Il s'agit d'une nouvelle technologie puisqu'elle a
débuté en 1940 avec Raoul Palmer à Paris. Née en gynécologie, elle a bouleversé la
chirurgie en général, introduisant le concept de la chirurgie minimale invasive. Elle
est par ailleurs un bel exemple de l'irruption d'une méthode thérapeutique
nouvelle dans le champ de l'arsenal thérapeutique classique, avec tous les
problèmes qui sont soulevés.
1. C'EST UNE TECHNOLOGIE NOUVELLE.
Elle apporte une autre façon de voir la chirurgie " ce
n'est pas une autre façon de faire la même chose " . C'est une
approche complètement différente. Pourquoi ?
- Le nouveau bloc opératoire est le pelvis : avec ses contraintes bien sûr : instruments
de petits diamètres, multiples entrées nécessaires, espace de vision et de mouvements
limité demandant l'utilisation du gaz ou des laparolifts ; avec ses avantages aussi
que son la non-ouverture de la paroi et l'absence de dessication et de contamination
aérienne.
- le respect de l'anatomie et de la physiologie grâce à la magnification due aux
instruments optiques, aux micro-instruments qui induisent une chirurgie précise, à la
nécessité d'une vue correcte qui demande une hémostase permanente.
- les effets inattendus, tant sur le plan de la réactivité des organes, comme la
cicatrisation spontanée de la trompe dont nous fûmes surpris après la description de
notre méthode de traitement de la grossesse extra-utérine, que sur celui de la
stratégie thérapeutique soulignant l'intérêt de la lymphadénectomie première
dans les cancers de l'utérus.
- la séquence thérapeutique au cours de la même anesthésie : diagnostic,
établissement du pronostic, réalisation du traitement chirurgical.
Mais n'oublions pas toutefois de garder les vraies valeurs de la
chirurgie car il s'agit d'une vraie chirurgie qui doit rester simple,
élégante, efficace et abstenious.
2. C'EST UNE CHIRURGIE NOUVELLE
Elle couvre maintenant tout le champ de la chirurgie gynécologique
:
- la chirurgie de l'annexe
a atteint sa maturité.
- la grossesse extra-utérine ; depuis que nous avons décrit la technique du traitement
chirurgical en 1973, elle est devenue le " milestone " du traitement
de la grossesse tubaire.
- la stérilité tubaire due à des adhérences ou à une obstruction est le lieu
électif d'application de l'endoscopie opératoire.
- les kystes de l'ovaire voient leur diagnostic et leur traitement actuel fondés
sur cette approche chirurgicale, avec la persistance d'une problème, objet de
recherche clinique, qui est la réactivité péritonéale aux agressions physiques et
pathologiques.
- l'endométriose dont le diagnostic, la pathogénie et la thérapeutique ont été
bouleversés par cette chirurgie.
- nous évoquerons d'autres indications opératoires complètement modifiées que
sont la torsion d'annexe, les P.I.D., les douleurs pelviennes.
- L'hystérectomie
, opération symbole des gynécologues, est toujours
l'objet de discussions vives, mais notre série de 1000 cas opérés durant les six
dernières années de cette technique par l'endoscopie.
Nos dernières frontières :
- le cancer :
le second look dans les cancers de l'ovaire a été le premier
apport positif de la technique à la chirurgie oncologique. L'hystérectomie radicale
par laparoscopic, dont nous avons réalisé la première en 1989, a montré son extrême
radicalité ; l'intérêt stratégique de la lymphadénectomie qui peut même être
proposée dans le bilan préthérapeutique.
- le prolapsus
est lui aussi gagné par la méthode. La suspension du col vésical
selon la méthode de Burch est maintenant de pratique quotidienne avec la même
efficacité que par les autres voies. Par contre, toutes les techniques de soutènement ou
de renforcement des parois vaginales (vaginal repair) seront privilégiées.
Avec des bénéfices différents, chaque grand chapitre pathologique
bénéficie de la chirurgie endoscopique, que ce soit dans la technique opératoire ou que
ce soit dans l'approche stratégique thérapeutique.
3. CETTE CHIRURGIE DOIT ETRE L'OBJET D'UNE EVALUATION
NOUVELLE
car son irruption récente dans le champ de la chirurgie classique
nous oblige en peu de temps à en évaluer tous les aspects.
Celles-ci ne peuvent être évaluées par la simple énumération des
complications possibles ; un grand nombre d'articles ont été écrits. Il faut
recourir à des séries suffisamment longues réalisées par des équipes suffisamment
entraînées pour que l'on puisse reconnaître les complications propres à cette
chirurgie. Mais qui ne soient pas des complications dues à un défaut de connaissance de
la méthode ou un défaut d'entraînement.
La chirurgie laparoscopique est une vraie chirurgie. Elle demande un
entraînement qui ne peut se résumer à la vision de quelques vidéos ou à un
entraînement de quelques jours sur pelvic trainer ou animaux.
Un long entraînement est nécessaire, dans une équipe qui connaisse
la méthode et possède les autres techniques chirurgicales gynécologiques.
-
LES RESULTATS DE CETTE CHIRURGIE
doivent être évalués par des séries comparatives et sans impliquer l'approche
de la pathologie elle-même :
- la grossesse extra-utérine va devoir intégrer les moyens de diagnostic actuels
précoces,
- la chirurgie de la stérilité va devoir reconnaître la place des moyens
d'évaluation endo-utérins,
- la chirurgie de l'endométriose va devoir prendre en compte la méconnaissance de
la physiopathologie de cette maladie.
- les hystérectomies devront être différenciées en hystérectomies avec gros utérus
et utérus de volume normal, en hystérectomies avec prolapsus et sans prolapsus.
- la chirurgie du cancer devra bien retenir ce qui relève de la chirurgie endoscopique
et de l'oncologie elle-même.
- l'extension de la lymphadénectomie doit être précisée avant de discuter de
l'intérêt de la laparoscopie.
- la chirurgie des prolapsus doit prendre en compte la physiopathogénie des prolapsus.
Il ne faut pas tout mélanger !
Nous devons bien différencier le coût de la chirurgie endoscopique
elle-même avec l'acquisition du matériel de base nécessaire à sa réalisation et
le coût facultatif des instruments sophistiqués, souvent associés à cette chirurgie :
l'achat de lasers est bien sûr onéreux ; les outils automatiques (stappler, clip)
augmentent le prix de cette chirurgie. Sont-ils toujours utiles ? La coagulation bipolaire
n'est elle pas suffisante pour réaliser un grand nombre d'hémostases ?
L'évaluation de cette chirurgie sous l'angle de
l'efficacité, du coût, de l'entraînement, doit bien retenir ce qui revient
exactement à cette technique chirurgicale et non aux autres aspects environnementaux.
4. LES NOUVELLES TECHNOLOGIES LA FONT EVOLUER
Elle devra toujours obéir aux règles de la chirurgie, mais elle va
certainement beaucoup évoluer avec les progrès de la technologie. Son histoire récente
nous l'a démontré. Son histoire future le confirmera.
-
LES IMAGES ONT UNE GRANDE IMPORTANCE.
* Que ce soit des images sensibilisées par l'utilisation de
la fluorescence, de certaines longueurs d'onde, pour les métastases néoplasiques ou
l'endométriose sur le péritoine par exemple.
* La réalité augmentée qui utilise des images réalisées
antérieurement à la chirurgie pour en faciliter le cours.
* La réalité virtuelle qui permettra de composer avant
l'intervention des hypothèses de chirurgie, voire de développer des entraînements
sur des machines utilisant la robotique et le computer. Cette technique permet aussi des
interventions, voire des aides à des interventions à distance.
utilisant des diamètres inférieurs ou égaux à 2 mm permettra de revoir le chapitre
diagnostique de l'endoscopie et peut-être de l'utiliser sans anesthésie avec
une simple sèdation.
-
LES INSTRUMENTS MULTIFONCTIONS
vont réduire le nombre de trocarts et éviter les entrées et sorties trop
fréquentes de nos instruments en cours d'opération.
-
LE GAZ et le MILIEU PERITONEAL
vont faire progresser notre connaissance des modifications de température, de pH,
d'illuminations et de réactivité péritonéale à ces agressions physiques.
-
LES ANESTHESIES NOUVELLES
prennent en compte les modifications du milieu intérieur par l'irruption des gaz
de pneumopéritoine, ou des liquides de dilatation utérine comme la glycine ; les
modifications de pression cardiovasculaire ou thoracique ou des circulations expliquent
des incidents ou les oliguries de certaines longues anesthésies ; les nouveaux gaz vont
peut être éviter les modifications du milieu intérieur et les hypercapnies.
Nous sommes en présence d'une révolution thérapeutique dont les
développements ne font que commencer !