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Titre: La Trisomie 21 en 1998 Signes d'appel échographiques, difficultés et résultats
Année: 1998
Auteurs: - Talmant C.
Spécialité: Médecine foetale
Theme: Trisomie 21

La Trisomie 21 en 1998

Signes d'appel échographiques, difficultés et résultats

Dr. C. Talmant NANTES

Collège Français d'Echographie Fœtale

A la différence du cytogénéticien et du biologiste le problème de l'échographiste n'est pas tant, le diagnostic de la trisomie 21, que la possibilité de reconnaître " La Normalité " afin de pouvoir lever ou plutôt réduire une angoisse parentale lorsqu'elle est exprimée.

Aux femmes sensibilisées par leur entourage familial, professionnel ou amical, s'ajoutent de plus en plus nombreuses celles qui ont pu bénéficier du double ou du triple test et qui n'ont pas accès à l'amniocentèse. A toutes ces femmes angoissées, l'échographiste ne peut se contenter de répondre que "le diagnostic échographique de la trisomie 21 est difficile, voire impossible". A lui de savoir reconnaître parmi tout les fœtus qu'il examine, celui qui pourrait "être mongolien". Cette reconnaissance repose sur une étude approfondie des éléments organiques, biométriques, morphologiques caractéristiques les plus fréquemment retrouvés chez l'enfant trisomique.

La principale difficulté réside dans le fait qu'aucun critère n'est spécifique de la trisomie 21, que l'expressivité des différents critères est variable et que les variantes morphologiques et biométriques peuvent se retrouver chez des enfants parfaitement normaux. Il devient évident que seule l'association de plusieurs "petits signes" pourra être informative.

Au second trimestre de la grossesse

Les malformations organiques imposent d'emblée la demande du caryotype, les plus fréquemment associées à la trisomie 21, sont :

- Les malformations cardiaques: CAV(VPP: 75%); CIA, CIV(15%); tétralogie de Fallot(9%). (1)

- Les malformations digestives: sténose duodénale (VPP: 30%); atrésie de l'œsophage(8%).

- les malformations réno-urinaires: rarement retrouvés dans la trisomie 21. La pyélectasie chez un fœtus de sexe masculin ne peut être considérée comme un signe d'appel que si elle est associée à d'autres petits signes.

Certains signes morphologiques sont considérés comme plus spécifiques (7) ce sont: (Les chiffres donnés sont ceux d'une étude rétrospective réalisée par le Collège Français d'Echographie Fœtale : CFEF, chez 209 fœtus trisomiques.)

- L'épaississement des tissus mous de la nuque, présent chez 6 % des nouveaux nés trisomiques, est susceptible d'être vu en anténatal (46%), il correspond probablement à la persistance de la clarté nucale constatée au 1er trimestre. La mesure seuil à 22 SA est de 5 à 6 mm selon les auteurs, mais il est dépendant de la position céphalique. La persistance d'une ou plusieurs logettes liquidiennes n'est pas exceptionnelle.

- Les membres sont courts,( 34% ) le fémur et l'humérus sont mesurés de -1 à - 2 DS , avec un rapport pied/fémur>1,10 ( 46% ) et un Bip/Fe>1,55. ( 28% )

- L'hypoplasie des os propres du nez,( 51% ) la longueur de leur partie ossifiée est inférieure de 2 mm à la mesure attendue pour le terme, la valeur moyenne normale est de 7 mm à 22 SA.

- La dysmorphie faciale: avec un profil plat( 67 %) et interposition linguale(62 %), la langue est vue entre le maxillaire et la mandibule, elle est parfois nettement protruse, s'intercalant entre les lèvres. L'oreille est petite ( 21 %) (Normale : 17 mm à 22 SA) avec un lobule court, parfois un repli du bord supérieur de l'hélix.

D'autres signes sont moins spécifiques, simple variante anatomique dont la constatation en cours d'examen impose la vigilance et la recherche attentive d'autres "petits signes", ce sont: (7)

- Un petit PC, avec brachycéphalie, le Bip est habituellement conservé, le rapport Bip/FO est supérieur à 0,90 ( valeur normale 0,80).

- L'étude des extrémités doit faire rechercher: une brachymésophalangie du 5ème doigt (36 %), un écart excessif et constant, entre le 1er et le 2d orteil (17%).

- La pyélectasie entre 5 et 10 mm à 22 SA ( 22% ) n'a de valeur significative que chez le fœtus de sexe féminin, dans la mesure ou elle est quasi physiologique chez le petit garçon.

- Les anses intestinales hyperéchogènes (8%) sont considérées comme un marqueur de la trisomie 21.

- Les côtes peuvent être comptées, 11 paires sont retrouvées chez 30 % des enfants trisomiques.

- La quantité de liquide amniotique est considérée comme excessive chez 24% de nos cas, avec un mobilité fœtale importante, ce qui est paradoxal chez des enfants considérés comme hypotoniques en post natal.

Difficultés du dépistage

Le bilan échographique réalisé dans cette optique est long, difficile et parfois fastidieux, car très dépendant de la position fœtale au moment de l'examen; il est également dépendant de la qualité de la transmission des ultrasons par la paroi maternelle; de plus certains signes étant subjectifs, l'étude est à l'évidence examinateur dépendant. Partant du principe que : "en échographie on ne voit que ce que l'on cherche, mais que, plus on cherche à voir plus on voit", dès 1989, à la suite d'un travail réalisé sur des fœtus trisomiques, avant et après interruption de grossesse, j'incitais mes confrères à cette recherche, en proposant un protocole de bilan échographique, à la recherche des "petits signes" évocateurs de trisomie 21. La difficulté de l'appréciation de certaines variantes anatomiques en a découragé plus d'un, et actuellement, peu nombreux sont les échographistes qui ont testé leur fiabilité par rapport à ce diagnostic. Nous savons tous que l'attitude du médecin qui a peur de passer à côté du fœtus trisomique, ou la constatation, au cours de l'examen échographique d'un ou deux petits signes, ne permet pas de rassurer les parents; induit un risque iatrogène fœtal, dont il faut tenir compte, puisque le passage obligé pour lever l'anxiété parentale, parfois médicalement induite, est la demande du caryotype.

Au premier trimestre de la grossesse

Depuis quelques années, l'amélioration de la définition de l'image échographique et la pratique de l'échographie vaginale en début de grossesse, ont permis de constater, qu'un certain nombre de fœtus porteurs d'une anomalie chromosomique présentent, de façon transitoire ou non, un épaississement anormal des tissus cutanés rétrocervicaux. La période optimale pour faire ce dépistage se situe entre 11 et 12 SA, correspondant au terme conseillé pour réaliser la première échographie de grossesse.

L'hypothèse étiopathogénique émise par Van der Putte en 1977, reprise par Smith et Graham en 1982, selon laquelle le drainage des vaisseaux lymphatiques dans les veines jugulaires qui normalement se produit vers le 40ème jour de gestation, ne se ferait pas, ou serait retardée, semble pouvoir être retenue.

Il est admis que l'augmentation de l'épaisseur de la clarté nucale, l'hygroma kystique, puis l'œdème cutané sont dus à la distension des sacs lymphatiques. Si les sacs lymphatiques et les veines jugulaires se connectent plus tardivement, ou si le drainage s'établit par des voies parallèles, l'hygroma et l'œdème peuvent régresser. Si la régression spontanée diminue le risque d'anomalie du caryotype, elle ne l'élimine pas totalement.

Il est proposé au premier trimestre de la grossesse de parler de " clarté nucale " regroupant ces 2 entités: L'œdème de la nuque et l'hygroma kystique.

La mesure concerne l'épaisseur de la zone anéchogène rétrocervicale, comprise entre les tissus para vertébraux et la paroi cutanée, elle est réalisée dans un plan de coupe longitudinal, si possible en sagittal médian, que le fœtus soit en pro ou en décubitus.

Résultats du Collège Français d'Echographie Fœtale : C.F.E.F.

La mesure moyenne de la clarté nucale à 12 SA est de 1,5 mm+/- 1,2mm

La valeur seuil du CFEF est donc de 2,70 à 11-12 SA et de 2,90 à 13 SA.

La prévalence pour une valeur seuil: 3 mm est de 3 %, elle est de 1,34 % dans notre centre de référence à Nantes.

De plus une étude prospective a été réalisée de janvier 1995 à juillet 1996 par certains membres du CFEF, en vue du dépistage des anomalies chromosomiques entre 10 et 14 SA. 102 Fœtus présentaient une clarté nucale d'une épaisseur > ou = à 3 mm, permettant de dépister: 40 Anomalies chromosomiques, soit 39,2 %, dont 26 T21 et 2 T18

Il s'avère que le taux d'anomalies chromosomiques est plus fonction de l'épaisseur de la clarté nucale, que de l'existence ou non de logettes liquidiennes. Il est de : 28% de 3 à 4 mm, 44% à 5 mm, 54% s'il est supérieur à 5 mm, 80% s'il est associé à un œdème généralisé.

Etude comparative

Avant 1992

Si l'on reprend les données de l'Association Française pour le Dépistage et la Prévention des Handicaps de l'Enfant : 01/10/85 au 31/12/91 (2)

- 16381caryotypes sur Signe d'Appel Echographique

- 1727 Anomalies Chromosomiques: VPP 10,5% dont: 27% T 21 et 26% T 18

Pour Nicolaîdes: Lancet sept 1992 ; (4)

- 2086 caryotypes entre 1983 et 1991 sur signe d'appel échographique

- 301 anomalies chromosomiques, soit une VPP 14% dont: 23% T 21 et 27% T 18

Ces deux études permettent de constater qu'au second trimestre sur signe d'appel échographique, le nombre des trisomies 21 dépistées est sensiblement identique à celui des trisomies 18, or il y a 10 fois plus de T21 que de T18. A cette époque, si le dépistage des trisomies 18 était satisfaisant celui, des trisomies 21 était très faible.

Depuis 1992

Une Revue de la littérature de 1990 à 1994 regroupe 10 séries contenant 431 cas de clarté nucale épaissie au premier trimestre de la grossesse, permettant de dépister 182 anomalies chromosomiques : VPP 42,2% dont, 70 trisomie 21 : 38,4% et 45 trisomies 18 : 24,7%

Revue de la littérature plus récente: 1996 portant sur: 1550 cas de clarté nucale > 3 mm, dont 427 anomalies chromosomiques: VPP: 27%

Une étude rétrospective a été réalisée au sein du centre de diagnostic anténatal de NANTES. 118 fœtus dont la clarté nucale est = 3 mm dont 48 Anomalies chromosomiques : VPP 41% dont: 18 trisomie 21 : 37,5% et 7 trisomies 18 : 14,8%

Evaluation du dépistage dans un centre de référence (Nantes) portant sur 4334 échographies de 10 à 14 SA, 58 pli du cou > 3 mm soit une prévalence de 1,34% permettant de dépister 20 Anomalies chromosomiques: VPP: 35% .

Pour Snijders(6) En Angleterre entre 1980 et 1990,

Les dosages sériques maternels : a -FP et b -HCG, ont permis de sélectionner une population à haut risque de trisomie 21: permettant de dépister 60% des trisomies 21.

En 1990, la combinaison: âge maternel et clarté nucale à 10-14 SA a permis de dépister 80% des trisomies 21 chez5 % des femmes enceintes

Plus récemment le RCF foetal et la b -HCG libre sont associés à âge maternel et l'épaisseur de la clarté nucale, le taux de détection des anomalies chromosomi-ques est passé à 90%

Lorsque le caryotype est normal, un suivi échographique particulièrement approfondi se justifie car des malformations ont été retrouvées chez ces foetus, les plus fréquentes étant des malformation cardiaques.

Réflexions

- Si l'on compare les taux de dépistage, de la trisomie 21 et de la trisomie 18 dont la prévalence est 10 fois plus faible; avant 1992 et depuis, force est de constater que si ces taux étaient sensiblement identiques, au profit de la trisomie 18, l'augmentation du pourcentage de dépistage de la trisomie 21 est évident grâce à la mesure de la clarté nucale au premier trimestre de la grossesse.

- La pratique personnelle de l'échographiste, la VPP et la sensibilité sont plus importantes dans un centre de référence, que dans une étude multicentrique.

- Les résultats donnés par des équipes non sensibilisées: terme de l'écho variable, mesure non réalisable! ont un taux de dépistage presque nul.

- Les résultats du Collège Français d'Echographie Foetale sont superposables à ceux des équipes concernées par ce type de dépistage.

- Bien que certains échographistes sensibilisent localement, depuis plusieurs années, leurs correspondants et leurs confrères, le pourcentage des foetus bénéficiant de l'échographie du premier trimestre à 12 SA avec mesure de la clarté nucale est encore très faible: 25% au CHU de Nantes!

- S'il est permis de comparer la VPP des marqueurs biologiques à celle de la mesure de la clarté nucale comme marqueur des anomalies chromosomiques: la valeur attendue des marqueurs est de 1/250 soit 0,4%, celle de la clarté nucale est de 27 à 42% soit 65 à 100 fois plus!

Conclusion

L'échographie du premier trimestre doit-elle avoir une place comme examen de dépistage de masse?

Depuis 1990 les anglais le pensent et le pratiquent.

A ceux qui croient et qui disent que cette mesure est aléatoire et totalement examinateur dépendant, je répondrai qu'avec une bonne sémiologie échographique, associée à une bonne méthodologie et un minimum de pratique échographique, les femmes enceintes peuvent accéder à et bénéficier de ce dépistage systématique, sans grever abusivement le budget de l'état, l'échographie du premier trimestre, si elle n'est pas obligatoire, est de plus en plus systématique, son coût est de 202 Fs; or il ne s'agit pas de créer un examen supplémentaire mais de réaliser au bon moment, avec honnêteté et de façon informative, un examen simple et fiable. La faible prévalence: 3% de la clarté nucale, supérieure à 3 mm, sa valeur prédictive intéressante: 30 à 40%, sa bonne sensibilité: 80% n'imposeront pas un nombre excessif de caryotypes. L'angoisse parentale induite est rapidement confirmée ou levée, le caryotype est réalisé soit sur la biopsie de trophoblaste soit par une amniocentèse précoce.

S'il est clair que l'un des buts de l'échographie est d'envisager le dépistage des anomalies chromosomiques, il devient incontestable que c'est entre 11 et 13 SA qu'il faut l'effectuer.

Cette mesure simple et fiable à 0,1 mm près, est beaucoup plus aisée à réaliser que la recherche des "petits signes" à 22 SA.

Bibliographie

1- Berg K.; Clark E.; Astembroski J; Boughman J.

Prenatal detection of cardiovascular malformations by echocardiography: an indication for cytogenetic evaluation.

Am. J. Obstet. Gynecol. 198 : 159 (2) : 477-481

2 - Briard M.L.

Les anomalies chromosomiques sur signe d'appel échographiques: les données nationales colligées par l'Association Française pour le Dépistage et la Prévention des Handicaps de l'Enfant

La Dépèche Nov 1992; 54-65

3 - Favre R.

Valeur de l'examen de la nuque par voie endovaginale à 12 SA Dans le dépistage des anomalies chromosomiques.

Med. Foetale et Echographie en Gynécologie. No 26 : 28-33. Juin 1996

4 -Nicolaides K.; Snijders R.; Gosden C.; BerryC.; Campbell S.

Ultrasographically detectable markers of fetal chromosomal abnomalities

Lancet 1992, 340: 704-707

5 - Pandya P. ; Snijders J.M. Johnson S P. ; Brizot M.

Screening for fetal trisomies by maternal age and fetal translucency thickness at 10 to 14 weeks of gestation.

Br. J. Obstet. Gynaecol. 1995, 12 : 957-962

6- Snijders J.M.; Johnson S.; Sebire N.J.; Noble L.; Nicolaides K.H

First trimester ultrasound screening for chromosomal defects

Ultrasound Obstet. Gynecol. 7 (1996) 216-226

7 - Talmant C.

Apport de l'échographie au diagnostic anténatal de la Trisomie 21

Med. Foetale et Echographie en Gynécologie. Avril 1996 (1): 9-20