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2002 > Pédiatrie > prématurité  Telecharger le PDF

Particularités du devenir neurologique de nouveau-nés prématurés de moins de 32 semaines, présentant un retard de croissance intra-utérin

Y Coantec , F Kieffer , Y Masson , M Voyer et D. Valleur-Masson

Les données de la littérature sur le devenir neurologique des nouveau-nés présentant un retard de croissance intra-utérin (RCIU) sont relativement contradictoires, les populations étudiées étant hétérogènes tant sur le plan de l'étiologie que sur celui de la sévérité des RCIU. La première difficulté tient au diagnostic même de RCIU, totalement dépendant de la fiabilité des courbes de croissance disponibles (intra-utérines et/ou établies à la naissance).

Comment définir un RCIU

a) Un RCIU se définit par la comparaison de paramètres anthropométriques mesurés chez un fœtus ou chez un nouveau-né à des normes établies aux mêmes âges gestationnels (AG). Les paramètres pris en compte in utero pour évaluer la croissance fœtale sont essentiellement : le diamètre abdominal transverse (reflet de la croissance pondérale), la longueur du fémur (reflet de la croissance staturale) et le diamètre bi-pariétal (reflet de la croissance cérébrale). Après la naissance, les paramètres d'évaluation sont le poids, la taille et le périmètre crânien (PC).

b) Les courbes de référence adoptées à la naissance sont des courbes transversales, établies à partir de fœtus nés à des âges gestationnels variables. Les enfants nés prématurément sont le plus souvent issus de grossesses pathologiques. Il s'agit d'enfants dont

c) Il existe des différences importantes entre les courbes de référence, non seulement d'un pays à l'autre (jusqu'à 640 g de différence entre les 10ème centiles selon les pays), mais aussi au sein d'un même pays : jusqu'à 447 g entre les 10ème centiles de trois courbes françaises (Bréart, Leroy et Mamelle) .

Les principales raisons évoquées à ces variations sont :

· L'altitude du lieu de vie (Lubchenco) : les médianes et les percentiles établis à partir d'une population vivant en altitude étant inférieurs à ceux d'une population vivant en plaine. · Des facteurs de risque de RCIU qui sont différents selon les populations étudiées pour l'établissement des courbes : taux de grossesses multiples, pathologies maternelles … · Des différences ethniques au sein des populations étudiées : prévalence de certaines pathologies dans certaines ethnies (toxémie dans la population noire des Antilles).

Pour les prématurés, il n'existe pas de courbes idéales de référence puisque celles-ci devraient être établies sur des études longitudinales, in utero, portant sur des grossesses uniques et non pathologiques et qui auraient donc dû se terminer à terme !!! Avant 35 SA, la croissance du fœtus est peu influencée par le sexe, le rang de grossesse, l'ethnie, la taille et le poids de la mère avant la grossesse.

Dans l'étude rétrospective que nous avons menée sur des enfants nés avant 32 SA, entre le 01/01/1992 et le 31/12/1995, le nombre d'enfants étudiés serait de 114 si l'on adopte les courbes de Leroy, de 98 pour les courbes de Lubchenco et de 54 pour les courbes de Mamelle. Nous avons retenu la courbe de Lubchenco, courbe classiquement utilisée en France, malgré les réserves faites plus haut.

etude realisee a l'institut de puericulture de paris

Matériel et Méthodes

Nous avons, de manière rétrospective, étudié le devenir de prématurés < 32 SA présentant un RCIU (poids de naissance inférieur au 10ème percentile des courbes de Lubchenko), nés entre le 01/01/1992 et le 31/12/1995, admis à l'Institut de Puériculture de Paris (IPP) dès la naissance ou dans la première semaine de vie après transfert d'un autre service de réanimation. Après avoir éliminé les enfants atteints de foetopathie, d'anomalie chromosomique ou de toute pathologie congénitale, 98 dossiers ont été retenus. Sur ces 98 dossiers, le devenir de 77 enfants a pu être retrouvé (78,5%). La majorité d'entre eux (60%) a été suivie par le Centre d'Action Médico-Sociale Précoce (CAMSP) de l'IPP et ce, jusqu'à l'âge de six ans ; pour les autres enfants, les nouvelles ont été obtenues au près des services hospitaliers ayant assuré le suivi, des pédiatres traitants et des parents eux-mêmes. Tous les enfants suivis ont actuellement entre 6 et 9 ans, donc tous en âge théorique d'être scolarisés en primaire.

La majorité des enfants perdus de vue l'ont été pour cause de déménagement, sans possibilité de retrouver leur nouvelle adresse. Il est important de préciser que pour un certain nombre d'enfants perdus de vue, des conditions socio-économiques familiales défavorables avaient été repérées lors de l'hospitalisation néonatale.

Les critères retenus dans l'étude rétrospective des dossiers ont été les suivants : - les caractéristiques de naissance : poids, taille, périmètre crânien, - le sexe, grossesse unique ou multiple, - l'existence de signes d'asphyxie périnatale, - les données de l'échographie transfontanellaire (ETF), - l'existence d'une dysplasie broncho-pulmonaire (DBP), définie par la poursuite d'une oxygénothérapie au delà de 36 SA d'âge corrigé, - la durée d'hospitalisation, - le terme corrigé, le poids et le PC à la sortie d'hospitalisation.

La grande majorité des grossesses sont survenues dans un contexte d'hypertension maternelle et toxémie gravidique ; très peu d'autres pathologies plus spécifiques ont été retrouvées (malformation utérine, maladie maternelle de système…)

Le suivi neurologique consistait en des évaluations incluant en moyenne 5 à 6 bilans dans les deux premières années. Ce bilan comprenait un examen neuro-moteur et une évaluation du niveau par un baby test (type Brunet Lézine) tous les six mois. Après deux ans, les enfants étaient vus entre une à deux fois par an, avec après 4 ans, un niveau de QI par an quand celui-ci était réalisable. Les tests employés sont essentiellement à cet âge des tests multifactoriels. La WPPSI est le test le plus employé, analysant le QI verbal et le QI performance. Le QI verbal comporte des facteurs verbaux, culturels et scolaires. Le QI performance est plus dégagé des apprentissages scolaires, explorant les facteurs spatiaux, praxiques et temporels. Cela permet de dépasser la notion de QI total et de mettre en évidence une homogénéité ou une hétérogénéité des résultats dans les différents domaines. Les PC à l'âge de un an et de trois ans ont été systématiquement notés. Les enfants qui présentaient durant les deux premières années un développement neurologique pas tout à fait satisfaisant avec un retard modéré des acquisitions, mais une normalisation à deux ans, ont été identifiés.

Le développement neurologique à 6 ans des enfants a été classé en six catégories :

  • Enfants avec évolution neurologique normale : développement moteur, intellectuel satisfaisants et scolarisation normale.
  • Enfants porteur d'une infirmité motrice cérébrale( IMC) type hémiplégie, diplégie ou tétraplégie.
  • Enfants présentant des troubles de l'apprentissage scolaire (troubles praxiques, visuo-spatiaux, difficultés de graphisme, de lecture, d'apprentissage des mathématiques) ayant nécessité un suivi particulier avec des rééducations et ayant entraîné un retard dans la scolarisation.
  • Enfants avec troubles du comportement (troubles d'attention, troubles de concentration, hyperactivité…).
  • Enfants présentant à la fois des troubles de l'apprentissage scolaire et des troubles du comportement appelés troubles mixtes.
  • Enfants avec déficience mentale : QI < 70 et nécessitant une scolarisation en établissement spécialisé.

Résultats

Sur les 77 dossiers retenus, 75 avaient un terme de naissance ³ à 28 SA, 2 avaient un terme < à 28 SA ; 43 présentaient un RCIU symétrique à la naissance et 34 un RCIU asymétrique. On entend par RCIU symétrique un RCIU dont tous les paramètres anthropométriques (poids, taille et PC) sont atteints de la même façon c'est-à-dire tous sont inférieurs au 10ème percentile de la courbe de Lubchenco, les RCIU asymétriques ne sont pas homogènes, c'est-à-dire que seul le PC de naissance est préservé et se situe au-dessus du 10éme percentile de la courbe de Lubchenco.

L'âge gestationnel médian à la naissance était de 30,4 SA [27,6-31,6], le poids de naissance médian était de 890 g [520-1200], le PC de naissance de 25,5 cm [23-28,5]. Il y avait 39 garçons et 38 filles. Une asphyxie périnatale était présente chez 26 (33,8 %) d'entre eux et une DBP chez 29 (37,7%). L'ETF était normale chez 62 (80,5%) des enfants, une hyperéchogénicité (HPE) périventriculaire ayant persisté plus de 10 jours a été observée chez 11 enfants (14,3%) et une leucomalacie périventriculaire cavitaire chez 4 d'entre eux.

La durée médiane d'hospitalisation a été de 82 jours [52-490], l'âge corrigé de sortie a été de 42,1 SA [38,1-99]. A un an, le PC était normal selon les courbes de Sempé chez 55 (71,4%) des enfants et à trois ans chez 65 enfants (84,4%). A long terme, 47 enfants (61%) ont un développement normal, 5 (6,5%) ont une IMC, 7 (9,1%) ont des troubles de l'apprentissage, 12 (15,6%) des troubles du comportement, 5 (6,5%) des troubles mixtes (apprentissage et comportement) et 3 (3,9%) sont déficients mentaux.

La somme de ces résultats est supérieure à 100%, 2 enfants ayant des troubles du comportement associés à des difficultés d'apprentissage. Parmi les enfants ayant des troubles de l'apprentissage ou du comportement, 14 ont un retard scolaire et les trois enfants avec déficience mentale sont en établissement spécialisé.

Chez les enfants IMC, 3 sont aussi en établissement spécialisé en raison de l'importance de leur handicap moteur. Les résultats ont été présentés sous forme de médiane/extrêmes et l'analyse a été réalisée par un test non paramétrique de Kruskal-wallis avec une correction de Bonferroni pour comparaisons multiples. Les variables discrètes ont été exprimées en nombre et pourcentage.

Les effets des facteurs sélectionnés par l'analyse univariée ont été évalués sur la survenue d'une anomalie de développement versus normalité par une régression logistique multiple avec une procédure pas à pas descendante. Les calculs ont été faits à l'aide du logiciel Number Cruncher Statistical Systems.

Les données sont résumées dans le tableau I .

Normaux (n=47) IMC (n=5) Troubles apprentissage (n=7) Troubles comportement (n=12) Troublesmixtes (n=5) Déficients mentaux (n=3) p
AG (SA)1 30,7 [27,6-1,6] 31 [28,6-31,6] 29,9 [28-31,6] 30,5 [28-31,6] 29,4 [29-30] 30,7 [28-31] ns
PN (g)1 930 [710-160] 1050 [850-200] 820 [520-1170] 905 [740-1140] 880 [540-960] 800 [750-840] 0,15
PCN (cm)1 25,5 [23-28,5] 27 [26-28] 24 [23-26,5] 25,3 [23-27,5] 24 [23-26,3] 25 [24,5-25,5] 0,01
Garçons ² 24 (51,1%) 5 (100%) 0 5 (41,7%) 3 (60%) 2 (66,7%) nc
Asphyxie ² 11 (23,4%) 4 (80%) 2 (28,6%) 6 (50%) 1 (20%) 2 (66,7%) nc

¹ médiane [extrêmes] ; ² nombre (%) ; ns : non significatif ; nc : non calculable

Le sexe ratio est égal à 1.

Les seules données que l'on peut conclure sont :

- le faible pourcentage d'enfants porteurs d'infirmité motrice cérébrale (6,5%), dont les principales caractéristiques sont un AG et un PN plus élevés,

- tous des garçons, l'asphyxie étant plus fréquente chez eux. Par ailleurs, dans l'ensemble du tableau où le p montre qu'il existe une différence significative entre l'ensemble des médianes, la comparaison multiple permet de montrer que les poids de naissance des enfants avec troubles de l'apprentissage et aussi avec troubles mixtes sont inférieurs à ceux des IMC. Les périmètres crâniens de naissance des enfants avec troubles de l'apprentissage et troubles mixtes (apprentissage et comportement) sont significativement plus bas que ceux des enfant atteints d'IMC.

Le tableau II montre les caractéristiques en cours d'hospitalisation en fonction du devenir à long terme

Normaux (n=47) IMC (n=5) TroublesApprentissage (n=7) Troubles comportement (n=12) Troubles mixtes (n=5) Déficients mentaux (n=3) p
DBP¹ 16 (34%) 0 3 (42,9%) 5 (41,7%) 4 (80%) 2 (66,7%) nc
ETF normale¹ 39 (83%) 4 (80%) 6 (85,7%) 9 (75%) 4 (80%) 2 (66,7%) nc
ETF : HPE¹ 7 (14,9%) 0 1 (14,3%) 3 (25%) 0 0 nc
ETF cavitaire¹ 1 (2,1%) 1 (20%) 0 0 1 (20%) 1 (33,3%) nc
Durée hospitalisation (j) ² 80 [52-150] 62 [60-79] 115 [65-136] 109 [60-358] 85 [70-490] 130 [120-358] 0,006
âge corrigé à la sortie ² 42 [38,1-51,4] 40,3 [39,6-41,1] 44,4 [39,1-41,4] 47 [40,1-79,1] 41,7 [39,4-99] 49,3 [48,1-79,1] 0,002

¹ nombre (%) ; ² médiane [extrêmes] ; ns : non significatif ; nc : non calculable.

En cours d'hospitalisation, l'ETF est peu parlante : la majorité des ETF étant normale (62), 11 ETF présentaient une hyperéchogénicité persistante dont 7 enfants auront un développement normal et 4 une LMPV cavitaire ( toutes microcavitaires de localisation pariértale bilatérale pour trois et pour la quatrième pariétale et frontale) dont deux seulement seront IMC.

Parmi les 5 enfants, IMC 3 ETF étaient strictement normales. Pour les deux enfants normaux ayant une LMPV cavitaire, il s'agissait de microcavités uniques dont l'une était frontale. On peut regretter de ne pas avoir analysé les images d'HZG et d'HIV, en particulier pour apprécier leur éventuel retentissement sur les troubles d'apprentissage. La comparaison multiple de Bonferroni montre que les durées d'hospitalisation et l'âge corrigé à la sortie des enfants IMC sont significativement inférieurs à celles des enfants avec troubles de l'apprentissage et des enfants avec déficience mentale, peut-être parce qu'il n'existe pas de DBP chez les IMC.

Par contre,l'existence d'une dysplasie broncho-pulmonaire n'est pas retrouvée comme facteur aggravant.

Sur les 77 enfants, 44 présentaient un RCIU symétrique et 33 un RCIU asymétrique. La répartition des normaux/pathologiques en fonction du caractère symétrique ou non est superposable (X²=0,34, p=0,56).

Tableau II

Normaux Pathologiques TOTAL
RCIU symétrique 26 (55,3%) 18 (62,1%) 44
RCIU asymétrique 21 (44,7%) 11 (37,9%) 33
TOTAL 47 30 77

La scolarité des enfants, compte tenu de leur année de naissance, va théoriquement du CP au CM1. 57 enfants (74%) ont une scolarisation tout à fait normale, avec, pour 3 d'entre eux, une année de retard. Parmi ces enfants, 22 (38%) ont nécessité à un moment donné une aide spécialisée, essentiellement en orthophonie. Pour les 20 enfants dont la scolarité n'est pas normale, 7 ont déjà deux années de retard et se pose le problème de leur orientation, 7 sont en classe de perfectionnement et 6 sont en établissement spécialisé, 3 en raison de l'importance de leur infirmité motrice cérébrale, 2 en établissement médico-psychologique (EMP) pour déficit mental et 1 en hôpital de jour pour troubles de la relation de type autistique.

La scolarisation est différente chez les enfants atteints d'un RCIU symétrique ou asymétrique (X²=11,08 p=0,0009 - tableau IV) : les enfants nécessitant une scolarisation spécialisée sont en grande majorité ceux qui avaient un RCIU symétrique à la naissance. Ceci permet d'émettre l'hypothèse que le facteur " hypoxémie chronique " pendant la grossesse est un facteur aggravant et que les enfants qui ont une croissance cérébrale anténatale insuffisante ont un plus mauvais pronostic intellectuel.

Tableau IV

scolarité normale retard scolaire / école spécialisée TOTAL
RCIU symétrique 26 (47,4%) 18 (90%) 44
RCIU asymétrique 31 (54,3%) 2 (10%) 33
TOTAL 57 20 77

La différence de devenir scolaire entre les RCIU symétriques et asymétriques amène d'autres commentaires, en particulier sur le PC, tant le PCN que le rattrapage postnatal du PC. Le tableau V montre les caractéristiques du PC à un an et trois ans en fonction du devenir à long terme.

Tableau V

Normaux (n=47) IMC (n=5) Troubles Apprentissage (n=7) Troubles comportement (n=12) Troubles mixtes (n=5) Déficience Mentale (n3) p
PC normal à 1 an 40 (85,1%) 3 (60%) 4 (57,1%) 6 (50%) 2 (40%) 2 (66,7%) ns
PC normal à 3 ans 47 (100%) 3 (60%) 7 (100%) 6 (50%) 3 (60%) 0 ns

A première vue, on ne peut conclure aucune valeur statistiquement significative sur la valeur isolée du PC.

A un an, le PC est inférieur à - 2 DS (selon les courbes de Sempé) chez 20 enfants sur 77 et à trois ans chez 11 enfants sur 77. La récupération se fait de manière très différente selon que le RCIU est symétrique ou asymétrique. Chez les 44 enfants avec RCIU symétriques, 15 ne récupéreront pas avant un an et 9 n'auront pas récupéré un PC > -2 DS avant trois ans ; tandis que dans les RCIU asymétriques, 5 seulement ont acquis une croissance insuffisante de leur PC en postnatal dans la première année et deux seulement ne récupéreront pas à trois ans.

Le devenir scolaire semble corrélé en partie à la croissance du PC : parmi les 20 enfants qui ont des difficultés scolaires importantes nécessitant une scolarisation adaptée ou en établissement spécialisé, 16 d'entre eux n'ont pas récupéré un PC satisfaisant à un an. La majorité d'entre eux sont des enfants avec RCIU symétrique (18/ 20).

Enfin, une analyse multivariée par régression logistique en utilisant comme variable indépendante le fait d'être normal versus anormal (en regroupant tous les types de pathologies) montre que les deux facteurs associés à une anomalie de développement à long terme sont une microcéphalie < 2 DS à l'âge de un an (OR= 5,03 IC 95% =[1,64-15,5] et une augmentation de l'l'âge corrigé à la sortie (OR= 1,13 par semaine IC 95% =[1,12-1,14]).

En résumé, l'étude rétrospective de ces 77 prématurés < 32 SA avec RCIU nous a permis de définir quelques caractéristiques sur leur devenir neurologique : 1 - Peu d'enfants présentent une IMC 2 - Un nombre relativement important d'enfants présentent des troubles de l'apprentissage et des troubles du comportement. 3 - 35% des enfants n'ont pas une solarisation normale après six ans, essentiellement dans la population des RCIU symétriques. 4 - Deux facteurs sont associés statistiquement à une anomalie de développement à long terme : un PC < -2 DS à l'âge de un an, et une augmentation de l'âge corrigé à la sortie d'hospitalisation.

données de la littérature

Les premières études visant à étudier l'impact du RCIU sur le développement neurologique rapportaient des études très contradictoires. Ceci était dû aux populations très hétérogènes, tant sur l'étiologie du RCIU que sur sa sévérité, et que sur les facteurs postnataux qui n'étaient pas pris en considération. Plus récemment, les auteurs se sont attachés à dégager des facteurs pronostics de devenir et des caractéristiques du développement de ces enfants.

Sur le plan neuromoteur,

la notion classique est qu'il existe moins d'infirmité motrice chez les RCIU que chez les eutrophiques de même terme. Hagberg souligne que le risque de " cerebral palsy " serait surtout lié au degré de prématurité : 8 % à 28SA, 5,4% de 28 à 31 SA. La majorité des RCIU apparaissent après 25-26 SA, ce qui expliquerait peut-être le moins grand nombre de " cerebral palsy ". D'autres retrouvent dans une méta-analyse récente sur 4116 enfants nés avant 27 S.A., une prévalence de 12,2% de " cerebral palsy " alors que la prévalence est seulement de 7,5% chez 4345 enfants prétermes avec retard de croissance intra-utérin de poids de naissance < 800 g (4). Une étude récente (Bilud) après avoir éliminé des biais postnataux, ne retrouve que très peu d'IMC dans les RCIU (4%) par rapport à des témoins de même âge gestationnel. Nous avons retrouvé les mêmes données dans notre étude. D'autres (Koh) font la même constatation mais ne la trouvent pas statistiquement différente.

BSur le plan cognitif,

les données sont assez unanimes : on retrouve des modifications du QI variables selon les auteurs, tant sur le plan quantitatif que qualitatif, des retards de langage et de parole. La méta-analyse de Shaarp ne montre pas de différence significative de QI mais constate des troubles de l'attention, des scores de QI pénalisés au niveau des performances. Une autre étude approfondie (Burguet) étudie le profil détaillé du QI (en utilisant la WPPSI) en évaluant les sous-tests différents atteints selon qu'il s'agisse d'un enfant avec RCIU ou d'un prématuré. Chez les enfants avec RCIU, le QI performance serait touché dans trois des quatre sous-groupes tandis que le QI verbal serait homogène. Il nous paraît difficile de différencier les sous-tests dans la mesure où ces enfants porteurs de RCIU sont aussi de grands prématurés avec les difficultés cognitives liées à la grande prématurité qui interfèrent pour leur propre compte. Quand la baisse du QI est globale, verbale et performance, le RCIU est toujours sévère, associé à une pathologie anténatale, néonatale et postnatale lourde. Mais il paraît quasi certain qu'à âge gestationnel égal, les RCIU sont plus à risque de séquelles cognitives.

L'incidence des troubles neurologiques mineurs

qui paraît liée aux difficultés d'apprentissage scolaire en raison de différents troubles de coordination, de manipulation, d'inattention, semble plus importante chez les RCIU. Selon Koh, les troubles plus globaux de la motricité (maladresse motrice, troubles de la motricité fine...) seraient retrouvés de manière significativement plus importante dans les RCIU que chez les enfants eutrophiques de même terme (p : 0,02) et concernerait 37% des prétermes avec RCIU contre 24% des prématurés eutrophiques de même terme. En cas de RCIU symétrique, le risque de séquelles serait majoré. Pour notre part, il est difficile de chiffrer exactement ces troubles. Cependant, tous les enfants ayant des troubles de l'apprentissage, soit 17 au total, ont eu besoin dans les premières années de vie d'une aide spécifique au développement (kinésithérapie motrice, psychomotricité, ergothérapie).

Chez les RCIU, certains retrouvent des anomalies neuro-développementales, particulièrement dans le domaine du langage. Mais l'impact des conditions socio-économiques est difficile à évaluer.

Sur le plan des troubles du comportement,

il convient d'être prudent dans leur interprétation, de nombreux facteurs entrant en jeu et les données recueillies sont souvent une observation des consultations et des dires des parents. Il est classique de retrouver des troubles comportementaux chez les prématurés. Selon les études, le pourcentage peut aller de 22 à 56% (réf tbles comportem.). Chez un certain nombre de ces très grands prématurés, il existe des difficultés scolaires malgré un QI normal. L'hyperactivité et les troubles de l'attention sont souvent retrouvés dans ces cas. Leur fréquence exacte est difficile à apprécier : pour certains, elle serait notée chez 18% d'entre eux à 8 ans, contre 5% pour un groupe témoin. Pour les parents, ces troubles comportementaux diminueraient entre 8 et 14 ans, ce qui n'est pas toujours constaté par les enseignants. Il s'agit d'enfants plus souvent malades sur le plan somatique avec davantage d'hospitalisations et des conditions socio-économiques généralement plus précaires. Les parents participant à cette enquête soulèvent aussi la difficulté du lien parents-enfants dans les premiers mois (8). Dans notre étude, ils sont de 18% au moins, ce qui semble retrouvé dans la littérature.

Influence de la croissance cérébrale

Il est admis par tous les auteurs que la croissance cérébrale joue un rôle dans le devenir neurologique des enfants. De manière globale, le risque d'avoir un PC < -2 DS à 18 mois d'âge corrigé est d'autant plus grand que le PC de naissance est faible et que la malnutrition cérébrale a débuté précocement dans la grossesse.

1- Importance de la croissance cérébrale en anténatal : les enfants qui ont un PC in utero inférieur au 10ème percentile avant 26 SA ont des scores neurologiques plus faibles dans tous les domaines. Depuis de nombreuses années, diverses études ont montré le risque accru de difficultés intellectuelles, de troubles de la motricité fine et de l'apprentissage chez les enfants ayant un PCN < -2 s, qu'ils soient nés prématurément ou à terme (guigoz 216 ousted). 2- Importance de la croissance cérébrale en postnatal : la croissance insuffisante du PC en postnatal est corrélée par de nombreux auteurs à un niveau d'intelligence plus bas, à des troubles de la motricité fine, tant dans la population générale que dans les RCIU (guigoz page 216 ref 28).

Parmi les 20 enfants de notre étude en grandes difficultés scolaires, 16 d'entre eux n'ont pas récupéré un PC> - 2 DS à un an. 3- Y a-t-il un âge minimum nécessaire pour rattraper un PC dans les normes ? Hack a étudié le devenir de 249 enfants dont 30 RCIU avec un PC de naissance < - 2 DS. A 8 mois, 33 enfants ont un PC < - 2 DS (3 l'ayant acquis en postnatal). Ces 33 enfants présentaient plus d'anomalies neurologiques (21% versus 8%) et un QI global plus bas à 8 ans ( 84 versus 94). 4- La relation entre mauvaise croissance du PC et difficultés d'apprentissage a été démontrée indépendante des facteurs sociaux (16).

Troubles visuels et auditifs

Nous avons trouvé une surdité de perception sur les 77 enfants. Nous n'avons pu apprécier avec exactitude les troubles visuels de ces enfants. Dans la littérature, il est décrit des potentiels évoqués visuels et auditifs altérés sans pour autant de risque majoré de déficit visuel ni auditif (13 du livre IPP 01).

Sur le plan de la scolarité

Dans l'étude de Sharp avant 7 ans, 90 % des enfants ont une scolarité normale dont 10 % avec un soutien. Après 7 ans, 80% des enfants restent dans le circuit classique dont 25% soit avec retard soit avec aides spécifiques ; 20% sont dans des écoles spécialisées. Ceci est sans doute expliqué par le fait que les demandes sont plus importantes au fur et à mesure que l'enfant grandit. Une autre étude récente de 1996 montre que seulement 50% d'un groupe d'enfants avec RCIU ont à 7 ans une scolarité normale mais il s'agit de prématurés d'AG < 28 SA, tandis que ce pourcentage de scolarité normale passe à 70% pour les enfants nés entre 1500 g et 2500 g, et à 93% dans une population témoin à terme, dans des conditions socio-économiques similaires (16 ).

Dans notre population sur 77 enfants, 57 sont scolarisés tout à fait normalement sans aide ni retard soit 72,7% ; 20 soit 27,3% ont besoin, soit de classes adaptées avec un retard scolaire d'au moins deux ans, soit pour 6 d'entre eux d'un établissement spécialisé. Mais trois y sont en raison de leur infirmité motrice cérébrale trop importante pour permettre l'intégration scolaire même avec des aides. Parmi les enfants ayant des troubles de l'apprentissage ou du comportement, 14 ont un retard scolaire et les trois enfants avec déficience mentale sont en établissement spécialisé.

Conclusion

Il nous apparaît que certaines particularités des RCIU de moins de 32 SA par rapport aux prématurés eutrophiques peuvent être dégagées. On retrouve moins d'enfants porteurs d'infirmité cérébrale, tant dans la littérature que dans nos observations. Les risques de séquelles cognitives et de troubles comportementaux sont relativement fréquents entraînant pour un nombre important d'enfants un retentissement très notable sur les possibilités de scolarité.

l nous est apparu que les RCIU symétriques avaient un pronostic plus réservé. Cependant, un facteur encourageant est l'amélioration notée dans l'adolescence par certains auteurs de ces troubles de l'apprentissage. Quelques hypothèses physiopathologiques ont été émises. Dans les RCIU avec croissance cérébrale insuffisante, on note une baisse du poids du cerveau, une diminution du DNA et des protéines cérébrales ainsi que de la myéline particulièrement sensible à la dénutrition, et un risque de dysfonctionnement glial.

Par ailleurs, les hypoglycémies des premiers jours auxquels ces enfants sont exposés pourraient retarder la prolifération astrocytaire, affecter le métabolisme et la survie des neurones ainsi que la synaptogénèse. Il paraît impossible de différencier précisément les rôles respectifs de la malnutrition et de l'hypoxie chronique anténatale, postnatale. On peut imaginer que les séquelles différentes des prématurés eutrophiques et des RCIU seraient dus à des mécanismes différents : en cas de RCIU, les séquelles seraient plus diffuses, atteignant le cortex et la myéline en raison du processus chronique d'ischémie anténatale.

Par contre chez les prématurés eutrophiques, la souffrance fœtale aiguë entraînerait les lésions bien connues de la substance blanche génératrices d'infirmité cérébrale. Ces explications sont certainement à l'heure actuelle réductrices.

Mots clés : Prématurité RCIU Devenir neurologique

* Centre d'Action Médico-Sociale Précoce (CAMSP), Centre Néonatal, Institut de Puériculture et de Périnatalogie.

la pathologie de la grossesse a entraîné au moins une naissance prématurée et parfois aussi une décision médicale d'extraction prématurée pour cause maternelle, fœtale voire fœto-maternelle. Ces courbes ne sont pas le reflet d'une croissance normale du fœtus, sauf pour les courbes établies à partir de fœtus issus d'interruption volontaire de grossesse (Keen).