La rectocèle
(colpocèle postérieure) est une hernie de la paroi rectale à travers le fascia
recti et la cloison recto-vaginale vers la cavité vaginale.
C’est
une affection fréquente est génératrice de dyskésie, de douleur ou d’inconfort
souvent masquée ou non parlante sur le plan clinique.
C’est
d’une part un trouble de la statique rectale parfois associée à l’intussuception
rectale et d’autre part un trouble de la statique pelvi-périnéale s’associant
à des pathologies urinaires ou gynécologiques.
La rectocèle
est rarement isolée, c’est le plus souvent un des éléments du prolapsus pelvien.
En fonction
de la spécialité que l’on exerce, on ne voit pas les mêmes rectocèles. Par exemple,
les proctologues voient souvent des colpocèles postérieures isolées, correspondant
:
- soit à des troubles ano-rectaux sans atteinte gynécologique ou morphologique,
- soit à des troubles consécutifs à une hystérectomie ou à une cystopexie.
Tout
se passe comme si la volonté thérapeutique sur le compartiment antérieur décompensait
une pathologie masquée du compartiment postérieur. On sait par ailleurs combien
la chirurgie uro-gynécologique a des effets délétères sur le périnée postérieur.
De leur
côté, les gynécologues voient souvent des colpocèles postérieures intégrées
dans un trouble global de la statique périnéale.
On comprend
que les voies d’abord et les volontés thérapeutiques diffèrent selon deux variables
que sont l’étiologie de la rectocèle et sa présentation mono ou pluri disciplinaire.
Quelle
que soit la classification (haute, moyenne ou basse) (primitive ou secondaire)
(topographique : antérieure 89 % ; antérieure et latérale 8 % ; postérieure
3 % ; excentrique et latérale 1 %) associée ou non à une entérocèle ou après
hystérectomie à une faiblesse des ligaments utérosacrés voir à un spasme du
pubo-rectal, les arguments pour traiter la rectocèle et éventuellement choisir
une voie d’abord chirurgicale sont fonction du tableau clinique à la fois anatomique
et fonctionnel, et des associations morbides.
On peut
considérer que la voie d’abord abdominale ne concerne pas la rectocèle dont
il est question ici et qu’il existe en fait trois voies d’abord basses qui sont
:
la voie vaginale
la voie rectale
la voie périnéale.
La voie d’abod vaginale basse s’adresse aux associations de la rectocèle
avec un prolapsus génital. (1)
Elle
débute par l’hystérectomie vaginale et/ou une cystopexie.
Elle
est suivie par la fermeture du vagin, la péritonisation et le cloisonnement
du cul de sac de Douglas.
- La
plastie antérieure permet de solidifier le plancher sous vésical. Le rapprochement
des utéro-sacrés (ou ligaments cervicaux ou ligaments ronds) réduit le risque
de récidive de la cystocèle par la réalisation d’un hamac sous vésical ligamentaire.
- La
plastie postérieure à la partie haute à la partie haute du vagin rapproche les
ligaments suspenseurs sur la ligne médiane et réduit l’amplitude du fond du
vagin.
- La
plastie postérieure à la partie basse du vagin consiste en une colpo-périnéorraphie.
La
voie d’abord trans anale décrite par Sullivan et Khubchandami (2) (3) aborde
la rectocèle par le versant rectal. La patiente est installée en position gynécologique.
Après incision de la muqueuse rectale antérieure au dessus de la ligne pectinée
la muqueuse et la sous muqueuse rectale en excès sont disséquées par un plan
de clivage entre sous muqueuse et musculeuse. La dissection est poussée en amont
de la zone de faiblesse musculaire. Une série de points séparés faufile le muscle
dénudé soit dans le sens longitudinal, soit dans le sens transversal. La muqueuse
rectale est ensuite excisée et la brèche muqueuse est refermée par affrontement
des berges au moyen de points séparés.
La
voie d’abord périnéale (4) est un abord extra luminal de la rectocèle .
La patiente est installée en position gynécologique. L’incision cutanée est
horizontale, à égale distance entre anus et fourchette vulvaire. Le plan de
dissection recto-vaginal est poursuivi jusqu’au cul de sac de Douglas. La face
antérieure du rectum apparait alors avec la rectocèle que repousse le doigt
endo-anal. Latéralement on retrouve des reliquats fibreux du fascia recti rompu
et les colonnes des muscles releveurs.
Le vagin
est récliné par une valve et la confection de 2 à 4 bourses concentriques enfouit
la rectocèle. Le fascia rectal est ensuite restauré. On réalise enfin un rapprochement
des muscles releveurs. Les plans sous cutanés sont ensuite reconstitués et la
plaie est refermée au vicryl rapide 000.
On a
pu proposer l’utilisation de prothèse non résorbable dans la zone de dissection
pour améliorer le contrôle de la colpocèle mais le risque infectieux secondaire
n’est certainement pas négligeable (5).
Cette
voie d’abord périnéale permet en cas d’incontinence anale par rupture sphinctérienne
associée, de réaliser dans le même temps opératoire une réparation sphinctérienne.
Par
ailleurs, en cas d’incontinence idropathique on peut également dans le même
temps réaliser une myorraphie pré anale et/ou myorraphie rétro-anale (post anal
repair de Parks).
Lorsqu’il
existe une élytrocèle associée à la colpocèle postérieure la suspension vaginale
au ligament sacro épineux (opération de Richter ) peut être réalisée par le
même abord chirurgical (6).
Enfin,
cette technique chirurgicale n’exclue pas la possibilité de réaliser dans le
même temps une hystérectomie par voie vaginle et/ou une cure de cystocèle et/ou
une cure d’incontinence urinaire par T.V.T.
Le traitement
de la rectoècle repose sur un bilan périnéologique complet à la recherche d’associations
morbides qui doivent être traitées de façon concomitante. Il a pour but la restauration
anatomique de la hernie rectale à travers le défect de la cloison vaginale,
mais le critère de réussite est fonctionnel avec la normalisation de la défécation
et le maintient d’une continence anale normale.
Le résultat
chirurgical doit être indemne de séquelles douloureuses ou dyspareuniantes et
de complications secondaires à type de troubles de la statique pelvi périnéale
ou d’élytrocèle.
Devant
les multiples interrogations qui se posent à l’étage diagnostique, et les difficultés
du choix thérapeutique, on comprend que le traitement de la rectocèle et des
autres troubles de la statique périnéale fasse la part belle à la pratique multi
disciplinaire (7).
La voie
endo-anale de Sullivan ou Khubchandain offre l’avantage de supprimer l’excès
de muqueuse rectale en solidifiant le mur musculaire antérieur. Elle peut aisément
être associée à une hémorroïdectomie quand la pathologie proctologique
est au premier plan.
Par
contre :
1) Elle ne peut absolument pas traiter les autres troubles de la statique pelvi
périnéale
2) L’utilisation de l’écarteur de Parks a des effets délétaires sur le sphincter
anal. Celui-ci peut faire décompenser une incontinence anale masquée , voire
entrainer une rupture sphinctérienne. (8)
3) Elle ne permet ni la myorraphie des muscles des releveurs, ni le traitement
de l’éventuelle élytrocèle associée.
La
voie endo-anale sera donc réservée aux rectocèles pures, basses souvent
associées à une pathologie hémorroïdaire.
La
voie périnéale n’agit ni sur le prolapsus muqueux ni sur la pathologie proctologique
associée (encore qu’elle puisse être associée à la technique de Longo d’hémorroïdectomie
à la pince P.P.H.).
Par
contre, elle n’a aucun effet délétaire sur la continence anale, elle permet
une myorraphie des releveurs, une éventuelle réparation sphinctérienne, une
cure d’élytrocèle par association à l’intervention de Richter, autorise le traitement
des autres troubles de la statique périnéale. Elle ne fait pas courir le risque
de dyspareunie secondaire. Elle permet de traiter toutes les rectocèles quelque
soit leur étage, basses, moyennes et hautes.
La
voie vaginale permet le traitement de tous les autres troubles de la statique
pelvi périnéale, elle met en évidence les élytrocèles que le bilan pré opératoire
oublie trop souvent. Enfin, elle respecte le sphincter anal et le périnée. Elle
permet un traitement direct du diastasis des releveurs.
On lui
reproche d’être génératrice de dyspareunies. On se devra donc d’être économe
en résection vaginale.
Le choix
d’une technique chirurgicale pour la rectocèle se fait à la fois à l’étape clinique,
et à l’étape thérapeutique.
La rectocèle
est souvent associée à d’autres troubles fonctionnels ou anatomiques du périnée
est provoquée par une fragilité de la cloison recto-vaginale. Une dysynergie
ano-rectale est rapportée dans 20 à 70 % des cas (9).
La rectocèle
est fréquente puique observée dans 39 à 72 % des cas de constipation féminine.
23 à
76 % des patientes porteuses de rectocèles sont constipées, 20 à 39 % ont recours
à des manoeuvres digitales.
La correction
de la rectocèle entraine une amélioration symptomatique globale dans 76 à 98
% des cas (10).
(1) B. BLANC, L.
BOUBLI, E. BAUTRANT, C. D’ERCOLE.
Les troubles de la statique pelvienne et leur traitement- Arnette. Editeur 1993
; 78-90.
(2) SULLIVAN E.S,
LEAVERTON G.H, HARDWICH L.E.
Transrectal perineal repair, an adjunct to improved function after anorectal
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(3) KHUBECHANDANI
I.T, CLANCY J.P, ROSEN L. ET COLL.
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(4) LEHUR.PA, MOYON.
J, BRULEY DES VARANNES S, GUIBERTEAU-CARFRE V, LE BORGNE J.
Rectocèle isolée invalidante. Plicature rectale par voie périnéale . A propos
de 20 cas- Chirurgie 1992 ; 118 : 516-521.
(5) WATSON SJ, LODER
PB, HALLIGAN S, BARTRAM CL, KAMM MA, PHILIPS RKS.
Transperineal repair of symptomatic rectocle with marlex mesh : a clinical physiological
and radiologic assessment of treatment. J am coll. Surg ; 183 : 257-261.
(6) GULY J, CRAVELLO
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La spinofixation de Richter dans les prolapsus vaginaux. Chirurgie 1997 ; 122
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(7) VILLET R, BUZELIN
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(8) VAN TETS WF, KNIPPERS JH , TRAN F, MOLLEN R, VAN GOOD H.
Influence of Parks ‘anal retractor on anal sphincter pressures. Dis. Colon rectum
1997 ; 40 : 1042-1045.
(9) LAZORTHES F,
SIPROUDHIS L.
Controverse : les troubles de la statique pelvi-rectale constipent-ils? Bulletin
Français de colo proctologie. 1- 1999 ; 2.
(10) MELLGREN A,
ANZEN B, NILSSON BY, JOHANSSON C, DOLK A, GILLGREN P, BREMMER S, HOLMSTROM B.
Results of recocel repair. A prospective Study. Dis colon recum 1995 ; 38 :
7-13.