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Titre: Explorations fonctionnelles digestives possibles dans la période néonatale
Année: 1997
Auteurs: - Scaillon M.
Spécialité: Néonatologie
Theme: Gastroentérologie pédiatrique

Explorations fonctionnelles digestives possibles dans la période néonatale.

Dr M. SCAILLON* **, Pr S. CADRANEL*

*Hôpital Universitaire des Enfants Reine Fabiola, Université Libre de Bruxelles

et ** Hôpitaux civils de Charleroi, Belgique

Introduction

Chez l’enfant prématuré, la fonction digestive dépend de l’évolution chronologique et intégrée de qualités de la sécrétion, de l’absorption mais aussi de la motricité du tube digestif (TD). Une perturbation dans l’évolution d’une de ces trois qualités entraîne un retard de la maturation fonctionnelle du TD. Nous parlerons particulièrement de la motricité.

Au cours de l’ontogenèse, la motricité du TD, y compris celle de sa partie striée, va autoriser le contact entre la muqueuse digestive et le liquide amniotique.

En effet, la déglutition, que l’on observe in utero dès la 17ième semaine gestationnelle, n’est certes pas très active, mais elle permet, chaque jour, à quelques millilitres de liquide amniotique d’exercer, au contact de la muqueuse, leur effet trophique favorable au processus de maturation.

Toutefois la fonction nutritive de la déglutition et le péristaltisme permettant un transit efficace n’apparaissent qu’entre la fin du 2ième trimestre et les premiers mois de vie extra-utérine. Cette organisation motrice progressive dépend de l’intégrité d’autres systèmes en maturation: le système nerveux entérique, le système nerveux autonome, la production de messagers, le système nerveux central. Les pathologies de la motricité nous illustrent l’importance de chacun de ces systèmes. L’efficacité de la motricité dépend également de la maturité des myocytes et des cellules interstitielles de Cajal, impliquées dans l’orchestration du rythme de dépolarisation des myocytes et donc de leur sensibilité aux influences nerveuses et hormonales.

Durant la vie extra-utérine, le mode de nutrition du prématuré modifie le profil de production des hormones digestives.

Contrairement à ce qui s’observe chez le nouveau né à terme, le prématuré de moins de

33 semaines ne montre pas de réponse de production d' insuline, d' hormone de croissance ou d’entéroglucagon lorsqu’il est nourri par bolus ou en goutte à goutte (1). Après 3 semaines de vie extra-utérine, le prématuré en nutrition parentérale exclusive, a un taux de base de motiline, entéroglucagon et neurotensine nettement plus bas que celui des prématurés du même âge en nutrition entérale(2). Ces études suggèrent que la nutrition entérale précoce stimule la maturation de la motricité digestive et de son adaptation à la vie extra-utérine.

Il est intéressant de noter que, dans la chronologie du développement de la motricité digestive, l’organisation, immature encore mais déjà efficace de la motricité intestinale, précède l’apparition d’une succion dite nutritive, c’est à dire suffisamment puissante et répétée.

Avant 34 semaines de gestation, la succion n’est pas nutritive. Elle peut toutefois, par sa stimulation chez le prématuré, devenir plus rapidement efficace. Elle améliore ainsi également la tolérance à l’alimentation entérale par gavage, réduit le temps de transit et améliore la prise de poids (3 )

Après la naissance, à terme, le nouveau né ne présente pas d’emblée une motricité de type adulte. Par exemple :

- l’anatomie de la jonction oesogastrique et sa sensibilité à la gastrine, évolueront durant plusieurs mois encore,

- la relaxation adaptative du fundus, la pression antrale et son activité clonique, coordonnée à celle de duodénum, apparaissent après quelques heures de vie,

- les tracés de manométrie intestinale du jeune enfant sont particuliers : délais plus courts entre les phases III des complexes moteurs migrants et amplitudes plus modestes des ondes, présence de salves d’ondes en phase II que l’on ne trouve pas chez l’adulte normal (elles disparaissent à un âge qui n’a pas encore été déterminé),

- la motricité colique est sans doute peu importante in utero. Elle n’a pas été encore bien étudiée même chez l’animal. La relaxation du sphincter anal avec émission de méconium n’est pas normale avant la naissance et est inquiétante si elle ne se produit pas dans les premières 24 heures de vie.

But de l’étude fonctionnelle de la motricité digestive

Dans un service de néonatalogie, le praticien se base bien entendu en priorité sur l’âge gestationnel de l’enfant et sur son état général pour décider de l’introduction d’une nutrition entérale. Des signes cliniques le mettront en garde contre la poursuite d’une telle alimentation.

Les investigations fonctionnelles pourraient aider à:

- apprécier le moment où l’enfant prématuré pourra être nourri partiellement ou totalement par voie entérale et quand il pourra l’être par la bouche,

- dépister le début d’une entérocolite nécrosante,

- diagnostiquer la cause d’une altération du transit,

- démontrer un reflux gastro-oesophagien à l’origine d’apnées,

- justifier la prescription médicale,

- poser et guider le geste chirurgical.

Méthodes nouvelles applicables au prématuré et au nouveau né

Ces méthodes utilisent des principes de physique divers et souvent exploités à d’autres fins depuis longtemps. Certaines sont encore du domaine de la recherche clinique et nécessitent une validation, en particulier en ce qui concerne la physiologie du prématuré ou du petit enfant normal. Le matériel n’est pas toujours suffisamment miniaturisé, ce qui en réduit actuellement l’usage dans les unités de néonatalogie, voire même de pédiatrie.

- pHmétrie versus impédancemétrie oesophagienne intraluminale

BUT : détecter des flux rétrogrades du contenu gastrique, en particulier chez des patients présentant des tableaux atypiques de reflux gastro-oesophagien.

PRINCIPE DE LA TECHNIQUE : la pHmétrie est une technique devenue classique.

Elle montre combien une technique d’exploration fonctionnelle peut devenir, par sa miniaturisation d’abord et par sa meilleure diffusion dès lors, un outil « indispensable ».

Elle a ses limites, les tracés de jeunes nourrissons sont parfois difficiles à interpréter en raison du pH gastrique le plus souvent neutralisé par le repas. De plus, dans les cas d’ aspiration ou de troubles du rythme cardiorespiratoire ou de la conscience du nourrisson, le pH du reflux n’est sans doute pas le seul facteur important.

L’impédancemétrie utilise la mesure d’un paramètre en électricité en courant alternatif:

Z = U/I, où Z est l’impédance, U est la tension efficace, I est l’intensité efficace.

Elle s’exprime en Ohms. Elle dépend de la conductivité du milieu qui entoure le segment qui sépare les deux électrodes.

Les couples d’électrodes annulaires forment un segment de mesure dans lequel passe un courant d’amplitude donnée, les variations de voltage enregistrées entre les électrodes donnent une mesure des variations d’impédance du milieu qui entoure le segment séparant les électrodes.

Application en exploration physiologique :

Les tissus qui entourent l’organe creux, la paroi musculaire de l’organe exploré ont eux- mêmes une certaine conductivité, les électrodes y sont sensibles s' il y a contact entre les anneaux et la muqueuse. La conductivité de la paroi contractée est légèrement supérieure à celle de la paroi au repos. La conductivité des fluides gastriques et du lait est supérieure à celle de la paroi au repos (résultats personnels). La mesure sera d’autant plus sensible que la différence entre la conductivité spécifique du milieu et celle de la paroi est grande.

Cette propriété dépend de la nature du milieu et de son épaisseur. L’air a une conductivité quasi nulle et écarte la paroi des électrodes, il augmente l’impédance. Cette technique peut donc d’explorer la motricité d’un organe et aussi le transit des matières dans l’organe, en l’occurrence la propagation des bolus et le sens du transit s’il y a plusieurs couples d’électrodes.

METHODE : une sonde est introduite par le nez, elle comporte 2 ou 6 couples d’électrodes selon le prototype. Un enregistrement simultané de pHmétrie est souvent utilisé car les études en cours s’attachent à trouver les nouvelles normes et s’en réfèrent encore toujours à cette technique qui a servi de base à de nombreuses et importantes études sur le reflux gastro-oesophagien depuis plus de 15 ans.

RESULTATS :

Les travaux du Children’s hospital and Helmholtz Institute et de l’ Aachen University of Technology ont démontré récemment, l’utilité de la mesure de l’impédance oesophagienne intra-luminale dans la détection de reflux chez des nourrissons présentant des apnées ou des malaises graves (4) Des épisodes de reflux gastro-oesophagiens, mesurés par l’une ou l’autre technique, ont été associés à des troubles respiratoires chez des nourrissons de 69 +/-32 jours.

Les épisodes enregistrés en impédancemétrie correspondent 312 fois à des irrégularités du

rythme respiratoire et 144 fois à des désaturations modérées (S02 90 %). De plus, les résultats suivants sont particulièrement intéressants.

Technique Nb d’épisodes de reflux Evénement anormal associé

Désaturation S02 Apnées (n:49)

de plus de 10 % (n:19)

Impédancemétrie3681949

pH métrie 42 311

Nos travaux personnels démontrent la grande fréquence d’événements non objectivés en pHmétrie, certains correspondant à des éructations.

D’autres techniques basées sur la mesure de variations d’impédance elles aussi, évaluent la vidange d’un organe rempli d’un liquide par l’intermédiaire d’électrodes cutanées. Elles sont peu envahissantes, ont leurs inconvénients, notamment le nombre d’électrodes à installer autour de petits corps. Milla et al. à Londres a publié des résultats obtenus chez des prématurés. Il utilise un appareillage d’enregistrement ambulatoire et miniaturisé (5) qui permet d’ étudier les variations du contenu gastrique. Elles témoignent, soit de brèves modifications liées à des reflux vers l’oesophage ou à des reflux duodénaux, soit de modifications progressives liées à la vidange gastrique.

- Test respiratoire au C13 acétate ou acide octanoïque

BUT: évaluer la qualité de la vidange gastrique (VG)

PRINCIPE DE LA TECHNIQUE : au cours d’un repas, une molécule traceuse est administrée.

Elle est choisie en fonction de la vitesse de son absorption immédiatement au-delà de l’estomac et de son oxydation. Elle est « marquée » par du carbone 13, un isotope stable du carbone.

Son métabolisme produit en l’occurrence du CO2 qui sera recueilli dans l’air expiré et dosé par spectrométrie de masse.

La méthode isotopique est admise comme le « gold standard » de l’étude de la VG chez l’adulte et chez l’enfant. Maes et al ont démonté la corrélation entre les résultats obtenus avec cette technique et ceux obtenus par la technique scintigraphique d’étude de la VG (6).

METHODE :

Cinquante µg d’acide octanoïque sont solubilisés dans 1 g de PEG 3350 et mélangés à un biberon de 30 à 55 ml d’un lait pauvre en C13 (7).

L’air est recueilli durant l’expiration, au moyen d’un fin tube nasopharyngé et réinjecté dans un tube sous vide. Les prélèvements sont pratiqués sur un enfant calme, au temps zéro, avant le biberon et selon un schéma préétabli durant les 4 heures postprandiales. L’enfant ne doit pas être déplacé.

Braden a également utilisé l’acétate et les résultats obtenus ont montré une bonne corrélation avec la scintigraphie au 99mTc chez l’adulte. Cette technique a été appliquée dans l’étude de la VG de nouveaux nés à terme. La dose utilisée était de 20 mg d’acétate de sodium dilués dans 2.5 ml de glucosé 5%, elle était donnée après une tétée de 30 à 50 ml chez un enfant de 7 mois chez lequel l’acétate était administré par gavage duodénal ou gastrique. (8)

RESULTATS :

Acide octanoïque :

L’étude de 11 prématurés normaux, d’âge gestationnel de 27 à 35 semaines (moyenne 33)

et âgés de 6 à 46 jours (moyenne 26 ) pour un poids de 1980 à 2560 gr (moyenne 2296) lors de l’épreuve donne des résultats préliminaires. Le t1/2 est de 59 minutes (Q1= 42, Q3=71),

la vidange volumétrique et calorimétrique absolue est plus lente que chez l’enfant d’âge scolaire, mais après correction en fonction de la surface corporelle, elle est plus rapide (7).

Acide acétique :

Les résultats obtenus par gavage chez l’enfant de 7 mois montrent que la vitesse d’oxydation est la même chez le nourrisson de 7 mois et chez l’adulte. Chez les 17 nouveaux nés à terme, âgés de 5 à 11 jours au moment du test, on observe une élévation significative de la d13C

(14% en moyenne) 10 minutes après l’ingestion du traceur et une élévation maximale de la d13C ( 70% en moyenne) après 87 +/- 23 minutes. On retrouve la notion d’une vidange gastrique dont la durée augmente linéairement avec le volume consommé (8).

Les auteurs concluent à la facilité, à la fiabilité et au caractère non invasif du test respiratoire au C13 durant la période périnatale.

- Electrogastrographies

BUT: évaluer la qualité de l’organisation de l’activité myoélectrique de l’estomac

PRINCIPE DE LA TECHNIQUE : L'activité motrice antrale augmente en même temps que l'amplitude de la « slow wave » gastrique. On peut donc évaluer la bonne qualité de la motricité antrale postprandiale en enregistrant le rythme des impulsions du pace maker qui est normalement de 3 par minute.

Brady- comme tachygastrie peuvent être associées à des troubles de la vidange gastrique, à des symptômes dyspeptiques idiopathiques ou secondaires à des gastrites, des ulcères.

La technique a été validée chez l’homme en comparant les enregistrements simultanément pratiqués directement sur la muqueuse gastrique et par électrodes cutanées pratiqués sur la séreuse et par électrodes cutanées.

METHODE : Des électrodes Ag/Ag sont collées sur la paroi abdominale épigastrique après une préparation qui assure une bonne diminution de l’impédance cutanée. L’enregistrement est pratiqué le plus souvent durant une période préprandiale qui sera comparée à une période postprandiale ou à défaut de la possibilité d’une prise alimentaire, après stimulation par un procinétique. L’examen direct du tracé n’est pas interprétable. Des analyses spectrales sont nécessaires (9)

RESULTATS : de 22 semaines au terme, il n’y a pas de différence notable dans l’allure de l’élctrogastrographie (EGG), le nourrisson aurait une plus grande activité dans les rythmes supérieurs à ce qui est considéré comme la normale adulte ( d’après CHEN: 2.5 à 3.5 cpm, 70% de l’activité) (10). Huit prématurés d’âge gestationnel de 32.1 semaines en moyenne et âgés de 19.6 jours en moyenne également ont démontré une modification du rythme postprandial au même titre que les adultes avec un retour aux valeurs préprandiales en une demi-heure (11). Chez le prématuré malade qui présente des vomissements, les caractéristiques de l’EGG sont modifiées (pourcentage d’activité au rythme normal, coefficient de stabilité entre la phase postprandiale et à jeun, rapport de puissance).

L’électrogastrographie, qui n'impose aucune manipulation douloureuse et un minimum d'immobilisation est une technique prometteuse. Des résultats préliminaires récents, sur tissus in vitro tentent d’appliquer les techniques de « mapping » appliqués en cardiologie (12).

- Manométrie oesophagienne;

BUT: évaluer les raisons pour lesquelles un reflux gastrooesophagien est difficile à contrôler, une enfant a des difficultés à avaler, a des troubles de la déglutition, présente des malaises.

PRINCIPE DE LA TECHNIQUE : des variations de la pression de la paroi sont enregistrées par méthode stationnaire ou ambulatoire.

Deux types de cathéters sont utilisables. Les cathéters perfusés: la variation de pression s’exerce sur un ménisque d’eau affleurant à l’orifice percé latéralement dans un fin cathéter en polyvinyl ou en silicone pour le matériel très sophistiqué mis au point par la DENT S.A. On utilise des assemblages de plusieurs canaux, dont les orifices sont situés à des distances variables selon l’usage. Ils sont perfusés avec de l’eau dégazée, à débit constant, par une pompe pneumohydroaulique. Tout le système doit être de faible compliance. Le débit de perfusion est le plus souvent de 0.5 ml, mais le débit peut être réduit à 0.05 ml/minute et par canal. Un capteur externe transforme le message hydraulique en un message qui pourra être écrit sur papier millimétré ou transmis à un ordinateur.

D’autres cathéters, nettemnt plus fragiles et plus coûteux, comportent des capteurs internes intraluminaux. Ces microcapteurs utilisent le phénomène de la piezorésistance. Ils permettent un appareillage d’enregistrement sans pompe, léger et mobile. Ils sont donc indiqués pour des examens de longue durée, hors d’une salle d’examen. Les sphincters sont, à l’idéal, étudiés par des capteurs spéciaux, qui intègrent les pressions sur plusieurs centimètres de longueur ( sphinctométres, Dent’s sleeve). Ils permettent de garder la zone sphinctérienne en regard du capteur malgré les mouvements de l’oesophage lors des déglutitions, cris ou mouvements respiratoires amples.

METHODE : Selon la position des capteurs, l’étude porte sur différents niveaux: sphincters supérieurs et inférieurs au repos et lors des relaxations, corps oesophagien au repos et lors des contactions. Divers paramètres sont importants à relever: forme, puissance et transmission des ondes, tonus de base de l’estomac puis du corps et des sphincters oesophagiens, séquences d’événements moteurs lors des déglutitions et des événements non liés au péristaltisme primaire.

Les appareils d’enregistrement en ambulatoire et les programmes de lecture informatisée permettent en outre l’étude de moments précis (repas, douleur) et l’enregistrement simultané de pHmétrie grâce à un capteur situé éventuellement sur la même sonde ou sur une sonde parallèle.

RESULTATS : Chez le prématuré de 33 à 38 semaines, en bonne santé, le sphincter oesophagien inférieur présente un tonus tout à fait efficace, d’une valeur de 20.5 mmHg en moyenne avant repas et de 13.7 +/- 1.3 mmHg après repas. Par contre, les séquences des contractions observées après déglutition réflexe sont péristaltiques dans seulement

26.6 % (13). Ces résultats, obtenus avec le matériel le mieux adapté au prématuré, battent en brèche l’idée toujours véhiculée d’un sphincter oesophagien inférieur (SOI) insuffisant et portent le regard sur un autre aspect du reflux: son contrôle par les défenses de l’oesophage, notamment sa motricité.

Chez le nourrisson qui présente des malaises, des anomalies de la motricité ont été décrites par divers auteurs. Par exemple, pour Jolley (14) beaucoup d’enfants ayant un reflux gastrooesophagien (RGO) ont un tonus de base du SOI élevée. Il observe que ces RGO répondent bien au traitement médical et sont guéris plus vite que les autres types de RGO (résolus à 10 mois). Il les définit par leur profil de fréquence de RGO postprandiale et que l’auteur ne voit pas associés à des hypertonies du SOI.

Pour Boige (15) les dyskinésies primaires de l’oesophage chez l’enfant sont rencontrées dans les troubles de la maturité, les malformations oesophagiennes congénitales, les pseudo-obstructions intestinales chroniques (POIC).

Diverses anomalies de la motricité sont décrites et sont retrouvées en association ou isolées. Anomalies de la motricité du sphincter supérieur (SOS):asynchronisme pharyngo-sphinctérien. Anomalies de la motricité du corps: ondes non propagées, simultanées, larges et amples (spasmodiques), tonus de base proche du tonus gastrique. Anomalies de la motricité du SOI : tonus de base N ou hyper, relaxation incomplète occasionnelle ou constante, des relaxations indues (TLESRs des anglo-saxons) sont observables en même temps. Ces troubles moteurs sont retrouvés chez des patients investigués pour des RGO, mais particulièrement fréquemment chez des enfants investigués pour des malaises graves et qui présentent des signes cardiaques d’hypertonie vagale. Ces anomalies sont inconstantes dans le temps et passagères. Elles seraient le reflet digestif de l’hypertonie vagale de ces enfants.

Nous avons observé un comportement particulier du SOI chez ce type de patients, il s’agit de lentes pertes de tonus de SOI hypertoniques (plus de 50 mmHg). Ces diminutions s'observent durant 9 à 20 secondes (13 secondes en moyenne), sans modification du tonus de base ou de l’activité motrice de l’oesophage.

- Manométries antro-duodénales ou intestinales

BUT: diagnostiquer l’origine de tableaux de pseudo-obstructions intestinales idiopathiques

chroniques (POIC) et en prédire l’évolution.

PRINCIPE DE LA TECHNIQUE : Le matériel de manométrie a été decrit précédement.

Le plus souvent, des sondes perfusées, plus ou moins sophistiquées, sont utilisées. Les sites les plus souvent explorés sont l’antre et la partie proximale dujéjunum. Les analyses se font par l’observation des tracés ou par des programmes de lecture informatisés.

Les résultats obtenus grâce à ces programmes doivent être revus avec prudence en pédiatrie, surtout chez ceux qui n’ont jamais connu que l’alimentation entérale. Des nuances liées à l’âge, le manque de grandes séries d’enfants normaux sont autant d’obstacles au décodage automatisé et à l’interprétation des tracés. Cinq anomalies sont certainement associées à une pathologie neuromotrice du TD : l’absence de phase III, les anomalies de propagation des phases III, des intervalles trop courts entre les phases III, des contractions de faible amplitude et des contractions toniques.

METHODE : après une phase de jeûne, l’enregistrement durera plusieurs heures (4 heures) ou le temps d’observer 4 phases III. On cherche à reconnaître les différentes phases de l’activité motrice interprandiale et sa modification postprandiale, lorsque le patient supporte d’être nourri.

.

RESULTATS : Les neuropathies montrent des désorganisations des différentes phases ou de la transmission des phases III. Les myopathies, de moins bon pronostic, montrent des ondes d’amplitude médiocre et des index moteurs insuffisants (16).

- Manométrie anorectale

BUT : essentiellement à cet âge, apporter des arguments pour ou contre une maladie de

Hirschsprung.

PRINCIPE DE LA TECHNIQUE : enregistrement des pressions rectales et anales.

METHODE : le tonus de base et l’adaptation à la stimulation par l’augmentation de volume

d’un ballon rectal sont mesurés le plus souvent grâce à des systèmes à capteurs externes.

RESULTATS : à partir de 34 semaines d’âge gestationnel et après 12 jours de vie, il est théoriquement possible d’évoquer un réflexe rectoanal inhibiteur. La présence d’un tel réflexe exclut le diagnostic de maladie de Hirschsprung. Il est parfois difficile d’éviter des déplacements de la sonde et l’interprétation des tracés doit être critique.

- Tests respiratoires à l’Hydrogène

BUT : dépister une entérocolite nécrosante, mettre au point une diarrhée.

PRINCIPE DE LA TECHNIQUE: de l’hydrogène est contenu en faible quantité dans l’air expiré. Un taux élevé d’hydrogène témoigne de la fermentation d’un substrat par la flore bactérienne. Selon le temps d’apparition du pic de production de l’hydrogène et selon les circonstances du test (sans substrat, sucre digestible comme le lactose, le glucose, ou sucre traceur comme le lactulose) on pourra conclure à des troubles du transit, à des pullulations microbiennes, à des déficits enzymatiques...

METHODE: un échantillon d’air de fin d’expiration (5-10 ml) est reccueilli par un masque à valve uni-directionnelle ou par un fin tube naso-pharyngé. Il est stocké dans des tubes étanches ou injecté dans l’appareil de chromatographie pour être dosé.

Selon le protocole choisi, une solution contenant le sucre testé est donnée après un premier recueil d’air expiré à jeun, puis régulièrement durant les heurs qui suivent.

RESULTATS: 75 % des nourrissons produisent de l’hydrogène à l’âge d’une semaine.

Cependant, chez le très jeune enfant, la capacité de digéré et d’absorber les hydrates de carbonns augment au cours ds premiers mois. La production d’hydrogène par la flore colique ne témoigne donc pas forcement d’un déficit pathologique durant le 3-4 premiers mois.

Certains auteurs ont prétendu que l’élevation du taux d’hydrogène expiré chez un tout jeune enfant pouvait être un indice précoce d’entérocolite nécrosante (17)

- Echo-Doppler

BUT : prédire les risques d’entérocolite nécrosante, la récupération.

PRINCIPE DE LA TECHNIQUE : le Doppler couleur indique la présence de vaisseaux, le Doppler pulsé permet des mesures de vélocimétrie, le Doppler puissance est très sensible, il mesure les globules rouges par volume d’organe observé mais il nécessite que le sujet soit immobile et n’indique ni le sens, ni la vitesse de la circulation. Cette méthode n’explore donc pas directement la motricité digestive, mais est un moyen d’exploration de prématurés souffrant de trouble du transit. La différence de vélocimétrie enregistrée entre les deux troncs est liée à la différence de résistance vasculaire périphérique.

METHODE : la sonde explore les vaisseaux à un niveau proche de leur origine. Le tronc coeliaque (TC) et l’artère mésentérique supérieure (AMS) sont souvent explorables, l’artère mésentérique inférieure l’est moins.

RESULTATS : le flux dans l’AMS augmente entre J1 et J5, il est modifié par la digestion mais différemment selon le type de lait (le lait maternel l’augmentant mois que les formules) (18).

La diminution du flux et en particulier du rapport entre le flux systolique de l’AMS et du TC serait un indice de risque d’entérocolite nécrosante (19).

 

 

 

Conclusion

Des méthodes sophistiquées, modernes mais pas forcement validées et certainement pas accessibles à toutes les équipes, permettent d’investiguer la fonction motrice du tube digestif.

Le respect de la chronologie théorique du développement des fonctions digestives (en particulier d’une motricité efficace), l’observation clinique, les mesures du résidu gastrique et les radiographies d’abdomen utilisant les contrastes naturels ou les échographies restent cependant des outils souvent satisfaisants dans la surveillance de la tolérance du prématuré à l’introduction d’une alimentation normale. Cette attitude tient compte de l’âge gestationnel, de la durée et de la qualité de la vie extra-utérine. Les techniques d’imagerie plus sophistiquées, avec produits de contraste permettent souvent le diagnostic de l’origine organique voire fonctionnelle d’un trouble du transit.

Ces techniques nouvelles trouveront leurs indications au cours du temps et en fonction de l’adaptation technique de l’outil aux usages pédiatriques. Certaines sont peu invasives et praticables au lit du malade, d’autres sont assez invasives ou irréalistes et leurs indications s’en trouvent limitées, d’autres encore méritent notre intérêt mais ne sont pas encore applicables.

Vous aviez dit, possible...

 

Références

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2 LUCAS A, ADRIAN TE, CHRISTOPHEDES N, BLOOM SR, AYNSLEY-GREEN A . Plasma Motilin, Gastrin and Enteroglucagon and feeding in the human newborn. Arch. Dis. Child. 1980:55, 673-677

3 BERNBAUM JC, GILBERTO RP, WATKINS JB, PECKHAM GJ. Non nutritive sucking during gavage feeding enhances growth and maturation in premature infants. Pediatrics 1983:71, 41-45

4 SKOPNICK H, SILNY J, SCHENCKE S, WENZL TG. Gastroesophageal reflus and respiration status of intra-luminal impedance mesurement (abstract) J Pediatr Gastroenterol Nutr. 1996;22:416

5 RUUSKA TH, EVANS DF,KEMPSEY S, MILLA PJ. Forgut motility in the very preterm infant. J Pediatr Gastroenterol Nutr 1995 (abstract);22:460

6 MAES BD, GHOOS YF, GEYPENS BJ et al. Combined carbon13-glycin/ xarbon13-octanoïc acid breath test to monitor gastric emptying rates of liquids and solids. J Nucl Med 1994; 35:824-31

7 VEEREMANS-WAUTERS G, GHOOS Y, VAN DER SCHOOR S, MAES B et al. The 13C-Octanoïc acid acid breath test: a noninvasive technique to assess gastric emptying in preterm infants.Pediatr Gastroenterol Nutr. 1996;23:111-7

8 BAUMLER - MERL B, DEMMELMAIR H, WEHNER B, KOLETZKO B, KOLETZKO S. Estimation of gastric emptying in newborns with acetate-breath-test (abstract) J Pediatr Gastroenterol Nutr 1996;22:417

9 VAN DER SHEE EJ, GRASHIUS JL. Running spectrum analisis as an aid in the representation and interpretation of electrogastrographic signals. Med Biol Eng Comput 1987;25:57-62

10 KOCH KL, TRAN T, BINGAMAN S, SPERRY N. Gastric myoelectrical activity in fasted and fed premature and term infants. J Gastrointest Mot 1993;5:41-7

 

11 ZACCHI P, KOLETZKO S, ENCK P et al Electrogastrography in term and preterm infants (abstract) J Pediatr Gastroenterol Nutr 1993; 17:474

12LAMMERS WJ, STEPHEN B, ARAFAT K et al High resolution electrical mapping in the gastrointestinal system: initial results Neurogastroenterol Mot 1996;8:207-16

13 TAHER I, KAZUNORI M, FRASER R et al. Esophageal Body and Lower Esophageal Sphincter Function in Healthy Premature Infants. Gastroenterol 1995;109:1757-64

14 JOLLEY SG, BESSER AS. Partial achalasia and gastroesophageal reflux: a disorder of maturation? in OESO: Primary disorders of the Esophagus. Guili R, Mc Callum R, Skinner D eds, John Libbey Eurotext Paris-Londres, 1991: pp 988-90

15 BOIGE N, VIARME F, CARGILL G, NAVARRO J. What is the proportion of primary esophgeal Disorders in the infant? in OESO: Primary disorders of the Esophagus. Guili R, Mc Callum R, Skinner D eds, John Libbey Eurotext Paris-Londres, 1991: pp 973-75

16 FELL JM, SMITH VV, MILLA P. Infantile chronic intestinal pseudo-obstruction: the role of small intestinal manometry as a diagnostic tool and prognostic indicator. Gut 1996;39:306-11

17 COOMBS RC, MORGAN MEI, DURBIN GM et al. Doppler Assesment of Human Neonatal Gut Blood Flow Velocities: Post-natal Adaptation and response to Feeds. J Pediatr Gastroenterol Nutr 1992;51:6-12

18COOMBS RC, MORGAN MEI, DURBIN GM et al.Abnormal Gut Blood Flow Velocity in Neonates at isk of NecrotisingEnterocolitis. J Pediatr Gastroenterol Nutr 1992;51:13-16.

Plan

Introduction

But de l’étude fonctionnelle de la motricité digestive

Méthodes nouvelles applicables au prématuré et au nouveau né

BUT

PRINCIPE DE LA TECHNIQUE

METHODE

RESULTATS

- pHmétrie versus impédencemétrie oesophagienne intraluminale

- Test respiratoire au C13 acétate ou acide octanoïque

- Electrogastrographies

- Manométrie oesophagienne;

- Manométrie antro-duodénales ou intestinales

- Tests respiratoire à l’Hydrogène

- Echo-Doppler

Conclusion