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Spermatogenèse et facteurs de croissance

M Benahmed , C Mauduit et S. Hamamah

Introduction

L’étude des caractéristiques du sperme demeure encore en l’an 2000 le maître examen dans l'évaluation de la fertilité masculine. Il constitue, le reflet de l'activité testiculaire ainsi que des évènements post-gonadiques. L’étude des caractéristiques du sperme demeure le maître examen dans l'évaluation de la fertilité masculine. Il constitue le reflet de l'activité testiculaire et des évènements post-gonadiques. D'un point de vue anatomique, le testicule adulte est composé de deux compartiments : (i) l'espace interstitiel et (ii) les tubules séminifères. L'espace interstitiel contient des ilôts de cellules de Leydig (cellules stéroïdogènes), des cellules du système immunitaire en petit nombre, une vascularisation lymphatique et artério-veineuse et enfin un réseau nerveux [1].

Les tubules séminifères sont constitués, à la périphérie des cellules péritubulaires myoïdes, des cellules de Sertoli et des cellules de la lignée germinale à différents stades de développement [1]. Les cellules de Sertoli et les cellules germinales sont intimement liées sur le plan anatomique, suggérant des interactions étroites. La spermatogenèse comprend trois phases: (i) la prolifération des cellules germinales (spermatogonies), (ii) la méiose (spermatocytes) qui correspond à la réduction du nombre des chromosomes c’est-à-dire au passage au stade haploïde et (iii) la spermiogenèse qui est l'étape de différenciation des cellules germinales haploïdes (spermatides) en spermatozoïdes [2].

L'épithélium séminifère (ensemble des cellules de Sertoli et des cellules germinales) présente des associations particulières de cellules de Sertoli avec des cellules germinales à différentes étapes de leur développement, chaque association est un stade de l'épithélium séminifère. On distingue 12 stades chez la souris et 6 chez l'homme [2]. Ces stades surviennent de façon cyclique, ils constituent le cycle spermatogenétique. Chez l'adulte, le rythme d'entrée des spermatogonies en prolifération est régulier pour un tubule donné. La spermatogenèse est un phénomène continu depuis la puberté jusqu'à la fin de la vie.

La spermatogenèse peut être abordée sur trois aspects:

(i) les aspects cellulaires qui soutendent la spermatogenèse ;

(ii) les gènes qui orchestrent ce processus et

(iii) les différents aspects pathologiques de la spermatogenèse.

Les aspects cellulaires de la spermatogenèse sont bien connus et décrits en détails dans un grand nombre d'ouvrages. Les aspects moléculaires sont de connaissance plus récente et se développent avec les apports de nouvelles méthodologies telles que les techniques de génétique et de biologie moléculaire.

Ces aspects moléculaires commencent à être connus dans les modèles expérimentaux (essentiellement les modèles de souris et de rat) mais encore peu chez l'homme. Enfin, en ce qui concerne les aspects pathologiques de la spermatogenèse, là aussi les aspects cellulaires sont décrits depuis longtemps, alors que les bases moléculaires de l'atteinte de la spermatogenèse restent encore mal connues.

Nous nous sommes efforcés de faire le lien, à chaque fois que cela était possible, entre les aspects moléculaires et la pathologie de la spermatogenèse.

Cellules germinales dans le testicule adulte

Au moment de la puberté, le processus de la spermatogenèse permet aux cellules germinales de proliférer et de se différencier dans le tube séminifère en rapport étroit avec les cellules de Sertoli. Sur un coupe histologique de testicule, on constate que les cellules les plus matures sont situées le plus loin de la membrane basale, les cellules plus jeunes sont situées vers la membrane basale.

Ce processus est synchronisé. Il commence par l’entrée en mitose des spermatogonies A et finit par la libération des spermatozoïdes dans la lumière du tube. Ainsi, la spermatogenèse est un processus qui permet la transformation graduelle de cellules germinales souches en spermatozoïdes. Ce processus implique des étapes (i) de prolifération cellulaire (mitoses);

(ii) de duplication des chromosomes et de recombinaisons génétiques (méiose) aboutissant à la production de spermatides haploïdes;

(iii) de différentiation terminale des spermatides en spermatozoïdes et

(iv) d’apoptose.

Les trois phases de prolifération, de réduction-division (méiose) et de différenciation sont associées à trois types de cellules germinales différentes qui sont respectivement les spermatogonies, les spermatocytes et les spermatides. L’apoptose concerne les cellules au moment de la prolifération (spermatogonies) et de la méiose (spermatocytes).

Prolifération des spermatogonies

Les spermatogonies, les cellules les plus immatures sont présentes à la base de l'épithélium séminifère. Les spermatogonies A vont d'une part se multiplier pour renouveller continuellement l'épithélium germinal (autorenouvellement) et d'autre part elles vont se différencier en spermatogonie B qui continueront leur développement jusqu'au stade du spermatozoïde. Les spermatogonies B donnent naissance aux premières cellules de la phase suivante, les spermatocytes préleptotènes (correspondant à l’entrée dans la prophase méiotique) qui vont migrer dans la partie apicale du tube séminifère après avoir traversé la barrière hémato-testiculaire.

La méiose

La méiose est un mécanisme de division cellulaire particulier aux cellules de la lignée germinale destinée à donner naissance à des cellules germinales haploïdes. La méiose est la succession de deux divisions cellulaires qui conduisent à la formation de quatre cellules haploïdes pour une cellule diploïde entrant en méiose. La méiose permet (i) la transmission de l'information génétique d'une génération à la suivante ; (ii) la réduction du nombre de chromosome avec la reconstitution du capital génétique au cours de la fécondation ; (iii) le brassage de l'information génétique [1].

La première division méiotique occupe une très grande partie de la méiose et permet la réduction du nombre des chromosomes et le brassage de l'information génétique. La deuxième division méiotique est proche d'une mitose classique mais elle survient sur des chromosomes repésentés en un seul exemplaire.

La différenciation : Spermiogenèse

La spermiogenèse est un processus complexe par lequel les spermatides se transforment en spermatozoïdes capables de bouger et de féconder. Ce processus implique des changements comme (i) la formation du flagelle qui permet la mobilité; (ii) le développement de l'acrosome qui contient des enzymes protéolytiques nécessaires aux spermatozoïdes lors de l'interaction avec l'ovocyte; (iii) la condensation des chromosomes et des protéines du noyaux pour former la tête du spermatozoïde; (iv) l'élimination de l'"excès" de cytoplasme des spermatides; (v) le largage des spermatozoïdes dans la lumière du tube séminifère (spermiation) [3].

La spermiogenèse s'effectue avec une durée fixe (par exemple 24 jours chez l'homme) au niveau de chaque étape de la différenciation des spermatides. Il semblerait que la durée des différentes étapes de la spermiogenèse ne peut être affectée ni par des agents physiques (comme la température) ni même par des signaux extracellulaires (molécules de signalisation). Il existe des relations structurelles et fonctionnelles étroites entre les spermatides et les cellules de Sertoli. Les cellules de Sertoli jouent un rôle essentiel dans le contrôle de la spermiogenèse très probablement via des facteurs régulateurs et nutritifs sous le contrôle hormonal[9]

Apoptose

Ce processus devrait jouer un rôle clé dans l’élimination des cellules germinales avec des anomalies chromosomiques. Le mécanisme d'apoptose permettrait ainsi d'éliminer les cellules (spermatogonies ou spermatocytes) où il y a eu une défaillance de la réparation de l'ADN (mitoses dans le cas des spermatogonies, recombinaison génétique dans le cas des spermatocytes pachytènes). Ce processus d’apoptose devrait aussi permettre l’ajustement du nombre des cellules germinales par rapport au nombre des cellules de Sertoli qui est constant [4].

Le processus de l'apoptose pourrait aussi jouer un rôle dans le positionnement des cellules germinales par rapport aux cellules de Sertoli. En effet, au niveau des cellules germinales l’apoptose est observée à deux moments critiques: (i) lors de la phase la plus importante de multiplication des spermatogonies (spermatogonies A2), (ii) lors de la méiose (anaphase) avant l’appariement des chromosomes homologues. A ces stades, il existe un risque important de dommage au niveau de l’ADN. Classiquement, quand il y a dommage au niveau de l'ADN d'une cellule, il y a arrêt puis réparation avant le départ dans le cycle cellulaire.

Il semblerait que pour les cellules germinales (destinées à devenir des spermatozoïdes c’est-à-dire des cellules qui transmettent le patrimoine génétique d’un individu), l'apoptose soit une voie privilégiée et urgente pour éliminer les cellules ayant un ADN endommagé. En somme, il apparaît que l'apoptose permet d'éliminer des cellules germinales en réponse à un stress environnemental (chaleur), à des lésions de l’ADN (anomalies chromosomiques, absence de réparation de l'ADN, ou de recombinaisions génétiques, radiations ionisantes) ou lors de déplétion en facteurs trophiques (exemple signaux hormonaux, facteurs de croissance).

Rôle de la cellule de Sertoli

Les cellules de Sertoli jouent un rôle crucial dans le développement des cellules germinales et dans la régulation de la spermatogenèse. En effet, ce sont les cellules de Sertoli qui reçoivent les messages hormonaux (testostérone, FSH) et un grand nombre de signaux locaux (facteurs de croissance). Les cellules de Sertoli vont alors sécréter d'autres facteurs qui moduleront les fonctions des cellules de Sertoli elles-mêmes, et des cellules voisines, les cellules de Leydig et surtout les cellules germinales. Vis-à-vis des cellules germinales, les cellules de Sertoli vont remplir plusieurs fonctions.

Maintien de la structure des tubes séminifères

Les cellules de Sertoli apportent des structures adaptées aux les cellules germinales souches et aux cellules germinales en voie de maturation, notamment par l’intermédiaire de la formation de matrice extracellulaire et des jonctions spécialisées (barrière hématotesticulaire).

Compartimentalisation de l'épithélium séminifère

La barrière hématotesticulaire formée par les jonctions spécialisées présentes entre les cellules de Sertoli divise le tubule séminifère en un compartiment basal et un compartiment adluminal. Cette barrière permet aux différentes étapes de la méiose et de la spermiogenèse de s'effectuer dans un environnement spécifique et isolé du milieu intérieur et en particulier du système immunitaire. La barrière hématotesticulaire est indispensable au bon déroulement de la spermatogenèse. La formation et le maintien de la barrièere hématotesticulaire sont essentiellement sous le contrôle hormonal mais il n'est pas impossible que le contrôle local joue aussi un rôle.

Phagocytose et pinocytose

Les cellules de Sertoli jouent un rôle clé dans la phagocytose des cellules germinales durant leur apoptose et des cytoplasmes résiduels (corps résiduels) provenant des spermatides au cours de la spermiation.

Spermiation

Les cellules de Sertoli jouent un rôle clé dans la libération des spermatozoïdes dans la lumière des tubes séminifères. Ce processus est complexe et implique l'expulsion des spermatides (tardives) à partir des cryptes sertoliennes vers la lumière. L'encapsulation des spermatides par les processus cytoplasmiques, la libération des têtes des spermatides de la région apicale des cellules de Sertoli puis le détachement et enfin la phagocytose des corps résiduels. Les mécanismes moléculaires à l'origine de ces différentes étapes sont inconnus

Sécrétion du fluide des tubes séminifères

Ce fluide permet l'apport d’éléments nutritifs pour les cellules germinales en maturation et pour les spermatozoïdes libérés, il permet aussi le transport des molécules régulatrices intervenant dans les mécanismes de communication cellulaire, le transport des spermatozoïdes vers le rete testis, les canaux efférents et la tête de l'épididyme. Ce fluide a une composition spécifique. Il est, par exemple, plus riche en potassium, protéines, acides aminés, sucres et hormones stéroïdes que le plasma. La formation et la composition de ce fluide sont sous le contôle hormonal et probablement aussi local.

(Production des facteurs régulateurs de la spermatogenèse

Environ 80% des protéines et peptides présents dans le fluide testiculaire proviennent des cellules de Sertoli. Ces facteurs sertoliens sont des protéines de transport, des facteurs de croissance, des protéases et des anti-protéases. Ces facteurs sont impliqués dans les différentes fonctions des cellules de Sertoli. Cependant, la démonstration du rôle exact de ces facteurs sertoliens dans les différentes étapes de la spermatogenèse reste encore à faire.

Contrôle de la spermatogenèse par les facteurs de croissance

Le contrôle de la spermatogenèse par les facteurs locaux est soit direct, soit indirect :

Action directe sur les cellules germinales

Les étapes fondamentales de la spermatogenèse comme la mitose, la méiose, la différenciation et la mort (apoptose) des cellules germinales, pourraient être sous le contrôle direct de certains facteurs de croissance et cytokines produits par les cellules de Sertoli.

En effet, les cellules germinales expriment des récepteurs spécifiques pour des molécules produites par les cellules de Sertoli comme EGF/TGFa, les TGFb et ses peptides apparentés, le SCF, l’IGF I et le bFGF [5-8] (tableau 1). Ces facteurs régulent le développement des cellules de la lignée germinale pendant la vie fœtale, la puberté et/ou la vie adulte. En effet, pendant le développement embryonaire de la gonade mâle, des facteurs locaux comme le SCF favorisent la migration des CPG ainsi que leur survie (rôle anti-apoptotique). La multiplication des gonocytes est stimulée par le SCF, le LIF et le bFGF.

La prolifération des spermatogonies à la puberté ou lors de chaque cycle de la spermatogenèse à l'âge adulte, serait induite par le SCF, l'EGF/TGFa et l'IGF-I, tandis que le TGFb et l'inhibine diminueraient la prolifération de ces cellules. Enfin, plusieurs molécules semblent impliquées dans les phénomènes de la méiose (EGF, TGFb, bNGF) et de la spermiogenèse (EGF). De plus, ces facteurs sertoliens qui contrôlent la spermatogenèse, peuvent être régulés par les hormones. Ces observations illustrent, de nouveau, le rôle de relais local des molécules de signalisation vis-à-vis des hormones (FSH, testostérone).

Cependant, l’expression de ces facteurs sertoliens peut être aussi sous le contrôle de facteurs locaux comme le TNFa, l’IL1a ou le NGF, provenant des cellules germinales. L’ensemble de ces observations indiquent clairement que les facteurs de croissance et les cytokines joueraient un rôle de médiateurs dans les interactions cellules de Sertoli-cellules germinales.

Action indirecte via les cellules de Sertoli

Les cellules de Sertoli réguleraient la spermatogenèse d’au moins quatre manières : elles fournissent aux cellules germinales des molécules indispensables à leur métabolisme (métabolites énergétiques comme le lactate) ; elles produisent des protéines de transport (transferrine, ABP, céruléoplasmine …) qui permettent de délivrer aux cellules germinales des molécules essentielles ; le déroulement de la spermatogenèse nécessite des remaniements tissulaires pour le passage des cellules germinales du pôle basal au pôle adluminal (voir chapitre M) qui font intervenir des protéases et anti-protéases produites par les cellules de Sertoli (et les cellules péritubulaires myoïdes) et enfin le nombre de cellules de Sertoli conditionne le nombre de cellules germinales.

Rôle sur la production d’éléments nutritifs comme le lactate

Les facteurs locaux favorisent le développement des cellules de la lignée germinale en augmentant la production des métabolites énergétiques comme le lactate. En effet, les cellules de la lignée germinale ne métabolisent pas le glucose mais utilisent préférentiellement le lactate provenant des cellules de Sertoli, comme source d’énergie [9]. Il est connu que les hormones telles que la FSH et l’insuline augmentent la production sertolienne de lactate. Plus récemment, Il a été montré que certains facteurs locaux modulent la sécrétion de lactate. Ainsi, l'IGF I et l'EGF stimulent la production de lactate en favorisant, à court terme, la captation de glucose (principalement en augmentant les transporteurs de glucose). D’autres facteurs comme le TGFb, le TNFa et l’IL1a augmentent la production de lactate à long terme.

Rôle sur l’expression et la production de protéines de transport

Les cellules de Sertoli du fait de la barrière hématotesticulaire doivent produire certaines protéines sériques indispensables à la spermatogenèse, telles que l'ABP (androgen binding protein), et la transferrine. L’ABP est sécrétée en très forte concentration dans les cellules de Sertoli de rat, en revanche, cette molécule n’est présente qu’à de très faibles concentration chez l’homme. L’ABP a une très forte affinité pour la testostérone et pour la dihydrotestostérone. La sécrétion de l’ABP sous le contrôle de la FSH permettent le transport de la testostérone du testicule vers l’épididyme. La production d'ABP par les cellules de Sertoli est régulée par les facteurs intragonadiques.

La transferrine est sécrétée en grande quantité par la cellule de Sertoli (elle est identique à la transferrine hépatique). Elle permet de délivrer du fer aux cellules germinales. La transferrine est sous le contrôle hormonal de la testostérone et la FSH. De plus, l’expression de cette protéine est sous le contrôle des facteurs locaux. Plusieurs facteurs stimulent l'expression et la production de transferrine sertolienne : l'EGF/TGFa, le bFGF, l'IL1b , l'IL2 et l'IL6. En revanche, l’acide rétinoïque inhibe l’expression de la transferrine. En modulant les taux de transferrine les hormones et les facteurs locaux réguleraient la spermatogenèse, en effet, le nombre de spermatozoïdes produits journellement est corrélé aux taux de transferrine produits par les cellules de Sertoli [10]. De plus, les taux de transferrine sont corrélés aux stades de l'épithélium séminifère.

Par l’intermédiaire du nombre de cellules de Sertoli

Le nombre de cellules de Sertoli présentes dans le testicule, dès la vie fœtale, conditionne le nombre de cellules germinales présentes à l’âge adulte. Autrement dit, tous les facteurs capables de stimuler ou d’inhiber la prolifération des cellules de Sertoli affectera la production des gamètes [1]. Plusieurs facteurs ont été identifiés comme ayant un rôle positif dans la prolifération des cellules de Sertoli fœtales : le bFGF, l’IGF I et l’EGF. Ces facteurs intragonadiques joueraient indirectement un rôle positif sur le nombre de cellules germinales présentes à l’âge adulte

Anomalie d'expression des facteurs locaux et infertilite masculine

La plupart des travaux sur les facteurs intratesticulaires sont relativement récents, et aucune infertilité chez l'homme n'est encore reliée à une anomalie des facteurs locaux. Cependant des altérations de la fertilité ont été mise en évidence chez les animaux ayant subi des modifications génétiques (mutations spontanées ou induites, surexpression, knock-out) portant sur les gènes de certains facteurs de croissance et cytokines (tableau 2). Ainsi, l'absence d'expression de l'IGF-I, de SCF ou de CSF1 provoque un arrêt de la gamétogenèse. Ces observations suggèrent l'importance des facteurs intragonadiques et la réalité de leur action sur la spermatogenèse. De plus, une surexpression de TGFb1 provoque un épaississement de la membrane basale et une hypertrophie des cellules de Leydig.

Ce tableau anatomopathologique rappelle celui observé chez l'homme dans le syndrôme de Klinefleter. Ces études de transgenèse suggèrent fortement que certains arrêts de la spermatogenèse chez l'homme (notamment parmi les 40 à 60 % de stérilités sécrétoires idiopathiques) pourraient être dus à des anomalies de l'expression des facteurs locaux ou du relais hormones-facteurs locaux dans la gonade mâle.

Conclusions

Des anomalies potentielles affectant l’expression et/ou l’action des facteurs locaux à l’une de ces étapes, pourraient entraîner une situation d’infertilité. Les anomalies pourraient rendre inefficace le système endocrinien dont l’action est décisive pour la spermatogenèse.

D’ailleurs des données expérimentales de transgenèse (knock-out ou surexpression) montrent qu’une expression inadéquate de facteurs de croissance ou des cytokines peut aboutir à la stérilité (voir tableau 2). Sachant qu’un très grand nombre d’infertilités, en particulier les oligo et les azoospermies sécrétoires, restent encore inexpliquées, il apparait donc important d’essayer d’utiliser les connaissances acquises sur ces facteurs pour tenter d’expliquer ces pathologies testiculaires.

Ces molécules sont recherchées dans le tissu testiculaire, le plasma sanguin et le plasma séminal. Le tissu testiculaire offre peu-être les possibilités les plus intéressantes pour essayer d’identifier différents types d’anomalies entraînant des pertes de fonctions du ligand, du récepteur, du système de transduction ou des facteurs de transcription utilisés par les facteurs locaux pour contrôler l’expression de leurs gènes cibles.

Le plasma sanguin pourrait s’avèrer intéressant pour détecter des molécules de signalisation provenant de cellules de Sertoli. L’exemple de l’inhibine B pourrait être suivi par la mise en évidence d’autres marqueurs intéressants. Enfin, le plasma séminal, qui est le résultat des sécrétions gonadiques et extra-gonadiques, pourrait permettre d’identifier des molécules marqueurs des différents types d’oligo et d'azoospermies sécrétoires et excrétoires.

Dans ces cas, la coopération entre le médecin, le biologiste et le chercheur est décisive pour distinguer et classer les différents types d’oligo et d'azoospermies. Les facteurs de croissance et les cytokines étant avant tout des peptides, leur manipulation et identification dans un milieu complexe comme le plasma séminal, requiert néanmoins énormément de précautions si l’on ne veut pas s’exposer à des risques de mauvaises exploitations/interprétations des données obtenues.

Bibliographie

1. MASTUMOTO AM : Spermatogenesis. In : "Reproductive endocrinology, surgery, and technology." EY Adashi, JA Rock and Z Rosenwaks (eds). Lippincott Raven, Philadelphia, (1996), Vol 1, pp 360-384

2. LARSEN WJ : Gamétogenèse, fécondation et première semaine. In : "Embryologie humaine". Churchill Livingstone, Edinburgh, (1996), pp 1-31

3. OAKBERG EF : A description of spermiogenesis in the mouse and its use in analysis of the cycle of the seminiferous epithelium and germ cell renewal. Am J Anat, (1956), 99, 391-409

4. BLANCO-RODRIGUEZ J : A matter of death and life: the significance of germ cell death during spermatogenesis. Int J Androl, (1998), 21, 236-248

5. BENAHMED M : Growth factors and cytokines in the testis. In : "Male infertility: Clinical investigation, cause, evaluation and treatment." F. Comhaire (ed). Chapman Hall, London, (1996), pp 55-96

6. GNESSI L, FABBRI A, SPERA G : Gonadal peptides as mediators of development and functional control of the testis: an integrated system with hormones and local environment. Endocrine Reviews, (1997), 18, 541-609

7. ROBERTSON DM, RISBRIDGER GP, HEDGER M, MCLACHLAN RI : In : "Molecular biology of the male reproductive system." D DeKretser (ed). Academic Press, San Diego, (1993), pp 411-438

8. GRISWOLD MD : Interactions between germ cells and Sertoli cells in the testis. Biology of Reproduction, (1995), 52, 211-216

9. GRISWOLD MD : Protein secretion by Sertoli cells: general considerations. In : "The Sertoli cell" LD Russell and MD Griswold (eds) CacheRiver Press, Clearwater, (1993), pp 195-200

10. SYLVESTER SR : Secretion of transport and binding proteins. In : "The Sertoli cell" LD Russell and MD Griswold (eds) CacheRiver Press, Clearwater, (1993), pp 201-216

Gene

mutation

phénotype mutant

TGFb1

surexpression

atrophie des tubules séminifères, épaississement de la membrane basale tubulaire, hypertrophie des cellules de Leydig

TGFb2

Knock out

ectopie testiculaire, hypoplasie testiculaire

BMP 8B

Knock out

petits testicules, défaut de prolifération et de différenciation des cellules germinales lors de la puberté, diminution des spermatogonies, augmentation de l'apoptose des cellules germinales, infertilité

Inhibine a

Knock out

développement de tumeurs gonadiques stromales, régression de la spermatogenèse parallèle à l'augmentation de la tumeur, arrêt de la spermatogenèse, augmentation du taux de FSH

Act RII

Knock out

diminution du taux de FSH, puberté tardive

IGF I

Knock out

diminution de la taille des testicules, infertilité, diminution du taux de testostérone, retard dans le développement des cellules de Leydig

CSF 1

Knock out

diminution du taux de testostérone, infertilité

SCF/ckit

deletion

anomalie de migration des cellules germinales primordiales (mutation nulle des gènes SCF ou ckit) , anomalie de la multiplication des spermatogonies (deletion du domaine intracytoplasmique du gène SCF)

IFNg

surexpression

altération de la spermatogenèse, infertilité

TrkA

Knock out

certains animaux sont stériles

IL2

surexpression

atrophie testiculaire, absence de cellules germinales

Tableau 2 : Altération gènique des facteurs intragonadiques et infertilité

Centre de Fécondation in vitro, Hôpital A. Béclère, 157 rue de la Porte de Trivaux, 92141 Clamart, INSERM U407, Faculté de Médecine Lyon-Sud, BP 12, 69 921 Oullins