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2011 > Périnatalité > prématurité  Telecharger le PDF

Problèmes techniques liés à l'extraction des FŒTUS PRÉMATURÉS

R. Maillet

QCM PRE TEST

Concernant la grande prématurité, laquelle ou lesquelles de ces propositions sont fausses :
  • A- le taux d’hémoglobine est celui du fœtus à terme.
  • B- les facteurs de coagulations sont normaux.
  • C- la densité osseuse est normale.
2-Concernant la grande prématurité , laquelle ou lesquelles de ces propositions sont fausse :
  • A-l’épisiotomie est systématique
  • B-la littérature confirme avec des niveaux de preuves suffisants la supériorité des « spatules » en cas d’extraction.
  • C-En cas de césarienne, il faut privilégier une incision cutanée médiane.

Introduction

Quel que soit le mode d’accouchement choisi, le fœtus de petit poids pose des problèmes techniques spécifiques liés à sa fragilité.

Un fœtus est dit :

  • de petit poids lorsqu’il fait moins de 1 500 g (very low birthweight)
  • de très petit lorsqu’il fait moins de 1 000 g (extremely very low birthweight).

La bibliographie concernant ce sujet est relativement pauvre et en tous les cas ancienne. Les principales références sont antérieures à 1990, elles concernent donc une période où les termes acceptables d’extraction des fœtus n’étaient pas ce qu’ils sont devenus aujourd’hui (on peut estimer que la différence est de deux semaines).

Lorsqu’on consulte les manuels didactiques, l’aspect technique est traité en moins de deux lignes ou carrément ignoré.

I – LA FRAGILITE DES TOUT PETITS

Elle est double à la fois mécanique et biologique.

Sur le plan mécanique, la fragilité est :
  • osseuse : la densité osseuse augmente avec l’âge gestationnel
  • vasculaire : les vaisseaux des grands prématurés sont particulièrement fragiles ; il existe de nombreuses publications essentiellement retrouvées dans les journaux de chirurgie vasculaire pédiatrique faisant état de complications graves vasculaires conduisant à des amputations et qui sont d’origine iatrogène et post-natale
  • cutanée : la peau subit une maturation progressive : le début de la couche cornée se fait à 24 semaines d’aménorrhée, donc plus le fœtus est jeune, moins sa peau est mature et plus il risque des complications infectieuses.
La Fragilité biologique :

Les points principaux qui concernent l’obstétricien sont l’existence d’une anémie, d’une hémostase insuffisante et d’un système immunitaire imparfait...

  • L’anémie : un fœtus entre 22 et 25 semaines a un taux d'hémoglobine de l’ordre de 12.2 g-100 ml alors  qu’au-delà de 30 semaines ce chiffre arrive à 13.6.
  • En ce qui concerne l’hémostase, tous les facteurs y participant sont diminués, ainsi :
  • le fibrinogène
  • l’anti-thrombine III, protéine C, protéine S
  • les facteurs de la coagulation, particulièrement ceux qui sont vitamines K dépendants (tableau 1)

 

Facteurs coagulation (%)

<28 SA

28-31

Terme

2

12

30

45

7

28

50

60

9

10

35

40

10

20

40

45

 

Tableau 1 : facteurs de la coagulation en fonction de l’âge gestationnel

Cas du crâne fœtal :

En cas de prématurité, le crâne fœtal cumule toutes les fragilités :

  • cutanée
  • osseuse
  • vasculaire et lorsqu’on sait la richesse vasculaire de cette extrémité fœtale, on comprend les dangers qui en découlent. (figure 1)

 

II – LES PRINCIPALES LESIONS RENCONTREES CHEZ LES PREMATURES

Elles sont variées, mais l’on retrouve le plus souvent :

  • des hématomes plus ou moins étendus, quelle que soit la voie d’accouchement
  • des fractures : elles concernent tous les os, mais particulièrement les os longs, encore plus fréquemment au cours des césariennes], les deux os étant les plus menacés étant le tibia gauche et le radius droit ; d’autres os sont concernés : la clavicule, les côtes et, bien entendu, le crâne fœtal].
  • les plaies cutanées sont également très fréquentes  : un travail italien estime que, quel que soit le terme, 1,8 % des fœtus ont une blessure cutanée lors d’une césarienne sur plus de 3 000 césariennes ; en cas de prématurité, ce phénomène est, bien entendu, aggravé par l’existence fréquente d’un oligoamnios ou d’une rupture prématurée des membranes.
  • plus rarement, d’autres viscères peuvent être blessés : la rate lors de compression abdominale, l’œsophage ou le carrefour laryngé en particulier lors de manœuvres sur tête dernière].

III – LES PARTICULARITES OBSTETRICALES

Elles expliquent les difficultés rencontrées.

  • Le Diagnostic de présentation est souvent difficile d’autant qu’il survient dans un contexte d’urgence. Les extrémités fœtales sont difficiles à différencier et l’échographie est, bien entendu, d’un grand secours.
  • Les présentations dystociques sont particulièrement fréquentes, ainsi on trouve plus fréquemment des sièges (tableau 2) et des présentations transverses. Lorsque la présentation est céphalique, on a fréquemment une déflexion qui peut aboutir à des présentations de la face. D’une manière générale, il n’existe pas les phénomènes d’accommodation et le fœtus va finir par stagner dans les voies génitales entraînant un allongement de la dernière phase du travail.
  • En cas de siège, des complications spécifiques peuvent survenir comme la rétention de tête dernière sur un col incomplètement dilaté ou les procidences du cordon particulièrement fréquentes dans ce contexte.

 

Age gestationnel

Fréquence en  %

21-24 SA

24

25-28 SA

19

29-32 SA

14

 

Tableau 2 : fréquence du siège/age gestationnel

 

IV – LES PROBLEMES TECHNIQUES

La lecture de la bibliographie tout particulièrement dans l’optique de l' » évidence base médecine » nous est de peu de secours.

Les trois problèmes principaux qui nous intéressent sont négligés à savoir :

  • l’épisiotomie
  • la place de l’extraction instrumentale
  • les particularités techniques de la césarienne.
En ce qui concerne l’épisiotomie :

il n’existe aucune preuve de son bien-fondé (NP 5). Il existe quelques articles contre[4]. Le but de l’épisiotomie est d’éviter la stagnation sur le périnée. On peut raisonnablement penser qu’elle est d’une bonne indication lorsque le périnée est tonique et en cas d’extrême prématurité, mais les preuves scientifiques ne sont pas là.

Les extractions instrumentales :

leur but est de protéger le crâne fœtal en évitant la bosse séro-sanguine. Il existe quelques publications] en faveur de l’extraction (NP 3). Trois instruments sont envisageables :

  • la ventouse est contre-indiquée par tous les auteurs pour des raisons de bon sens en dessous de 1500g.
  • il existe quelques articles préconisant l’utilisation du forceps
  • quant à l’utilisation des spatules, il n’existe aucun argument scientifique en leur faveur, mais ceux qui connaissent cet instrument en font une bonne indication puisqu’il ne s’agit pas dans ce type d’extraction de saisir le crâne fœtal, mais d’écarter les parties génitales.
Problèmes spécifiques de la césarienne :

D’une manière générale, la césarienne dans cette indication est une césarienne potentiellement difficile puisqu’il n’existe pas de segment inférieur et que très souvent s'associe une pathologie maternelle ajoutant ses propres facteurs de risques (troubles de la coagulation, obésité...).

Les recommandations que l’on peut tirer de la bibliographie sont rares :

  • en ce qui concerne l’incison cutanée, il n’existe pas de recommandation sinon qu’elle doit être large (NP 5)
  • en ce qui concerne l’incision utérine, il existe quelques articles] qui préconisent une incision verticale qui donne un avantage chez les fœtus de moins d e 1 000 g].
  • La césarienne vaginale peut être intéressante pour les praticiens sachant la pratiquer

V – CAS DU SIEGE

Comme toujours, en cas de présentation du siège, les risques sont multipliés. Toutes sortes de lésions ont été décrites que ce soient :

  • des fractures des membres
  • des hématomes liés à la préhension
  • des compressions abdominales responsables de rupture de rate
  • des fractures d’humérus au moment de l’extraction des épaules.

Il n’existe pas de manuel opératoire dans cette situation, simplement quelques conseils :

  • ne pas lever le fœtus au-delà de 30 par rapport à l’horizontal sous peine de lésions cervicales sévères
  • en cas de rétention sur un col incomplètement dilaté, on peut utiliser le NITRONAL® ou une incision cervicale
  • cas particulier du 2e jumeau : on peut s’aider en cas d’utérus tonique du SEVOFLURANE plus efficace que le FLUOTANE et moins dangereux pour la mère. Certains auteurs préconisent de garder intacte la poche des eaux, ce qui permet de mieux faire évoluer le fœtus en cas de grande extraction

VI – AUTRES ASPECTS TECHNIQUES

La délivrance pose des problèmes spécifiques. Il n’existe en effet pas de plan de clivage en cas de prématurité extrême et les gestes se compliquent à travers une dilatation cervicale restreinte et peu compliante.

L’analgésie : tous les auteurs préconisent l’analgésie loco-régionale qui diminue l’agitation maternelle, les efforts de poussée intempestive pouvant traumatiser le fœtus et qui permet à la mère de voir son enfant. On connaît l’importance de l’établissement d’une relation materno fœtale précoce dans les cas de grande prématurité.

Conclusion

Lorsqu’on sait que le pronostic fœtal est souvent très largement fait en anténatal, il est difficile pour l’obstétricien d’avoir une attitude raisonnable. Comme toujours en obstétrique, il est impossible de randomiser de pareilles situations. Il apparaît évident que l'attitude ne sera pas la même à 25 semaines chez une adolescente de

15 ans que chez une primipare de 39 ans ayant eu une fécondation in vitro.

Il ne faut pas non plus omettre que l’augmentation importante des utérus cicatriciels atypiques risque de générer dans les années qui viennent des complications maternelles graves. Leur apparition est retardée par le faible taux de natalité des pays riches et par le peu d'enclin qu'a la communauté médicale à publier spontanément ses complications iatrogènes.

QCM POST TEST

Concernant la grande prématurité, laquelle ou lesquelles de ces propositions sont fausses :
  • A- le taux d’hémoglobine est celui du fœtus à terme.
  • B- les facteurs de coagulations sont normaux.
  • C- la densité osseuse est normale.

Réponse : A B C

2-Concernant la grande prématurité , laquelle ou lesquelles de ces propositions sont fausse :
  • A-l’épisiotomie est systématique
  • B-la littérature confirme avec des niveaux de preuves suffisants la supériorité des « spatules » en cas d’extraction.
  • C-En cas de césarienne, il faut privilégier une incision cutanée médiane.
Réponse : A B C

Bibliographie

  1. Kaplan, M., et al., Fractured long bones in a term infant delivered by cesarian section. Pediatr Radiol, 1987. 17(3): p. 256-7.
  2. Nadas, S., et al., Predisposing factors in obstetrical fractures. Skeletal Radiol, 1993. 22(3): p. 195-8.
  3. Moisiuk, S.E., et al., Salvage of the ruptured spleen in an infant with very low birth weight. J Pediatr Surg, 2000. 35(12): p. 1822-3.
  4. Lobb, M.O., S.J. Duthie, and R.W. Cooke, The influence of episiotomy on the neonatal survival and incidence of periventricular haemorrhage in very-low-birth-weight infants. Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol, 1986. 22(1-2): p. 17-21.
  5. Bottoms, S., Delivery of the premature infant. Clin Obstet Gynecol, 1995. 38(4): p. 780-9.
  6. Bosche, C., et al., [Mortality, mode of delivery, pneumothorax and intracranial hemorrhage in 859 extremely premature newborn infants between 1984-1992]. Geburtshilfe Frauenheilkd, 1996. 56(6): p. 322-7.
  7. Dietl, J.A., K. Goretzki, and H.A. Hirsch, Classical versus lower segment caesarean section for very-low- birthweight infants. Lancet, 1988. 1(8596): p. 1227.
  8. Neeser, E., U. Niehues, and H.A. Hirsch, [Maternal morbidity following cesarean section. Comparison of isthmo- corpus longitudinal section and isthmian transverse section in premature labor]. Geburtshilfe Frauenheilkd, 1988. 48(1): p. 8-12. 

R. MAILLET