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Titre: Traitement hormonal substitutif (THS) : la vérité en chiffres
Année: 2005
Auteurs: - Genazzani A.
Spécialité: Gynécologie
Theme: ménpause

Traitement hormonal substitutif (THS) : la vérité en chiffres

A.R. GENAZZANI*, T. SIMONCINI*,
P. MONTELEONE*, M.S. GIRETTI*

Après six ans de débats ardus commencés après la publication de la première étude de prévention secondaire des accidents cardiovasculaires des femmes sous traitement hormonal substitutif (THS) [1], la sombre histoire de l'emploi des œstrogènes et la santé de la femme ménopausée voit apparaître quelques rayons de soleil entre les nuages, en donnant de nouvelles
certitudes aux femmes et à leurs médecins.

Récemment, le National Institute of Health a interrompu le bras « œstrogènes seuls » du Women's Health Initiative, (WHI) [2] après l'analyse du Data Safety Monitoring Board (DSMB) qui mettait en évidence que, au bout de près de sept ans, le traitement avec les œstrogènes équins conjugués (les EEC) ne détermine pas une variation de l'incidence de maladies
coronaires [2]. L'étude, prévue pour durer 8 ans et demi a été interrompue prématurément, après seulement 5 ans, parce que les auteurs de l'étude ont acquis la conviction qu'ils faisaient courir un risque certain aux femmes. Sur la base du communiqué des médias, la raison principale de l'interruption a été l'augmentation de l'incidence d'ictus chez les femmes traitées avec les EEC (huit cas en plus par année pour 10 000 participants) par rapport au groupe placebo [2].

Aucune augmentation d'incidence de cancer du sein n'a été mise en évidence après un suivi de près de sept ans chez les patientes traitées avec les seuls œstrogènes [2]. L'importance de cette donnée est énorme et confirme les résultats d'une étude précédente randomisée, l'étude HERS, qui n'a montré aucune augmentation d'incidence de cancer du sein des femmes traitées avec les EEC + AMP (acétate de médroxyprogestérone) durant près de 7 ans [1]. En même temps, le WHI confirme une réduction significative de l'incidence de cancer du côlon et des fractures du col du fémur des femmes sous THS [2].

Pour n'importe quel lecteur doué d'esprit critique, écrasé par le lourd martèlement des médias qui rapportent comme seul message, le concept que
« le traitement hormonal substitutif augmente le risque du sein et de l'infarctus », la publication de cette nouvelle ne peut que représenter la fin de la plus grande distorsion de la médecine moderne.

Le WHI a été présenté comme une étude prospective, randomisée et en double aveugle effectuée chez des femmes saines ménopausées et, pour cette raison aurait dû être qualitativement supérieur à toutes les autres études conduites auparavant. En fait, le WHI s'est avéré seulement une gigantesque étude d'intervention avec un taux très élevé de dévoilement dû à l'excès de saignements indésirables et de tension mammaire chez les femmes traitées avec les œstrogènes, avec un taux élevé de participants sortis de l'étude. En outre, les patientes recrutées pour cette étude étaient d'âge moyen de 63 ans, avec une moyenne environ de 13 ans de ménopause, avec une forte prédominance de surpoids, d'hypertension artérielle, d'hypercholestérolémie, de diabète et de tabagisme [3].

Compte tenu de ces caractéristiques, les femmes incluses dans le WHI et dans le HERS n'étaient absolument pas des candidates appropriées pour suivre un traitement avec 0,625 mg de EEC + 2,5 mg de AMP par jour et ne représentaient pas la population de femmes jeunes, en début de ménopause, et réellement saines qui normalement demandent le THS [4-6].

À cause de ces gros défauts, le WHI ne répond pas à la question fondamentale que se posent les médecins : le THS est-il capable de déterminer des bénéfices à long terme pour femme en début de ménopause ? Celle-ci est l'unique question réellement importante et, très curieusement, aucune des énormes études effectuées ces dernières années n'a été organisée pour trouver une réponse à cette question.

Le WHI répond par contre à la question purement académique : l'administration orale d'une dose fixe de EEC ou de ECC plus AMP pour une femme ménopausée, indépendamment de l'âge et de l'état physique, détermine-
t-elle plus de bénéfices ou plus de risques ? Il est évident que pour tout médecin qui se consacre à la clinique et non uniquement aux calculs statistiques, la réponse est évidente.

Il est temps d'analyser de manière objective les résultats de cette étude si controversée, pour chercher ce qu'il y a d'utile afin de déterminer les futurs axes de recherche pour améliorer la santé des femmes ménopausées.

Le WHI a conclu que les femmes qui utilisent le THS ont une réduction significative de l'incidence des fractures fémorales et vertébrales [2, 3], un concept déjà solidement rapporté par diverses autres études cliniques bien conduites. Ce résultat ne nécessite pas de discussions ultérieures mais, malgré cette solide évidence clinique, les organismes de contrôle des médicaments et de la santé européens et américains sont en train d'élaborer de nouvelles recommandations qui découragent l'emploi de ce traitement efficace pour l'ostéoporose à cause du risque présumé de développer le cancer du sein, en réservant le THS seulement pour les femmes à haut risque d'ostéoporose ou de fractures, ou en seconde intention après l'emploi d'autres médicaments spécifiques de l'os.

Le rationnel scientifique sur quoi se basent les nouvelles recommandations réside dans l'augmentation du nombre de cancers du sein rapportée depuis plusieurs années chez des femmes sous THS. En effet, même si on pouvait s'attendre qu'un agent qui stimule la prolifération des cellules mammaires soit capable de favoriser une pathologie des tissus cibles, aucun rapport entre les œstrogènes et le cancer du sein n'a été encore établi, et les études cliniques ont montré des résultats partiellement contrastés. La méta-analyse sur les hormones et le développement du cancer du sein a rapporté un accroissement des cas de cancer du sein chez des femmes sous THS depuis plus de cinq ans [7]. Après cette publication, même le Million Women Study [8] et le bras CEE + AMP du WHI [3] a montré une augmentation de cas de cancer du sein chez les femmes traitées avec les œstrogènes, toutefois, la signification réelle de ces résultats est encore incertaine [9].

Les résultats du MWS, présentés par les médias comme la démonstration évidente du rapport entre hormones et cancer du sein, ont rapporté une incroyable augmentation d'environ 45 %, de l'incidence du cancer du sein chez les femmes sous THS depuis un an [8]. Ce résultat peut être facilement mis en corrélation avec l'augmentation des diagnostics lors de la première évaluation mammographique. Il n'existe certainement pas de rationnel
biologique qui puisse expliquer comment un cancer du sein, qui nécessite de nombreuses années pour s'exprimer cliniquement de façon évidente, devrait par contre exploser sous l'effet du THS. Ce qui est invraisemblable c'est la disparition immédiate de l'excès de risque de cancer du sein après moins d'un an d'interruption du traitement [8]. Il est évident que si un médicament cause le cancer, l'augmentation des diagnostics de cancer devrait rester stable au moins pour quelque temps après l'interruption de l'exposition. La responsabilité du THS dans le risque de cancer du sein semble être, plutôt, un effet promoteur des tumeurs infracliniques préexistantes.

En fin de compte, nous savons maintenant que même l'étude WHI a montré que l'administration au long terme d'une dose journalière significative d'œstrogènes n'est pas associée à une augmentation de l'incidence du cancer du sein [2]. Cette donnée constitue une certitude pour le THS de la femme ménopausée, mais aussi grâce au grand nombre des sujets traités dans l'étude et du nombre important des sujets prenant des œstrogènes ; donnée d'ailleurs déjà connue des radiologues habitués aux mammographies.

La pathologie cardiovasculaire est une histoire complexe. Malgré le fait que, les chercheurs ont depuis longtemps essayé d'expliquer aux épidémiologistes qu'il n'existe pas de base rationnelle pour prévoir des actions protectrices des œstrogènes en présence de pathologie athérosclérotique avancée, ce concept évident pour n'importe quel médecin, n'a pas été publié par les médias après l'échec prévisible des études de prévention secondaire HERS et ERA. Au contraire, les médias ont gonflé la nouvelle de l'accroissement d'évènements vasculaires pendant la première année de l'administration des œstrogènes.

Encore une fois, nous devrions regarder à l'essence de la recherche clinique et utiliser les connaissances acquises pour interpréter les nouveaux résultats. Il était déjà bien admis que les œstrogènes oraux, à travers une induction de la synthèse hépatique des facteurs de la coagulation, sont associés à une
augmentation de la thrombose veineuse. On peut donc s'attendre à une tendance plus forte à la thrombose sur des vaisseaux sanguins athérosclérotiques surtout dans les cas où il y a une activation non appropriée de la coagulation. C'est ce qui a été observé dans l'étude HERS [1], dans le bras la CEE + AMP du WHI [3] et maintenant même dans le bras avec les seuls œstrogènes du WHI [2].

Malgré ceci, nous savons maintenant que le bras des seuls CEE du WHI a été interrompu à cause du sur-risque d'ictus chez les femmes qui prenaient les œstrogènes. On se souvient de ce que le bras CEE + AMP du WHI avait été suspendu puisque l'augmentation des risques (cancer du sein, ictus et thrombose veineuse) dépassait celle des bénéfices estimés (ostéoporose et cancer de côlon). Aujourd'hui on sait que les femmes qui reçoivent les seuls œstrogènes n'ont aucune augmentation d'incidence de cancer du sein ou de pathologie cardiovasculaire ; on peut supposer que dans ce bras de l'étude, les bénéfices sont sûrement majeurs. Il est donc difficile de comprendre comment il serait possible de considérer éthique d'interrompre l'administration d'un traitement pour les femmes qui commençaient à bénéficier d'une réduction des pathologies graves comme le cancer du côlon ou les fractures de l'ostéoporose.

Finalement, il existe des évidences significatives qui indiquent que les individus qui ont des mutations spécifiques des enzymes impliqués dans la
coagulation, comme la prothrombine, ont un risque d'accidents cardiovasculaires durant le THS [10]. En parallèle, on sait que certains polymorphismes du récepteur des oestrogènes sont associés à un risque cardiovasculaire plus elevé [11]. Ces observations indiquent que dans le futur nous aurons à disposition des moyens plus sophistiqués pour déterminer les sujets qui présentent un risque majeur de développer des accidents cardiovasculaires, de façon à mettre à profit seulement les bénéfices du traitement hormonal.

De toute façon un point très important apparaît lorsque l'on compare les résultats des deux groupes du WHI : l'administration de AMP en association aux œstrogènes conjugués semble augmenter l'incidence d'accidents non désirés par rapport à l'administration des seuls œstrogènes. Ceci semble être particulièrement vrai pour le cancer du sein et pour la pathologie cardiovasculaire et constitue la base pour développer de nouvelles stratégies afin de minimiser les effets négatifs possibles des progestatifs, mais surtout il impose que la recherche scientifique éclaircisse les réelles actions des divers composés disponibles, vu qu'il existe maintenant des évidences diverses qui indiquent que des combinaisons différentes ont des actions significativement divergentes.

Aujourd'hui nous avons des évidences que des doses basses de THS sont également efficaces pour traiter et prévenir les symptômes de la ménopause comme les altérations de la densité minérale osseuse et du métabolisme [12-14]. De même Les résultats sont prometteurs en ce qui concerne le marqueurs de risque cardiovasculaire [15].

En conclusion, nous restons convaincus que le THS n'est pas un « traitement dangereux », comme cela a été défini par un soi-disant « expert » du comité de contrôle du WHI en juillet 2002. Nous sommes même certains que les bonnes nouvelles provenant du bras avec la seule EEC du WHI encourageront autant les chercheurs fondamentaux que les chercheurs cliniciens à poursuivre la recherche sur comment améliorer la santé de la femme après la ménopause avec toutes les stratégies possibles allant de l'éducation à un style de vie plus sain ainsi qu'aux différentes stratégies pharmacologiques disponibles, y compris le THS, pour la prévention des pathologies dégénératives comme l'ostéoporose et les maladies cardiovasculaires [16].

Bibliographie

[1]   Hulley S, Grady D, Bush T, Furberg C, Herrington D, Riggs B, Vittinghoff E 1998 : Randomized trial of estrogen plus progestin for secondary prevention of coronary heart disease in postmenopausal women. Heart and Estrogen/progestin Replacement Study (HERS) Research Group. Jama 280:605-13

[2]   The Women's Health Initiative Steering Committee 2004 : Effects of Conjugated Equine Estrogen in Postmenopausal Women With Hysterectomy: The Women's Health Initiative Randomized Controlled Trial. JAMA 291:1701-1712

[3]   The Writing Group for the Women's Health Initiative Investigators 2002 : Risks and benefits of estrogen plus progestin in healthy postmenopausal women: principal results From the Women's Health Initiative randomized controlled trial. Jama 288:321-33

[4]   Genazzani AR, Gambacciani M 2003 : The sound of an International anti-HRT herald. Maturitas 46:105-6

[5]   Genazzani AR, Gambacciani M 2002 : A personal initiative for women's health: to challenge the Women's Health Initiative. Gynecol Endocrinol 16:255-7

[6]   Gambacciani M, Rosano G, Monteleone P, Fini M, Genazzani A 2002 : Clinical relevance of the HERS trial. Lancet 360:641

[7]   Collaborative Group on Hormonal Factors in Breast Cancer 1997 : Breast cancer and hormone replacement therapy: collaborative reanalysis of data from 51 epidemiological studies of 52,705 women with breast cancer and 108,411 women without breast cancer. Lancet 350:1047-59

[8]   Beral V 2003 : Breast cancer and hormone-replacement therapy in the Million Women Study. Lancet 362:419-27

[9]   Gambacciani M, Genazzani AR 2003 : The study with a million women (and hopefully fewer mistakes). Gynecol Endocrinol 17:359-62

[10]   Psaty BM, Smith NL, Lemaitre RN, Vos HL, Heckbert SR, LaCroix AZ, Rosendaal FR 2001 : Hormone replacement therapy, prothrombotic mutations, and the risk of incident nonfatal myocardial infarction in postmenopausal women. Jama 285:906-13

[11]   Shearman AM, Cupples LA, Demissie S, Peter I, Schmid CH, Karas RH, Mendelsohn ME, Housman DE, Levy D 2003 : Association between estrogen receptor alpha gene variation and cardiovascular disease. Jama 290:2263-70

[12]   Utian WH, Shoupe D, Bachmann G, Pinkerton JV, Pickar JH 2001 : Relief of vasomotor symptoms and vaginal atrophy with lower doses of conjugated equine estrogens and medroxyprogesterone acetate. Fertil Steril 75:1065-79

[13]   Lindsay R, Gallagher JC, Kleerekoper M, Pickar JH 2002 : Effect of lower doses of conjugated equine estrogens with and without medroxyprogesterone acetate on bone in early postmenopausal women. Jama 287:2668-76

[14]   Archer DF, Dorin M, Lewis V, Schneider DL, Pickar JH 2001 : Effects of lower doses of conjugated equine estrogens and medroxyprogesterone acetate on endometrial bleeding. Fertil Steril 75:1080-7

[15]   Lobo RA, Bush T, Carr BR, Pickar JH 2001 : Effects of lower doses of conjugated equine estrogens and medroxyprogesterone acetate on plasma lipids and lipoproteins, coagulation factors, and carbohydrate metabolism. Fertil Steril 76:13-24

[16]   Gambacciani M, Genazzani AR 2001 : Hormone replacement therapy: the benefits in tailoring the regimen and dose. Maturitas 40:195-201

* Clinica Ostetrica e Ginecologica "P. Fioretti", Università degli Studi di Pisa

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438   A.R. GENAZZANI, T. SIMONCINI, P. MONTELEONE, M.S. GIRETTI

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