La
femme à risque osseux : évaluation du risque
Professeur
Claude DREUX
Président
du Comité d'Education Sanitaire et Sociale de la Pharmacie Française
(CESSPF)
Membre des Académies nationales de Médecine et de Pharmacie
Président de la Société de Biologie
La
femme à risque osseux : évaluation du risque
Chez
la femme le risque de fracture osseuse est du, dans la majorité des cas,
à l'ostéoporose.
La définition de cette maladie, agréée par l'OMS en 1992,
est : " affection généralisée du squelette caractérisée
par une masse osseuse basse et une altération de la micro-architecture
du tissu osseux responsable d'une augmentation de la fragilité de l'os
et, par conséquent, du risque de fracture ".
L'ostéoporose est liée essentiellement aux modifications hormonales
post-ménopausiques et à l'âge.
Les fractures qui surviennent touchent plus particulièrement les vertèbres
(tassements vertébraux), ne provoquant généralement pas
de signes cliniques évidents mais se traduisant souvent par des douleurs,
une diminution de la taille et, parfois, par des courbures de la colonne vertébrale
(cyphose).
Les plus graves des fractures sont celles du poignet (Pouteaux-Colle) et de
l'extrémité du fémur (souvent appelé col) survenant
après une chute même légère ; les conséquences
sont toujours graves en termes de morbidité et de mortalité chez
les personnes âgées. De toute façon la qualité de
la vie des femmes ostéoporotiques est, à terme, profondément
atteinte.
Il ne faut pas oublier que l'ostéoporose, maladie majoritairement féminine
atteint également les hommes (environ 20% des cas).
Les
risques osseux chez la femme
Les
dernières données épidémiologiques font état
d'une ostéoporose chez environ 30% des femmes de 50 ans et de 50% après
60 ans.
Les fractures qui en résultent atteignent les vertèbres dans 44%
des cas, 20% le col du fémur, 14% le poignet, le pourcentage restant
concernant les autres parties du squelette.
D'après le Haut Comité de Santé publique, en 2000, 20 à
30% des femmes ménopausées (soit 2 à 3 millions de françaises)
seraient atteintes d'ostéoporose. Près de 30% auront une fracture
vertébrale ou du poignet avant la fin de leur vie et 18% une fracture
du col du fémur.
Ainsi, en France plus de 2 millions de femmes seraient atteintes de fractures
vertébrales (environ 60.000 cas par an). Annuellement plus de 50.000
fractures du col du fémur sont identifiées entraînant la
mort dans 20% des cas dans l'année suivant la fracture et une perte majeure
d'autonomie dans 50%. Une fracture du poignet survient chaque année chez
40.000 femmes.
On peut estimer qu'en 2050 plus de 100.000 personnes seront victimes d'une fracture
fémorale si rien n'est fait pour prévenir ou traiter l'ostéoporose.
Au plan mondial la situation est aussi préoccupante : les fractures
du col du fémur atteignent près de 2 millions de personnes par
an et près de 7 millions pourraient être touchées en 2050.
A noter que le taux d'incidence des fractures de hanche, ajusté en fonction
de l'âge et du sexe est plus élevé dans les populations
caucasiennes que chez les Asiatiques et plus faible dans les pays proches de
l'Equateur. La prépondérance féminine chez les populations
blanches n'apparaît pas chez les Noires et les Asiatiques (rapport voisin
de 1) du probablement à des facteurs génétiques.
L'importance économique de l'ostéoporose est considérable.
Les fractures du col du fémur entraînent en France près
de 80.000 hospitalisations et on peut estimer à près de 6 milliards
de francs le coût des conséquences de l'ostéoporose.
Ce n'est pas ici le lieu de débattre de l'intérêt économique
du dépistage et du traitement préventif ou curatif de l'ostéoporose.
Nous nous attacherons surtout à définir les facteurs cliniques
et biologiques qui constituent l'apparition de cette maladie de l'os, à
envisager les diverses méthodes de dépistage et à conclure
sur l'intérêt d'un dépistage de masse de l'ostéoporose
ou d'une limitation de celui-ci aux femmes les plus à risque.
Ces questions ont fait l'objet d'un rapport présenté devant l'Académie
nationale de Médecine (C. DREUX et P. DELMAS) en 2001. Un rapport plus
général sur la politique de prévention en France, demandé
par le Président de la République à l'Académie Nationale
de Médecine, fera état de cette étude ainsi que celle concernant
l'intérêt du traitement hormonal substitutif (THS) post-ménopausique.
Signalons simplement qu'actuellement sur 5 millions de femmes âgées
de 45 à 65 ans, 1,5 millions seulement bénéficient d'un
THS et que sur environ 2 millions ayant au moins une fracture vertébrale
susceptible d'être diagnostiquée, 600.000 seulement font l'objet
d'une prise en charge thérapeutique. Bien plus, les femmes ayant une
ostéoporose sans fracture ne bénéficient aujourd'hui d'aucune
prise en charge par les organismes sociaux !
Facteurs
cliniques et biologiques du risque osseux
L'os
est un tissu en perpétuel renouvellement. A l'échelon macroscopique
il existe deux types d'os :
- l'os cortical (fûts des os longs) représentant 80% du
squelette et dont le renouvellement est faible. Son rôle est celui d'une
véritable charpente du corps.
- l'os trabéculaire, 20% seulement du squelette (surtout au niveau
vertébral) dans lequel a lieu une intense activité métabolique.
A l'échelon cellulaire, le remodelage osseux est un processus complexe
mettant en jeu deux cellules à activités antagonistes : les ostéoclastes
responsables de la dégradation (ou résorption) osseuse et les
ostéoblastes qui élaborent la trame organique de l'os, essentiellement
constituée de collagène. Ultérieurement, cet os "
mou " sera calcifié par fixation de cristaux de phosphate tricalcique.
Chez un sujet sain, ces deux activités cellulaires se font dans les mêmes
proportions ce qui permet le maintien de la masse osseuse. La perte osseuse
liée à la ménopause, au vieillissement, à certaines
pathologies et aux traitements prolongés par quelques médicaments
est due à une balance négative entre résorption et formation
de l'os. Trois périodes se succèdent dans le devenir du capital
osseux.
1 - la croissance ou se constitue progressivement la masse osseuse et
qui se termine vers la 20ème année. (chez l'homme le pic de masse
osseuse est supérieur à celui de la femme)
2 - la période de stabilité osseuse de 20 à 50 ans
environ
3 - la phase de perte osseuse qui est accélérée
chez la femme par la carence estrogénique liée à la ménopause,
qui augmente la résorption osseuse. Celle-ci est accélérée
les 5 à 10 premières années puis se poursuit plus lentement.
Le phénomène est moins important chez l'homme, la perte osseuse
étant habituellement faible et linéaire à partir de 50
ans.
La probabilité d'apparition d'une ostéoporose est d'autant plus
élevée que le pic de masse osseuse acquis pendant la croissance
est faible. Ce pic est lié à des facteurs génétiques
mais aussi aux apports calciques et vitaminiques de l'enfance à l'adolescence.
Le remodelage osseux, phénomène physico-chimique peut maintenant
être évalué de façon non invasive par la mesure de
plusieurs paramètres biologiques.
Facteurs
cliniques de l'ostéoporose , " épidémie silencieuse
"
-
Signes cliniques : le diagnostic d'ostéoporose doit être
envisagé devant toute fracture survenant en l'absence d'un traumatisme
majeur (traumatisme inférieur ou égal à une chute de la
hauteur du patient).
Il peut être suspecté en présence d'une perte de taille
notable (supérieure à 5 cm) souvent difficile à apprécier.
Mais le plus souvent, l'ostéoporose est une maladie silencieuse qui ne
peut être diagnostiquée que radiologiquement (fractures vertébrales
découvertes fortuitement) ou par mesure de la densité minérale
osseuse (DMO). En 1994, l'OMS a proposé une définition de l'ostéoporose
basée sur la mesure de la DMO en fixant trois seuils : ostéopénie,
ostéoporose et ostéoporose sévère. Nous envisagerons
cette question plus loin.
- Facteurs de risque : les signes cliniques étant le plus
souvent discrets, la prise en compte de facteurs de risque d'ostéoporose
est importante pour l'établissement du diagnostic. Ces facteurs peuvent
également induire des campagnes de dépistage ciblées sur
les femmes " à risque " évitant ainsi le dépistage
de masse beaucoup plus onéreux.
Les facteurs de risques majeurs sont chez la femme :
- l'âge
- le poids faible : indice de masse corporelle inférieur à 19
Kg/m2
- la race caucasienne ou asiatique
- l'immobilisation prolongée ou l'inactivité physique
- l'hypercorticisme
- l'hypogonadisme primaire
- l'hyperparathyroïdie primaire et l'hyperthyroïdie
- les facteurs entraînant une carence estrogénique : ménopause
précoce (avant 40 ans), hystéro-ovariectomie, aménorrhées
préménopausiques...
- antécédents familiaux d'ostéoporose
- mode de vie : alimentation insuffisante en Calcium et vitamine D, alcoolisme,
tabagisme
- utilisation prolongée de médicaments, surtout les corticoïdes
(dose supérieure à 7,5 mg/jour d'équivalent prednisone
pendant plus de 6 mois), mais aussi les hormones thyroïdiennes ou leurs
dérivés.
Comme nous l'avons déjà indiqué, les signes cliniques souvent
difficiles à caractériser, comme les douleurs vertébrales
ou les déformations du squelette, permettant de suspecter des fractures
vertébrales, doivent inciter le clinicien à prescrire des explorations
radiologiques et biologiques que nous allons aborder maintenant.
Méthodes
de mesure de la densité minérale osseuse (DMO)
La
définition de l'ostéoporose fait intervenir deux facteurs : masse
osseuse basse et altération de la micro-architecture du tissu osseux.
C'est actuellement le premier facteur qui est le mieux étudié
grâce aux méthodes de détermination de la densité
minérale osseuse (DMO) et notamment l'absorptiométrie. Parmi les
nouvelles méthodes, celles faisant appel aux ultrasons pourraient refléter,
dans une certaine mesure, les modifications de la structure de l'os.
Ostéodensitométrie ou absorptiométrie biphotonique (DEXA
ou DXA)
D'après l'expertise collective de l'INSERM (1996), le rapport établi
pour le G.R.I.O. (Groupe de Recherche et d'Information sur les Ostéoporoses)
en 2000, et le rapport de l'ANAES en 2001, l'absorptiométrie biphotonique
aux rayons X (Dual energy X - Ray absorptiometry ou DEXA) constitue la méthode
de référence de mesure de la DMO. C'est en effet la méthode
la plus sensible, la plus rapide et la plus précise des techniques pour
une faible irradiation du patient. Sans entrer dans les détails techniques
(qui pourront être obtenus notamment dans le rapport du GRIO publié
en 2000), le principe de la méthode est basé sur l'atténuation
d'un faisceau de photons par le tissu osseux calcifié exprimé
par rapport à celle observée avec un tissu " mou ".
Selon les appareils, la mesure est obtenue en 5 à 15 minutes et la reproductibilité
est de l'ordre de 1 à 2%. La mesure de DMO est effectuée au niveau
de la hanche (composante corticale) et de la colonne vertébrale (composante
trabéculaire). On peut aussi opérer au niveau de l'avant-bras
au site proximal (os cortical) et distal (os trabéculaire).
L'exactitude des mesures s'exprime par rapport à une valeur de
référence théorique permettant de comparer les résultats
obtenus sur des appareils différents. Mais il est recommandé dans
le suivi d'un patient d'utiliser le même appareillage. La précision,
s'exprimant par le coefficient de variation est de l'ordre de 1 à 2%.
Il serait important qu'un contrôle de la qualité des appareils
et des manipulateurs soit effectué selon le modèle adopté
par les biologistes depuis plus de 20 ans. Celui-ci a montré son efficacité,
permettant d'améliorer considérablement les résultats d'analyses
de biologie médicale. Nous y reviendrons.
L'irradiation du sujet est très faible : 0,6 à 4 millisieverts
(mSv) alors que les examens de radiodiagnostic délivrent de 0,5 à
30 mSv et l'irradiation naturelle de 2,5 à 5,5 mSv.
L'expression des résultats a fait l'objet de nombreuses études
destinées à standardiser les comptes rendus d'examens malgré
la diversité des appareils. On a ainsi défini :
- le Z score : écart entre la mesure correspondant au patient
et à la valeur moyenne rapportée à l'écart type
de la distribution de la population de référence. La valeur de
référence est donnée en fonction de l'âge du sujet.
- le T score : généralement utilisé actuellement.
Cette mesure diffère de la précédente par le choix de la
population de référence : adultes jeunes (20 - 30 ans) de même
sexe, présentant un maximum de masse osseuse. L'OMS a proposé
de classer l'échelle de diminution de la masse osseuse en quatre niveaux
:
- niveau 1 : masse osseuse " normale ", la DMO différant
de moins de 1 écart-type de la moyenne de référence : T
score supérieur à -1.
- niveau 2 : masse osseuse faible (ostéopénie)
T score compris entre -1 et -2,5
- niveau 3 : ostéoporose
T score inférieur à -2,5
- niveau 4 : ostéoporose grave : le risque fracturaire est d'autant
plus grand que le T score diminue au delà de -2,5. D'après P..D.
DELMAS une baisse d'un écart-type de la DMO est associée à
une augmentation du risque fracturaire de 50% à 150% en fonction du site
de mesure et du type de fracture.
Remarque importante : les mesures de la DMO par absorptiométrie
biphotonique et l'interprétation des résultats obtenus ne devraient
être effectués que par des spécialistes bien formés,
utilisant un matériel régulièrement contrôlé
et en suivant un protocole précis. L'appréciation souvent
péjorative de l'ostéodensitométrie est due à la
pratique non contrôlée de cet examen. Les pouvoirs publics seraient
bien inspirés en appliquant à cet examen les mêmes règles
rigoureuses que celles exigées pour les analyses de biologie médicale
depuis la loi de 1975. La mise au point de " bonnes pratiques de mesure
de la DMO " par un collège de spécialistes de cette méthode
d'exploration serait de nature à améliorer l'interprétation
des résultats. Ceux-ci d'ailleurs doivent être appréciés
en fonction des autres paramètres physio-pathologiques.
L'étude française EPIDOS réalisée en 1995 à
partir d'une cohorte de 7600 femmes montre que la baisse de la DMO mesurée
par DXA est associée significativement au risque de fracture du col du
fémur.
Autres
méthodes de mesure de la DMO
La
tomodensitométrie quantitative ou QCT serait plus sensible que
l'absorptiométrie biphotonique pour détecter l'ostéoporose.
Cependant elle est difficile à standardiser et impose le recours à
des spécialistes confirmés. De plus, c'est une méthode
très onéreuse et plus irradiante. Curieusement une mesure de DMO
pratiquée par QCT est remboursée par l'assurance maladie contrairement
à l'ostéodensitométrie par DXA !
Les techniques utilisant les ultrasons d'apparition plus récentes
se sont beaucoup développées aux USA, notamment au niveau des
cabinets médicaux et des officines de pharmacie. Elles font, en effet,
appel à des appareils peu encombrants et moins coûteux que les
ostéodensitomètres par absorptiométrie biphotonique. On
analyse les modifications de la transmission des ultrasons par l'os minéralisé
au niveau du calcanéum plus rarement, des phalanges.
Des études ont montré une bonne corrélation entre l'atténuation
du faisceau d'ultrasons et la DMO mesurée par absorptiométrie
biphotonique au niveau du calcanéum. De plus, il semblerait que les résultats
soient influencés en partie par une modification de la structure de l'os
et non seulement de la calcification.
Plusieurs études prospectives ont montré également une
bonne corrélation entre la diminution de l'atténuation des ultrasons
mesurée au niveau du calcanéum et le risque de fracture du col
du fémur, chez les personnes âgées.
Les méthodes utilisant les ultrasons paraissent donc très prometteuses.
Actuellement, cependant, leur précision est nettement inférieure
à celle de l'absorptiométrie biphotonique, la standardisation
n'est pas réalisée et des études prospectives doivent être
engagées. Des organismes publics ou privés devraient mettre en
place ces études au plan régional ou national compte tenu de l'intérêt
potentiel de cette méthode pour un dépistage de masse de l'ostéoporose,
comme c'est le cas pour la mesure de l'hypertension, par exemple.
Les
marqueurs biologiques de l'ostéoporose
Cette
maladie qui est caractérisée par des modifications importantes
du métabolisme osseux à fait l'objet depuis de nombreuses années
de recherches de biologie clinique basées sur les connaissances du métabolisme
phosphocalcique et des marqueurs biologiques du remodelage osseux.
Explorations
biologiques " classiques " du métabolisme phospho-calcique
Dans
la plupart des cas, le bilan phospho-calcique (calcémie, phosphorémie,
calciurie...) est normal. Cependant, on observe parfois une élévation
de la calciurie des 24 heures, et des phosphatases alcalines dans les fractures
vertébrales importantes et les ostéoporoses dues à un alitement
prolongé.
Le dosage de la vitamine D ou de ses métabolites (25-OH D3) permettant
de dépister une carence, surtout chez les personnes âgées
institutionnalisées, peut s'avérer utile.
D'autres examens peuvent permettre de faire un diagnostic différentiel
dans les déminéralisations osseuses non ostéoporotiques.
C'est le cas pour les myélomes et les cancers osseux, les hyperparathyroïdies,
les hypercorticismes surrénaliens (Cushing).
Les
marqueurs du remodelage osseux
Depuis
quelques années on a recherché l'apparition dans le sang ou les
urines de protéines (enzymes notamment) et de composés résultant
de la formation et de la dégradation de l'os. Un groupe d'étude
de la Société Française de Biologie Clinique (SFBC) animé
par les Drs; P. GARNERO et J.C. SOUBERBIELLE a étudié l'intérêt
de ces marqueurs dans le diagnostic et le suivi des traitements de l'ostéoporose.
Une fiche technique publiée par le CESSPF en 2001 fait le point récent
sur cette question. Nous la reproduisons en annexe. Les Biologistes y
trouveront des précisions méthodologiques permettant d'effectuer
ces déterminations dans les meilleures conditions..
Pour les cliniciens, nous ferons simplement quelques remarques sur l'utilité
de ces marqueurs et leur place à côté des autres méthodes
de diagnostic et de suivi de l'ostéoporose.
Nous reproduisons dans le Tableau 1 la liste des principaux marqueurs qu'il
est possible de déterminer actuellement.
Tableau
1 : Marqueurs biochimiques du remodelage osseux
En
gras sont indiqués les marqueurs les plus performants dans l'ostéoporose
FORMATION
|
RESORPTION
|
Sérum
- Ostéocalcine
- Phosphatase alcaline totale et osseuse
Propeptides C et N-terminaux ducollagène de type I (PICP et PINP)
|
Plasma/sérum
- Phosphatase acide résistante à l'acide tartrique
- Pyridinoline et desoxypyridinoline libres
- Télopeptides C-terminaux (CTX) du collagènede type
I
Urine
- Pyridinoline et desoxypyridinoline libres
- Télopeptides N (NTX) et C-terminaux (CTX)du collagène
de type I
- Calciurie
- Hydroxyprolinurie
- Galactosylhydroxylysine
|
Sur
un plan général, il est nécessaire de savoir pour l'interprétation
des résultats que l'imprécision analytique de ces dosages est
inférieure à 10%. Les variations interindividuelles sont de 5
à 10% pour les marqueurs dosés dans le sang et 15 à 20%
pour ceux évalués dans l'urine. Il est recommandé pour
le suivi des patients de faire pratiquer les dosages dans le même laboratoire.
Indiquons tout de suite qu'il est impossible de poser un diagnostic d'ostéoporose
en se basant uniquement sur l'usage des marqueurs biochimiques. La mesure
de la DMO par absorptiométrie biphotonique constitue actuellement le
meilleur élément de diagnostic. Les marqueurs peuvent cependant
apporter des compléments d'information.
Si, par exemple, la DMO conduit à envisager une ostéopénie,
l'augmentation nette de un ou plusieurs marqueurs de la résorption osseuse,
peut conduire le clinicien à proposer un traitement ; en effet, le risque
de perte osseuse rapide est, dans ce cas, de 2 à 6 fois plus importante
qu'en présence de marqueurs normaux ou sub-normaux. D'autre part, l'augmentation
des marqueurs du remodelage osseux est en faveur d'un risque fracturaire accru
étant témoin de la dégradation de la micro-architecture
de l'os par hyperactivité des ostéoclastes.
La détermination des marqueurs osseux permet donc d'affiner le décision
thérapeutique devant une diminution de la DMO associée à
des facteurs de risque indiqués précédemment tels que :
antécédents familiaux, faible poids corporel etc... . Mais actuellement,
l'utilité essentielle des marqueurs réside dans le suivi de
l'effet des traitements par les inhibiteurs de la résorption osseuse.
Ils permettent, en outre, de contrôler l'observance du traitement
et de motiver des patient(e)s soumis à des thérapeutiques prolongées
pendant plusieurs années. Enfin, chez les malades ostéoporétiques,
un niveau très élevé des marqueurs osseux peut suggérer
la présence d'une maladie métabolique de l'os ou d'une atteinte
néoplasique.
Conclusions
A
la suite de l'analyse des risques que fait courir l'existence d'une ostéoporose
et les possibilités actuelles de diagnostic de prévention et de
traitement, quelles recommandations peut-on effectuer concernant l'évaluation
du risque osseux ?
De nombreux groupes d'experts ont émis des avis assez concordants malgré
quelques divergences.
Dans l'état actuel des possibilités d'explorations cliniques,
radiologiques et biologiques, il ne semble pas réaliste d'effectuer un
dépistage systématique de l'ostéoporose sur toute la population.
Une mesure de la DMO par absorptiométrie biphotonique aux rayons X chez
toutes les femmes à la ménopause serait utile, cependant pour
des raisons essentiellement économiques le dépistage généralisé
n'est pas retenu par la plupart des groupes d'experts. Un dépistage limité
aux femmes présentant des facteurs de risque particuliers paraît
raisonnable. Nous les avons évoqués : ménopause précoce,
aménorrhée secondaire prolongée, antécédents
d'ostéoporose ou de fractures chez les parents, indice de masse corporelle
inférieur à 19 Kg/m2, diminution de la taille, hypercorticisme
ou corticothérapie prolongée, hyperthyroïdie et hyperparathyroïdie...
Le dépistage de l'ostéoporose n'est pas nécessaire quand
un traitement hormonal substitutif adéquat a été institué,
à condition que l'observance soit régulière et prolongée.
Il est donc utile de vérifier l'efficacité de ce THS tous les
2 à 5 ans.
De même, en cas d'ostéoporose caractérisée et traitée,
il est souhaitable de vérifier l'efficacité du traitement en effectuant
une ostéodensitométrie tous les 2 à 5 ans, accompagnée
du suivi des marqueurs osseux.
Dans un rapport sur ce sujet, l'Académie Nationale de Médecine
recommande également de déterminer la DMO chez toutes les femmes
âgées de plus de 65 ans, à titre expérimental.
Afin que toutes les femmes puissent bénéficier de ces possibilités
de diagnostic, le remboursement de l'ostéodensitométrie par les
organismes sociaux est recommandé dans les conditions évoquées
ci-dessus. Mais il faudrait associer cette mesure à l'assurance de la
qualité de cet acte comme cela est réalisé pour les analyses
biologiques (formation des spécialistes et contrôle de la qualité
des examens).
Il n'est pas inutile en terminant d'insister sur l'importance de la prévention
primaire de l'ostéoporose (nutrition, mode de vie : activité
physique, tabac, alcool...) et sur l'intérêt du traitement hormonal
substitutif. Le rôle des professionnels de Santé est très
important notamment celui du médecin de famille, du gynécologue,
du pédiatre, du pharmacien... . C'est ce que s'efforce de susciter le
CESSPF auprès des pharmaciens d'officine et des biologistes. Mais l'information
du public par les médias et les Associations de patients ou de consommateurs
est également très importante.
Enfin, les recherches fondamentales et cliniques doivent être poursuivies,
notamment sur la micro-architecture de l'os, la mise au point de nouvelles méthodes
d'exploration non invasives, la valeur relative des facteurs de risque fracturaire
et le rôle des facteurs nutritionnels dans l'apparition de l'ostéoporose.
Mots
clés : ostéoporose, ostéodensitométrie, marqueurs
biologiques
Eléments
bibliographiques
-
Ostéoporose. Stratégies de prévention et de traitement.
Expertise collective de l'INSERM- Editions INSERM 1996.
- Ostéoporoses. GRIO. Coordination C.L. BENHAMOU
Collection Conduites - DOIN ed. Paris 2000.
- Densitométrie osseuse et ostéoporose post-ménopausique
C. ROUX et M. DOUGADOS - Med. et Therap. 2001, 7, n°2, 144-119.
- Les méthodes de mesure de la densité minérale osseuse
et des marqueurs du remodelage osseux dans le dépistage de l'ostéoporose
C. DREUX et P.D. DELMAS - Bulletin de l'Académie Nationale de Médecine
2001 (à paraître).
- Marqueurs biochimiques du remodelage osseux. Introduction P. GARNERO et al.
-
Ann Biol. Clin. 2001, 59, 298-316.
- Le pharmacien et l'ostéoporose. A. FONTANA et P.D. DELMAS - Fiche technique
éditée par le Comité d'Education Sanitaire et Sociale de
la Pharmacie Française (lettre des Nouvelles pharmaceutiques n°216
- Mai 2001).
- Marqueurs du remodelage osseux : intérêt et limites dans l'ostéoporose
post-ménopausique P. GARNERO et J.C. SOUBERBIELLE - Fiche technique éditée
par Comité d'Education Sanitaire et Sociale de la Pharmacie Française
(lettre des Nouvelles pharmaceutiques n°217 - Juin 2001).
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