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1999 > Néonatologie > Hypertonie vagane du du nourrisson  Telecharger le PDF

Hypertonie/hyperréactivité vagale du nourrisson : vraie entité ou faux problème ?

F. Gold , I. Demontgolfier et J. Baudon

Introduction

Le titre même de cette communication appelle un certain nombre de commentaires préliminaires.

Hypertonie ou hyper-réactivité vagale ?

L’appellation d’hypertonie vagale, ou hypervagotonie, qui fait expressément référence à l’anomalie permanente d’un tonus, c’est-à-dire d’un niveau de régulation, est discutable. Certains lui préfèrent la dénomination d’hyper-réflectivité ou hyper-réactivité vagale (HRV), qui fait elle référence à une anomalie de l’adaptation à une ou des stimulations, et qui correspond plus directement aux techniques d’exploration qui sont habituellement mises en œuvre pour documenter la pathologie en question.

Quoiqu’il en soit, il s’agit pour tous d’un déséquilibre supposé des activités sympathique et parasympathique (au profit de la seconde) régulant les fonctions vitales cardiaque et respiratoire, et qui est tenu pour responsable d’un certain nombre d’accidents graves (malaises) ou mêmes dramatiques (morts subites) du nouveau-né et du nourrisson [1].

Vraie entité ou faux problème ?

En France, la pathologie ainsi délimitée constitue une entité reconnue, et dont le diagnostic amène à la prescription d’un traitement médicamenteux univoque de type atropinique (le diphémanil méthylsulfate), destiné à limiter les conséquences éventuelles de l’hypertonie ou hyper-réflectivité vagale.

A l’étranger par contre, et notamment dans le monde anglo-saxon, cette entité est ignorée ou non reconnue : le terme même d’hypertonie vagale n’existe pas dans l’index des principaux livres de référence de Néonatologie ; cette entité n’est pas citée parmi les causes de bradycardie du nourrisson dans les ouvrages de Pédiatrie ; le terme ne figure pas non plus parmi les mots clefs des banques de données bibliographiques ; nombre de pédiatres anglais et américains ne connaissent même pas la terminologie d’hypertonie vagale ! De plus, c’est couramment une hypothèse inverse de dysfontionnement sympathique, de type hyper ou hypo-fonctionnement selon les cas, qui est avancée pour rendre compte d’un certain nombre de constatations physiologiques ou pathologiques faites chez le nouveau-né et le nourrisson [1]. D’où il résulte pour certains auteurs un non-intérêt, voire une contre-indication, des traitements atropiniques chez le nouveau-né et le nourrisson [2] !

Il paraît donc, devant des conceptions aussi radicalement opposées, qu’un questionnement sur le sujet n’est pas superflu...

Une pathologie transitoire !

Si l’on met à part l’hypervagotonie familiale, pathologie dramatique et définitive qui peut contraindre à des traitements exceptionnels (de type dénervation cardiaque ou entraînement électrosystolique), l’expérience clinique montre que ces phénomènes pathologiques concernent principalement les premiers mois de la vie, et ne dépassent en règle pas l’âge de 1 an.

Il semble donc bien s’agir d’une anomalie fonctionnelle et transitoire de régulation de la balance sympathovagale, qui trouve parfaitement sa place dans une table ronde sur le transitoire chez le nouveau-né et le nourrisson

La realite des observations cliniques

Nombre d’équipes françaises ont observé des cas exemplaires de ce qui est attribué à cette pathologie. Voici à titre d’illustration une observation personnelle récente.

Naime M est né le 30/08/97 par voie basse au terme de 26 SA et au poids de naissance de 710g, dans un contexte d’infection génitale maternelle et de chorio-amniotite. Malgré l’absence de toute maladie respiratoire initiale, il développe secondairement une dysplasie broncho-pulmonaire, et séjourne de ce fait un mois et demi en Réanimation Néonatale. Il est ensuite pris en charge dans notre service de Néonatologie, où il demeure oxygéno-dépendant jusqu'à l’âge post-menstruel de 33 SA.

Le 21/10/97, à l’âge post-menstruel de 34,5 SA, et de façon contemporaine à la prise des premiers biberons, apparaissent des bradycardies brutales et sévères. L’examen clinique et les examens complémentaires habituels sont normaux. Il n’y a pas de signe clinique de reflux gastro-oesophagien, et la Phmétrie oesophagienne bicanalaire de 24 heures est normale le 23/10/97 (temps d’acidité à pH inférieur à 4 : 3,3 %). Le réflexe oculo-cardiaque est de conclusion incertaine : l’espace RR maximum est de 880 ms ; le pourcentage de chute du niveau de la fréquence cardiaque est de 52 %.

En raison de l’impossibilité d’obtenir rapidement un enregistrement Holter, et devant la répétition rapprochée et inquiétante des bradycardies malgré l’arrêt des tétées, un traitement d’épreuve par PRANTAL® est débuté le 25/10/97 (35 SA) à la posologie de 4 puis 5,5 mg/Kg/24 h en 2 administrations journalières, sous surveillance ECG étroite. Cette prescription entraîne en quelques jours la disparition complète des bradycardies.

Une tentative d’arrêt de ce traitement est effectuée 3 semaines plus tard, qui provoque rapidement la récidive des bradycardies. Un enregistrement Holter effectué le 22/11/97 (38 SA) montre un rythme sinusal instable, plusieurs bradycardies à 50/mn, et un ralentissement brutal faisant passer la fréquence cardiaque de 190 à 75/mn au décours d’un biberon ; tous signes qui sont interprétés comme la persistance de signes d’immaturité sympathovagale. Le traitement atropinique est repris à la dose progressivement croissante de 7 puis 10 mg/Kg/24h.

L’enfant rentre à domicile le 16/12/97 à l’âge post-natal de 106 jours, l’âge post-menstruel de 41,5 SA, le poids de 3130 g, avec un traitement anti-reflux gastro-oesophagien et une prescription de PRANTAL® à raison de 10 mg 3 fois par 24 heures.

Revu en consultation le 15/01/98, à l’âge civil de 4,5 mois, l’enfant est bien portant ; il n’a fait aucun accident particulier ; il souffre de constipation. Le traitement atropinique est définitivement arrêté au début du mois de mars (âge civil = 6 mois). Revu en consultation quelques semaines plus tard, l’enfant est bien portant.

Base physio-pathologique : Maturation du système nerveux autonome et régulation de la fréquence cardiaque

Les catécholamines surrénaliennes jouent un rôle important chez le foetus et à la naissance. Ce rôle diminue ensuite au cours des 3 premiers mois de la vie, et la taille relative de la médullo-surrénale diminue parallèlement. L’organisme devient alors plus dépendant de la libération de catécholamines à partir des terminaisons nerveuses sympathiques des organes cibles du système nerveux autonome. Les récepteurs cardiaques apparaissent tôt et sont fonctionnels avant le développement complet de l’innervation sympathique, qui se poursuit après la naissance (pendant la vie foetale, l’innervation parasympathique précède l’innervation sympathique). Le tonus vagal augmente en fin de grossesse, ce qui explique le ralentissement progressif de la fréquence cardiaque foetale [3].

Chez le nourrisson né à terme, la fréquence cardiaque augmente dans les premières semaines de vie, jusqu'à un maximum situé entre 1 et 3 mois ; puis elle diminue, d’abord rapidement puis plus lentement, jusqu'à la fin de la 1ère année de vie [4]. Une différence jour-nuit apparaît vers 3 mois, du fait de la diminution plus importante des fréquences cardiaques nocturnes que des fréquences cardiaques diurnes. La variabilité de la fréquence cardiaque suit une évolution parallèle : une diminution de cette variabilité est observée dans les premières semaines, puis on assiste à une augmentation de la variabilité cardiaque [5]. L’ensemble de ces constatations plaiderait plutôt en faveur d’une prédominance sympathique au cours du premier trimestre de la vie [6].

Chez le foetus et le petit nourrisson, la réponse au stress se traduit paradoxalement par une bradycardie et un risque d’asystolie en cas de réponse excessive (réponse immature dite passive, correspondant à une majoration de l’activité parasympathique). Ultérieurement, la réponse mature au stress est dite active, marquée par une tachycardie et une activité motrice témoignant de l’activité du système sympathique [5].

Des considérations précédentes, il résulte que le foetus au troisième trimestre de la gestation, et donc le prématuré, et le nourrisson dans les 3 à 6 premiers mois de la vie, sont dans une situation d’immaturité et de précarité de la balance sympathovagale de régulation des grandes fonctions vitales, et notamment de la fréquence cardiaque.

Ce n’est donc probablement pas un hasard si la mort subite du nourrisson est électivement observée dans la tranche d’âge entre 2 et 4 mois ! Pour chaque enfant individuellement, cette balance ne peut pas être considérée comme un élément statique défini, mais doit être vue comme un élément dynamique évoluant avec la maturation du nourrisson [6]. De façon générale, et malgré des données contradictoires, le déséquilibre transitoire éventuel de fonctionnement du système nerveux autonome semble principalement résulter d’une influence parasympathique accrue (sans qu’il soit clairement établi s’il s’agit d’un retard de maturation sympathique ou d’un d’hyper-fonctionnement parasympathique).

Les techniques d’exploration de l’hyper-reactivite vagale et leurs incertitudes

Le réflexe oculo-cardiaque (ROC)

La méthode consiste à exercer une compression des globes oculaires pendant 10 secondes. Celle-ci déclenche une afférence sensitive qui est transmise par une branche ophtalmique du nerf trijumeau jusqu’au noyau moteur du nerf vague situé dans le tronc cérébral. La réponse se traduit par un ralentissement de la fréquence cardiaque, voire une asystolie prolongée [7].

Les critères de positivité du test, plaidant en faveur d’une HRV, doivent être modulés en fonction de l’âge du nourrisson. Dans les premiers mois de la vie, ils sont habituellement les suivants : chute de la fréquence cardiaque de plus de 50 % par rapport à sa valeur pré-test, ou chute > 100 battements/mn (Delta Fi) ; durée d’asystolie (longueur de l’espace RR) > 1200 ms ; normalisation de la fréquence cardiaque après un délai > 10 s après arrêt de la compression oculaire. L’HRV est très probable si la durée de l’asystolie est >2500 ms avant 3 mois ou 3000 ms jusqu'à un an, ou si le ROC reproduit un malaise identique à celui décrit par l’entourage du nourrisson [8]. 95 % des ex-prématurés arrivés à terme ont un espace RR < 2000 ms lors du ROC.

Le ROC pose surtout un problème de standardisation et de reproductibilité. Il faut également tenir compte du stade d’éveil ou de sommeil du nourrisson pour l’interprétation (idéalement : éveil calme). A. de BROCA a proposé une méthode calibrée qui diminue la variabilité intra et inter-opérateur du réflexe oculo-cardiaque [7].

L’enregistrement de HOLTER

Il s’agit d’un enregistrement ambulatoire prolongé (habituellement sur 24 heures) de l’ECG, sur bande magnétique, à partir de plusieurs électrodes disposées sur le thorax. L’analyse automatisée du signal cardiaque fournit des renseignements précieux sur l’équilibre neuro-végétatif.

Les critères habituels de positivité de l’enregistrement en faveur d’une HRV sont les suivants : existence de décélérations cardiaques brutales (Delta Fi) >100/mn avant 1 an ; existence de bradycardies brutales et brèves <80/mn avant 1 mois, <70/mn avant 3 mois, < 60/mn jusqu'à 1 an ; constatation de pauses sinusales avec espace RR >1000 ms avant l’âge de 1 an [8].

Le problème posé par l’enregistrement de HOLTER tient à son interprétation et aux critères d’HRV retenus, qui ne font pas l’unanimité ; ainsi qu’à la difficulté d’établir une relation entre ces critères et les risques éventuels (malaises, mort subite) encourus par les nourrissons qui présentent ces anomalies. D’après V. LUCET, des critères francs d’HRV justifient un traitement atropinique dans un but de prévention de la mort subite du nourrisson [9].

L’enregistrement cardio-respiratoire polygraphique

Il consiste en une surveillance de 16-24 heures d’un enfant à l’aide de différents capteurs : électrodes d’enregistrement cardiaque (fréquence cardiaque instantanée et ECG) et respiratoire (impédancemétrie ou autre technique), oxymétrie de pouls, flux naso-buccal, et parfois pH-métrie. Ces enregistrements numériques remplacent désormais l’enregistrement cardio-respiratoire sur papier [ 10] . Les capacités de vérification et de traitement du signal donnent toute possibilité d’examiner et de valider ou non les anomalies détectées et de comprendre les interactions entre les différents paramètres. Il est ainsi possible de visualiser qui d’une apnée, d’une bradycardie, d’une désaturation en oxygène ou d’un reflux gastro-oesophagien acide est précurseur de la perturbation enregistrée sur la polygraphie. Le traitement sera donc adapté à ce phénomène princeps et non pas aux conséquences.

L’évaluation d’une réponse vagale est ainsi facilitée puisque l’analyse de la variabilité cardiaque prend en compte des phénomènes tels que un cri préalable (évocateur d’une réponse de type VALSALVA), ou une apnée centrale (évocateur d’une réactivité physiologique à cet arrêt respiratoire), ou l’apparition soudaine et isolée d’une bradycardie.

L’analyse de la variabilité cardiaque durant les différentes phases de sommeil (validée sur l’analyse du comportement de l’enfant au cours de l’enregistrement) permet aussi une étude à long terme, ce qui permet par exemple d’évoquer une tendance hypertonique sympathique quand la variabilité est très faible durant le sommeil calme. Il n’est d’ailleurs pas rare de voir apparaître de grandes réactions isolées parasympathiques (brutales bradycardies) sur ces terrains d’hypertonie sympathique. Ce dernier point explique peut-être la discordance éventuelle d’interprétation entre deux équipes qui s’occuperaient, l’une de la tendance générale de la variabilité cardiaque, et l’autre de la réaction brutale !

Outre d’éventuelles difficultés techniques l’enregistrement polygraphique pose donc surtout des problèmes d’interprétation [ 10] .

Le baro-réflexe spontané

Un réflexe issu des baro-récepteurs situés dans les grosses artères systémiques apparaît lors de variations rapides de la pression artérielle, qui agit sur le centre vasoconstricteur bulbaire et le nerf vague. C’est ainsi qu’une élévation tensionnelle provoque un ralentissement de la fréquence cardiaque et une vasodilatation périphérique, tandis qu’une baisse de pression a des effets inverses [3].

On peut étudier la sensibilité de ce baro-réflexe par comparaison des variations simultanées de la pression artérielle (enregistrée par une méthode non invasive) et de la fréquence cardiaque (évaluée par l’espace RR de l’ECG). Le traitement informatique de ces 2 signaux permet de construire leur courbe de régression et de calculer la sensibilité du baro-réflexe spontané, exprimée en ms (l’intervalle RR) par mmHg (la pression artérielle). D’après A. MOUZARD [3], il s’agit là d’une technique très prometteuse et de mise en œuvre beaucoup plus simple que d’autres méthodes d’évaluation de la balance sympatho-vagale, tel que par exemple le Tilt-Test (passage du décubitus à la position verticale, qui provoque après 10 à 20 minutes une bradycardie et une hypotension artérielle excessives en cas d’hypertonie vagale ou d’hypotonie sympathique ; ce test est difficile à mettre en œuvre chez le nourrisson, qui doit demeurer calme pendant toute sa durée).

La discussion therapeutique

D’après V. LUCET [8], la principale particularité française réside dans l’utilisation quasi-exclusive d’un atropinique de synthèse, le diphémanil méthylsulfate (PRANTAL®). Cette drogue, utilisée dans notre pays depuis plus de 20 ans, n’a toujours reçu à ce jour ni AMM ni ATU, et elle est donc encore employée sous la seule responsabilité du prescripteur.

Des recommandations récentes de l’Agence du Médicament en ont, au moins temporairement, fixé précisément les conditions initiales d’administration [11], en attendant que des études pharmacologiques en cours précisent (enfin) la posologie et les règles optimales d’administration !

La poursuite et la fin de la prescription de ce produit ne font par contre l’objet d’aucune règle établie, et chaque prescripteur s’est fait au fil du temps son expérience personnelle. A titre d’exemple, nos habitudes de prescription sont les suivantes :

  • quand le traitement est débuté chez un enfant encore prématuré [12], il paraît justifié d’essayer une cessation du traitement, sous surveillance étroite, une fois franchi le terme plein (c’est-à-dire entre 42 et 45 SA d’âge post-menstruel).
  • quand le traitement est débuté chez un nouveau-né à terme, ou qu’une récidive des accidents est observée après l’épreuve précédente (comme dans le cas rapporté ci-dessus), il paraît difficile de l’arrêter avant que la période la plus critique de l’âge du nourrisson (c’est-à-dire 2 à 4 mois) ne soit passée. Nous avons donc l’habitude de poursuivre la prescription jusqu'à ce que les conditions suivantes soient réunies : âge civil > 6 mois, âge corrigé > 4 mois, dose administrée # 5 mg/Kg/j, et ce en l’absence de tout accident depuis plusieurs semaines.
  • quand le traitement est débuté chez un nourrisson âge de plus de 1 mois, il doit être poursuivi pendant 6 à 9 mois, puis arrêté vers la fin de la 1ère année, avec contrôle du ROC et de l’enregistrement de HOLTER après arrêt du traitement [8].

En pratique courante, un traitement efficace par le diphémanil méthylsulfate comporte pour l’enfant un certain nombre d’inconvénients, dont le principal est la constipation volontiers opiniâtre dont souffre le nourrisson. De plus, chez le prématuré et le nouveau-né, des accidents rythmiques (bloc auriculo-ventriculaire) sont possibles, et la prescription doit donc faire l’objet d’une surveillance ECG étroite : avant début du traitement, vérifier l’absence de toute anomalie de la repolarisation (espace QTc < 0,42 s sur 5 complexes QRS différents) ; en cours de traitement, attention notamment au risque encouru lors d’une suspension alimentaire [13] ; chez le nourrisson, ces accidents rythmiques sont plus rares si l’on respecte les contre-indications médicamenteuses réglementaires [11].

Conclusion

Alors, l’HRV : vraie entité ou faux problème ?

En l’état, nous répondons volontiers que si l’entité elle-même reste incertaine pour ce qui concerne notamment sa physiopathologie exacte, le problème clinique est lui bien réel. De telle sorte que dans un certain nombre de cas, probablement peu nombreux, la conjonction :

  1. d’accidents cliniques volontiers spectaculaires et évocateurs (comportant notamment une pâleur de l’enfant),
  2. l’absence d’autre étiologie ou association pathologique documentée (notamment reflux gastro-oesophagien et/ou oesophagite),
  3. les arguments tirés des explorations courantes de la balance sympatho-vagale (habituellement ROC + enregistrement de HOLTER ou enregistrement cardio-respiratoire polygraphique),

justifie un traitement d’épreuve qui, dans les conditions actuelles de prudence, ne comporte pas de risque important et représente peut-être une sauvegarde réelle du nourrisson.

Dans le cas particulier du nouveau-né « convalescent » [15], préalablement à la prescription d’un traitement atropinique, 3 précautions doivent donc, selon nous, être prises :

  • se mettre à l’abri d’une confusion avec un autre mécanisme d’accident, et notamment chez l’enfant prématuré une immaturité respiratoire : soulignons à ce sujet le caractère exceptionnel de cette prescription avant l’âge post-menstruel de 34-35 SA [14].
  • s’assurer de la réalité de la symptomatologie clinique (bradycardies, malaises) et de sa persistance : c’est ainsi par exemple qu’un certain nombre de prématurés font des accidents lors des premières tétées au biberon qui semblent liés à une certaine dyspraxie de succion-déglutition et qui cèdent habituellement si l’on prend la précaution d’épaissir les biberons et de fractionner le début des tétées ; de la même façon, la correction d’une anémie franche (taux d’hémoglobine < 8g/dl) peut faire disparaître les symptômes.
  • éliminer d’autres pathologies causales et/ou associées, et notamment un reflux gastro-oesophagien acide, par les explorations nécessaires (pH-métrie) et éventuellement l’échec d’un traitement d’épreuve.

Nous remercions très vivement le Docteur Alain de BROCA (CHU d’Amiens) pour sa relecture critique de cet article.

Bibliographie

  1. KAHN A. REBUFFAT E., SOTTIAUX M. Problèmes cliniques en relation avec les malaises graves du nourrisson. Annales Nestlé 1992 ; 50 : 79-86.
  2. AMIEL-TISON C. L’infirmité motrice d’origine cérébrale. Masson, Paris, 1997 : pp.76.
  3. MOUZARD A., DROUIN E. Malaise du nourrisson et balance sympathovagale. In : Journées Parisiennes de Pédiatrie 1998, Flammarion Médecine-Sciences, pp197-204.
  4. DAVIGNON A. et al. L’électrocardiogramme de l’enfant normal : données obtenues chez environ 2100 individus normaux divisés en 12 groupes d’âge. Rev. Int. Pediatr 1981 ; 115 : 45-70.
  5. GAULTIER C. Maturation du contrôle cardiorespiratoire. In : RELIER J.P. ed. Progrès en Néonatologie n°17, KARGER, Paris, 1997 : pp. 110-123.
  6. RAMET J. Adaptation du contrôle de la fréquence cardiaque. In : DEHAN M., GILLY R. eds Mort subite du nourrisson. Doin, Paris, 1989 : pp. 81-93.
  7. De BROCA A. Malaise et mort subite du nourrisson. Prise en charge et prévention. Lamarre, Paris, 1993 (286 pp.).
  8. LUCET V. Hyper réflexivité vagale du nourrisson. Pédiatrie Pratique, 1998, n°96 (mars) : 6-8.
  9. LUCET V., DENJOY I., DO NGOC D. et al. Effet du traitement atropinique sur la mort subite du nourrisson. Enquête multicentrique réunissant 7851 enfants à risque. La Presse Médicale 1992 ; 21 : 1896-1900.
  10. FAVRE A., de BROCA A., KABEYA B., GUEROIS M., GOLD F. L’enregistrement cardio-respirographique en médecine néonatale : intérêt, interprétation, indications. Arch. Pediatr. 1996 ; 3 : 480-488.
  11. Agence du Médicament, direction de l’évaluation. Information des prescripteurs sur l’utilisation du Prantal. Arch Pediatr 1997 ; 4 : 78-80. Arch Pediatr 1997 ; 4 :708 (Erratum).
  12. HASCOET J.M. ; BOUTROY M.J. Traitement des apnées du prématuré. Arch Pediatr 1998 ; 5 : 546-552.
  13. GUEROIS M. FAVRE A., GOLD F., BLOND M.H, CHANTEPIE A. et al. L’arrêt de l’alimentation orale favorise-t-il la survenue d’un bloc auriculo-ventriculaire chez les prématurés traités par diphémanil ? Arch Pediatr 1997 ; 4 :158-162.
  14. BLOND M.H, LUKSENBERG S., RONDEAU-DESPERIEZ C., GOLD F., FAVRE A. et al . Apnées, bradycardies et malaises précoces du nouveau-né prématuré : étude épidémiologique prospective sur 1 an ( 316 cas). In : RELIER J.P. ed. Progrès en Néonatologie n° 16, Karger, Paris, 1996 : pp 52-65.
  15. BOUTTE P., BERARD E., DAGEVILLE C.. Dépistage des accès de bradycardie du nouveau-né « convalescent ». Arch Pediatr 1994 ; 1 : 392-395.