'enfant, avait été
très rapidement adoptée par notre équipe soignante. Sous
la pression de plus en plus importante de celle-ci, un protocole de prise en
charge a été élaboré, utilisant le SRO en prévention
d'une déshydratation initiale chez le NN : il s'agit d'un concept nouveau,
puisque dans la littérature, les études publiées chez le
NN utilisent un SRO en vue d'une réhydratation post diarrhée.
Notre expérience pilote dans l'utilisation de ce protocole de prise en
charge est relatée ici.
3.
Population et méthodes
La
prise en charge par SRO s'adressait à des NN de plus de 30 semaines d'âge
postconceptionnel, de poids supérieur à 1 000 g, pour lesquels
une perfusion était en place, mais de maintien difficile : VVP, ou CVO
d'ablation prévue en raison des risques d'accidents nosocomiaux majorés
en cas de durée prolongée, ou CC épicutanéo-cave,
dont l'ablation prématurée a été nécessaire.
Tous ces NN avaient une alimentation entérale lactée bien tolérée
avec ingestion d'au moins 10 ml/kg/j, et résidus gastriques inférieurs
au tiers des apports.
Etaient exclus les enfants qui présentaient un échec d'alimentation
entérale avec tolérance digestive inférieure à 10
ml/kg/j, une anoxie périnatale sévère, une détresse
respiratoire " importante " (intubation-ventilation assistée
avec FiO2 > 25%), une malformation congénitale sévère.
Méthodes
Le
maintien d'une hydratation suffisante était assuré dès
la naissance par perfusion intraveineuse (CVO ou VVP).
L'alimentation entérale lactée était introduite précocement
dès 24 heures de vie en gavage gastrique discontinu. Après une
bonne tolérance lactée d'une durée minimale de 12 heures,
un SRO hypoosmolaire commercialisé (tableau 1) était donné
en perfusion entérale continue par gavage gastrique (PSRO). La
PSRO, débutée à 1 ml/h, était augmentée toutes
les 12 à 24 heures de 1 ml/h jusqu'à 5 ml/h au maximum. Les apports
lactés étaient augmentés de 20 ml/kg/j. Les apports hydriques
apportés par voie IV étaient progressivement remplacés
par les apports entéraux associant SRO et lait. Dès que ceux-ci
atteignaient 120 à 150 ml/kg/j, l'apport IV était arrêté.
Puis, les apports de lait étaient majorés, et le SRO diminué
pour aboutir finalement à des apports hydriques exclusivement d'origine
lactée. La figure 1 donne un exemple de relais de la voie veineuse par
le SRO chez un NN en tout début d'alimentation. La procédure était
similaire en cas d'ablation prématurée d'un CC épicutanéo-cave,
celui-ci étant remplacé initialement par une VVP " de sécurité
".
Critères
d'évaluation de la méthode d'hydratation
L'efficacité
de l'hydratation est évaluée sur la courbe pondérale (pourcentage
de perte de PN maximale, jour de la perte de PN, nombre de jours pour atteindre
le PN).
La tolérance digestive est évaluée sur les résidus
gastriques : leur volume (supérieur ou inférieur au 1/3 des apports
entéraux totaux), la présence d'une entéropathie (définie
comme l'association d'un ballonnement abdominal, d'anses digestives trop bien
visibles, et la présence de plus de 2 résidus bilieux par 24 heures).
Les effets secondaires recherchés sont digestifs : vomissements,
nécessité de recours aux prokinétiques, ballonnement abdominal,
rectorragie, entérocolite ulcéronécrosante (ECUN).
Les troubles métaboliques sont dépistés : oedèmes,
troubles ioniques, déshydratation importante (avec perte de PN de plus
de 15 %, et / ou protidémie supérieure à 60 g/l), insuffisance
rénale avec créatininémie supérieure à 100
mmol/l.
Les échecs de perfusion entérale de SRO imposent un arrêt
de celui-ci, et un traitement conventionnel IV. Les critères d'échecs
sont : l'ECUN, l'entéropathie sévère, de durée
supérieure à 48 heures, malgré un traitement par prokinétiques.
Les
analyses statistiques ont été effectuées grâce au
logiciel Epi-infoâ de l'Ecole Nationale de Santé Publique (version
2000).
4.
Résultats
4.1.
Caractéristiques de la population
Du
01/04/1999 au 30/04/2001, 99 nouveau-nés, 56 garçons et
43 filles, ont été traités, dont 28 issus de grossesses
multiples. Cinquante-six enfants (56 %) sont nés par césarienne,
dont 21 sous anesthésie générale (38 %).
Trente-deux enfants ont été sédatés par morphine
les 48 premières heures de vie.
Aucun enfant n'est décédé durant la perfusion entérale
continue de SRO. Un enfant est décédé secondairement
d'une leucomalacie périventriculaire.
La répartition par terme, par âge d'introduction du SRO, et par
poids est décrite dans les figures 2, 3 et 4.
4.2.
Abords veineux
4.2.1.
Avant mise en route de la PSRO
Seuls
5 enfants, âgés d'au moins 32 SA, avec un PN supérieur
à 1700 g, ont bénéficié d'une VVP. Les autres
avaient un CVO.
Pour 11 NN, la PSRO était débutée après ablation
prématurée d'un CC transcutané, pour infection nosocomiale,
thrombose, ou causes diverses (veinite ne cédant pas malgré
une perfusion hypoosmolaire, faisant craindre une infection nosocomiale, fuite,
bulles, ou section). Cette ablation survenait en moyenne 4 jours après
la pose (3 à 20 jours), dans 91 % des cas (10 enfants) dans la première
semaine.
4.2.2. Pendant la PSRO
Le CVO était laissé en place 4 jours en moyenne (entre 1 et
8 jours). A l'ablation, la culture du CVO a été positive chez
7 enfants, sans signe infectieux clinique ou biologique.
La moitié des enfants (n = 50) a nécessité le relais
du CVO par une VVP.
Pour les 55 enfants ayant eu une PSRO sous couvert d'une VVP, la mise en place
de celle-ci a été réussie au 1er essai dans 54 % des
cas, au 2ème dans 31 %, au 3ème ou plus chez 15 % des enfants.
25 NN (46 %) ont été reperfusés en périphérie
au moins 2 fois (dont 1 enfant 4 fois).
4.3.
Modalités d'introduction du SRO
La PSRO
a été débutée en moyenne à J3 de vie (entre
J1 et J17), pour 91 enfants avant la fin de la première semaine de vie.
Sa durée moyenne était de 6 jours (1 à 12 jours).
L'indication majoritaire (pour 88 nouveau-nés) était d'éviter
la pose d'un CC en relais du CVO, ou de diminuer la durée de perfusion
IV. Pour 11 enfants, la PSRO, associée d'emblée à une VVP
" de sécurité ", était débutée
après ablation prématurée d'un CC transcutané.
Dans la sous-population GPE, 48 ont reçu le SRO avant J4 (64 %), et 70
(93 %) avant la fin de la première semaine de vie, avec une VVP de complément
d'hydratation.
4.4.
Evolution pondérale initiale
Les 91enfants
pour lesquels le SRO a été introduit la première semaine
de vie ont perdu en moyenne 9 +/- 3,4 % de leur PN. Quatre vingt dix
enfants (99 %) ont perdu au maximum 15 % de leur PN. Un seul enfant a perdu
20 % de son PN. La perte de PN maximale est survenue à J3
en moyenne (J1 à J10).
La reprise du PN se faisait en moyenne à J11, dans 92 % des cas avant
J15 (n = 84). L'évolution pondérale de la sous-population GPE
est superposable à celle de l'ensemble de la population. Le PN est
atteint en moyenne à J10 (J4 à J16) ; 89 % des enfants
l'ont atteint avant J15, 95 % à J15 de vie.
4.5.
Quantités ingérées pendant la PSRO (figure 5)
La quantité
moyenne de SRO ingérée est de 244 +/- 119 ml/kg. Elle varie de
10 à 536 ml/kg. Les enfants sans échec de traitement ingèrent
en moyenne 278 (+/- 101) ml/kg, avec des extrêmes allant de 200 à
535 ml/kg, sur une durée de 6 +/- 2 jours (entre 4 et 12 jours). Parallèlement,
les apports lactés de ces enfants sont de 430 (+/- 213) ml/kg. Les enfants
ayant nécessité une VVP de complément initial ont reçu
en moyenne 135 (+/- 105) ml/kg d'apports hydriques veineux périphériques.
4.6.
Evolution pondérale sous SRO
Trente-deux
NN ont présenté une stagnation pondérale (prise de poids
inférieure à 15 g/j pendant au moins 72 heures sous SRO ou après
celui-ci). Ils ont ingéré 254 (+/-95) ml/kg de SRO, 412 (+/- 135)
ml/kg de lait, apportant au total 390 kcal/kg sur 6 jours soit 65 kcal/kg/j.
Ils ont repris du poids dès que les apports caloriques ont été
supérieurs à 90 kcal/kg/j.
4.7.
Tolérance digestive
4.7.1.
Echecs de traitement
Sept NN, tous eutrophes, ont nécessité l'arrêt de la PSRO
et la pose secondaire d'un CC, (tableau 2). Cinq cumulaient au moins 2 effets
secondaires digestifs.
La grande prématurité, avec un terme de naissance inférieur
à 30 SA révolues multiplie par 8 le risque relatif d'échec
(odd ratio = 13, limites de l'intervalle de confiance du risque relatif
entre 2,36 et 26,4 ; p < 0,01). Le PN, l'hypotrophie, le fait d'être
issu d'une grossesse multiple, le mode d'accouchement, l'anesthésie
péri ou postnatale ne sont pas liés au risque d'échec.
De même, le terme corrigé d'introduction de la PSRO ne semble
pas influer statistiquement sur les risques d'échec.
4.7.2. Complication digestive majeure : l'entérocolite ulcéronécrosante
Un enfant a développé une entérocolite ulcéronécrosante.
Il s'agissait d'un prématuré eutrophe de 31 SA et 2 jours, issu
d'une troisième grossesse sans particularité, né par
voie basse après travail spontané, avec une bonne adaptation
à la vie extra-utérine. En dehors d'une détresse respiratoire
transitoire, les premiers jours de vie ont été marqués
par un épisode de tachycardie supraventriculaire, bien tolérée,
avec un électrocardiogramme normal au décours. L'alimentation
entérale a été débutée dès H24 de
vie, par gavages gastriques discontinus de lait de femme. La PSRO, introduite
après 24 heures d'alimentation bien tolérée, a été
poursuivie pendant 6 jours, avec une très bonne tolérance en
dehors de deux vomissements résolutifs après proclive ventral
et allongement de la durée des gavages discontinus. Une parentérale
de complément a été maintenue sur le CVO jusqu'à
J5 de vie. Le lait pour prématurés a été introduit
de J3 à J9. L'enfant a ingéré pendant la PSRO : 370 ml/kg
de SRO, 125 ml/kg de lait de femme et 390 ml/kg de lait pour prématurés,
soit 475 kcal/kg sur 6 jours. Après une stagnation pondérale
de J7 à J10 (les 3 derniers jours de la PSRO alors que l'enfant ingérait
entre 70 et 95 kcal/kg/j), la courbe de poids redevient ascendante, avec reprise
du PN à J12. Cet enfant récidive des accès de tachycardie
supraventriculaire entre J16 et J17, à distance de l'arrêt de
la PSRO. Certaines, mal tolérées, bien que de durée brève
avec pâleur, voire malaise, motivent un traitement par digoxine puis
Cordaroneâ à partir de J30.
A J18 de vie, 8 jours de l'arrêt du SRO, l'enfant développe un
tableau typique d'ECUN : apnées, troubles hémodynamiques centraux
et périphériques, ballonnement abdominal et rectorragies. L'ASP
confirme la présence d'une pneumatose des parois intestinales et portale.
L'évolution est favorable après traitement médical simple
(ventilation assistée transitoire, arrêt alimentaire pendant
3 semaines et antibiothérapie parentérale pendant 10 jours).
Les rectorragies et la pneumatose persistent les 3 premiers jours de traitement
; le syndrome inflammatoire biologique disparaît dès J7 de traitement.
L'alimentation entérale est reprise sans problème par du lait
de mère puis par du lait pour prématurés après
15 jours de bonne tolérance entérale. L'alimentation parentérale
est poursuivie pendant 23 jours. Une septicémie secondaire survenue
à point de départ du CC posé au début de l'ECUN
motive l'ablation de celui-ci : en complément d'une hydratation par
VVP, une PSRO a été reprise pendant 24 heures, avec une très
bonne tolérance, dans l'attente de la pose d'un deuxième CC.
4.7.3. Effets secondaires digestifs mineurs
Vingt-huit enfants ont eu des effets secondaires mineurs sans échec
de traitement. Statistiquement, le sous-groupe GPE n'est pas plus à
risque que la population générale. De même, ni une naissance
avant 30 SA, ni l'hypotrophie, ni le type d'anesthésie per / postnatale,
n'influe sur la présence de ces effets secondaires.
Ils ont tous été transitoires, de durée inférieure
à 48 heures, cédant après traitement simple : proclive
ventral, allongement de la durée de gavage discontinu de lait, ou au
maximum, traitement par prokinétiques. Ils comportent :
- des
RG supérieurs au 1/3 des apports chez 8 NN (dont 4 de moins
de 31 SA). Trois de ces enfants ont bénéficié de prokinétiques
;
- des RG bilieux chez 13 NN (dont 5 de moins de 31 SA) ;
- une entéropathie chez 3 enfants, cédant après
un palier de 24 heures sans augmentation des apports entéraux, (1
enfant a bénéficié de prokinétiques). Un
terme de naissance inférieur à 30 SA révolues multiplie
le risque relatif d'entéropathie par 2 (p < 0,05). Le risque relatif
d'échec en cas d'entéropathie avant mise en route de la PSRO
est multiplié par 7, même en cas de naissance après
30 SA (limites de confiance du RR à 95 % : [1,55-33,8] ; odd ratio
= 8 ; p < 0,01).
- des vomissements chez 12 NN, d'une durée inférieure
à 12 heures pour 9 d'entre eux. Les 2/3 de ces vomissements sont
apparus en fin de traitement par SRO, avec des bolus de gavages gastriques
discontinus supérieurs à 10 ml/kg. Seuls 2 enfants ont nécessité
un traitement par prokinétique. Pour les autres, les vomissements
se sont amendés après simple augmentation de la durée
de gavage discontinu et proclive ventral.
- un ballonnement abdominal chez 4 NN, ayant cédé après
un palier de 48 à 72 heures dans la progression de l'alimentation
entérale.
4.8.
Tolérance métabolique
Aucun enfant
n'a présenté d'oedèmes.
Aucun trouble ionique n'a été constaté sur 27 ionogrammes
sanguins effectués de façon systématique 2 à 4 jours
après mise en route du SRO chez des NN de moins d'une semaine.
Sept enfants présentaient une insuffisance rénale biologique fonctionnelle
(avec créatininémie entre 100 et 115 micromoles/l, associée
à une protidémie entre 60 et 65 g/l).
5.
Discussion :Prévention de la déshydratation initiale du prématuré
par SRO : un nouveau concept
Cette
expérience pilote utilise un SRO de composition adéquate pour
les nouveau-nés (7). Elle emploie une technique de réhydratation
connue, la voie entérale, avec perfusion continue par gavage gastrique
de ce SRO. Mais elle se distingue en l'utilisant pour la première fois
: d'une part en prévention d'une déshydratation trop importante
dans les premiers jours de vie chez des NN prématurés sans diarrhée
; d'autre part en apport hydrique complétant l'apport lacté en
relais ou en complément d'une voie veineuse.
5.1.
Efficacité de la prévention de la déshydratation par SRO
Avec
des apports hydriques calqués sur les recommandations habituelles chez
le prématuré (1,2), mais apportés en très grande
partie par voie entérale (jusqu'à 80 % des apports totaux des
premiers jours), en association à un abord veineux, 99% des enfants
n'avaient pas de déshydratation clinique. L'évolution pondérale
est classique pour la population étudiée (1,2) : la perte
de PN moyenne est de 9%, survenant vers J3, avec une reprise du PN dans 92%
des cas avant J15, et même dans 95% des cas dans la population la plus
immature. Le seul enfant ayant perdu 20% de son PN à 24 heures de vie
n'avait pas de signe de déshydratation biologique : sa protidémie
était inférieure à 60 g/l, avec une natrémie normale,
et une créatininémie à 95 mmol/l. La dissociation entre
la perte de poids isolée et les données biologiques peut faire
évoquer un PN faux, ou une hémodilution anténatale.
Cette efficacité de la PSRO en prévention de la déshydratation
avec évolution pondérale équivalente à celle rencontrée
lors d'une prise en charge classique par apport complémentaire IV est
à rapprocher de l'efficacité clinique trouvée par différents
auteurs ayant pris en charge des NN diarrhéiques déshydratés,
même de faible PN, par réhydratation par voie entérale (5-9).
Elle est probablement le reflet de la maturation rapide des systèmes
de transport transmembranaires, sur lesquels l'efficacité du SRO est
basée, qui sont détectables et fonctionnels précocement
(3,13).
5.2.
Bonne tolérance métabolique
Aucun
trouble ionique n'a été trouvé dans notre population.
Certains auteurs ont décrit des effets secondaires à type de dysnatrémie
(surtout hypernatrémie parfois responsable de crises convulsives), irritabilité
et oedèmes, disparaissant 24 heures après l'arrêt du SRO
(5,6). Ces troubles survenaient surtout chez des NN de faible PN. Ils n'ont
pas été retrouvés dans notre étude probablement
pour deux raisons : la concentration faible en sodium du SRO utilisé
(60 mmol/l, au lieu des 90 mmol/l utilisés dans les études citées),
et son hypoosmolarité.
Un quart de la population a présenté des signes de déshydratation
biologique avec hyperprotidémie et insuffisance rénale fonctionnelle,
mais sans signe clinique évident de déshydratation, et sans trouble
ionique. Tous les signes se sont amendés en moins de 3 jours.
5.3.
Tolérance digestive dépendante du terme de naissance et de l'absence
d'entéropathie avant SRO
Pour
les enfants ayant une bonne tolérance digestive, les apports hydriques
des premiers jours de vie sont assurés pour moitié par le lait.
Le complément d'hydratation est apporté pour les 2/3 par le SRO.
Donc, en l'absence d'échec du traitement, la voie entérale assure
à elle seule plus de 80% des apports hydriques. Ceci confirme
la fonctionnalité précoce de l'absorption hydrosodée (3,13).
Un tiers des enfants a néanmoins présenté une stagnation
pondérale sous SRO : leurs apports caloriques (65 kcal/kg/j) étaient
juste suffisants pour le catabolisme de base, mais probablement insuffisants
pour permettre un anabolisme.
Seulement 7 % des enfants ont présenté une intolérance
digestive d'intensité et de durée suffisantes pour obliger à
l'arrêt de la PSRO. Plus de la moitié cumulaient au moins 2 effets
secondaires digestifs. Le facteur de risque majeur d'échec est un terme
de naissance inférieur à 30 SA révolues. 30 SA est un âge-clé
dans la maturation digestive globale (3,4) : au niveau intestinal, l'organogénèse
est complète, l'épithélium intestinal est différencié,
l'entérocyte s'est polarisé, les différentes activités
enzymatiques concernant l'absorption en eau, glucides et électrolytes
sont proches de celles de l'adulte et fonctionnent comme telles ; les fonctions
gastriques, pancréatiques et biliaires, bien qu'insuffisantes, sont en
place ; l'innervation de l'ensemble du tube digestif haut est identique en densité
à celle de l'adulte bien que le péristaltisme soit encore mal
coordonné ; la maturation digestive est accélérée
par un gavage discontinu de lait. Le risque d'échec majoré par
un terme de naissance avant 30 SA, et par la présence d'une entéropathie
avant la PSRO (signe d'immaturité globale de digestion) est probablement
expliqué par une maturation digestive qui se poursuit en postnatal immédiat,
mais qui n'est optimale qu'en 10 à 15 jours de vie postnatale (4) ; or
le SRO est introduit avant l'acquisition de cette maturité digestive,
ou chez des enfants à 30 SAP, mais dont la maturité digestive
a pu être retardée par la pathologie initiale. Ceci explique aussi
le risque relatif d'entéropathie doublé en cas de naissance avant
30 SA.
Les effets secondaires transitoires observés chez certains enfants pour
lesquels la PSRO a été un succès sont le reflet de cette
maturation postnatale digestive encore en cours au moment de l'introduction
de la PSRO : immaturité de la motricité digestive (responsable
de résidus gastriques importants, de vomissements et de ballonnement
abdominal), immaturité des fonctions de digestion (responsable de résidus
gastriques bilieux, voire d'entéropathie) (4).
L'entérocolite ulcéro-nécrosante présentée
par un seul enfant peut avoir pour origine la PSRO, même si elle ne survient
que 8 jours après l'arrêt de la perfusion entérale. Mais
cet enfant présentait aussi d'autres facteurs de risque :
- des
troubles du rythme parfois mal tolérés sur le plan hémodynamique
pouvant être responsables d'insuffisance d'irrigation sanguine intestinale
;
- une stagnation pondérale, avec insuffisance d'apport calorique en
fin de PSRO pouvant avoir contribué à une mauvaise régénération
d'un épithélium intestinal en pleine croissance après
ces épisodes de mauvaise irrigation ;
- une alimentation initiale par un lait pour prématuré dont
les apports lipidiques étaient apportés par de l'huile de poisson,
au lieu de phospholipides d'uf. Or les phospholipides d'uf ont
été décrits comme protecteurs vis-à-vis de l'ECUN
(15).
5.4.
Avantages de l'hydratation par voie entérale
La prise
en charge mixte initiale de l'hydratation à la fois par voie entérale
(après 24 heures de vie), et par voie veineuse (abord veineux dès
la naissance, ombilical dans la grande majorité des cas) permet d'assurer
aux enfants une sécurité, le temps que la maturation intestinale
accélérée en postnatal se mette en place. En revanche,
très rapidement, l'absorption par voie entérale est efficace,
puisque l'évolution pondérale des premiers jours de vie, en grande
partie reflet de l'hydratation est classique(1,2). Cette efficacité de
la voie entérale, illustrée par la tolérance de 80 % des
apports hydriques apportés par voie entérale, permet un remplacement
progressif de la voie veineuse. La durée de perfusion est ainsi raccourcie.
La PSRO a ainsi permis d'éviter une VVP en relais du CVO dans la moitié
des cas, avec plusieurs avantages : pour l'enfant, diminution des risques iatrogéniques
liés à la voie veineuse, mais aussi amélioration de son
confort, par diminution du nombre de " reperfusions " ; pour le personnel
soignant, diminution de la charge de travail, par diminution du temps passé
à la mise en place des perfusions et " reperfusions ".
Les difficultés de prise en charge liées à l'abord veineux
sont illustrées dans cette étude : risques infectieux avec une
culture positive de CVO chez 7 % des enfants, malgré une durée
de perfusion par voie ombilicale classique de 4 jours ; complications iatrogéniques
des cathéters centraux (infections nosocomiales, thrombose, veinite)
; difficultés de maintien de la VVP avec nécessité de reperfuser
1/3 des enfants au moins 2 fois.
Pour les enfants ayant présenté un échec de la technique,
la PSRO a néanmoins permis une épargne transitoire du capital
veineux, dans l'attente de pose d'un CC par voie transcutanée.
6.
Conclusion
Chez
le prématuré de plus de 30 SA, l'apport hydrique complémentaire
à l'alimentation entérale lactée, nécessaire initialement
par obligation de prudence dans l'introduction alimentaire, était jusque
là classiquement apporté par voie IV.
Cette étude, réalisée en réanimation néonatale,
montre pour la première fois l'efficacité d'une perfusion entérale
de SRO hypoosmolaire en prévention de la déshydratation des premiers
jours de vie. Elle est en faveur d'une maturation et d'une efficacité
précoce des mécanismes entérocytaires d'absorption hydroélectrolytique
: l'évolution pondérale sous PSRO est superposable à celle
de la population générale prématurée avec une perte
moyenne de PN de 9 %, toujours inférieure à 15 %, s'effectuant
le plus souvent vers J3. La reprise du PN s'effectue dans les normes physiologiques
admises : en moyenne à J11, et dans 92 % des cas avant J15.
Les effets secondaires digestifs, à type d'entéropathie, de RG
importants, ou de vomissements, sont facilement traités par des méthodes
simples (proclive, décubitus ventral, prokinétiques), et sont
très souvent transitoires (moins de 48 heures). Les effets secondaires
majeurs (ECUN) ne sont pas plus fréquents que dans la population générale
des mêmes termes pris en charge en réanimation.
Les échecs de PSRO sont peu nombreux (7 %), par effets secondaires digestifs
prolongés. Leur risque est augmenté par une naissance avant 30
SA, et la présence, avant la mise en route de la PSRO, d'une entéropathie.
Les hypotrophes sans entéropathie initiale ont une bonne tolérance
à la PSRO.
Les effets secondaires métaboliques sont rares, et toujours mineurs (insuffisance
rénale fonctionnelle transitoire).
La PSRO pourrait être une bonne alternative à la voie veineuse.
Elle est peu invasive, peu coûteuse, avec peu de risques si elle est utilisée
à bon escient. Elle permet une épargne veineuse, avec un bénéfice
obtenu dans le confort de l'enfant, surtout dans les complications iatrogéniques
de la voie veineuse, mais aussi une diminution de la charge de travail infirmier.
Son indication particulière se trouve chez le prématuré
né à plus de 30 SA sans entéropathie initiale. Cette
pratique, simple, pourrait être diffusée avec profit dans tous
les services de néonatalogie, y compris dans ceux ayant des moyens techniques
limités (pays en voie de développement).
Une validation de cette approche nouvelle de l'hydratation du prématuré
les premiers jours de vie est en cours, avec mise en route prochaine d'un
essai multicentrique d'équivalence entre les 2 techniques d'hydratation,
SRO par voie entérale ou classique par voie veineuse.
Mots-clés
: Soluté de réhydratation orale hypoosmolaire, prématuré,
hydratation
Références
1.
Gouyon JB et al, Objectifs des apports hydrosodés dans la première
semaine de vie du prématuré : comment les atteindre ? In : Equilibre
hydroéléctrolytique du grand prématuré. Paris, Arnette,
1997 (99-118).
2. Voyer M et al, Apports nutritionnels : principe des calculs, modalités
et surveillance. In : Prématurité, le préterme. Paris,
Elsevier, 1998 (113-134).
3. Montgomery RK et al, Development of the human gastrointestinal tract : twenty
years of progress, Gastroenterology, 1999 (116:702-31).
4. Schmitz J. Développement des fonctions digestives. In : Salle BL,
Putet G, ed. Alimentation du prématuré et du nouveau-né
à terme dans les trois premiers mois de vie, Paris, Doin , 1996 (39-57).
5. Pizarro D et al, Treatment of 242 neonates with dehydrating diarrhea with
an oral glucose-electrolyte solution, J Pediatr, 1983 (102:153-6).
6. Abdalla S et al, Oral rehydration for the low-birthweight baby with diarrhoea,
Lancet,1984 (Oct :818-9).
7. Sachdev HP et al, Oral rehydration therapy of neonates and young infants
: optimal content of oral rehydration solution, Indian Pediatr, 1990 (27(12):1333-6).
8. Barghava SK et al, Oral therapy of neonates and young infants with World
Organization Rehydration Packets : a controlled trial of two sets of instructions,
J Pediatr Gastroenterol Nutr, 1986 (5:416-22).
9. Morville P, Pertes de chaleur et pertes hydriques : les différents
moyens de protection. In : Gouyon JB, Guignard JP, Siméoni U, ed. Equilibre
hydroéléctrolytique du grand prématuré, Paris, Arnette,
1997 (47-58).
10. Nalin DR et al, Oral maintenance for cholera in adults, Lancet, 1968 (2:370-72).
11. Schmitz J, Digestion et absorption des sucres. In : Navarro J, Schmitz J,
ed. Gastroentérologie pédiatrique, 2ème édition,
Paris, Flammarion Médecine Sciences, 2000 (20-28).
12. Guignard JP, Développement de la fonction rénale et du contrôle
de l'homéostasie hydrosaline. In : Gouyon JB, Guignard JP, Siméoni
U, ed, Equilibre hydroéléctrolytique du grand prématuré,
Paris, Arnette, 1997 (15-30).
13. Baral MR, Experience with 100 diarrhoea cases treated at Narayani Zonal
Hospital Rehydration Therapy Center, Birgunj, J Nep Med Ass, 1975 (13:77-87).
14. ESPGAN Working Group, Recommandations for composition of ORS for the children
in Europe, J Pediatr Gastroenterol Nutr, 1992 (14:113-15).
15. Carlson SE et al, Lower incidence of necrotizing enterocolitis in infants
fed a preterm formula with egg phospholipids, Pediatr Res, 1998 (44:491-98).
|